MOCQUET Bertand

De JFCM
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Enseignant, PhD, qualifié 71°,

Chercheur et Manager en transfo Num des Organisations (ex Vice-pdt d'université)
Fr Université de Perpignan, UPVD, France Université Michel de Montaigne (Bordeaux 3)
Perpignan (Perpinyà) Area, France


Développement des compétences de culture numérique professionnelle en formation initiale et continue.

La gouvernance universitaire et l’évolution des usages du numérique :
nouveaux enjeux pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche français

Bertrand Mocquet
To cite this version
Bertrand Mocquet. La gouvernance universitaire et l’évolution des usages du numérique : nouveaux enjeux pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche français. Sciences de l’information et de la communication. Université Michel de Montaigne - Bordeaux III, 2017. Français. <NNT : 2017BOR30045>.
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THÈSE DE DOCTORAT EN SCIENCES DE L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
La gouvernance universitaire et l’évolution des usages du numérique
Nouveaux enjeux pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche français.

Présentée et soutenue publiquement le 12 Décembre 2017 par Bertrand MOCQUET


Sous la direction de Lise VIEIRA


Membres du jury 
Jean-François Cerisier, Rapporteur, Professeur, Université de Poitiers
Carlos Correia, Professeur, Université Nova de Lisboa
Pierre-Michel Riccio, Rapporteur, Maitre de recherche, Ecole des Mines d’Alès
Soufiane Rouissi, Maître de conférences, Université Bordeaux Montaigne
Lise Vieira, Directrice de thèse, Professeur, Université Bordeaux Montaigne

A Céline, la femme sans qui je n’aurais pu réaliser toute ma vie.
A mes trois enfants, Brice, Lola et Grégoire.


Introduction générale[modifier]

« We must develop a comprehensive and globally shared view of how technology is affecting our lives and reshaping our economic, social, cultural, and human environments. There has never been a time of greater promise, or greater peril[1]»
«Nous devons développer une vision globale et globalement partagée de la façon dont la technologie affecte nos vies et comment elle refond notre environnement économique, social, culturel et humain. Il n'y a jamais eu autant de promesse, ni autant de risque» (Klaus Schwab, 2016)


La première partie part du constat, celui de la position actuelle des TIC dans le système universitaire français, vers l’énoncé de la problématique :

  • notre question centrale, « en quoi l’évolution des usages du numérique conduit à la nécessité d’une gouvernance du numérique universitaire ? »,
  • étayée par un corps d’hypothèses constitué à partir de notre expérience personnelle et des repères de recherches scientifiques, que nous nommons vision diplopique de l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR).


Sommaire


Cette recherche porte sur le rôle et les effets des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans l’évolution organisationnelle des établissements de l’ESR français, en regard de l'évolution des usages du numérique dans le contexte universitaire.

Notre intérêt et motivation pour cet objet de recherche date de notre formation initiale d’ingénieur en informatique industrielle, et de la première période d’euphorie de l’Internet, entre 1995 et 2000.

Créateur, en 1996, d’un cybercafé éphémère, au sein d’une exposition de [2] vulgarisation scientifique et technique intitulée « Cybernez-vous » en partenariat avec les établissements de l’ESR toulousains au sein du centre de culture scientifique et technique de Midi-Pyrénées, nous étions, bien involontairement à cette époque, au cœur des débuts de l’interaction entre les TIC et les établissements de l’ESR.
Nous avons prolongé tout au long de notre parcours professionnel cet intérêt, tout d’abord au sein de la formation des enseignants, des futurs-enseignants préparant le CAPET en Institut Universitaire de Formation des Maitres et des étudiants, ou dans le cadre de formation aux usages des TIC au sein d’une université.
Entre 2010 et avril 2012, nous avons pu mieux comprendre et observer cet objet dans le cadre de responsabilité de dispositifs de développement des usages du numérique au Ministère de l'Éducation nationale, de l'ESR, en tant que coordonnateur C2i2 métiers de l’environnement et de l’aménagement durable (C2i2MEAD).
Entre 2012 et juin 2016, nous sommes entrés en responsabilité de vice-président en charge du numérique, au cœur d’une équipe présidentielle en charge du numérique de notre université de rattachement, l’Université de Perpignan Via Domitia.

Ces positions successives, à tous les échelons du système universitaire, nous a permis de pourvoir observer tous les niveaux du numérique de l’Université : que ce soit lors des enseignements, au sein d’une université, au sein d’une équipe de direction d’université, dans des services du ministère, ou de groupes de travail des référents numériques nationaux.

En 2017, dégagé de la responsabilité de vice-présidence, nous avons pu prendre le recul sur les données observées. Au travers de ce travail de recherche, nous tenterons de démontrer que l’instabilité provoquée par l’arrivée du numérique dans les établissements de l’ESR a permis de faire évoluer le système universitaire, au point de tendre vers la création un nouveau point d’équilibre s’appuyant sur une nouvelle gouvernance du numérique universitaire.

Nous avons fait le constat que l’Université, désignant ici, de manière large, les établissements publics d’enseignement supérieur, est confrontée à un double mouvement de la société sur leur organisation provoquant une nécessité de changement.

Le premier concerne l’environnement institutionnel changeant depuis la loi relative à l’ESR de 2013 [3] : passage à la responsabilité et compétences élargies, contexte de concurrence, contraintes budgétaires fortes, évolutions sociales des apprenants, nouvelle pratique managériale dans le secteur public s’appuyant sur le New Public Management[4] , accès à la connaissance au moyen de nouvelles plateformes [5] et généralisation des technologies de l’information et de la communication dans la société. Plus globalement, pour l’Université, cette situation est d’autant plus paradoxale qu’un phénomène d’isomorphisme institutionnel [6] est apparu. Les comportements des établissements de l’ESR convergent quand bien même chacun d’eux tente d’être plus attractif que l’autre sur le marché de la formation tout au long de la vie. Cette convergence de comportement est la conséquence d’une volonté de respect des missions des universités et d’une rationalisation des moyens alloués par la Tutelle.

Par ailleurs, un second mouvement, qui concerne les membres et les usagers de l’Université, apparaît au regard des usages des TIC dans la société : la facilité d’accès à la connaissance au moyen de nouvelles plateformes. L ’adoption des TIC dans la société en est le catalyseur, puisque la circulation de l’information est plus rapide, plus importante de nos jours : « le [7][8] management s’en trouve ainsi changé » ; les « usages du numérique » se développent au sein de la société, et donc dans ces établissements.

  1. Schwab, K. (2016). 9 quotes that sum up the Fourth Industrial Revolution. Consulté à l’adresse https://www.weforum.org/agenda/2016/01/9-quotes-that-sum-up-the-fourth-industrial-revolution/
  2. 2 Science Animation. (2015). Notre histoire. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse fttp://www.science-animation.org/fr/nous-decouvrir/notre-histoire.
  3. 3 Mocquet, B. (2014). Stratégies Organisationnelles-Développer les usages du numérique à l’Université : le cas de l’Université de Perpignan. In EUTIC 2014 . Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01280368/
  4. 4 Fayol, H. (1921). L’incapacité industrielle de l’Etat: les PTT . Dunod.
  5. 5 Vieira, L., Reymond, D., & Pinede, N. (2011). « Le rôle de l’observation et de l’évaluation des sites institutionnels dans la gouvernance des universités ». In A. Kiyindou & R. Amador Bautista, Le rôle de l’observation et de l’évaluation des sites institutionnels dans la gouvernance des universités. Nouvel espace de partage des savoirs (p. 15-27). L’Harmattan.
  6. 6 DiMaggio, P. J., & Powell, W. W. (1983). The iron cage revisited: Institutional isomorphism and collective rationality in organizational fields. American Sociology Review, 48 (2), 147-160. Ou IN: POWELL, W, 63-82.
  7. 7 Mahieu, C. (2007). Le management intermédiaire en transformation. Revue française de gestion , (172), 49-61. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RFG_172_0049
  8. 8 Proulx, S. (2005). Penser les usages des technologies de l’information et de la communication aujourd’hui: enjeux–modèles–tendances. in Vieira, L., Pinède-Wojciechowski, N. Enjeux et usages des TIC: aspects sociaux et culturels, 1, 7-20.

Cette stratégie nationale se retrouve enfin renforcée lors de la publication du plan France Université Numérique 12 qui propose, notamment, la généralisation d’une pédagogie numérique, avec un objectif de 20% de l’offre de formation à 10 ans .

Forte de ces analyses et recommandations macroscopiques du numérique dans l’enseignement supérieur, cette recherche explore une cartographie de dispositifs affichant un développement des usages du numérique existant dans nos universités françaises.

Que ce soit l’échelle d’analyse pour les étudiants, nos principaux usagers, les stagiaires de la formation continue, les membres de l’Université, les partenaires de l’Université, cela consiste à repérer les histoires réussies, et de comprendre les raisons de ce succès, pour permettre à équipe présidentielle et la direction de mieux appréhender la transformation numérique de l’établissement au sein du système universitaire français.

La position d’analyse : un ancrage pluridisciplinaire complétée par notre vision diplopique Tout ce qui est énoncé dans le paragraphe précédent provoque, comme nous l’avons dit, un état d’instabilité propice à l’observation des mutations, et de la place que le numérique prend 9 MINES. (2008). La politique de soutien au développement du numérique - ESR  : enseignementsup- recherche.gouv.fr. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.enseignementsup- recherche.gouv.fr/cid56047/la-politique-de-soutien-au-developpement-du-numerique.html Menser. (2012, octobre 15). Accompagnement et formation des enseignants du supérieur aux usages pédagogqiues du numérique. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://cache.media.enseignementsup- recherche.gouv.fr/file/Actualites_2012/99/9/Livre_Blanc_Accompagnement_VF_22_10_12-1_231999.pdf Caisse des dépots et consignations. (2009). Guide méthodologique de l’Université numérique [text]. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/notices/49250-guide- methodologique-de-l-universite-numerique Gouvernement français. (2013). Séminaire gouvernemental sur le numérique | Portail du Gouvernement.

Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.gouvernement.fr/presse/seminaire-gouvernemental-sur- le-numerique dans ce système, le système universitaire. Nous nous positionnons ainsi dans un objet de recherche qui se construit dans une relation spécifique à l’objet sociotechnique.

Lois, règles et normes Echanges et rituels sociaux Changement social Logique sociale Culture Droit Situation idiomatique Praxéologie Histoire Rhétorique Anthro- Décision, stratégie Acte du langage Influence et pouvoir Code pologie Auditoire, style de vie culturelle Discours Diffusion Contexte Science du langage Sociologie Ethnométhode Oral Opinion, sondage Métaphore Linguistique - des organisations Sémiotique Action - des mass média Système Pragmatique règle Cadrage Science politique Logique Inter- SIC Documentation NTIC action Psychologie sociale Synthémisme Interaction circulante Psychologie Informatique Médiation Perception Télécommunications Signification Cognition Usahe Système de Situation Interprétation Réseau pertinence Image Médiation technique Représentation Infométrie Philosophie Économie Analyse de contenu Logiciels, fonctionnalités Philosophie Gestion NTIC des sciences Marketing et Banque de données Épistémologie Publicité Multimédias Interactivité Numérisation Émergence Marché,cible Technologie Phénoménologie Concurrence Management Constructivisme Espace public Ressources humaines Complexité Information Approche compréhensive Système d’information (SI) Vision du monde Figure 1 : Approche pluridisciplinaire et centrale des SIC vue par Alex Mucchielli13.

Au plan méthodologique, les acquis théoriques des études existantes dans d’autres secteurs d’activité et d’autres disciplines seront recherchés et réutilisés dans une perspective des Sciences de l’Information et de la Communication (SIC). Notre vision s’appuie sur une approche interdisciplinaire de l’objet de recherche comme nous le confirme Alex Mucchielli en identifiant les différentes disciplines avec lesquelles les SIC partagent des champs de recherche (Figure 1). Nous reconnaissons ainsi que les SIC constitue un savoir « spécifique qui se réfère aux théories systémiques et constructiviste »14.

Mucchielli, A. (1998). Les sciences de l’information et de la communication. Hachette éducation. p46 Mucchielli, A. (1998). Ibid . p46 Le postulat de départ est essentiellement lié à la position stratégique d’analyse, au sein d ’une équipe de direction d’une Université, en charge de la vice-présidence du numérique. Ce positionnement, concentré sur le réel, permettrait de théoriser sur le domaine de l’information et de la connaissance.

Nous abordons l’angle de la diplopie dans notre approche de chercheur. La diplopie est « un trouble de la vision consistant à percevoir deux images ou plus pour un seul objet », mais c’est surtout du point de vue de la métaphore, que nous souhaitons aborder cela. Il s’agirait de percevoir la réalité en juxtaposant deux ou plusieurs images : « Il [l'auteur de la Genèse] procède par juxtaposition, selon un procédé que nous appellerions volontiers diplopique 15 ».

Nous retrouvons cette métaphore dans la littérature, un extrait du Journal des Goncourt où « Daudet se plaint d’avoir, pour le moment, en littérature deux idées sur toutes choses, et c’est le duel de ces deux idées dans sa tête, qui lui fait le travail difficile, hésitant, perplexe. Il nomme cela sa diplopie »16 .

Pour notre posture de chercheur, il s’agit bien de confronter la vision d’un praticien de la stratégie du numérique dans l’ESR, avec la décomposition de cette vision à travers le filtre de la complexité des disciplines universitaires mêlées dans cette stratégie, l’une enrichissant l’autre.

Plus globalement, nous pourrions schématiser notre approche de la manière suivante. Chaque situation est prélevée dans l’action (AGIR), dans la réalité des terrains choisis parmi les établissements ou situations de l’ESR, elle fait l’objet d’une observation (OBSERVER), puis est passée au filtre diplopique des théories associées et des expériences pratiques rencontrées auparavant : MOBILISER conjointement plusieurs représentations de la réalité, et de CONCEPTUALISER la situation rencontrée (Figure 2).

Renan, E. (1889). Histoire du peuple d’Israël (Vol. 1). C. Lévy.

De Goncourt, E., De Goncourt, J., & Descaves, L. (1861). Journal, mémoires de la vie littéraire... (Vol. 1). E.

Flammarion, Fasquelle.

Figure 2 : Développement d’une vision diplopique de la Société.

Cette vision est par ailleurs dynamique car d’autres situations peuvent se présenter et le processus se répéter. Cette modalité permet de construire sur les pratiques, de manière agile tout en s’appuyant sur des théories définies enrichissant l’observation et la conceptualisations futures.

Vers la problématique A l’heure où l ’on parle d’efficience dans la gouvernance des universités françaises, nous nous interrogeons sur comment l’ensemble de leurs membres peut développer des usages du numérique qui puissent contribuer à la stratégie globale de l’Université. Nous avons relevé que certaines universités ont fait des choix stratégiques, dans leur organisation, dans leur schéma directeur du numérique, et il nous paraît opportun d’analyser si ces choix ont permis un développement des usages du numérique et d’en estimer les effets, bénéfiques ou non, à moyen termes pour l’organisation.

Une équipe présidentielle prenant ses fonctions est en capacité de faire des choix stratégiques dans le respect de la mission de service publique de l’établissement : quelle sera son orientation stratégique concernant le numérique ? Longtemps limité aux infrastructures informatiques de réseau et aux applications de gestion, le numérique offre davantage aujourd’hui. Comment s’en saisir et accompagner son établissement vers une progression dans ce domaine, et cela durant le temps d’un mandat ? Nous considérons que les outils ne fonctionnent pas complètement au sein de l’organisation sans adhésion des usagers : le point d’entrée de cette stratégie devraient s’appuyer sur le développement des usages du numérique.

A partir de cela, comment développer ces usages ? Formation ? Certification ? La généralisation de la certification informatique offre un intérêt que certaines universités ont utilisées toujours sur ce développement. Nous nous demandons si toutes les universités auraient le même succès. Faut-il investir dans une stratégie « bâtimentaire », pour incarner un lieu emblématique de l’usage du numérique ? Faut-il multiplier les lieux d’usage sur un campus ? Ces lieux sont-ils propres à une seule composante de l’Université, sont-ils communs ou liés à des bibliothèques universitaires ? Ces choix méritent d’être éclairés par une meilleure connaissance de l’effet de ce type de choix pour nos universités.

Il existe aussi des dispositifs TIC qui sont partagés avec d’autres universités françaises ou internationales. Un programme européen de formation ou de recherche, par exemple un IDEFI, influence-t-il le développement des usages du numérique pour l’ensemble de l’établissement ou seulement pour l’équipe constituante ? De la même manière, nous nous interrogeons sur les MOOC, et leurs effets sur les enseignants, dans leur pratique pédagogique mais aussi dans leur propre usage du numérique. Quelles sont les précautions à prendre en termes de gouvernance pour ne pas isoler le programme ? Comment construire une « success- story » à partir d’un seul programme ? Ce dernier point permet aussi de se questionner sur la dynamique de changement à mettre en œuvre pour que l’Université entre en transformation numérique. Faut-il appuyer davantage stratégiquement ? Existe-t-il des mécanismes communs permettant une évolution des usages du numérique dans les universités ? Cette recherche réalisée en parallèle d’une mission de pilotage de la gouvernance du numérique d’une université vise à établir le lien entre le pragmatique de la fonction et les éléments théoriques permettant de tirer de la connaissance de cette expérience. En effet, notre propre expérience nous a permis de développer des compétences à analyser le numérique universitaire, et nous sommes aujourd’hui dans une phase de production de connaissances sur cet objet d’étude.

Les hypothèses de recherche L’instabilité provoquée par l’arrivée des usages du numérique dans la société et dans les universités permettrait de faire évoluer le système universitaire, au point de créer un nouveau point d’équilibre, répondant à des nouveaux enjeux. « En quoi l’évolution des usages du numérique conduit elle à la nécessité d’une gouvernance du numérique universitaire ? » : telle est la question centrale de notre travail de recherche.

Le positionnement énoncé précédemment, nous amène à énoncer un corps d’hypothèses (tableau 1), qui porte à la fois sur l’approche globale du système universitaire et sur des dimensions stratégiques plus pragmatiques.

Comme nous le disions précédemment, les paradigmes dominants actuels donnent paradoxalement toute leur importance à l’échelon de l’établissement de type Université dans le système de l’ESR. Les universités construisent ainsi leurs stratégies numériques en prenant en compte tous les paramètres, internes et externes de la transformation numérique de l’Université. Il découle de cette hypothèse les sous-hypothèses suivantes.

Hypothèses Hypothèse 1 : vers une Hypothèse 2 : Hypothèse 3 : vers un meilleur nouvelle gouvernance des dispositifs positionnement d’une différenciés université au sein de l’ESR pour e e e e l l n d l l développer les e e u n v ’ e n u d g o o usages t a i n n t e m a i s e m ’ i n e l n a u n e g n d r s o o r i e e t n v i c o s e n i o e t h n p r a c o r r o i r u o t r u c i p u e l l l n é p l e o i o A t v e c m é n é a t

a : m e : i

d : d s r n 1. e 2. 1 s 2. e 1 c 1 . e 3 v s 3 m i n a r e t e e e e u s s s t s è e è è è e h e h e h n h n t t t c t e t u o n o n o é o ’ Terrains p a p a p t p d y d y n y i y e h h r h s h - n - e - r - u e e s c s v s v s q d’observations u s u u u i u r o e o o o n o a S d S g S u S m Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32 Tableau 1 : Corps d’hypothèses de cette thèse.

Hypothèse n°1 : vers une nouvelle gouvernance Sous hypothèse 1.1 : La gouvernance du numérique universitaire se place comme le chef d’orchestre de la transformation numérique par approche informationnelle descendante et ascendante.

Sous hypothèse 1.2 : La gouvernance évolue vers la nouvelle gouvernance, un nouveau processus d’intelligence endogène créé à l’occasion de la mise en œuvre de politiques publiques nationales descendantes qui :

  • tient compte des usages du numérique construit en dehors de l’Université par chacun de

ses membres et varie ses approches (descendantes, montantes, fonctionnement en réseau), pour obtenir la meilleure performance dans la gestion du changement : notion de stratégie innovante et évolutive, de design des organisations.

  • évalue les dispositifs de transformation numérique en amont de leur mise en place.

Hypothèse n°2 : des dispositifs différenciés pour développer les usages Chaque établissement de l’ESR étant singulier (taille, sa localisation, son histoire, etc.), nous faisons l’hypothèse que des stratégies différenciées en matière d’information et de communication peuvent accélérer le développement des usages du numérique au sein de chacune des universités. Ainsi il existe des dispositifs de transformation numérique plus efficients que d’autres : ils développent davantage les usages que d'autres en fonction du public ciblé (les étudiants, les stagiaires, les BIATSS, les enseignants, les enseignants/chercheurs et les chercheurs). Une approche typologique est envisageable pour mieux appréhender la globalité des établissements.

Hypothèse n°3 : vers un meilleur positionnement de l’établissement au sein de l’ESR Enfin, nous faisons l’hypothèse que les universités seront à même de s’affirmer dans le nouveau contexte concurrentiel, d’autant plus qu’elles seront en pleine connaissance des tenants et aboutissants de leur stratégie numérique, ce qui n’est pas toujours spontanément identifiable. Il est courant, en effet, de constater que le concept d’adoption de dispositif sociotechnique d’information et de communication, entraine des innovations qui positionnent l’établissement différemment. Il découle de cette hypothèse les sous-hypothèses suivantes : Sous hypothèse 3.1 : Toutes les universités peuvent entrer dans une transformation numérique de leur fonctionnement en mettant en place une gouvernance du numérique universitaire qui se projette, se questionne, sur les évolutions prévisibles en tenant compte de la notion de concurrence.

Sous hypothèse 3.2 : Les universités ayant réussi leur transformation numérique voient un meilleur positionnement parmi les autres universités, dans un environnement devenu de plus en concurrentiel, tout en améliorant leur fonctionnement.

Plan de la recherche présentée Le travail de recherche présenté dans cette thèse se compose, outre cette introduction générale, de 6 grandes parties.

La première partie est un état de l’art de l’objet de recherche. Il s’agit d’un tour d’horizon sur le système actuel de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR) mais aussi sur son évolution depuis 1992 jusqu’en 2017, le regard porté sur les dispositifs des TIC mis en place pour favoriser le développement des usages du numérique.

La deuxième partie cimente le cadrage de l’approche conceptuelle. Elle présente une vision pluridisciplinaire, le fondement d’une approche en sciences de l'information et de la communication. Il s’agit de notre boite à outils de concepts, que nous mobilisons durant les parties suivantes. Dans cette partie, nous aborderons les TIC et leurs effets, les formes organisationnelles d’un point de vue systémique afin d’appréhender la complexité du système observé. C’est aussi l’occasion de mieux cerner l’articulation entre communication et information et de mobiliser des concepts empruntés aux Sciences de gestion, en particulier les notions de performance et efficience des organisations.

La troisième partie nous projette dans l’objet de recherche. Il s’agit d’appliquer les théories mobilisées au paragraphe précédent au contexte de l’Université, en proposant une interprétation de la réalité suivant le filtre de nos hypothèses : ainsi apparaissent les concepts de nouveau design de la gouvernance, de gouvernance du numérique universitaire, et de transformation numérique de l’ESR.

La quatrième partie est à la fois un recueil des dispositifs numériques observés permettant un développement des usages du numérique, et une préparation à l’observation des paramètres favorisant ces usages, en estimant les périmètres d’influence. Les influences sont décomposées en fonction de la frontière entre le système universitaire et la société, entre le système universitaire et l’Université, pour nous chainon élémentaire du système, puis au sein de l’établissement lui-même.

La cinquième partie correspond à l’expérimentation du modèle de recherche. Une fois la méthodologie présentée nous appuyons notre thèse sur un principe de superposition de cinq études de cas, permettant de tester le corps d’hypothèses de l’introduction générale. Chaque conclusion d’observation se positionne vis à vis des hypothèses, faisant remonter un certain nombre d’éléments permettant de construire des pistes vers un discours généralisant.

La conclusion de cette thèse propose la synthèse de ce travail de recherche. Elle permet de nous positionner sur la question initiale en regard des retours des observations de la cinquième partie, nous énonçons alors nos différentes propositions et débats. Les limites et voies de recherches futures sont aussi abordées afin de nous projeter à moyen termes dans notre métier de chercheur.

1 L’évolution des TIC dans le contexte de l’ESR en France « La technologie ne crée pas de lien social, mais la technologie peut donner des conditions qui font qu'en se la réappropriant, on crée du lien social» (Joël de Rosnay, 2007) L’objet de recherche se situe dans le contexte général de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (ESR) français. Cette partie est pour nous un état de l’art du système actuel de l’ESR: autant sur son périmètre d’action que sur les données chiffrées. Puisque nous nous intéressons à l’évolution dans ce système, nous consacrons cette partie à un regard sur les évolutions des dispositifs TIC de 1992 à 2017.

Labelle, B. (2007). Entretien avec Joël de Rosnay. L’encyclopédie de la création . Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://collections.cinematheque.qc.ca/recherche/oeuvres/fiche/88326-contact-lencyclopedie-de- la-creation-02

1.1 Le contexte de l’ESR français[modifier]

Pour appréhender le contexte de l’ESR français d’un point de vue stratégique, stratégie vu ici
comme ce qui « désigne généralement la manière d'organiser une action pour arriver à un
résultat »18, nous décidons d’étudier le positionnement du système universitaire français par
rapport aux autres systèmes universitaires étrangers. Trois points de collecte de données
retiennent notre attention. Les deux premiers concernent la vision de notre système
universitaire par des organisations mondiales : le point de vue l'Organisation de Coopération
et de Développement Économiques (OCDE), et celui de l’European University Association
(EUA). Le dernier concerne l’état statistique annuel réalisé par le gouvernement français.


1.1.1 Le point de vue de l’OCDE[modifier]

Chaque année, l'Organisation de Coopération et de Développement Économiques (OCDE)
propose dans le cadre de sa mission « de promouvoir les politiques qui amélioreront le bien-
être économique et social partout dans le monde » une analyse par état du système éducatif,
et dresse un portrait de chaque pays en regard des états membres.
En 2016, la France se situe dans « la moyenne de la zone OCDE »20, cette étude montre que
34% de la population française est diplômée de l’ESR, avec un pic de 45% pour les 25-34
ans. Le coût annuel moyen par étudiant français de l’enseignement supérieur est de 14 430€,
soit une centaine d'euros de plus que pour la moyenne des pays de l’OCDE. Concernant les
dépenses publiques en France, 4,7 % de la part du produit intérieur brut, est consacrée aux
dépenses au titre des établissements d'enseignement. La moyenne OCDE est de 4,5 %. Cet
indicateur concerne tout le système éducatif français. A l’horizon 2030, l’OCDE a fixé trois
indicateurs (Tableau 2). Parmi les indicateurs évaluant « les progrès sur la voie de la
réalisation de l’objectif de développement durable relatif à l’éducation, par cibles » nous
estimons que certains d’entre eux peuvent concerner le développement de l’usage du
numérique, ou des TIC.
Rey, A. (2011). Dictionnaire historique de la langue française . Le robert. p3651
OCDE. (2017). A propos. Consulté 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.oecd.org/fr/apropos/
20 Educpros. (2016, septembre 15). Regards sur l’éducation  : les 10 chiffres de l’enseignement supérieur français.
Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/ocde-chiffres-
enseignement-superieur-france-2016.html
Cibles de l’objectif de développement durable Les indicateurs que l’OCDE peut proposer et
relatif à l’éducation contribuer à développer

4.4 D’ici à 2030, augmenter considérablement le - Données sur la performance des individus âgés[modifier]

nombre de jeunes et d’adultes disposant des de 16 à 65 ans en résolution de problèmes dans des
compétences, notamment techniques et environnements à forte composante
professionnelles, nécessaires à l’emploi, à technologiques, dérivées de l’Évaluation des
l’obtention d’un travail décent et à compétences des adultes (PIAAC)
l’entrepreneuriat
  • Données sur la performance des individus âgés
de 16 à 65 ans en littératie et en numératie,
dérivées de l’Évaluation des compétences des
adultes (PIAAC).


4.6 D’ici à 2030, veiller à ce que tous les jeunes et Données sur les compétences en littératie et en[modifier]

une proportion considérable d’adultes, hommes et numératie, par âge et par sexe, dérivées de
femmes, sachent lire, écrire et compter l’Évaluation des compétences des adultes
(PIAAC).


4.a Faire construire des établissements scolaires qui Données sur les environnements d ’apprentissage,[modifier]

soient adaptés aux enfants, aux personnes les ressources et les équipements (y compris les
handicapées et aux deux sexes, ou adapter les TIC et la connectivité) des établissements
établissements existants à cette fin, et fournir un
d’enseignement, dérivées des enquêtes PISA.
cadre d’apprentissage effectif qui soit sûr, exempt
de violence et accessible à tous
Tableau 2 : Les indicateurs de l’OCDE évaluant les progrès sur la voie de la réalisation de l’objectif de
développement durable relatif à l’éducation, par cibles
Ce tableau, qui initie la stratégie éducative d’ici 2030 de la zone OCDE,, y compris de l’ESR,
de la zone OCDE, a intégré la « numératie » et les statistiques d’usages des environnements
numériques d’apprentissage. Cette numératie est selon la commission européenne « l’un des
facteurs essentiels pour déterminer la capacité d’une population à s’adapter à une société de
plus en plus axée sur l’information, d’y fonctionner efficacement et d’offrir un bon rendement
au travail »21.
21 Faure, M., & Massacret, M. ( 1997). Le Livre blanc sur l’éducation et la formation. Revue internationale
d’éducation de Sèvres, (16), 113-118. https://doi.org/10.4000/ries.3054

1.1.2 Le point de vue d’une association européenne des universités[modifier]

L’association European University Association (EUA) est une association d’universités
européennes qui vise à « soutenir le développement continu de la culture, de la société, de la
technologie et de l'économie d'Europe ». La vision des universités européennes du futur est
celle d'un système d'établissements universitaires avec des profils très diversifiés, offrant un
large éventail de diplômes et facilitant la mobilité du personnel et des étudiants. Elle fait la
promotion de l’autonomie des institutions, qui « doivent être capables de définir leur propre
stratégie et de créer des partenariats dans leur propre intérêt ».
Chaque année, elle établit une expertise des différents états membres et propose la publication
d’un rapport22 présentant les profils d’universités analysées selon quatre pôles d’autonomie :
organisation, finance, recrutement et académique.
En 2016, le profil de la France en termes d’autonomie universitaire révèle un indice d’environ
59% pour le pôle organisation, 45% pour les finances, 43% pour le recrutement, et 37% pour
le pôle académique.
Ces indicateurs positionnent la France par rapport aux autres systèmes universitaires
européens au niveau Moyen Bas pour l’autonomie d’organisation, de recrutement et des
finances et Bas pour l’autonomie académique (Figure 3).
Figure 3 : Indicateurs d’autonomie du système universitaire français en 2016 (source EUA).
La traduction de la fiche du profil de l’ESR français nous donne les éléments suivants pour les
quatre pôles.
22 European University Association. (2017). University Autonomy in Europe III Country Profiles. European
University Association. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.eua.be/Libraries/publications/University-Autonomy-in-Europe-2017.pdf?sfvrsn=4
1.1.2.1 Pôle organisation[modifier]
Les questions de gouvernance sont significativement réglementées par l'État, y compris le
choix des critères, la durée du mandat et le licenciement du Président. Les structures de
gouvernance comprennent des membres externes, en partie nommés par l'Université. Les
universités ne peuvent pas complètement décider de leurs structures académiques, mais
peuvent créer des nouvelles entités juridiques (composantes) au besoin.


1.1.2.2 Pôle financier[modifier]
Les universités reçoivent une subvention annuelle de la part de l’État français, avec possibilité
limitée de déplacer des fonds entre les catégories prédéfinies. Les universités peuvent
emprunter de l'argent avec l'approbation d'une autorité externe. Certaines universités
possèdent leurs biens immobiliers et peuvent vendre leurs bâtiments. Le niveau des frais de
scolarité pour tous les types d'étudiants est défini par l’État.


1.1.2.3 Pôle recrutement[modifier]
Le nombre de postes universitaires est réglementé par une autorité externe. Le recrutement
pour certains cadres supérieurs est également effectué à l'extérieur sur la base des
compétitions nationales. Les procédures de licenciement sont strictement réglementées en
raison du statut de fonctionnaire de la plupart du personnel. Il existe des restrictions externes
sur les promotions pour tout le personnel.


1.1.2.4 Pôle académique[modifier]
L'admission à l’Université est entièrement réglementée par une autorité externe
(baccalauréat), tandis que les universités ont la capacité de recruter avec sélection des
étudiants au niveau Master. Tous les nouveaux les programmes d'études doivent être soumis à
une accréditation préalable pour recevoir un financement.


1.1.3 Un rapide tour d’horizon de l’ESR en 2016[modifier]

L'enseignement supérieur en France est marqué par la coexistence d'une pluralité
d'établissements ayant des finalités, des structures et des conditions d'admission différentes,
toutes régies par le code de l’éducation.
e
Le ministère de l'Éducation nationale, de l’ESR, a mis en ligne la 9 édition de « L'état de
l'Enseignement supérieur et de la Recherche » en juin 2016. Cet état statistique, sur l’année
2014, témoigne « d'une volonté de transparence sur les données de l'action publique » :
  • il présente « une vision synthétique, chiffrée et rigoureuse » du paysage de l’ESR en
France ;
  • il offre « une mise en perspective de la situation française avec celle des leaders
mondiaux » en matière d'enseignement supérieur et de recherche ;
1.1.3.1 Les établissements[modifier]
141 établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel (E.P.S.C.P.).
Les EPSCP (Figure 4) sont des établissements nationaux d'enseignement supérieur et de
recherche jouissant de la personnalité morale et de l'autonomie pédagogique et scientifique,
administrative et financière. Ils sont gérés de manière démocratique avec le concours de
l'ensemble des personnels, des étudiants et de personnalités extérieures.
Les EPSCP sont autonomes c'est-à-dire qu'ils définissent leur politique de formation, de
recherche et de documentation dans le cadre de la réglementation nationale et dans le respect
de leurs engagements contractuels (ex. contrat pluriannuel). La répartition des établissements
selon leur statut est représentée Figure 4.
  • Universités : tutelle administrative et budgétaire du recteur d’académie (sauf mention
contraire)
  • Institut national polytechnique : tutelle du recteur d'académie
  • Instituts et écoles extérieurs aux universités : tutelle du recteur d'académie
  • Grands établissements
  • Écoles françaises à l'étranger : tutelle administrative et budgétaire du ministre chargé
de l'enseignement supérieur
  • Écoles normales supérieures : tutelle administrative du ministre chargé de
l'enseignement supérieur et budgétaire du recteur d'académie
  • Communautés d'universités et établissements : tutelle administrative et budgétaire du
recteur d'académie
Etablissements publics à caractère scienti2ique,
culturel et professionnel
Universités
Institut national
21 polytechnique
Instituts et écoles extérieurs
4 aux universités
Grands établissements
Écoles françaises à l'étranger
19 Écoles normales supérieures
Communautés d'universités et
établissements
Figure 4 : Répartition des 141 E.P.S.C.P. en France.
25 établissements publics à caractère administratif (E.P.A.).
Un E.P.A. est doté de la personnalité morale de droit public disposant d'une certaine
autonomie administrative et financière afin de remplir une mission d'intérêt général autre
qu'industrielle et commerciale, précisément définie, sous le contrôle de l'État ou d'une
collectivité territoriale. Le décret de création de chacun des E.P.A. fixe le statut particulier de
l'établissement.
  • 17 E.P.A. rattachés (ex L719-10) ou associés (L718-16) à un E.P.S.C.P.
o 8 écoles d'ingénieurs : tutelle administrative et financière du recteur
d'académie (ENI, ENSI)
Autres établissements publics
  • 7 Instituts d'études politiques de province : tutelle administrative et financière du
recteur d'académie
  • 2 autres établissements : tutelle administrative et financière du recteur d'académie
  • 8 E.P.A. autonomes,
  • Ex-Pôle de recherche et d'enseignement supérieur
o 1 Etablissement public de coopération scientifique (EPCS)
o EPA placé sous la tutelle conjointe des ministres chargés de l'agriculture et
de l'enseignement supérieur,
o 3 Fondations de coopération scientifique (FCS)
1.1.3.2 Les personnels dans les établissements de l’ESR[modifier]
e
La lecture de la 9 édition de « L'état de l'Enseignement supérieur et de la l’ESR » en juin
2016, nous permet de disposer d’un état des personnels en situation d’enseignement (Erreur =
Source du renvoi introuvable.) et non-enseignants (Erreur = Source du renvoi
introuvable.)
En 2014-15, 90939 enseignants exercent dans les établissements publics d’enseignement
supérieur sous tutelle du MENESR, sur un total d’environ 155 000 personnes.
Figure 5 : Répartition du nombre d'enseignants par statut - Source http://data.enseignementsup-
recherche.gouv.fr.
L’ensemble des effectifs d’enseignants titulaires et stagiaires a sensiblement augmenté au
cours de la dernière décennie (+ 4,8% entre 2005 et 2015).
En 2014-15, 56500 non-enseignants (Figure 6Erreur = Source du renvoi introuvable.)
assurent des fonctions administratives, techniques ou d’encadrement au sein des
établissements publics de l’ESR
Figure 6 : Répartition du nombre de personnels non-enseignants par statut - Source
http://data.enseignementsup-recherche.gouv.fr.


1.1.3.3 Les étudiants, usagers de l’ESR[modifier]
Environ 75 % des bacheliers 2014 s'inscrivent immédiatement dans l'enseignement supérieur.
Près des deux-tiers des bacheliers généraux s'inscrivent à l'Université, soit 7 points de moins
qu'en 2000 mais 2,7 points de plus qu’en 2012.
En 2014-15, 2 470 700 étudiants sont inscrits dans l’enseignement supérieur en France
métropolitaine et dans les départements d’outre-mer (Figure 7Erreur = Source du renvoi
introuvable.). Le nombre d’étudiants inscrits a augmenté pour la sixième année consécutive
(+ 1,6 %, soit 38 400 étudiants de plus qu’en 2013) : les étudiants n’ont jamais été aussi
nombreux en France.
En 2014-15, 1 531 300 étudiants sont inscrits dans les universités de France métropolitaine et
des départements d’outre-mer, ce qui représente 62 % de l’ensemble des inscriptions dans
l’enseignement supérieur, dont 5 % en préparation au DUT. Les effectifs de l’Université ont
augmenté de 7,5 % en 10 ans,
Un étudiant sur 6 soit 437 700 étudiants fréquente un établissement d’enseignement privé.
L’effectif est quasi-stable depuis deux ans mais en forte progression depuis 2000.
À la rentrée 2014, 20 549 étudiants se déclarent handicapés dans les formations de
l’enseignement supérieur des lycées publics et privés sous contrat et dans les établissements
d’enseignement supérieur publics sous tutelle du ministère de l’Éducation nationale, de l’ESR
Figure 7 : Cartographie de l'enseignement supérieur (2014) - Source http://data.enseignementsup-
recherche.gouv.fr.


1.1.3.4 L’émergence de la formation continue[modifier]
La formation continue a accueilli 477 300 stagiaires et délivré 82 800 diplômes dont 56 200
diplômes nationaux en 2014-2015, pour un chiffre d’affaire de 427 millions d'euros, soit une
hausse de 5% par rapport à 2012, en euros courants.
Elle représente moins de 2 % du chiffre d'affaires de la formation professionnelle en France.
Nous lisons que la formation continue est un enjeu stratégique considérable pour l’ESR, car à
ce jour, bien que le budget soit conséquent, les universités sont peu positionnées comme
opérateur de formation sur ce marché.


1.1.4 La gouvernance des établissements de l’ESR en France[modifier]

L’Etat français a réalisé une succession de réformes, suscitées par la logique du NPM (New
Public Management), dont les fondements sont inspirés par Henri Fayol23 en 1921 : le chef est
au centre et « doit assurer l’exécution des six fonctions essentielles : administrative,
technique, commerciale, financière, de sécurité et de comptabilité. Il a besoin de larges
23 Fayol, H., op. cit.
pouvoir dans chacun de ces domaines »24. Dans leur article sur le New Public Management25,
les auteurs renforcent cette logique de management et citent 8 points caractérisant « cette
nouvelle gestion publique ». Nous retiendrons pour notre analyse les deux derniers points, « la
recherche de l’efficience dans l’emploi des fonds publics » et « la participation des usagers
dans la définition et l’évaluation des prestations publiques. »
Dans son éditorial de la Revue Gestion et Management public26, Thierry Côme propose de
définir la « gouvernance ou ensemble de dispositifs mis en œuvre par la firme pour réaliser
des coordinations efficaces », et constate l’émergence de plusieurs rapports publics,
permettant le débat sur les gouvernances des universités.
Lors du colloque international EUTIC en septembre 201627, organisé justement sur le thème
de la nouvelle gouvernance, Lise Vieira nous rappelle que le sens du mot « gouvernance » est
aujourd’hui « multiforme » construit « au fil des années », parfois synonyme de
gouvernement. Elle ajoute que « Dans son utilisation classique, la notion de gouvernance
désignait donc un mode de direction de quelque-chose ou de quelqu’un, ce qui renvoie à une
conception du pouvoir basée sur l’inégalité, l’asymétrie et l’unilatéralité. »28 . Nous
comprenons ainsi mieux l’amalgame avec la notion de gouvernement, synonyme de mode de
fonctionnement directif, propre à la notion de souveraineté de l’Etat29 et surtout de top-down
dans la transmission de l’information.
Dans « Gouvernance : tenter une définition »30, les auteurs nous mettent en garde sur les
différentes définitions qui dépendent à la fois du contexte de citation de la notion et de la
discipline au travers de laquelle nous la regardons (philosophie, sciences économiques et
gestion, politiques, géopolitique). Ils nous dressent un historique de définition propre aux
24 Morgana, L. (2012). Un précurseur du New Public Management  : Henri Fayol (1841-1925). Gestion et
management public, Volume 1/n°2(2), 4-21. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=GMP_002_0004
25 Chappoz, Y., & Pupion, P.-C. (2012). Le New Public Management. Gestion et management public, Volume
1/n°2(2), 1-3. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http ://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=GMP_002_0001
26 Côme, T. (2013). La gouvernance des universités. Gestion et management public, Volume 2/n°1(3), 1-5. le 25
septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=GMP_021_0001
27 Vieira, L., & Mocquet, B. (2016). Les politiques du numérique dans l’Enseignement Supérieur et la
Recherche  : vers l’émergence de nouvelles formes de gouvernance. Présenté à Colloque international EUTIC
2016, Université d’Athènes.
28 Vieira, J. (2015). La jeunesse éco-citoyenne à l’heure du numérique Les enjeux juridiques de l’engagement
participatif. In Les écosystèmes numériques et la démocratisation informationnelle: Intelligence collective,
Développement durable, Interculturalité, Transfert de connaissances. le 25 septembre 2017 à l’adresse
https://hal.univ-antilles.fr/hal-01258204/
29 Chevallier, J. (2003). La gouvernance, un nouveau paradigme étatique? Revue française d’administration
publique , (1), 203-217.
30 Lacroix, I., & St-Arnaud, P.-O. (2012). La gouvernance: tenter une définition. Cahiers de recherche en
politique appliquée , 4(3), 19-37.
grandes organisations publiques comme l’ONU, Banque mondiale ou FMI (« l’art ou la
manière de gouverner »). Pour ces organisations, il fallait impérativement se détacher de la
notion de gouvernement, et c’est ainsi que apparaît des notions complémentaires « d’une part
bien marquer la distinction avec le gouvernement en tant qu’institution; d’autre part, sous un
vocable peu usité et donc peu connoté, promouvoir un nouveau mode de gestion des affaires
publiques fondé sur la participation de la société civile à tous les niveaux »31
La gouvernance apparait alors comme un gouvernement qui tiendrait compte de tous les
niveaux de participation de la société civile et comme un mode de gestion qui s’appuie sur
« les règles, les processus et les comportements qui influent sur l'exercice des pouvoirs au
niveau européen, particulièrement du point de vue de l'ouverture, de la participation, de la
responsabilité, de l'efficacité et de la cohérence » pour l’Union Européenne et comme «
l’exercice de l’autorité économique politique et administrative dans la gestion à tous les
niveaux des affaires des pays. » pour les Nations Unies.
Cette définition englobe donc « les mécanismes, processus et institutions grâce auxquels les
citoyens et les groupes articulent leurs intérêts, exercent leurs droits légaux, assurent leurs
obligations et trouvent une médiation de leurs différences »
Lise Vieira propose alors une définition actuelle, « la gouvernance apparaît donc comme une
méthode par laquelle des acteurs parviennent à des décisions mutuellement satisfaisantes par
un ensemble de procédures de régulation, à travers la négociation et la coopération ». Elle se
détermine, en s’appuyant sur les travaux de Schmitter, par des « formes horizontales
d’interactions entre acteurs qui ont des intérêts contradictoires mais qui sont suffisamment
indépendants les uns des autres pour qu'aucun d’eux ne puisse imposer une solution à lui
seul, tout en étant suffisamment indépendants pour qu'ils soient tous perdants si aucune
solution n'était trouvée » 32
Dans le cadre des établissements de l’ESR, cette gouvernance peut se définir comme «
l’utilisation de dispositifs formels ou informels dont le but est d’ouvrir à différents types
d’acteurs privés ou publics la participation aux processus décisionnels et cela au-delà du
cadre institutionnel »33
31 Paye, O., (2005). La gouvernance: D'une notion polysémique à un concept politologique. Études
internationales, 36 (1), 13-40.
32 Schmitter, P. C. (2000). How to Democratize the European Union--and why Bother? Rowman & Littlefield.
33 Vieira, J. (2016), op. cit.
Nous prendrons comme définition de dispositif le point de vue de Michel Foucault, c’est-à-
dire « un ensemble résolument hétérogène, comportant des discours, des institutions, des
aménagements architecturaux, des décisions réglementaires, des lois, des mesures
administratives, des énoncés scientifiques, des propositions philosophiques, morales,
philanthropiques, bref : du dit, aussi bien que du non-dit » 34
Ces dispositifs mis en place par l’équipe dirigeante de l’université s’appuient « sur la
négociation, la souplesse, sur la coopération et sur des partenariats. » et « Du même coup,
on assiste à un déplacement des légitimités de décisions et d’actions des acteurs étatiques
vers la société civile et ces groupes/individus la composant et prenant part à cette démarche
de gouvernance.»35 : chaque équipe présidentielle exprime alors ses spécificités localement.
La gouvernance des universités a d’ailleurs été étudiée par Chatelain-Ponroy, Mignot-Gérard,
Musselin, et Sponem, en interrogeant ceux qui pilotent cette gouvernance36. Ce rapport
s’appuie sur une analyse des statistiques descriptives des réponses obtenues à un
questionnaire portant sur les structures de direction des universités, leurs dispositifs de
pilotage ainsi que sur les valeurs et les opinions des responsables universitaires. Nous
retenons de ce rapport que les gouvernances ne sont pas des entités de fonctionnement unique,
basées sur les mêmes processus, mais bien des entités singulières répondant aussi bien à des
contraintes nationales qu’à des contraintes locales.


1.1.5 Le numérique dans les textes officiels français depuis 2007[modifier]

La loi du 10 août 2007 relative aux libertés et responsabilités des universités (dite loi LRU)
implique, pour chaque université, l’élaboration d’orientations stratégiques visant, « à moyen
et long termes, à améliorer leur attractivité, à leur permettre d’accéder à l’autonomie dans
les 5 ans à venir, au niveau budgétaire, du management de leurs ressources humaines et de la
maîtrise de leur patrimoine »37. Ce texte verra apparaître la naissance du concept de schéma
directeur pour les universités, mise en œuvre tout d’abord pour le patrimoine, puis par
extension pour le numérique.
34 Foucault, M. (1977). Le jeu de Michel foucault. Dits et écrits , 3, 298-329.
35 Lacroix, I., & St-Arnaud, P.-O. (2012). op. cit.
36 Chatelain-Ponroy, S., Mignot-Gérard, S., Musselin, C., & Sponem, S. (2012). La gouvernance des universités
françaises Pouvoir, évaluation et identité. le 25 septembre 2017 à l’adresse http://halshs.archives-
ouvertes.fr/halshs-00729058
37 Caisse des dépôts et consignations. (2009, janvier). Guide des universités numériques. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse
http://www.cpu.fr/uploads/tx_publications/CDC_Guide_universite_numerique_version_finale_01.pdf
Dans la loi n° 2013-660 du 22 juillet 201338 relative à l'enseignement supérieur et à la
recherche, il est intéressant de repérer les éléments (Figure 8) qui concernent explicitement
aux TIC nommées ici comme « le numérique ».
Figure 8 : Le numérique universitaire d’après la loi relative à l’ESR n° 2013-660).
Ceci nous permet d’étiqueter ce que l’État entend aujourd’hui par l’appellation
« numérique dans les universités françaises ». Il s’agit des services (y compris infogérance) et
des ressources (Art. L. 123-4-1 et Art. L. 611-8 et Art. L. 718-9), de l’accès aux services et
ressources pour les usagers et membres (Art. L. 712-6-1), de l’usage de ses services et
ressources (Art. L. 711-1) et de la gouvernance du numérique dans les universités, notamment
la nomination d’un vice-président chargé des questions et ressources numériques (Art. L. 718-
10).
En instituant la place du numérique dans les universités françaises, le Ministère de l'Éducation
nationale, de l'ESR met en avant la nécessité pour les universités de considérer cela davantage
c’est un signe fort qui suggèrent aux universités de changer voire de définir leur stratégie du
numérique.
38 LOI n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, 2013-660 (2013).


1.1.5.1 Quatre ambitions pour le numérique universitaire[modifier]
En juin 2015, le ministère a réaffirmé sa stratégie numérique39 pour l'enseignement supérieur
traduit par quatre grandes ambitions : le numérique au service de la réussite et de l’insertion
des étudiants, le numérique comme outil de rénovation des pratiques pédagogiques, le
numérique pour le développement de campus d’avenir puis le numérique pour une Université
ouverte et attractive, en Europe et à l’international.
Le numérique au service de la réussite et de l’insertion des étudiants
Dans cette stratégie ministérielle il s’agit en premier lieu « à la fois d’offrir l’accès aux
étudiants à des formations en ligne et à une pédagogie rénovée, de leur apporter de nouveaux
services relatifs à la scolarité et à la vie étudiante, en distance et en mobilité, de mieux les
accompagner dans leurs choix d’orientation et de favoriser leur insertion professionnelle. »
Pour cela, « un soutien résolu à la production de contenus et de services numériques
innovants pour l’Université, notamment à travers les universités numériques thématiques et
sa plate-forme de Mooc FUN-MOOC » est proposé par le ministère. Pour aménager le
territoire et que la stratégie s’étende dans toutes les régions, « 17 universités numériques en
région (U.N.R.) contribuent au développement des services numériques ». Ces universités
numériques en région sont coordonnées au niveau du Ministère par la direction générale de
l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP)
Le numérique comme outil de rénovation des pratiques pédagogiques
Le deuxième axe de la stratégie numérique vise « à mobiliser le potentiel du numérique pour
adapter les processus pédagogiques à la diversité des publics universitaires, en diversifiant
les méthodes pédagogiques et les modes d’accès aux contenus et services pédagogiques ».
Pour le ministère, « la gouvernance » (de l’établissement) « est un enjeu majeur pour le
succès de la pédagogie numérique dans l’enseignement supérieur. »
Dans le cas de la contractualisation entre les établissements le ministère annonce qu’ « un
ensemble de 30 indicateurs permet d'apprécier l'état du numérique au moment de
l'évaluation ». Il est demandé à l’équipe présidentielle de l’établissement de se projeter sur
39 Le numérique au service d’une Université performante, innovante et ouverte sur le monde - ESR  :
enseignementsup-recherche.gouv.fr. (Juin 2015). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid89439/le-numerique-au-service-d-une-universite-
performante-innovante-et-ouverte-sur-le-monde.html
l’évolution de ces indicateurs et cela pour les cinq ans à venir. Pour accompagner cette
stratégie, le ministère propose le Rapport Bertrand, réalisé à la demande de Mme Simone
Bonnafous, Directrice générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle.
Ce rapport entend proposer des pistes pour favoriser de nouvelles formes d'apprentissage et de
nouveaux modes d'enseignement. « Soutenir la transformation pédagogique dans
l'enseignement supérieur »40. Lameul et Loisy estime que l’usage du numérique « introduit la
question pédagogique dans l’enseignement supérieur »41 qu’il permet de nouvelles situations
d’apprentissage et une distribution des rôles différente.
Le numérique pour le développement de campus d’avenir
En troisième axe, le ministère souhaite « le développement d’infrastructures numériques
garantissant une qualité de service propice au développement des usages ». Cette stratégie est
conjointe avec la stratégie de rénovation des campus, il s’agit de « repenser l’espace
d’enseignement et d’apprentissage dans les établissements ». Cet axe est accompagné par la
convention Campus d’@venir signée en avril 2013 entre le Ministère et la Caisse des Dépôts
et Consignations puis en 2015 avec la rédaction d’un Guide d’aménagement des campus
d’@venir42 .
Le numérique pour une Université ouverte et attractive, en Europe et à l’international
Enfin le quatrième axe concerne la présence de formation française à l’échelon international.
Cet axe a pour finalité de relancer les coopérations avec les pays en développement et les pays
francophones, il s’agit pour la France de développer « des formations (…) à la hauteur de la
qualité de son enseignement et de sa recherche, pour mettre en place une offre ambitieuse de
formations en ligne, et lui permettre de renforcer aussi bien la visibilité nationale et
internationale de ses établissements »
40 La documentation française, (2013). Soutenir la transformation pédagogique dans l’enseignement supérieur
[rapport public]. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-
publics/144000579/
41 Lameul, G., & Loisy, C. (2014). Comprendre la pédagogie universitaire numérique au sein du dialogue entre
chercheurs et praticiens. De Boeck. p 206
42 Guide Campus d’avenir 2015  : Concevoir des espaces de formation à l’heure du numérique - ESR  :
enseignementsup-recherche.gouv.fr. (2015). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid87012/guide-campus-d-avenir-2015-concevoir-des-espaces-
de-formation-a-l-heure-du-numerique.html
1.1.5.2 Le numérique dans l’ESR : un triptyque Etat-Université-Usagers[modifier]
Nous entendrons le mot « système »43 au sens de Joël Rosnay comme un « ensemble
d’éléments en interaction dynamique, organisée en fonction d’un but ». Il s’agit bien ici du
système de l’ESR, dans lequel s’effectue des échanges informationnels, avec ou sans
régulation. La régulation, au sens de Dominique Beriot44 est une « action qui s’exerce par des
rétroactions positives et négatives et qui visent à réduire les écarts entre objectifs fixés et
résultats atteints ». Dans cette configuration, les universités possèdent aussi des régulations et
peuvent être observées comme un système. En leur sein, le vice-président en charge de la
stratégie numérique, celui qui pilote la stratégie numérique, est un des acteurs de la régulation
de l’Université qui souhaite, ou doit par injonction des textes officiels, développer les usages
du numérique, mais n’est pas le seul : nous le verrons plus tard.
La politique est donc tout naturellement impulsée par le Ministère de l'Éducation nationale, de
l’ESR. Les universités, depuis la Loi de Réforme des universités, développent leur propre
stratégie toute en respectant les recommandations de la tutelle. Enfin, pour une mise en œuvre
à destination des usagers, un opérationnalisation de la stratégie numérique est indispensable.


1.2 Repères sur une histoire des dispositifs TIC dans ce[modifier]

contexte
Faisons un tour d’horizon des principales dates qui ont fondé le numérique de l’enseignement
supérieur ; ces dates sont repérées par la création de dispositifs permettant son développement
depuis 1992 et jusqu’en avril 2016.
Les années 1980-1990 ont fait entrer la France, par l’intermédiaire de l’évolution de
l’opérateur historique France Telecom, dans une période marquée par le passage de
l’analogique au numérique dans les transmissions45 . L’histoire avant 1992 est ainsi liée au
développement de l’infrastructure, avant tout, des territoires, et par conséquence des
universités. Ce déploiement de l’infrastructure permettra le développement dans la recherche
43 Rosnay, J. de. (1977). Le macroscope - Vers une vision globale. Paris: Seuil.
44 Bériot, D. (1992). Du microscope au macroscope: l’approche systématique du changement dans l’entreprise.
ESF éd.
45 France Telecom. (1995). Mémoires pour l’action .
des échanges internationaux, puis intra-nationaux : il est repris par Valérie Schafer, dans son
histoire de l’internet et de Renater.46 .
Afin de faciliter la lecture de ces repères, quatre périodes ont été mises en évidence dans le
déploiement de la politique d’état du numérique dans l’ESR. 1992 à 2000 caractérisent la
structuration d’une politique commune de l’informatisation des métiers de l’administration, et
le soutien à cette administration. 2001 à 2009 permet de construire une politique dans
l’éducation, primaire, secondaire et supérieur, politique commune dans tous les cycles. 2010
À partir de 2013, la politique du supérieur se distingue de celle de l’éducation nationale, puis
depuis 2013, le Supérieur affiche une politique très engagée pour généraliser l’usage du
numérique.


1.2.1 1992-2000 : Création de la politique numérique, et du soutien à[modifier]

l’administration des universités
Dans l’objet d’étude qui nous occupe, le point de départ d’un historique n’est donc pas la
technologie sur laquelle il repose, mais bien le premier dispositif permettant aux organisations
universitaires de travailler numériquement.
Avril 1992 voit apparaitre la création de la Gestion des universités et établissements
(GIGUE), un groupement permettant le développement national d'applications informatiques
de gestion adaptées aux universités47 . Ce groupement se fait en conséquence d’une
obligation : « disposer d'un outil qui respecte la refonte du cadre budgétaire et comptable des
établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel et en généralise les
principes dans les établissements. ». C’est une approche par l’outil qui voit naitre cette
organisation mutualisée.
Phénomène international lié à la recherche, dans une logique d’échange de documents
numériques pour la recherche, nous notons la mise à disposition en licence libre du logiciel
World Wide Web dans le domaine public par le laboratoire CERN, Conseil européen pour la
Recherche nucléaire en avril 1993 . Le développement de l’internet, visible par cette mise à
disposition du code pour le world wide web, voit apparaître la même année, la structuration en
46 Schafer, V., & Tuy, B. (2013). Dans les coulisses de l’internet: RENATER, 20 ans de Technologie,
d’Enseignement et de Recherche. Armand Colin.
47 Inspection générale, de l’administration, de l’Éducation national et de la Recherche. (2013, décembre). Audit
de l’Agence de mutualisation des universités et des établissements.
48 CERN. (2015). La naissance du web | CERN. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://home.cern/fr/topics/birth-web
Groupement d'intérêt Public du Réseau National de télécommunications pour la Technologie
l'Enseignement et la Recherche, RENATER.
Après des outils de mutualisation pour la gestion, une structuration de l’infrastructure pour le
développement de l’internet dans les universités, des membres ressentent le besoin de partager
leurs pratiques, et d’échanger sur leur résolution de problèmes techniques. Les premières
Journées Réseaux de l'Enseignement supérieur (J.R.E.S.) voient le jour en 1995 à l’Université
de Chambéry49 . Se déroulant tous les 2 ans, ces journées réunissent des membres de l’ESR qui
contribuent au déploiement et à l'essor des nouvelles technologies de l'information et de la
communication (TIC) dans les établissements d'enseignement supérieur et de recherche au
travers de thématiques liées au numérique.
En 1997 est créée50 la SDTETIC (Sous-Direction des Technologies Educatives et des
Technologies de l'Information et de la Communication) premier service de stratégie politique
nationale du numérique pour le Ministère. Cette sous-direction rattachée à la Direction
Technique (DT) est chargée du développement de l'usage des TIC. Cette création fait suite au
e
discours lors de la 18 Université d'été de la communication à Hourtin (prononcé par Lionel
Jospin alors Premier ministre). Des thématiques telles que « l 'entrée de la France dans la
société de l'information », « le développement en milieu scolaire de l'utilisation des
technologies de l'information », le fait de « donner la maîtrise des nouveaux outils de
communication, qui seront indispensables aux futurs citoyens », de valoriser « les richesses
du multimédia comme outil pédagogique. » sont abordées par ce discours qui fondent, dans un
premier temps, le positionnement du numérique de l’École et de l’ESR par son approche
« plus sur les équipements que sur le processus d’information »51.
En 1997, la GIGUE se transforme en Agence de mutualisation des universités et
établissements d'enseignement supérieur et de recherche (AMUE). À la mission initiale de
mutualisation de l'informatique dans le Supérieur s'ajoutera la mutualisation des outils de
gestion. Ce sont aussi des actions de mutualisation des universités comme la création de la
Maison des universités « à proximité du quartier latin à Paris, lieu ressource pour la
communauté universitaire (mise à disposition de salles de réunion, hébergement d'organismes
49 JRES. ( 1995) Programme de JRES95. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://1995.jres.org/programme.html
50 Décret no 97-1149 du 15 décembre 1997 portant organisation de l’administration centrale du ministère de
l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie, 97-1149 (1997).
51 Robert, B. (2009). Organisation des Connaissances  : Aspects Sociaux et Changements Lies au Numerique.
Toulouse: Pu Mirail Toulouse.
et associations) ». Les activités de l'Amue52 entre 1997 et 2002 sont marquées par deux
opérations majeures : « la distribution massive dans les établissements des applications
informatiques initiées par le GIGUE » et « le développement progressif d'activités de services
dans les principaux domaines de gestion, qu'il s'agisse de services d'accompagnement liés
aux produits informatiques (implantation et gestion de projet, formations initiales et
continues, bourses aux outils) ou de services plus larges non directement liés aux produits
(rencontres et séminaires autour d'un thème, réseaux d'échanges d'expériences). »
En 2000, la SDTIC lance le premier appel à propositions pour la création des C@mpus
numériques, afin de favoriser la construction d’une « offre nationale de formation ouverte et à
distance (FOAD) de qualité et compétitive sur le marché international »53. Ce dispositif
incitatif financièrement s’articule autour de quatre types d’action : des études technologiques
et d’usages, la formation des personnels, des informations et des diffusions de ressources
numériques.
La même année (2000) la volonté croisée de la communauté universitaire, de la SDTIC et du
Service du film de recherche scientifique (SFRS) de mettre à disposition des ressources
pédagogiques audiovisuelles sur le web permettra la création de Canal-U, par un financement
venant des campus numériques. La première année, cette création s’appuiera sur Vidéoscop
de l'Université Nancy 2 : un transfert de compétences audiovisuelles vers les compétences
multimédias permettant la création de ce dispositif.


1.2.2 2001-2009 : Renforcement de la politique numérique pour[modifier]

l’éducation
En 2001, la SDTIC se transforme en SDTICE (Sous-Direction des Technologies Educatives et
des Technologies de l'Information et de la Communication pour l’Éducation)54. « Elle
travaille à la fois à la généralisation des usages pédagogiques liés à ces technologies et aux
choix et dispositions techniques propres à contribuer à cette généralisation de la manière la
52 AMUE. (2015). Historique - Amue. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.amue.fr/presentation/presentation-amue/historique/
53 Thibault, F. (2006). Autour des campus numériques français. Distances et savoirs , Vol. 4(1), 109-112.
Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=DIS_041_0109
54 Décret n°97-1149 du 15 décembre 1997 modifiée 19 septembre 2001portant organisation de l’administration
centrale du ministère de l’éducation nationale et de l’administration centrale du ministère de la recherche., 97-
1149 (1997).
plus optimale possible »55. Ce service pilote la politique du numérique pour l’École et les
universités jusqu’en juillet 2010, date à partir de laquelle les stratégies politiques pour
l’Education Nationale et pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche seront distinctes.
En 2002, la création du Certificat Internet et Informatique C2i56 par la SDTICE a pour finalité
que « toute personne est aujourd'hui concernée par l'usage désormais banalisé d'outils
informatiques ». Le rôle de la certification est de « dispenser à chaque citoyen la formation
qui, à terme, le mettra à même de faire des technologies de l'information et de la
communication une utilisation raisonnée, de percevoir les possibilités et les limites des
traitements informatisés, de faire preuve d'esprit critique face aux résultats de ces traitements
et d'identifier les contraintes juridiques et sociales dans lesquelles s'inscrivent ces
utilisations. » en continuité avec le B2i (Brevet Internet et Informatique) pour l’école.
Avec le développement des campus numériques, de la formation à distance, il s'agit de
proposer aux étudiants : « de maîtriser les compétences qui sont désormais indispensables à
la poursuite d'études supérieures, d'être capables de faire évoluer ces compétences en
fonction des développements technologiques, et de pouvoir établir qu'ils maîtrisent des
compétences qui les aideront à s'insérer dans le monde des activités professionnelles à la fin
de leur cursus. ». Lors de cette création, deux niveaux sont proposés : un niveau 1 pour les
compétences des étudiants ; un niveau 2 pour les compétences professionnelles visées par les
étudiants à l’issue de leur diplôme.
En 2002, un appel d’offre proposé par la SDTICE incite les établissements du supérieur à la
« création d’environnements numériques de travail (ENT). Cette nouvelle initiative, en
rupture avec les orientations précédentes plus pédagogiques que technologiques, est
présentée comme le « deuxième volet » de l’appel d’offres campus numériques. ». Elle vise la
diffusion des ressources pédagogiques au sein des établissements, sans mutualisation de ces
ressources. La mutualisation concerne les outils technologiques choisis par les établissements,
notamment « ESUP-Portail ; ENCORA ; EPPUN ; Monte-Cristo »57.
Cette même année (2002), l’AMUE se transforme en Groupement d'Intérêt Public (GIP) qui
« organise la coopération entre ses membres et sert de support à leurs actions communes en
55 SDTICE (sous-direction des TICE). (2015) [EduSection]. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://eduscol.education.fr/numerique/textes/reglementaires/acteurs/sdtice/sdtice
56 Bulletin officiel de l’éducation nationale n°19 du 9 mai 2002. (2002) Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.education.gouv.fr/bo/2002/19/default.htm
57 Thibault, F. (2006). op. cit. p110
vue d’améliorer la qualité de leur gestion ». Ce GIP se fixe les axes prioritaires suivants :
mieux associer les établissements aux activités et au devenir de leur Agence, tant au niveau de
la participation aux instances de l'Amue qu'à leur implication pratique dans ses activités
quotidiennes ; améliorer le partenariat entre l'AMUE et le ministère en charge des universités,
sur la base d'une clarification des objectifs et d'une meilleure évaluation des activités inscrites
dans le contrat de développement ; affirmer la vocation de l'Agence à être un lieu de services
diversifiés pour ses membres, afin de les aider à remplir leurs missions de service public,
indépendamment de la nature informatique ou non de ces services ; contribuer à la
construction du système d'information global des établissements d'enseignement supérieur et
de recherche, et singulièrement au système d'information de gestion, cadre dans lequel seront
envisagés le devenir et la communication réciproque des applications informatiques de
l'Amue.
En 2003, 38 établissements expérimentent le C2i1 ; le premier appel à proposition pour la
création d’universités numériques en région (UNR) est lancé par le Ministère en charge de
l’enseignement supérieur en partenariat avec la Délégation interministérielle à l’aménagement
du territoire et à l’attractivité régionale (DATAR) et le Centre national des œuvres
universitaires et scolaires (CNOUS). Les UNR apportent sur la base d’une mutualisation
régionale des services nécessaires à la vie de l’étudiant, le développement des usages, une
politique de production, de diffusion et de mutualisation des ressources pédagogiques.
Et en complément des ENT et des UNR, toujours en 2003, les universités Thématiques (UNT)
se développent afin de favoriser la mutualisation et l’échange de ressources pédagogiques,
tout en garantissant une qualité de ces ressources : la labellisation des ressources
pédagogiques passant par des comités de lecture. Les UNT ont pour missions initiales « de
mettre à la disposition des établissements et des étudiants des ressources pédagogiques dont
la qualité technique, scientifique et pédagogique est validée par les universitaires compétents
dans chaque domaine disciplinaire ».
En 2003, la Délégation aux usages de l’internet est instituée58 afin « de proposer les mesures
propres à généraliser l'accès à l'internet ainsi que la formation des familles, des enfants et du
grand public aux usages des nouvelles technologies » : cette délégation est à l’initiative des
quatre plans Micro Portable l’Etudiant (MIPE) qui suivront (Figure 9)
58 Décret n°2003-1168 du 8 décembre 2003 portant création d’une délégation aux usages de l’internet., 2003-
1168 (2003).
Figure 9 : Plans MIPE de la Délégation aux usages numériques (source CRU du 25/07/2007).
En 2004, le premier plan MIPE permet à chaque étudiant d'acquérir un ordinateur portable en
bénéficiant d’offres préférentielles de partenaires et du dispositif incitatif Wifi pour les
universités (111 établissements sur 127 éligibles à un financement). Le plan MIPE, qui
consiste notamment à proposer des offres adaptées aux étudiants pour l’acquisition d’un
ordinateur portable (financement d’1€ par jour), rencontre un succès important en 2004 avec
100.000 étudiants équipés en 4 mois59.
La même année, deux C2i2 voient le jour. Le premier concerne les enseignants. Les principes
généraux du C2i2 Enseignant (C2i2E) sont érigés. Sa mise en œuvre et sa validation, sont
proposés afin de renforcer le rôle de l’école dans l’évolution de la société de l’information et
« tout enseignant est désormais concerné par l’usage des outils propres à ces technologies et
leur intégration dans les pratiques pédagogiques »60. Le deuxième concerne les métiers du
droit : le C2i2 Métiers du droit (C2i2MD). Il vise les étudiants de masters de droit qu’ils
« soient orientés vers le judiciaire, l’administration, l’entreprise ou la relation des citoyens
entre eux, pour l’exercice de leurs métiers dans ses dimensions professionnelles,
déontologiques et citoyennes. » et il concerne les usages du numérique des professionnels du
droit.
En 2005, le plan MIPE est consolidé avec la création d’un plan MIPE2, qui propose comme
actions, « la diffusion de l'information parmi les étudiants, l'accès aux ordinateurs fixes en
libre service ou aux ordinateurs portables en prêt, l'adoption d'un Environnement Numérique
59 MENSR. (2008). Présentation de l’Opération MIPE -. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://cache.media.enseignementsup-recherche.gouv.fr/file/2008/97/0/fiche2_36970.pdf
60 B.O. n°11 du 11 mars 2004 - M.J.E.N.R. (2004) Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.education.gouv.fr/bo/2004/11/MENT0400410C.htm
de Travail par chaque établissement, la mise en ligne de bureaux virtuels, de services
administratifs, et de contenus pédagogiques. »61
En 2005, le centre de ressources et d'information sur les multimédias pour l'enseignement
supérieur (CERIMES) est né. Il porte la gestion technique des sites comme Canal-U, BibNum
(Textes fondateurs de la science analysés par les scientifiques d´aujourd´hui), FormaSUP (le
portail de la formation à distance) et les signets des bibliothèques jusqu’en 2014.
En 2005, le troisième C2i2 est créé, il s’agit du C2i2 “Métiers de la santé” (C2i2MS). Cette
certification concerne un ensemble de compétences déclinées dans les domaines suivants :
« l’information dans ses aspects de recherche et d’utilisation des ressources issues de celle-
ci, de sécurité, de droit de l’information et de responsabilités liées aux activités numériques ;
les travaux collaboratifs avec les outils partagés, les outils d’environnement numérique de
travail, la mise en œuvre de projet en réseau, le télé-enseignement ; les systèmes
d’informations avec les problèmes et enjeux liés aux TIC dans les activités liés à la santé, les
cartes Vital et Professionnel de santé, les réseaux de soins et professionnels. »62
En 2006, la troisième partie de MIPE (MIPE3) concerne le développement des usages du
numérique : « Priorité à la création de contenus et de services en ligne pour les étudiants, et
consolidation de l’offre portable pour la troisième année. »63. Les podcasts ou
baladodiffusions font leurs apparitions comme éléments de formation, au format audio ou
vidéo.
En 2007, la quatrième partie de MIPE (MIPE4) est lancée, orientée vers l’articulation avec la
certification C2i1 avec l’incitation faite aux universités de proposer un stage de pré-rentrée
permettant aux étudiants de valider une parie des compétences du C2i Niveau 1.
Le quatrième C2i2 est créé en 2007, le C2i2 « Métiers de l'ingénieur » (C2i2MI)64 à
destination « des futurs ingénieurs issus des écoles habilitées à délivrer le titre d’ingénieur
diplômé et figurant à l’arrêté interministériel d’habilitation publié chaque année au B.O., des
étudiants des masters habilités dans le champ des sciences et des technologies et des
61 MENSR. (2005). Dossier de presse MIPE2. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
ftp://ftp.educnet.education.fr/pub/educnet/mipe/MIPE2-DP.pdf
62 Bulletin officiel n° 31 du 1er septembre 2005. (2005) Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.education.gouv.fr/bo/2005/31/MENT0501583C.htm
63 MENSR. (2006). Dossier de presse MIPE 3. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
ftp://ftp.educnet.education.fr/pub/educnet/mipe/MIPE3-DP.pdf
64 Circulaire n° 2007-1010 du 21-12-2007. (2007). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://eduscol.education.fr/numerique/textes/reglementaires/competences/c2i/niveau-2-metiers-
ingenieur/ESRT0700244C
ingénieurs en activité ». Il vise à attester les compétences numériques transversales
indispensables aux cadres de l’Industrie.
C’est en 2008 que le rapport Isaac65, MCF en Sciences de Gestion à Paris Descartes,
commandité par la Ministre alors en poste, sort. Ce rapport dresse un constat sévère du
décalage entre l'Université et ses jeunes usagers et propose des actions pour remédier à cela.
Un certain nombre de dispositifs mis en œuvre après 2008 découlent de cette analyse et
prospection.
En 2008, l'Assemblée des Directeurs des Systèmes d'informations de l'Enseignement
Supérieur (ADSI) est créée, afin de « mettre place une structure permettant des échanges
entre les établissements et un dialogue avec les responsables impliqués dans les
systèmes d’information des établissements »66.
Une autre association voit le jour en 2008, il s’agit de l'association ESUP-PORTAIL,
association autour d’une communauté d'établissements pour l'innovation numérique, porteuse
entre autre des ENT. ESUP-Portail s’affirme dès l’origine comme « un précurseur en matière
d’authentification unique. Dans son environnement, un seul code utilisateur suffit pour
accéder aux différents services : c’était une innovation en 2002 »67.
Dans le domaine des certifications C2i, création du C2i2 métiers de l’environnement et de
l’aménagement durables (C2i2MEAD) destiné à « développer, renforcer et attester de la
maîtrise des compétences TIC communes et nécessaires aux professions de l'environnement et
de l'aménagement dont l'activité principale s'inscrit dans une démarche de développement
durable. »68. Nous connaissons particulièrement bien ce dispositif pour avoir piloter le soutien
de son développement pour le compte du Ministère entre 2010 et 2012, par exemple en co-
rédigeant le document d’accompagnement69 à destination des correspondants des universités.
65 Isaac, H. (2008). L’Université numérique. Rapport à Mme la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la
Recherche.
66 A-DSI. (2015). Présentation et missions |. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse https://www.a-
dsi.fr/lassociation/presentation
67 Une histoire en partage | www.esup-portail.org. (2015) Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://www.esup-portail.org/content/une-histoire-en-partage
68 C2i ® niveau 2  : Métiers de l’environnement et de l’aménagement durables. (2015). Consulté le 25 septembre
2017à l’adresse http://www.education.gouv.fr/cid23773/esrt0900050c.html
69 Bertrand, C., Chantillon, N., Charpille, J.-L., Collomb, C., Counil, E., Denos, N., … Mocquet, B. Villiot-
Leclercq, E. (2012). DOCUMENT D’ACCOMPAGNEMENT Pour la mise en place du C2i CERTIFICAT
INFORMATIQUE ET INTERNET MIssion Numérique pour l’Enseignement Supérieur (MINES -DGESIP)
Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche . Consulté à l’adresse https://hal.archives-
ouvertes.fr/hal-01616182/document
En 2009, naissance de l’association Cocktail, Association de la communauté universitaire qui
propose une mutualisation aux universités pour améliorer la qualité de leur gestion. C’est une
alternative à l’AMUE qui se créé sous l’impulsion d’un petit groupe d’universités.


1.2.3 2010 à 2013: la politique numérique de l’ESR se distingue de celle[modifier]

de l’Éducation nationale
A partir du 20 juillet 2010, la SDTICE disparaît. C’est la sous-direction des programmes
d'enseignement, de la formation des enseignants et du développement du numérique, rattachée
à la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) pour le domaine de l’Éducation
Nationale, et la Mission Numérique pour l’Enseignement supérieur (MINES) rattachée à la
Direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP), qui
la remplace.
La MINES a pour mission « d’impulser, de soutenir et de déployer l’offre numérique
française » qu’elle soit « sous forme de certifications, de standards, de services, de ressources
pédagogiques ou de formations. », elle est « au service du partage de valeurs et de savoirs
communs, de l’égalité des chances et d’une économie de la connaissance maitrisée »70
En 2010, Le C2i2 "enseignant" devient obligatoire pour enseigner, « l'acquisition du C2i2e
poursuit l'objectif d'offrir à chaque étudiant se destinant aux métiers de l'enseignement
scolaire, de l'enseignement supérieur et de la formation, la reconnaissance des compétences
nécessaires en vue de son insertion professionnelle. »71.
Champ de formation Nombre de projets
Sciences humaines et sociales 12
Sciences de la matière et ingénierie 9
Sciences de la vie, santé, agronomie, écologie. 6
Projets et dispositifs pluridisciplinaires 10
Tableau 3 : Répartition par champ de formation des projets IDEFI lauréats.
En 2011, l’agence nationale de la recherche (ANR) lance dans le cadre du grand emprunt les
Initiatives d'excellence en formations innovantes (IDEFI). Cet appel à projets vise à soutenir
70 MINES. (2010). Plaquette e-formations MINES. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.unit.eu/sites/default/files/plaquette_e-formation_MINES.pdf
71 MENSR. (2010). Certificat informatique et internet de l’enseignement supérieur C2i2E. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://www.education.gouv.fr/cid54844/esrs1000461a.html
des projets emblématiques et innovants en matière d'enseignement supérieur72. Doté de 150
Millions d'euros, l'appel à projets IDEFI permet un soutien pluriannuel et finance 37 projets
de formation, sur les 58 projets présélectionnés (Tableau 3).
En 2011, les C2i1 et niveau 2 sont regroupés en une seule circulaire73, sous l’appellation C2i.
Les spécialités apparaissent en remplacement des multiples C2i2.


1.2.4 2013 à aujourd’hui : la politique numérique de l’ESR est renforcée[modifier]

La loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche a donné une
impulsion décisive, en inscrivant le numérique comme levier d’une Université en mouvement.
La création statutaire d’un « vice-président en charge des questions et ressources
numériques »74 dans une logique de site apparaît. Certains Présidents nomment des Vice-
présidents en charge du numérique (VpNum) au sein de leurs universités.
En octobre 2013, création de France Université Numérique (FUN) : 18 actions pour
développer le numérique dans l'enseignement supérieur, parmi ses actions la création de la
plateforme de MOOC (FUN-MOOC).
La même année est créé le dernier C2i2, spécialité « Fonctions des organisations et
communication »75 (C2i2FORCOM). Il s’adresse « aux étudiants de licences ou de masters,
en particulier de Lettres, Arts, Langues, Sciences Humaines et Sociales, pouvant être amenés,
à l'issue de leurs études, à exercer des fonctions d'organisation et de communication ainsi
qu'aux professionnels en activité. »
En 2014, la Conférence des Présidents d’Université crée le « réseau des référents
numériques », un réseau composé des DSI, des chargés de missions et des vice-présidents
s’occupant des questions du numérique dans les établissements du supérieur.
En 2015, l’ANR propose un appel d’offre IDEFI-N qui « vise à soutenir une quinzaine de
projets ambitieux pour amorcer une dynamique nouvelle de transformation de l’offre de
formations numériques dans l’enseignement supérieur français ». 10 lauréats seront retenus.
72 Initiatives d’excellence en formations innovantes (IDEFI) | ANR - Agence Nationale de la Recherche. (2015).
Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.agence-nationale-recherche.fr/investissements-d-
avenir/appels-a-projets/2011/initiatives-dexcellence-en-formations-innovantes-idefi/
73 ESRS1115909C - ESR  : enseignementsup-recherche.gouv.fr. (2011) Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/pid20536/bulletin-officiel.html
74 LOI n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, 2013-660 (2013).
75 ESRS1315185C - ESR  : enseignementsup-recherche.gouv.fr. (2015). Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/pid20536/bulletin-officiel.html
En 2016, une association des Vice-présidents en charge du numérique est créée, elle vise à
valoriser que le numérique de l’Université s’établit au sein de l’équipe présidentielle appuyée
par une gouvernance du numérique. Elle verra sa création au RUE 2016 qui cette année seront
sur les 7 chantiers de la transformation numérique de l'enseignement supérieur : « la
formation initiale, la formation continue, la recherche, la dématérialisation, les questions
juridiques, les campus du futur et l’économie du numérique éducatif. »76
Mai 2016, une réflexion animée par le Conseil national du numérique à la demande de
Thierry Mandon, Secrétaire d'Etat chargé de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, et
d’un travail collaboratif avec les membres de l’ESR, permet la création d’un référentiel de
transformation numérique. La finalité est que « le numérique soit le levier d’une
transformation globale à l’échelle d’un établissement ou d’un site »77

1.2.5 Création d’une frise chronologique du numérique dans l’ESR[modifier]

En regroupant les informations collectées dans les paragraphes précédents, nous avons pu
créer une frise chronologique du numérique dans l’enseignement supérieur proposée en
ligne78. Cette réalisation a pu être réalisé au moyen d’une application en javascript qui
s’appuie sur un tableau collaboratif déposé sur un Google Drive. Cette procédure est
disponible au moyen d’un site intitulé TimelineJS79.
Le principe de ce travail est de mettre à disposition un outil de consultation en ligne
permettant de consulter les dates repères de la mise en place des dispositifs d’Etat incitatifs
pour les universités dans le domaine du numérique universitaire. Une partie de ce travail est
disponible en Annexe 1.
Cette frise disponible à l’adresse http://e-transformations.fr/wp/archives/350 évoluera
dorénavant en fonction de la création des dispositifs impactant directement le numérique dans
l’enseignement supérieur.
76 AEF. Dépêche AEF  : RUE 2016  : les 7 chantiers de la transformation numérique de l’ESR. le 25 septembre
2017 à l’adresse http://www.rue-aef.com/wp-content/uploads/DepecheAEF_RUE2016_les-7-chantiers-de-la-
transformation-numerique-de-lESR.pdf
77 Référentiel de transformation numérique de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. (2016) Consulté le
25 septembre 2017, à l’adresse https://data.enseignementsup-
recherche.gouv.fr/pages/referentiel_de_transformation_numerique/
78 Frise du numérique dans l’enseignement supérieur | E-transformations. (2015) Consulté le 25 septembre 2017à
l’adresse http://e-transformations.fr/wp/archives/350
79 Timeline JS3 - Beautifully crafted timelines that are easy, and intuitive to use. (2015). Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse https://timeline.knightlab.com/
Nous proposons figure suivante, la page d’accueil de cette application disponible sur le web.
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1.3 Effet de l’évolution des TIC dans le contexte de[modifier]

l’ESR
Comme nous le montrent les éléments recueillis dans cette première partie de notre thèse, le
système de l’ESR est en mouvement. Ce changement se caractérise de plusieurs manières que
nous souhaitons mettre en lumière ici. Nous l’avons vu, le nombre d’étudiant augmente,
l’Université se massifie. Les causes sont identifiées et multiples : l’augmentation
démographique de la France, l’attractivité du système universitaire français pour les
personnes issues des pays francophones, et l’augmentation du nombre de bacheliers, venant
de tous les baccalauréats, généraux, technologiques ou professionnels. A cela s’ajoute, le
souhait de considérer la mission formation des universités, non plus comme de la formation
initiale, mais bien comme une formation tout au long de la vie.
Nous retiendrons que les publics de l’Université changent.
Ceci incite l’Université à se repenser globalement mais aussi localement, par établissement ou
regroupement d’établissements. Enfin, la mondialisation des échanges oblige les universités à
considérer la formation à l’échelle planétaire, et interroge, aussi politiquement, l’État sur la
place de la France dans le monde.
Au sein de ce système en changement, nous avons observé le second mouvement, celui de
l’évolution sociétale des TIC. Pour nous, il a été pris en considération par l’État pour
l’Université durant la période étudiée. Des dispositifs d’incitation au développement des TIC
ont bien vu le jour depuis 1997. Ils ont été proposés aux universités, avec une logique, dans
un premier temps, centrée sur l’infrastructure et les outils, puis sur les usages, pour enfin, très
récemment, concerner des préoccupations de stratégie du numérique universitaire. La
première partie a été accompagnée par des subventions d’Etat plus importantes que pour les
autres parties.
Fort de cette constatation, nous souhaitons analyser davantage cet objet de recherche. Il nous
faut pour cela étayer notre raisonnement au moyen de théories disponibles dans le champ des
sciences de l'information et de la communication. C’est le rôle du cadrage de l’approche
conceptuelle.
2 Cadrage de l’approche conceptuelle : une
mobilisation pluridisciplinaire propre aux
sciences de l'information et de la
communication
« Pour moi, l'information est le contenu de la communication,
et la communication le véhicule de l'information »80
(Escarpit, 1992)
Afin de répondre aux interrogations soulevées par cette mutation des établissements de l’ESR,
nous avons mobilisé conjointement plusieurs courants de recherche fréquemment utilisés en
sciences de l'information et de la communication (SIC) : il s’agit bien d’une approche
pluridisciplinaire de notre objet de recherche que nous proposons, approche emblématique des
SIC. Par ailleurs, nous alternerons les approches analytiques et systémiques, qui pour nous
sont naturellement complémentaires, comme le sont le tout et les parties. Elles ne sont pas
opposables.
80 Escarpit, R. (1992). Interview de Robert Escarpit en 1992 par Jean Devèze/Anne-Marie Laulan. Les
Fondateurs de la SFSIC. Robert Escarpit. Paris .


2.1 Les Technologies de l'information et de la[modifier]

communication (TIC) , leurs effets et leurs usages
Les TIC ne peuvent plus être considérées seulement comme un objet technique d’étude. Nous
devons nous positionner dans une vision plus globale, en associant l’observation de leurs
effets sur la société, mais aussi la façon dont les individus s’en emparent et développent des
usages du numérique. Cette posture offre une vision plus conceptuelle des TIC, et permet
d’envisager une meilleure compréhension des différentes perceptions de cet objet de la part
des acteurs de l’Université.


2.1.1 Approche conceptuelle des TIC[modifier]

Nous reconnaissons que le vocable de TIC, constitue un terme générique renvoyant à
l’ « ensemble des technologies issues de la convergence de l'informatique et des techniques
évoluées du multimédia et des télécommunications, qui ont permis l'émergence de moyens de
communication plus efficaces, en améliorant le traitement, la mise en mémoire, la diffusion et
l'échange de l'information »81 pour reprendre la définition de l’Office québécois de la langue
française.
Elles furent très longtemps nommées NTIC, à cause de la nouveauté que représentait le
rapprochement entre l'informatique et les différents moyens de communication. Cette
nouveauté n’a plus lieu d’être en 2017 tant les TIC sont des technologies adoptées par la
société.
Alex Mucchielli, écrivant sur les NTIC82, nous rappelle qu’il s’agit bien d’un des domaines
des sciences de l'information et de la communication, et que nous pouvons approcher les TIC
au travers de la numérisation de l’information, « le point de départ », selon lui, l’interactivité
apportée par le multimédia mais aussi les réseaux techniques, dont Internet. Il insiste sur les
modalités communicationnelles (« dialogue avec l’ordinateur », « nouveaux langages et
nouvelles compétences ») de ces technologies. Il rejoint Pierre Levy sur la notion de
« cybermonde », un monde virtuel caractérisé par un « contenu immatériel et protéiforme des
banques de données (…) accessible à chaque possesseur d’un micro-ordinateur branché sur
81 Office québécois de la langue française. (2008). Technologies de l’information et de la communication.
Consulté 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.granddictionnaire.com/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=8349341
82 Mucchielli, A. (2006). Les sciences de l’information et de la communication. Hachette éducation.
les réseaux »83. Cette idée de nouveau monde, colonisé par « des aventuriers de la
connaissance »84 est aussi abordé par Dominique Nora.
De la même façon, Alex Mucchielli, nous invite à problématiser sur « les technologies
nouvelles et les possibilités de communication qu’elles offrent »85 : le champ d’analyse y est
large. Pour lui, la nature de la tâche réalisée, travail ou loisir, comme les modifications spatio-
temporelles, sont bouleversées. Il ajoute que « les rapports à l’écriture, à la lecture, à la parole,
à la présence vont aussi être bouleversés » au point de modifier nos apprentissages, nos
modalités d’échange au travail, et peut-être notre travail, ainsi que l’influence des pouvoirs en
place. Plus globalement, il nous invite à nous rendre compte que « la communication elle-
même (contenu, forme et modalité d’expression) en sera aussi affectée », et par voie de
conséquence la médiation de la culture qui pourrait en être faite.
Cette transformation, et les questions qui l’entourent, concernent pleinement les sciences de
l'information et de la communication (SIC). Et c’est bien sur les effets des TIC, que les SIC
prennent toutes leurs puissances d’approche. Pierre Lévy avance concernant la cyberculture
apportée par les TIC que « deux thèses s'affrontent à propos des effets des TIC »86. La
première concerne les « effets d'amplification des travers dénoncés à propos des médias », il
faut comprendre ici la perte de relation avec l’espace réel, le repli sur un privé limité en
relation. L'autre thèse nous convient davantage car il montre des ruptures plus
positives comme « la réanimation de la société civile, le renforcement du dialogue et de
l'initiative individuelle par l'interactivité »87. Nous estimons qu’il existe surtout des usages
différenciés et singuliers des TIC, différenciés par la singularité des individus qui les mettent
en œuvre et différenciés, aussi, par le contexte dans lequel cette technologie s’exprime.
Nous estimons que pour qu’un acteur social s’approprie cet objet de pensée, il se doit de lui
donner du sens. Les TIC sont généralement perçues comme un ensemble d’outils, des outils
tantôt concrets (le matériel, les logiciels) tantôt abstraits (cloud par exemple) pour les acteurs
sociaux. Nous pourrions rattacher à cet objet les diverses perceptions que la Société a des
TIC, et proposer d’en organiser les connaissances associées. Tenter cette démarche, c’est pour
nous aborder conceptuellement les TIC, selon un point de vue sociotechnique, en observant la
83 Levy. (1998). Qu’est ce que le virtuel  ? Paris: La Découverte.
84 Nora, D. (1995). Les conquérants du cybermonde . Calmann-Lévy.
85 Mucchielli, A. (2006). op. cit.p 63
86 Levy. (1998). Qu’est ce que le virtuel  ? Paris: La Découverte.
87 Mucchielli, A. (2006). op. cit.p 67
construction sociale des technologies88, c’est-à-dire les interactions entre la Société et le
monde technologique. Cette meilleure compréhension pourra permettre à chacun d’entre
nous de mieux percevoir la réalité en cherchant des modes de représentation connus, et
d’organiser cette connaissance, par exemple en catégorisant les informations recueillies.
C’est au travers des travaux de Piaget, sur la psychologie génétique, que nous allons pouvoir
trouver des éléments d’appui. Nous considérons que le sens des technologies est perçu
lorsqu’il y a assimilation de cette technologie. Cette assimilation apparaît selon Piaget
« lorsque des perceptions par elles-mêmes informes, et incapables de se compléter grâce à
des éléments tirés du même plan de réalité, viennent se mouler dans des schémas antérieurs à
l'expérience de l'ordre considéré et conditionnés par la structure de l'organisme. »89
Ainsi, nous considérons que l’assimilation des TIC passe par leur mise en œuvre dans un
contexte donné, une organisation, un corps de métier ou une communauté d’individus.


2.1.2 Les effets des TIC[modifier]

Pour reprendre des travaux de P. Chambat, nous pouvons analyser les effets des TIC à travers
un discours sur la technique, sur les objets ou sur le quotidien90. Ainsi, en saisissant l’un ou
l’autre de ces modèles, notre recherche pourra être classée « dans le paradigme de la diffusion
(la technique), le paradigme de l’innovation (les objets) ou le paradigme de l’appropriation
(le quotidien) »91.
Cette évolution des problématiques de recherche peut faire débat au point parfois d’opposer la
technique et le social, une logique déterministe à une logique organisationnelle. Nous
proposons de faire le tour de ces différents points de vue afin de pouvoir orienter nos
analyses.


2.1.2.1 Paradigme de la diffusion : la technique[modifier]
L’approche par la technique comme cadre de la position d’analyse fait apparaître une
position de certains chercheurs inspirée par les travaux de McLuhan, notamment sa théorie
88 Bijker, W. E. (1997). Of bicycles, bakelites, and bulbs: Toward a theory of sociotechnical change. MIT press.
89 Piaget, J. (1927). La causalité physique chez l’enfant: avec le concours de dix-sept collaborateurs (Vol. 4).
Librairie Félix Alcan.
321-322
90 Chambat, P. (1994). Usages des technologies de l’information et de la communication (TIC)  : évolution des
problématiques. Technologies de l’information et société.
91 Kane, O. (2013). Les usages des TIC entre analyse sociotechnique et théories de l’appropriation: état de la
littérature. Les enjeux de la communication. Libreville: Presses universitaires du Gabon , 23-42.
sur « le village global »92. Ces travaux défendent l’idée que la société à l’ère des médias se
resserre au point de revenir à « un retour au village tribal, mais à l'échelle planétaire, au
sens où la psychologie des individus changerait sous l’effet de la technologie ». La métaphore
du village est ici employée, au sens du rapprochement, il y aurait une proximité créée par les
liens entre les personnes dans l’usage des TIC. Nous pourrions retenir de cette thèse, proférée
en un temps où les TIC et la mondialisation n’existaient pas, comme une théorie mono-
causale affirmant que les moyens de communication structurent les sociétés.
En relevant le caractère univoque de la technique sur le social, d’autant plus forte que la
technique est nouvelle et que « ses usages pas encore stabilisés, ni même toujours repérables
dans le suivi des expérimentations »93, la tentation est alors grande de ne pas considérer les
usages mais bien les impacts et les enjeux de la technique sur la société. Nous constatons que
cette tentation fait naitre par opposition deux mouvements antagonistes : les technolâtres,
ceux pour qui il n’y a pas de progrès social sans évolution technique, et les techno-critiques,
qui réfutent que la technique améliore la société. Pour les technolâtres, les adorateurs aveugles
de la technique, il n’y a point de progrès sociaux sans évolution technique. Pour les techno-
critiques, le discours sur les TIC donne lieu à des propos tantôt alarmistes, catastrophistes94,
ou bien plus récemment critiques95. Jarrige par ailleurs, nous invite à reconsidérer, plus
globalement, le progrès apporté par la technique : « À l'encontre des discours des
modernisateurs gommant et simplifiant la complexité des pratiques artisanales pour imposer
leurs mécaniques, la main-d'œuvre défend la richesse de ses "savoirs gestuels" et de ses
cultures sensorielles ». Cette idée que la technique n’apporte pas que du progrès pour la
société avait déjà été évoquée par Ivan Illich qui développe le concept de « contre-
productivité » des techniques. Plus l’outil technique est puissant, plus il peut-être destructeur
pour la société selon lui : « L’outil peut croître de deux façons, selon qu’il augmente le
pouvoir de l’homme ou qu’il le remplace. Dans le premier cas, la personne conduit son
existence propre, en prend le contrôle et la responsabilité. Dans le second cas, c’est
finalement la machine qui l’emporte »96. Nous rejoignons parfois cette idée en débutant notre
journée de travail par l e dépouillement de plusieurs dizaines de mails arrivés durant une
92 McLuhan, M., & Fiore, Q. (1967). The media is the massage : An inventory of effects. New York: Bantam .
93 Chambat, P. (1994). op. cit.
94 Mercier, P.-A., Plassard, F., & Scardigli, V. (1985). La société digitale. Les nouvelles technologies au futur
quotidien. Barcelona.
95 Jarrige, F. (2016). Technocritiques: du refus des machines à la contestation des technosciences. la
Découverte.Chapitre 2,
96 Illich, I. (1973). La convivialité, trad. fse. Paris, Ed. du Seuil .
période de repos ou de congés, ou lors de difficultés à nous déconnecter d’Internet, une
nouvelle forme d’addictions.
Les techno-critiques ne sont pas de technophobes, ils ne s’opposent pas à l’utilisation de la
technologie, ne prônent pas un retour à l’éclairage à la bougie. Minoritaires dans la
communauté universitaire, ils développent une pensée critique qui doit nous amener à nous
interroger. Saisir les TIC par la technique, c’est accepter de saisir ces deux oppositions car
elles sont utiles à une bien meilleure compréhension : « l'euphorie technologique du moment
doit s'accompagner d'une pensée critique constructive »97. C'est cet effort de raisonnement
vers la pensée critique qui nous permettra d’aller au-delà de l'opposition basique entre « l'anti
technicisme ignorant » et le « technicisme intempérant » dont parlait Gilbert Simondon98.


2.1.2.2 Paradigme de l’innovation : les objets[modifier]
En considérant la deuxième position d’analyse s’appuyant essentiellement sur une approche
par les objets des sciences humaines, nous souhaitons ici porter notre regard sur « les
relations que les êtres sociaux que nous sommes, entretiennent avec les réalités matérielles,
en un mot avec les choses »99. Nous décidons de nous pencher sur la professionnalisation des
membres de l’ESR comme un objet d’analyse de relations entre les individus et l’objet ou
dispositif des TIC.
Ces phénomènes de professionnalisation sont envisagés à un niveau
macroscopique dans les travaux d’Askénazy sur l’intégration des TIC dans les filières de
l’ancienne économie qui s’appuient sur de nombreuses études de cas sociologiques. Nous en
retiendrons que « les facteurs humains » interviennent pour expliquer le succès ou l'échec de
l'introduction des TIC.
Cela nous amène à considérer nos métiers, tous nos métiers, de l’Université, et d’englober
tous nos usagers de ce service public, en formation, initiale ou continue, ou en recherche.
97 Usbek & Rica. (2015). Les ennemis de la machine. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://readymag.com/59683/
98 Simondon, G. (1958). Du mode d’existence des objets techniques.
99 Raffestin, C. (2003). Penser et classer dans les sciences humaines. Revue européenne des sciences sociales.
European Journal of Social Sciences , (XLI-127), 71-85. https://doi.org/10.4000/ress.508
Askenasy, P., Pitzalis, M., Walkowiak, E., & Waser, A. M. (2001). Effets de l’introduction des tehnologies de
l’information et de la communication sur le travail, les professions et les qualifications.


2.1.2.3 Paradigme de l’appropriation : le quotidien[modifier]
Selon la définition usuelle du mot usage, il s’agit du « f ait de se servir de quelque chose » et
« pratique habituellement observée dans un groupe, dans une société. »101.Dans son article
sur les « Usages prescrits ou annoncés, usages observés »102, Alain Chaptal nous rappelle en
citant Chambat que « L’usage n’est pas un objet naturel mais un construit social »103. Nous
distinguons alors comme l'analyse Chambat, trois conceptions différentes de l'usage, « comme
utilisation plus ou moins fonctionnelle et performante, comme expression plus ou moins
distinctive du statut social, comme assujettissement plus ou moins accentué à des normes
sociales ». C’est sur la première définition de cet usage, « utilisation plus ou moins
fonctionnelle et perform ante », que nous canaliserons notre analyse pour l’Université.
Il nous paraît important de nous entendre sur les usages du numérique. Dans « Penser les
usages des technologies de l’information et de la communication aujourd’hui : enjeux –
modèles – tendances » S Proulx, nous rappelle « qu’Internet transforme significativement les
conditions d’usage des technologies » et nous présente une « construction sociale de
l’usage»104. Cette construction repose selon lui sur cinq niveaux d’analyse :
  • L’interaction dialogique entre l’utilisateur et le dispositif technique ;
  • La coordination entre l’usager et le concepteur du dispositif ;
  • La situation de l’usage dans un contexte de pratiques (c’est à ce niveau que l’on
pourrait parler de l’expérience de l’usager) ;
  • L’inscription de dimensions politique et morale dans le design de l’objet technique et
dans la configuration de l’usager ;
  • L’ancrage social et historique des usages dans un ensemble de macrostructures
(formations discursives, matrices culturelles, systèmes de rapports sociaux) qui en
constituent les formes.
Certains chercheurs se demandent « si, au travers de leur impact sur les mécanismes de
coordination, les TIC ne sont pas devenues non seulement un support mais aussi un facteur
Larousse. (2014). Définitions  : usage - Dictionnaire de français Larousse. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/usage/80758
Chaptal, A. (2008). Usages prescrits ou annoncés, usages observés. Document numérique , Vol. 10(3), 81-106.
Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=DN_103_0081
Chambat, P. (1994). Usages des technologies de l’information et de la communication (TIC)  : évolution des
problématiques. Technologies de l’information et société.
Proulx, S. (2005). Penser les usages des technologies de l’information et de la communication aujourd’hui:
enjeux–modèles–tendances. Enjeux et usages des TIC: aspects sociaux et culturels , 1, 7-20.
important du changement organisationnel et, au delà, de l'efficacité des organisations »105.
Nous constatons que les investissements en TIC par les organisations constituent le plus
souvent un facteur de déclenchement ou d’accélération de ces réorganisations, ainsi nous ne
chercherons pas l’opposition dans notre discours mais bien la complémentarité des trois
approches durant notre recherche.


2.1.2.4 L’utilisation, les pratiques et les usages du numérique[modifier]
Dans le langage commun, l’utilisation, les pratiques et les usages peuvent avoir le même sens,
ce qui doit nous alerter lors d’observations et de restitution par les membres de la
communauté universitaire. D’un point de vue scientifique, nous ferons la distinction
proposée106 par Pierre-Michel Riccio, que l’utilisation est décomposée en deux composantes,
les pratiques et les usages.
Les pratiques « peuvent être décomposées en deux parties : la capacité à faire (ou
compétences) et le souhait de faire (ou volonté et motivation) » et nous nous appuierons sur
« le domaine des référentiels métiers, pour construire un modèle des pratiques
individuelles. »
Les usages « s’appuient sur l’ensemble des fonctions ou services mis à disposition des
acteurs ». Pour ce chercheur, les usages sont intimement liées aux tâches, autrement dit « ce
qu’un individu doit ou peut faire »107. Elles « peuvent alors être juxtaposées aux activités
pour comprendre l’impact de la contribution d’un individu aux objectifs de l’entreprise ou de
l’organisation. »

2.1.3 Sociologie des usages du numérique[modifier]

La sociologie des usages fait apparaitre la problématique de l’usage par rapport à la
technologie, car « l’usage et les usagers n’ont jamais été considérés comme prioritaires ou
e 108
fondamentaux dans la dynamique technologique du XX siècle » . Comme le rappelle Josiane
Jouët : « Les études de réception rendent mieux compte de l’épaisseur sociale de « l’usage »
Brousseau, E., & Rallet, A. (1997). Le rôle des technologies de l’information et de la communication dans les
changements organisationnels. Guilhon B. et alii, éds, Economie de la connaissance et dynamique des
organisations, L’Harmattan, Paris, 286-309.
Riccio, P.-M. (2013). Vers un modèle d’efficience des collectifs. Communication et organisation, (43), 37-46.
https://doi.org/10.4000/communicationorganisation.4107
Leplat, J., & Hoc, J. M. (1983). Tâche et activité dans l’analyse psychologique des situations. Cahiers de
psychologie cognitive , 3(1), 49-63.
Badillo, P.-Y., & Pélissier, N. (2015). Usages et usagers de l’information numérique. Revue française des
sciences de l’information et de la communication, (6). le 25 septembre 2017 à l’adresse
https://rfsic.revues.org/1448
car la réception devient appréhendée comme une activité complexe, mobilisant des ressources
culturelles et conduisant à une construction subjective du sens. »
Nous nous intéressons en conséquence à la sociologie des usages, et reprenons la proposition
de Breton et Proulx110, qui portent leur attention sur trois points d’entrée pour aborder l’usage
du numérique : la diffusion, l’innovation et l’appropriation. Cette approche est pour nous
d’une grande force car elle nous permet de nous intéresser à la façon de saisir « l’impact de la
technique sur la société et inversement » et « comment prendre en compte l’action du contexte
social sur le développement d’innovations techniques. »
Pour ces deux auteurs, l’approche de la diffusion repose sur le modèle d’adoption de
Rogers comportant plusieurs variables comme les innovations, la communication, la durée,
l’ensemble social, et suivrait pour les adoptants un processus typologique allant du
retardataire au précoce.
L’innovation et son approche pour ses auteurs reposent aussi bien sur l’approche
d’observation de création des innovations, en considérant aussi bien les réussites que les
échecs, et en cherchant les causes comme le faisaient Callon et Latour112, que sur les travaux
d’Akrich113 . Nous retiendrons de ces travaux, que « les utilisateurs [sont] des acteurs de
l’innovation » et qu’elle distingue entre autres, quatre formes d’intervention directe des
utilisateurs sur les objets techniques : le déplacement (l’action d’utiliser un objet technique
dans un autre contexte que celui pour lequel il a été créé), l’adaptation (l’action d’introduire
quelques modifications à un objet technique permettant un meilleur usage, sans changer la
fonction principale), l’extension (l’action d’ajouter des éléments à un objet technique afin
d’en augmenter le nombre de fonction) et enfin le détournement (l’action d’utiliser l’objet
pour une autre fonction que ce que le concepteur à penser).
Concernant l’appropriation, les deux auteurs s’appuient plus globalement sur la théorie du
philosophe et historien français Michel de Certeau, qui nous révèle que les « pratiques de tous
Jouët, J. (2000). Retour critique sur la sociologie des usages. Réseaux , 18(100), 487-521.
Breton, P., & Proulx, S. (2006). L’explosion de la communication: introduction aux théories et aux pratiques
de la communication. Paris: La Découverte.
Rogers, E. M. (2010). Diffusion of innovations . Simon and Schuster.
Callon, M., & Latour, B. (1986). Les paradoxes de la modernité. Comment concevoir les innovations?
Prospective et santé , 36, 13-25.
Akrich, M. (1990). De la sociologie des techniques à une sociologie des usages. Techniques et culture, (16),
83-110.
Akrich, M. (1998). Les utilisateurs, acteurs de l’innovation. Éducation permanente , (134), 79-90. Consulté le
25 septembre 2017 à l’adresse https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00082051/document
les jours qui, à cause de leur généralité et même de leur banalité, étaient invisibles »115. Un
objet technique approprié deviendrait ainsi indéniablement invisible aux yeux de son
utilisateur.
Dans le domaine des TIC, nous allons nous attarder davantage sur l’appropriation, au travers
des paragraphes suivants.


2.1.3.1 L’évolution des problématiques d’usages des TIC[modifier]
Devant la complexité de l’évolution des problématiques d’usages des TIC, Chambat propose
de combiner deux réflexions116 : celle sur la « validité des différentiations opérées par les
recherche sur les usages » et celle qui consiste « à différencier les diverses figures de
l’usager engagées dans la pénétration des TIC dans les pratiques sociales » sans rechercher
une définition consensuelle.
Dans la première, l’auteur nous invite à observer distinctement les situations d’usages,
personnelle ou professionnelle, les technologies employées (le comment de l’usage), les types
de pratiques (le pourquoi de l’usage), et enfin les formes de communication (avec qui).
Dans la deuxième, il s’agit de se projeter dans la dimension sociale de cet usage, en un
instant, aujourd’hui, et surtout à long terme. Cette réflexion fait ainsi apparaître une
construction des pratiques sociales sur un mode « de processus circulaire inscrit dans le
durée et se différentie selon la configuration du système d’acteurs et la nature de l’offre
technique mais aussi selon les formes et les contextes de l’appropriation sociale ». Nous
voyons bien ici apparaître un enjeu pour l’usager qui s’extirpe de la simple mise en œuvre de
l’outil, et de la position que le concepteur de cet outil a voulu restreindre vers une position
d’acteur, en capacité à proposer de nouveaux usages, des défournements parfois.
L’auteur relève un paradoxe à ce sujet, et nous invite à ce que les décideurs publics s’en
emparent : les TIC sont pensées dans une logique de marchandisation, reposant sur des
principes de mondialisation, laissant peu de place à une intervention publique, alors qu’elles
construisent une société d’individus. Dans le cadre de notre recherche, ce dernier point retient
particulièrement notre attention : le construit social proposé par les sociétés privées
conceptrices de dispositifs TIC, ne peut se construire sans une précaution publique, et peut-
être encore plus à l’Université, où se forment les futurs professionnels.
Marques, T. P. (2011). Introduction. Revue d’Histoire des Sciences Humaines , (23), 3-18. le 25 septembre
2017 à l’adresse https://www.cairn.info/revue-histoire-des-sciences-humaines-2010-2-page-3.htm
Chambat, P. op. cit.


2.1.3.2 L’intégration sociale des TIC[modifier]
Les études de Mallein et Toussaint notamment sur l’usage de TIC, ont démontré que
l’apparition de nouveaux usages se greffe sur le passé, sur la capacité des utilisateurs que nous
sommes à réutiliser des expériences d’usages antérieurs. Ainsi leurs travaux démontrent que
l’intégration sociale des TIC repose davantage sur « des significations d’usage projetées et
construites pas les usagers, sur le dispositif technique » que sur « ses caractéristiques
techniques intrinsèques et de ses performances ». Cette démonstration nous amène même à
mieux comprendre le rejet ou la répulsion de certains face à un nouveau dispositif
technologique, se trouvant au devant d’une offre dont ils n’étaient pas en demande.
Les auteurs proposent de considérer que l’arrivée d’une nouvelle technologie met en œuvre
deux logiques opposées et successives : l’idéalisation puis la banalisation de cette technologie.
Durant la première phase, une vision techniciste, nous retrouvons : l’idéalisation, la
substitution, la révolution sociale et l’identité passive. Durant la seconde, les concepts de
banalisation, hybridation, évolution et identité active apparaissent.
Nous voyons bien que deux logiques apparaissent et s’opposent, pouvant provoquer un
paradoxe pour l ’usager qui oscille entre passivité et activité.
Ce qui nous paraît exploitable pour nos travaux se trouve justement autour de ce paradoxe, ce
qui pourrait nous servir comme garde-fou pour des décisions prises concernant le numérique
des universités : il n’est pas pensable de déduire l’usage réel des TIC aux possibilités qu’elles
promettent et nous devons considérer que l’intégration des TIC n’est pas neutre, tant elles
apportent à la fois de contraintes et de possibilités qui influent sur les usages qui en sont faits.


2.1.3.3 Les significations d’usage du numérique[modifier]
Les travaux de Jauréguiberry sur les TIC nous invitent à mieux appréhender la signification
de leurs usages. Les études menées montrent que la singularité des usages suivrait des
logiques d’action sociale au nombre de trois. En effet, pour cet auteur, les usagers
alternent une logique d'intégration, être connecté pour garder un lien avec un groupe social
professionnel ou familial, une logique utilitaire pour devenir ou être efficace, et enfin une
logique critique, une prise de distance quant aux informations recueillies et d'autonomie.
L’usager se retrouve tour à tour lié à un groupe d’appartenance, à distance avec les contenus
dans un souci de gain en termes d’efficacité.
Mallein, P., & Toussaint, Y. (1994). L’intégration sociale des technologies d’information et de
communication: une sociologie des usages. Technologies de l’information et société, 6(4), 315-335.
L’usager développe ainsi « des conduites d'ajustement » reprises dans la figure suivante :
« zapper, qui est un appel à la fluidité, à l'immédiateté et à l'ubiquité ; filtrer, qui s'apparente
à une prise de recul rusée ; et préserver qui vise avant tout à défendre une authenticité. »
Figure 11 : Illustration de l’expérience du branché selon Jauréguiberry .
À la lecture de cette illustration, qui décrit les situations de connexion et les effets sur les
usagers, nous mesurons la complexité de perception d’un usager du numérique se retrouvant
au sein du numérique universitaire. Développer des usages du numérique reviendrait à
multiplier les situations de connexion, afin de mêler les trois types de logique, utilitaire,
intégrée et critique. L’expérience utilisateur parait ainsi primordial dans la mise en œuvre de
nouvelles TIC dans une organisation. D’un point de vue du pilotage du numérique
universitaire, nous devons prendre en considération que les « branchés » seront pour nous tour
à tour les étudiants, les membres de l’ESR, réunis sous l’appellation d’acteurs. Ces acteurs
développeront des significations d’usages différentes sur des outils qui pourtant leurs sont
communs : c’est un point crucial dans la compréhension de notre écosystème numérique.
Jauréguiberry, F. (1997). L’usage du téléphone portatif comme expérience sociale. Réseaux , 15(82), 149-165.
https://doi.org/10.3406/reso.1997.3061
2.1.3.4 Usage des TIC ou usage du numérique[modifier]
Nous employons parfois les TIC ou le numérique pour décrire ce que nous cherchons. Nous
relevons que l’étude réalisée sur la littérature scientifique entre 1990 et 2000 est
essentiellement sur les TIC. Les travaux sur le numérique sont plus récents, ils s’appuient bien
évidemment sur la recherche sur les TIC. En 2010, Bruno Bachimont propose de définir la
notion du numérique, entendu comme « un passage à la limite qui permet de reposer de
manière encore plus nette la confrontation de la promesse et de la menace »119. Le numérique
nous paraît correspondre à des problématiques plus contemporaines décrivant le second
mouvement dont nous parlions en introduction générale : l’appropriation par les individus qui
les utilisent.
Dans son article Instabilité et permanence des usages numériques Geneviève Vidal
revient sur une histoire de l’analyse des usages du numérique par la recherche. Pour elle,
l’analyse des usages suit l’histoire des technologies liées à l’objet informatique.
Figure 12 : Les TIC considérées parfois comme un système en boucle ouverte.
La recherche s’est concentrée tout d’abord sur une approche techno-centrée, appelé alors
dispositif TIC en prenant la posture du concepteur. Cette posture représentée sur la figure ci-
dessus, comme un système en boucle ouverte, a longtemps laisser penser qu’il fallait que
e
l’acteur s’adapte à l’outil. Depuis le début du 21 siècle, la recherche s’intéresse au récepteur :
« la recherche intègre la question des usages des medias et TIC »121.
En portant de l’intérêt sur le récepteur, nous estimons que nous mettons en œuvre une boucle
de régulation, qui permet de capter les besoins de l’usager, à posteriori de la conception, pour
modifier au besoin le dispositif, « contrairement aux outils de la précédente génération, les
nouvelles technologies introduites en entreprise s’accompagnent de peu de prescriptions en
Bachimont, B. (2010). Le sens de la technique: le numérique et le calcul . Encres Marines/Les Belles Lettres.
Vidal, G. (2013). Présentation  : Instabilité et permanence des usages numériques. Les Cahiers du numérique ,
Vol. 9(2), 9-9. le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/article.php?ID_ARTICLE=LCN_092_0009
Vidal, G. (2013). op. cit..
matière d’usage ou d’organisation du travail. »122. Ainsi cette structuration interviendrait en
tenant compte du besoin des usagers tout au long de l’appropriation de l’outil, ce qui met en
place une régulation dans le système ainsi constituée (figure ci-dessous). Les dispositifs
numériques « engendrent des interactions qui ne sont ni prévisibles, ni définies ex ante »123
alors que les dispositifs TIC « proposaient une forme de forma lisation ex ante de l’action
avec toutefois une coordination ex post par la hiérarchie »124.
Figure 13 : Le numérique, un système régulé.
Cet usage du numérique intègre aujourd’hui « l’illusion de participation » et renvoie à une
« utopie de pouvoir de l’usager », là où par ailleurs la recherche observait la réception.
L’usager du numérique est en droit de « s’opposer, de négocier avec l’émetteur », il devient
alors crucial de structurer le changement.


2.1.4 Frontières et usages des dispositifs numériques[modifier]

2.1.4.1 Des frontières dans les dispositifs TIC[modifier]
En reprenant le point de vue d’un constructeur de solutions informatiques concernant le
travail numérique à plusieurs, nous relevons la description de l’éditeur Microsoft pour qui les
questions de frontières sont des « limites statiques qui ne peuvent absolument pas être
dépassées »125 et les seuils comme des « limites configurables qui peuvent être dépassées si
des contraintes spécifiques l’imposent » doivent être abordés. En parcourant l’article, nous
comprenons bien qu’il s’agit de contraintes technologiques plus qu’humaines, ce qui réduirait
la perception de ce nouvel enjeu.
Benedetto-Meyer, M. (2017). Des outils numériques en quête d’inscription organisationnelle. Réseaux , (205),
203-233. Consulté à l’adresse https://www.cairn.info/revue-reseaux-2017-5-page-203.html p 210
Guesmi, S., & Rallet, A. (2012). Web 2.0 et outils de coordination décentralisée. Revue française de gestion ,
(5), p 142
Guesmi, S., & Rallet, A. (2012). Ibid , p 142
Microsoft. (2015). Limitations et frontières logicielles pour SharePoint 2013. Consulté le 25 septembre 2017
à l’adresse https://technet.microsoft.com/fr-fr/library/cc262787.aspx
Nous pouvons nous interroger sur la place de l’humain dans tout cela, et tout particulièrement
de sa culture, sur ces dispositifs TIC qui s’imposent à la vie numérique des sociétés, qui sont
conçus par des entreprises d’une autre culture que celle de ceux qui l’utilisent.
Nous proposons dans cette partie de nous focaliser sur la notion de frontières au sein des
dispositifs TIC.
L’ouvrage qui rassemble les travaux de la première conférence « Frontières Numériques »
tenue à Fès en 2012 nous propose de définir trois dimensions des frontières numériques :
celles de « l’identité et de l’humain », celle « dans l’Art » puis celles « de l’espace et du
savoir ». Nous ciblerons volontairement deux des trois dimensions dans cet article, et
n’aborderons pas volontairement le volet artistique.
Celle de l’identité et de l’humain permet donc d’appréhender l’individu, sa représentation
numérique, sa visibilité, son rapport avec l’autre dans une relation numérique.
Celle de l’espace et du savoir nous repositionne sur de nouveaux territoires, immatériels, avec
leur règles, leurs communautés, leurs codes, leur histoire, et plus particulièrement les espaces
de formations en ligne.


2.1.4.2 Des dispositifs numériques possédant des frontières[modifier]
Dans le cadre de l’objet de recherche qui nous intéresse, nous canaliserons aussi notre
attention sur la situation d’usage de la formation, et des plateformes TIC utilisées à
l’université. Les formations mêlant plusieurs langues ou plusieurs nationalités d’étudiants sont
d’autant de dispositifs de formation proposant des échanges entre cultures différentes. La mise
en place d’un espace de formation pose le problème de la dynamique de groupe et du travail
ensemble numériquement et cela quelle que soit la culture.
Plus généralement, il s’agit de focaliser notre attention sur des dispositifs d’apprentissage en
ligne, qui avec l’apparition des MOOC sur des plateformes mondialisées prennent de plus en
plus de place dans la diffusion des savoirs et de la formation.
Cette modalité de formation, basée sur des plateformes et mettant en œuvre une scénarisation
de ressources pédagogiques, est utilisée notamment sur les x-MOOC, au sens de Georges
Saleh, Bouhai, & Hachour. (2014). Les frontières du numérique . Paris: Editions L’Harmattan.
Bidet, A., Datchary, C., & Gaglio, G. (2017). Quand travailler, c’est s’organiser : La multi-activité à l’ère
numérique. Paris: Presses des Mines. le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://books.openedition.org/pressesmines/3431
Siemens qui « se concentrent sur la transmission de savoirs déjà existants »128, au travers
d’activité mettant en relation les apprenants. Dans les x-mooc, le travail en son sein a été
analysé par Mathieu Cisel, et il constate que le travail demandé aux apprenants est « réparti
entre les cours magistraux et les productions à rendre »129. Certaines de ces productions de
document numérique sont individuelles, d’autres sont collectives.
Cette production de document numérique au travers des plateformes d’apprentissage
s’explique par le fait que les enseignants utilisant ces modalités s’appuient sur un courant
130 131
pédagogique constructiviste (travail individuel) ou socioconstructiviste (travail à
plusieurs).
Nous retrouvons ainsi une situation demandant un usage du numérique à l’enseignant et aux
étudiants. Cette situation, nous l’appellerons « le travail numérique ensemble » sur des
plateformes mondialisées, travail réalisé par des individus qui peuvent être de différentes
cultures.


2.1.4.3 Travailler numériquement ensemble[modifier]
La notion de travailler numériquement ensemble regroupe, dans le cadre de la formation à
distance, toutes les activités numériques provoquées pour interagir entre participants sur une
plateforme. Cette interaction, peut-être « fonctionne lle et donc seulement machinique [mais
peut-être également] intentionnelle (du côté de l’humain) » 132.
Dans le cas de plateforme d’apprentissage, travailler numériquement ensemble c’est aussi une
modalité pédagogique. Une organisation conçue par les enseignants du projet pour permettre
de réaliser des activités d’apprentissage, d’atteindre un objectif.
Deux modalités pour travailler numériquement ensemble sont généralement proposées lors
133 134
des scénarios pédagogiques : le travail collaboratif et le travail coopératif cela de façon
complémentaire, non opposée.
Siemens, G. (2012). elearnspace. Connectivism: A Learning Theory for the Digital Age. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://www.elearnspace.org/Articles/connectivism.htm
Cisel, M., & Bruillard, E. (2013). Chronique des MOOC, 19. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://sticef.univ-lemans.fr/num/vol2012/13r-cisel/sticef_2012_cisel_13r.htm
Piaget, J. (1923). La langage et la pensée chez l’enfant: Études sur la logique de l’enfant.
Doise, W., & Mugny, G. (1981). Le développement social de l’intelligence (Vol. 1). InterEditions Paris.
Jeanneret, Y. (2007). Y-a-t-il (vraiment) des technologies de l’information?: Nouvelle édition revue et
corrigée (Vol. 23). Presses Univ. Septentrion.
Silva, F., & Ali, A. B. (2010). Emergence du travail collaboratif  : Nouvelles Formes d’Organisation du
Travail. Management & Avenir , 36(6), 340-365. le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.cairn.info.ezproxy.univ-perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=MAV_036_0340
En scénarisant son cours, l’enseignant, devient le designer de son espace et le manager de
l’organisation du travail sur ses plateformes en ligne. Ainsi « apparaissent de nouvelles
formes d’organisation du travail » (NFOT) où « les technologies sont devenues un élément
structurant l’organisation du travail ainsi que sa nature » ; la stratégie des organisations
apparaît alors dans l’acte pédagogique de ces plateformes.
Ces deux modes d’organisation trouvent leur place dans le domaine de la formation en ligne.
Le travail collaboratif est une interaction intentionnelle provoquée par l’enseignant pour
permettre la construction d’une connaissance, d’une compétence. Dans le cadre de l’analyse
de ce processus, nous constatons trois étapes : le partage des informations, la décision de
l’organisation, et la production de document numérique. Cette décision d’organisation repose
sur la décision de chacun à contribuer à la globalité du travail. La finalité est bien la
production. Le travail coopératif est aussi une interaction intentionnelle provoquée par
l’enseignant pour permettre la construction d’une connaissance, d’une compétence. Dans le
cadre de l’analyse du processus, il s’agit que chacun des individus apporte une tâche après
partage équitable. La finalité est bien la division en tâches, désignant « ce qu’un individu doit
ou peut faire »137.


2.1.4.4 Les organisations de nos structures sont aussi culturelles[modifier]
Nous sommes conscients que les organisations dépendent aussi de la culture de ceux qui les
inventent. Dans Le choc des cultures, Richard D. Lewis, un linguiste, fournit un guide global
et pratique sur l’organisation du travail à travers les cultures138, en expliquant comment notre
propre culture, notre langue affectent la façon dont nous organisons notre monde, nous le
penser, le ressentons.
Dans le cadre de ce qui nous intéresse, nous allons observer son analyse pour les pays
susceptibles d’être sur cette plateforme, afin de détecter les éventuels communs (Figure
suivante).
Bardram, Jakob. (1998, septembre). Designing for the Dynamics of Cooperative Work Activities. Consulté le
25 septembre 2017 à l’adresse http://ojs.statsbiblioteket.dk/index.php/daimipb/article/viewFile/7066/6025
Charpentier, P. (2007). Management et gestion des organisations. Armand Colin.
Akoka, J., & Comyn-Wattiau, I. (2006). Encyclopédie de l’informatique et des systèmes d’information.
Vuibert.
Leplat, J., & Hoc, J. M. (1983). op.cit.
Lewis, R. D. (2005). When cultures collide: leading across cultures: a major new edition of the global guide
(3rd ed). Boston ; London: Nicholas Brealey International.
Figure 14 : Organisations par culture (Lewis, 2005).
A la lecture de cette proposition, nous constatons qu’il n’y a pas de communs dans les
organisations choisies et qu’il appartient aux concepteurs des espaces de formation de trouver
des modalités d’organisation pour faire apparaître des seuils et permettre ce travail numérique
ensemble.


2.1.4.5 Eléments de stratégies permettant d’optimiser la mise en place de dispositifs[modifier]
La collaboration, la coopération seraient alors envisageable même si les étudiants ne partagent
pas la même culture : il faudrait alors que le dispositif de formation TIC soit aussi en capacité
à construire les seuils.
S’il y a frontières, il peut y avoir rupture, nous pouvons nous interroger sur la place de la
fluidité dans les relations humaines. Joël de Rosnay nous propose deux parties sortes de
relations, celle du « rapport de force dont on ne peut sortir que par une escalade » et « celle
du rapport de fluidité, rapport d'échange d'informations, échanges de point de vue, échange
culturel »139. Ceci conduit à la société fluide, en utilisant la métaphore du surf, point de vue
que nous garderons dans cette partie. L’auteur nous propose aussi sept piliers de valeurs pour
favoriser cette fluidité : le respect de l'autre, l’altruisme, la responsabilité individuelle et
collective, l'empathie, l'amour confraternel et la spiritualité laïque.
Il s’agit ainsi de contourner la frontière des individus, de frontière numérique, de frontière
culturelle et de se positionner dans la création d’une organisation co-construite et de travailler
sur les valeurs proposées par De Rosnay, à savoir, la responsabilité individuelle et collective,
l'empathie.
Nous proposons que ces frontières culturelles, dans le cadre du travail numérique ensemble,
soient gommées par co-construction de l’organisation du travail, qu’il soit collaboratif ou
coopératif. Dumez et Jeunemaître définissent la frontière organisationnelle comme « un
mécanisme potentiel ou réel qui consiste à réguler les flux entre deux espaces hétérogènes et
à rendre ces flux visibles »140. Dans cet article « Méta-organisations et évolution des pratiques
managériales »141, « cette conception dynamique repose sur l’idée que les frontières d’une
organisation ne sont pas « naturelles » mais qu’elles sont issues de décisions », ainsi nous
proposons une répartition en organisation (Figure ci-dessous).
Niveau de décision
Niveau d'organisation
Niveau d'opérationnalisation
Figure 15 : Frontières organisationnelles.
Nous reprenons ainsi une représentation idéal-typique de l’organisation du travail, décomposé
en trois niveaux : le niveau de ceux qui décident de l’action à mener (niveau de décision),
celui de ceux qui organisent cette action en tâche (niveau d’organisation) et enfin ceux qui
opérationnalisent la tâche (niveau d’opérationnalisation).
Rosnay, J. de. (2013). Surfer la vie : Comment sur-vivre dans la société fluide. Arles; Montréal: Actes Sud
Editions.
Dumez, H., & Jeunemaitre, A. (2010). The management of organizational boundaries: A case study. M@ n@
gement , 13(3), 152– 171. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=MANA_133_0152
Leys, V., & Joffre, P. (2014). Méta-organisations et évolution des pratiques managériales. Revue française de
gestion , N° 241(4), 121-134. le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=RFG_241_0121
2.1.4.6 Construction de pistes de travail pour une stratégie d’organisation[modifier]
Cette proposition a été expérimentée à trois reprises (2013, 2014 et 2015) par nos soins lors
d’une formation auprès d’une vingtaine d’étudiants de la formation continue, tous et toutes de
la fonction publique territoriale142. Nous proposons de construire une modalité d’organisation
permettant à chacun des individus de co-construire l’organisation du travail numérique
ensemble.
Le travail numérique ensemble proposé ici est la synthèse d’un document long, plus de 80
pages, par une quinzaine d’individus. La finalité du travail est la rédaction d’une fiche de
synthèse courte (maximum 4 pages) à destination de chacun des individus ; cette fiche de
synthèse fera l’objet d’un contrôle de connaissance individuel oral.
Le groupe est invité à produire ce travail en un temps court, 2h en synchrone, organisation
comprise.
Les trois niveaux d’actions sont proposés en consigne afin de faciliter l’organisation, ils
reprennent les trois niveaux proposés ci-dessus. Le tableau ci-dessous est donné sans les
éléments
Mocquet, B. (2016). Frontières culturelles et usage des dispositifs numériques  : reflexions sur des stratégies
d’organisation pour travailler numériquement ensemble. In Hybridités, frontières et seuils L’ouverture des
espaces informationnels (Université de la Manouba Institut supérieur de Documentation Unité de recherche
« Bibliothèque numérique et patrimoine »). Tunisie.
Figure 16 : exemple de processus co-construit.
Cette co-construction (Figure ci-dessus) a permis aux groupes d’échanger sur les modalités
d’organisation et de confronter sa représentation du travail à réaliser. Certains d’entre eux
n’avaient jamais travaillé à plusieurs et se sont confrontés très vite à une exclusion.
Prendre en compte la méta-organisation dans un dispositif d’apprentissage en ligne
permettrait de contourner la problématique des frontières culturelles en proposant une co-
construction de l’organisation. Cette phase de décision mutuelle, permet de confronter les
cultures et les lisser par le dialogue, la négociation de chacun, faisant ainsi apparaître des
seuils acceptables par tous. Il en résulterait une fluidité dans le travail numérique ensemble.
Cette première expérience d’observation est plutôt concluante et mérite que cette hypothèse
perdure dans le design des activités menées sur des plateformes.


2.1.4.7 Vers quels usages observés allons-nous lors du travailler numérique[modifier]
ensemble
Le choix d’observation sera une « posture adéquate (…) qui consiste à s’appuyer sur des
protocoles d’enquêtes de terrain fondés, (…) sur l’observation, les entretiens q ualitatifs et
l’analyse de contenus sur les réseaux, tout en tenant compte des analyses socio-économiques
des industries de la communication numérique et des données quantitatives des différents
milieux qui constituent les réseaux numériques, faisant l’objet de l’exploitation des données
privées des internautes. »
Nous percevons alors dans la littérature un glissement vers un usage interactif, une attitude
critique de l’usager : nous prônons que l’usager du numérique aujourd’hui intègrerait les TIC
sans rejet, ni fascination.


2.1.5 L’Université et les TIC[modifier]

Le rapport entre l’Université et les TIC est vécu comme une action de rapprochement, de
comparaison en cherchant parfois une opposition. Perçu par certains des membres de
l’Université comme des multiples techniques informatiques, les TIC « se situent en effet aussi
sur le terrain de l'éducation en prétendant renouveler les modes d'accès à l'information et les
processus d'acquisition des connaissances, donc le rapport de l'élève au savoir, et, partant, le
rôle des enseignants. »144
Nous reprendrons cette idée que l’arrivée de cet objet sociotechnique au sein de cette
communauté universitaire, devrait provoquer une réaction professionnelle de ces membres :
pour nous, l’introduction TIC dans sa profession, invite chacune d’entre nous à reconsidérer
son métier. Cette réaction aboutit à « une remise en cause de l'éducation traditionnelle trop
éloignée des rythmes de l'économie moderne et de l'obsolescence rapide des savoirs. »
toujours selon Guilhot, au point de nous interroger sur le statut symbolique des enseignants
qui pourrait être remis en cause par la généralisation des TIC.
Pendant longtemps, nous avons pensé qu’il était évident que l’intégration des TIC à
l’Université relève certainement de « dispositions » au sens de Bourdieu mais l’histoire
nous montre que nous avons fait peut-être une omission : nous n’avons jamais autant parlé de
notre métier, la formation de nos étudiants, que depuis que les TIC sont entrées dans nos
établissements. En nous amenant à nous interroger sur le comment utiliser cet outil, nous
avons réinterrogé nos métiers : la « disposition » n’était pas que technique elle est bien plus
complexe que cela.
Les tâches incombant aux Sciences de l’information et de la communication nous semblent
lutter contre les fausses idées liés à l’arrivée d’une quelconque technologie dans la société.
Vidal, G., & Collectif. (2012). Sociologie des usages, continuités et transformations  : Traité des sciences et
techniques de l’information. Hermes Science Publications
Guihot, P. (1995). Système éducatif et TIC, une difficile rencontre. In Actes du colloque Ecole . p31-35
Bourdieu, E., 1998. Savoir faire. Contribution à une théorie dispositionnelle de l’action, Paris : Seuil.
Une des premières mauvaises idées serait d’analyser que la mise en place de cette technologie
en réduisant au domaine de la formation.. Une autre erreur pourrait être de réduire les TIC à
l’expression d’un dispositif technique reposant « sans inscription dans des idéologies et des
institutions »146. Pour cela, Bruno Ollivier nous invite à considérer les TIC comme des
« dispositifs techniques et politiques de développement, et d’observer quelles niches de
marché les universités visent avec les Technologies de l'information et de la
communication (…) et selon quelles alliances et quels discours. »147. Il faut donc aussi
s’intéresser « aux changements de métiers, les transformations dans la relation à
l’organisation universitaire comme dans toute organisation en recomposition » et à
« l’observation des nouveaux lieux et nouvelles formes sociales d’appropriation des machines
et des savoirs (accès, rôle des réseaux sociaux préexistants, lien avec des acteurs
sociaux) » selon les travaux de Jacques Perriault.
Ainsi pour parler de l’Université et des TIC, nous faisons le choix de penser l’Université dans
sa globalité, et non pas seulement dans la mission de formation, ou pour un corps des acteurs,
ceux qui enseignent. Les TIC à l’Université, que nous nommerons numérique universitaire
sont les TIC abordés par tous les acteurs de l’université, les étudiants, les stagiaires, et les
employés (enseignants, enseignants/chercheurs, chercheurs, vacataires ou titulaires).


2.1.5.1 Perception du numérique universitaire par les membres des universités[modifier]
Fort de constater que le numérique s’est substantivé depuis quelques années, au point que
pour Moatti le numérique substantivé « accompagne un mouvement sociétal plus global, celui
d’un désintérêt pour la science et la technique pourtant toujours plus présentes dans des
produits dont on ne s’intéresse qu’à l’usage »149. Le numérique ou le digital (mais nous
n’entrerons pas dans cette bataille sémantique, ce serait un autre sujet) employé par la rue ne
nous paraît exclusivement comme un désintérêt pour la science et la technique, il est devenu
un mot englobant plusieurs notions et concepts. Pour les universités, il nous paraissait
intéressant de nous entendre sur le vocable numérique employé par les acteurs.
Debray, R. (1997). Transmettre. Paris: Odile Jacob. p.78
Ollivier, B. (1998). Les technologies de l’information et de la communication dans les systèmes éducatifs
universitaires. In 5ème Congrès franco-brésilien des SIC. p152-162
Perriault, J. (1996). La communication du savoir à distance: autoroutes de l’information et télé-savoirs.
Editions L’Harmattan.
Moatti, A. (2012). Le numérique, adjectif substantivé. Le Débat , 170(3), 133-137. le 25 septembre 2017 à
l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=DEBA_170_0133
Plusieurs approches peuvent être abordées par les différents membres de l’Université, ce qui
nous affirme le côté polymorphe que les acteurs lui attribuent. Cette vision différente de
chacun des acteurs, doit être connue par ceux qui pilotent la stratégie numérique. Nous
collectons, à leur intention, quelques définitions recueillies auprès de plusieurs courants de
pensée antérieurs à sa position actuelle dans la société. Cette vision complémentaire de
chacun des membres contribue à définir le contour du numérique universitaire.
Les acteurs du numérique universitaire
Nous reprenons la distinction faite par Serge Agostinelli, entre les acteurs et les membres150.
L’acteur est compris ici comme l’acteur dans les dispositifs de TIC. Cette notion est
« fortement dépendante des processus dans lesquels ils sont impliqués : un acteur n’a pas
forcément le même rôle d’un processus à l’autre ». La notion de membre n’est pas utilisée en
référence à une personne, mais bien à « l’appartenance sociale à une groupe » Il se rapporte
« plutôt à la maitrise du langage commun »151, l’appartenance à une communauté et peut ainsi
témoigner lors d’observation par le chercheur « du savoir de sens commun de leurs affaires
quotidiennes en tant que phénomènes observables et racontables ».
Nous utiliserons alors le vocable d’acteur du numérique universitaire pour décrire tous ceux
qui ont une action sur les dispositifs TIC des universités (les usagers et employés/membres du
service public). Cette appellation sera parfois réduite à la notion d’acteur lors de nos écrits.
Le numérique, perçu comme un objet et un système technique
Dans « Mode d’existence des objets techniques »152, l’objet technique est défini comme en
interaction avec ce qui l’entoure. On retrouve cette notion dans un système technique, au sens
de Bertrand Gille, qui propose comme définition « un ensemble intégré qui lie les divers
aspects techniques d’une époque donnée et en circonscrit le cadre général, tout en marquant
ses limites »153. Ce système technique, évolue alors au gré de sa propre mutation
technologique, mais aussi de l’usage que l’on en fait et de l’appropriation de cet usage par la
société. Le numérique correspondrait à cette définition pour les plus « informaticiens »
Agostinelli, S., & Metge, M. (2009). le rôle des réseaux dans la dynamique d’adhésion ou de résistance au
changement. In L. Vieira & N. Pinède, Stratégie du changement dans les systèmes et les territoires (Presses
Universitaires de Bordeaux).
Sacks, H., & Garfinkel, H. (1970). On formal structures of practical action. Theoretical Sociology. New York:
Appleton -Century-Crofts, 338-366.
Simondon, G. (1958). op. cit.
Gille, B. (1978). Histoire des techniques  : Technique et civilisations, technique et sciences. Gallimard.
d’entre les acteurs de l’université, se rapprochant d’une définition de la filière professionnelle
du numérique.
Le numérique perçu comme un vecteur de la communication humaine
Un vecteur de la communication, au sens de Roman Jakobson, et son « schéma général de la
communication »154, schéma mettant en relation un émetteur et un récepteur, utilisant un
message dans un contexte donné, en maintenant un contact et en partageant le même code de
communication. Certains des acteurs possèdent cette vision du numérique relayée par un
usage des réseaux socionumériques, ou du courriel dans les interactions professionnelles. En
percevant le numérique exclusivement selon ce point de vue, nous trouvons que les acteurs
possèdent une vision réductrice, allant jusqu’à laisser de côté le volet informatique du
numérique. C’est sûrement la crainte exprimée par Moatti, que nous rejoignons ainsi.
Le numérique peut-être aussi perçu comme un territoire
C’est un territoire avec ses frontières, ses limites. Il y alors une analogie possible avec le
virtuel : cette terra incognita où chacun de nous est explorateur, voire « conquérant » selon
Dominique Nora155. Considéré comme un territoire qualifié de virtuel par Pierre Lévy, le
numérique est perçu comme un ensemble d’« espaces déterritorialisés des réseaux
informatiques » dans lequel l’acteur exprime une « extériorisation progressive de la vie
psychique et physique des êtres humains »156. Percevoir le numérique comme un territoire
inconnu, permet de nous référer à des pratiques humaines que l’Histoire nous rapporte : le
temps des pionniers, des colonisateurs, la découverte d’une nouvelle culture (cyberculture)…
Le numérique comme la forme d’un document
Dans la théorie du support, une théorie développée par Bernard Stiegler157 et Bruno
Bachimont158 nous retenons que « toute connaissance ne peut procéder que d’une inscription
sur un support matériel », et que ce support peut se trouver être numérique. Ce support prend
la forme d’un document numérique, dont l’auteur Roger T. Pédauque dégage une
méthodologie d’analyse en trois dimensions : « anthropologique (le document/forme comme
objet à voir), cognitif (le document/texte comme objet à penser) et social (le
Jakobson, R. (1981). Les fondations du langage . Paris: Editions de Minuit.
Nora, D. (1995). op. cit.
Levy. (1998). op. cit.
Stiegler, B. (2004). La technique et le temps, T. 3: Le temps du cinéma et la question du mal-être.
Bachimont, B. (2004). Arts et sciences du numérique: ingénierie des connaissances et critique de la raison
computationnelle. Mémoire de HDR .
document/relation comme objet à transmettre). »159. Percevoir le numérique universitaire au
travers des documents numérique à l’université nous permet d’appréhender l’enjeu au sein
des bibliothèques universitaires mais aussi « sa mise en jeu dans le contexte pédagogique »160.
Le numérique peut être perçu plus globalement comme un dispositif
Le numérique est « une affaire de dispositif, travaillée par trois logiques intrinsèques, ses
trois cohérences, interne, concrète et externe »161, ce dispositif n’est plus réduit à sa seule
expression technique mais est bien un tout.
Dans le cadre de dispositifs TIC dans le contexte de la formation, Monique Linard, propose
aux concepteurs de considérer le dispositif selon deux positions paradoxales « entre physique
et mental, en fait un objet épistémique idéal de manipulation et d'exploration, pratique et
théorique. » Alors c’est aussi un dispositif au sens de Michel Foucault « un appareil formé
d’une série de parties agencées entre elles de telle manière qu’elles influent sur le champ
d’action »163. Ce dispositif «englobe aussi bien les pratiques non discursives que les pratiques
discursives», il est par nature «hétérogène» puisqu’il comprend, toujours d’après Michel
Foucault, «les discours, les institutions, les dispositions architecturales, les règlements, les
lois, les mesures administratives, les énoncés scientifiques, les propositions philosophiques, la
moralité, la philanthropie, etc.».


2.1.5.2 Sociologie des usages du numérique dans l’ESR[modifier]
Nous abordons aussi plus particulièrement l ’usage du numérique dans le cadre de cette
recherche. Cet usage du numérique, est une « utilisation plus ou moins fonctionnelle et
performant »164 et « aujourd’hui intègrerait les Technologies de l’Information et de la
Communication sans rejet, ni fascination »165.
Pédauque, R. T. (2006). Le Document à la lumière du numérique: forme, texte, médium: comprendre le rôle
du document numérique dans l’émergence d’une nouvelle modernité. C & F Éditions.
Rouissi, S. (2004). Intelligence et normalisation dans la production des documents numériques : cas de la
communauté universitaire. Bordeaux 3. Consulté à l’adresse http://www.theses.fr/2004BOR30047
Bachimont, B. (2010). Le sens de la technique : le numérique et le calcul.
Linard, M. (2002). Conception de dispositifs et changement de paradigme en formation. Éducation
permanente , (152), 143-155.
Raffnsøe, S. (2013). Qu’est-ce qu’un dispositif? L’analytique sociale de Michel Foucault. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://www.academia.edu/3374779/Qu_est-
ce_qu_un_dispositif_L_analytique_sociale_de_Michel_Foucault
Chambat, P. (1994). op. cit.
Mocquet, B. (2014). op. cit. p6
Dans « Penser les usages des technologies de l’information et de la communication
aujourd’hui : enjeux – modèles – tendances »166, Serge Proulx nous rappelle « qu’Internet
transforme significativement les conditions d’usage des technologies » et nous présente une «
construction sociale de l’usage ». Il s’agit de mobiliser cette discipline afin de mieux
comprendre, d’expliquer cette vision du monde en nous concentrant sur les mutations
organisationnelles attendues et générées par l’arrivée du numérique dans certains
établissements de l’ESR en France. Serge Proulx relève plusieurs approches sociologiques
dans l’étude des usages, nous nous appuierons sur certaines d’entre elles pour construire notre
analyse. Nous retenons, ainsi :
  • une transformation des figures de l’usager dans le regard de l’observateur,
  • une complexification des conditions d’observation des situations d’usage,
  • l’appropriation, les détournements, des usages,
  • les équipements numériques et leur nécessaire innovation permanente,
Dans les établissements de l’ESR, nous retrouvons bien entendu la même énumération au sein
des dispositifs de formations internes proposés. Nous proposons que dans la suite de l’article,
les cinq niveaux d’analyse deviendraient alors :
  • L’interaction entre l’apprenant et les environnements numériques de travail, comme
« L’interaction dialogique entre l’utilisateur et le dispositif technique » ;
  • la coordination entre l’apprenant et l’enseignant comme « La coordination entre
l’usager et le concepteur du dispositif » ;
  • la situation de l’usage dans un contexte d’apprentissage, comme « La situation de
l’usage dans un contexte de pratiques (c’est à ce niveau que l’on pourrait parler de
l’expérience de l’usager) » ;
  • l’inscription de dimensions politique (l’accessibilité et la gratuité des outils utilisés) et
morale (le respect de la législation des ressources numériques) comme « L’inscription
de dimensions politique et morale dans le design de l’objet technique et dans la
configuration de l’usager » ;
Proulx, S. (2005). op. cit. p2
  • l’écosystème du numérique de l’ESR comme « L’ancrage social et historique des
usages dans un ensemble de macrostructures (formations discursives, matrices
culturelles, systèmes de rapports sociaux) qui en constituent les formes ».


2.1.5.3 Les attentes des usagers du service public des universités[modifier]
Nous constatons que la mise en œuvre des dispositifs d’État en faveur de l’implantation des
TIC dans l’ESR, rappelés ultérieurement, a reçu plus ou moins de succès auprès des usagers
du service public des universités, nos étudiants et stagiaires de la formation continue. Pour
autant, « les volontés politiques ne semblent pas faiblir dans ce domaine et s’accompagnent
de la production de guides à destinations des décideurs »167. Nous partageons l’avis des deux
auteurs, S. Rouissi et D. Paquelin : « la prise en compte des attentes mais aussi des pratiques
déclarées par les étudiants reste une préoccupation » aussi pour ceux qui pilotent le
numérique des universités, ajouterons-nous.
Récemment, l’IDEFI PaRé169, projet Parcours Réussite sélectionné par l’ANR dans le cadre
de l’appel à projets « Initiatives d’Excellence en Formations innovantes» (ANR-11IDEFI-
0028) de l’Université de Poitiers travaille sur un observatoire des usages dans l’ESR.
Cet observatoire (Figure suivante) a proposé une enquête sur les usages des étudiants de L1-
L2 et M1 entre fin 2013 et début 2014, et nous permet de nous projeter dans une analyse des
usages réalisés par les étudiants durant leur cursus.
Rouissi, S., & Paquelin, D. (2012). Les universités à l’ère du numérique  : pratique et attentes des étudiants. In
N. Akam, C. Lishou, & L. Vieira, TIC et gouvernance universitaire. Presses Universitaires de Dakar.
Rouissi, S., & Paquelin, D. (2012). Ibid p 45
Université de Poitiers - IDEFI Paré - Le projet. (2014) Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://pare.univ-poitiers.fr/idefi-pare-le-projet-l-equipe/le-projet/
Figure 17 : IDEFI PaRé de l'Université de Poitiers.
Les éléments de notre énumération sont confirmés par l’enquête de cet observatoire des
usages du numérique : les cinq niveaux d’analyse de Proulx y sont repérables, et nous
pouvons en proposer une synthèse dans le dans un contexte d’apprentissage, c’est-à-dire en
retirant les pratiques numériques « jouer », « usages administratifs ».
Interaction entre La La situation de L’inscription L’écosystème
l’apprenant et les coordination l’usage dans un de dimensions du numérique
environnements entre contexte politique de l’ESR
numériques de l’apprenant d’apprentissage (l’accessibilité
travail et et la gratuité
l’enseignant des outils
utilisés) et
morale (le
respect de la
législation des
ressources
numériques)
Accéder à ses OUI OUI OUI OUI OUI
cours
Communiquer OUI OUI OUI NON OUI
en réseau
Communiquer OUI OUI OUI NON NON
entre individus
Consulter des OUI OUI OUI OUI OUI
fichiers
Produire des OUI OUI OUI OUI NON
documents
Rechercher et OUI OUI OUI OUI OUI
accéder à des
documents
Utiliser des OUI NON OUI OUI NON
logiciels
Utiliser les OUI OUI OUI OUI OUI
services de
l’Université
Tableau 4 : Usages du numérique de PaRé au regard des cinq niveaux d’analyse des usages du numérique
de Proulx
Cette représentation fait apparaître que les données fournies par l’enquête réalisée par l’IDEFI
Paré, notamment la qualification des usages du numérique en tâches élémentaires (accéder
aux réseaux, communiquer en réseau, rechercher et accéder à des documents, utiliser les
services de l’Université), et en tâches complexes (communiquer entre individus, produire des
documents, utiliser des logiciels) permettent de développer des usages du numérique. Il
apparaît aussi que les approches « L’inscription de dimensions politiques » et « L’écosystème
du numérique de l’ESR » semblent être moins mobilisées dans les pratiques observées.
Dans le contexte d’apprentissage, ce que nous souhaitons particulièrement analyser dans un
de notre terrain d’observation, les pratiques repérées par cette étude montrent bien qu’elles
concourent au développement des usages du numérique, au sens de Proulx.


2.1.6 Vers des conditions d’émergence d’une culture du numérique[modifier]

universitaire
Les membres (enseignants, enseignants/chercheurs, chercheurs, personnels ingénieurs,
administratifs, techniques, sociaux et de santé et des bibliothèques) et les usagers (étudiants de
formation initiale et stagiaires de la formation continue) sont tous des acteurs du numérique
universitaire. Ils se retrouvent à mettre en œuvre conjointement des usages du numérique au
sein du même système d’information (SI) : nous pensons qu’il s’agit d’un contexte tout çà fait
favorable à l’émergence d’une culture numérique universitaire.
Nous pouvons proposer que la culture numérique universitaire peut se construire comme une
culture technique selon trois polarités complémentaires pour reprendre le philosophe des
sciences Philippe Roqueplo170. La première concerne « les conditions culturelles internes
nécessaires au fonctionnement de l’appareil de production » de l’université ; où comment les
acteurs du SI de l’université développent une culture technique propre. La deuxième est
« l’ensemble des connaissances et savoir-faire nécessaires à tout un chacun pour
s’approprier et maitriser son propre environnement », nous parlerons d’usages du numérique
universitaire indispensables aux acteurs et aux usagers de ce service public (une situation
d’apprentissage, un appel projet à rédiger entre collègues,…). Et enfin, « la conscience
historique et sociale des conditions dans lesquels s’est constitué notre monde matériel et
concret ». C’est sûrement la dimension la plus culturelle au sens de la définition de dite
Roqueplo, P. (1983). Penser la technique: pour une démocratie concrète (Vol. 44). Seuil.
Mexico de l’Unesco : « ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et
affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les
lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l’être humain, les systèmes de valeurs,
les traditions et les croyances. » Elle permet à chacun des acteurs de « comprendre
pourquoi les choses sont ce qu’elles sont et évoluent comme elles évoluent »172. Sur ce dernier
point, nous pensons que ceci nous amène à la constitution d’une culture que devrait posséder
ceux qui participent à la gouvernance du numérique.
Dans ce contexte universitaire, et plus particulièrement l’analyse de référentiel de certification
des compétences numériques, Devauchelle, Platteaux et Cerisier, proposent que « p arler de
culture numérique revient alors à articuler plusieurs éléments. »173. Cette culture numérique
est pour ces auteurs « définie par les compétences mobilisées dans les usages, évacuant les
dimensions relatives aux valeurs et aux croyances..»174
L’enjeu pour une nouvelle gouvernance est bien de percevoir que « les trois définitions
proposées peuvent concerner des catégories bien distinctes de gens qui se demandent (…)
comment il a été fabriqué, comment on s’en sert, quand, où et pourquoi il a été inventé »175 et
que ces gens travaillent ensemble parfois sur les mêmes dispositifs TIC.


2.2 L ’Université considérée comme organisation[modifier]

Nous reconnaissons en l’Université les traits d’une organisation, qui peut se caractériser
conceptuellement selon trois caractéristiques communes à toutes les organisations selon
Dortier : « les missions explicites » (former, rechercher et insérer professionnellement ses
usagers du service public), « la division des tâches en fonctions spécialisées » (la répartition
en service, en communauté,…) puis « la présence d’une hiérarchie et de règles formelles de
fonctionnement » (la Présidence, la Direction et la gouvernance).
Nous reconnaissons le besoin de détenir une succession d’analyses complémentaires pour
mieux appréhender les organisations dans leur ensemble.
UNESCO, Déclaration de Mexico sur les politiques culturelles , Conférence mondiale sur les politiques
culturelles Mexico City, 1982.
Roqueplo, P. (1983). Ibid. p125
Devauchelle, Bruno, Platteaux, Hervé, Cerisier, Jean-François (2009), "Culture informationnelle, culture
numérique : tensions et relations. Le cas des référentiels C2i niveau 2", Penser la culture informationnelle, Les
cahiers du numérique. P 54.
Devauchelle, Bruno, Platteaux, Hervé, Cerisier, Jean-François (2009), Op. cit. p 57.
Jacomy, B. (1993). Culture technique de l’ingénieur. Technique de l’ingénieur.
Dortier, J.-F. (2013). Le Dictionnaire des sciences sociales . Sciences Humaines.
Les travaux académiques sur les organisations sont nombreux. Les universités sont des
« organisations éducatives complexes » pour reprendre Anne Bartoli et Ewango Chatelet
qui considèrent (1) « qu’elles sont peuplées de professionnels dont les missions et les activités
sont profondément diverses et variées dans le temps » et que (2) « l’articulation des multiples
niveaux de régulation (établissement, discipline, nation, scène internationale, etc.) est
particulièrement délicate » Nous souhaitons ici éclairer les positionnements que nous
prendrons pour mieux appréhender cette organisation singulière qu’est l’Université. Pour
nous, cette singularité s’appuie, aussi, sur le mode de désignation de la hiérarchie, la
Présidence, qui se fait par élection entre pairs et non pas par les usagers du service public,
comme dans d’autres organisations publiques.


2.2.1 L’organisation : une vision mécanique[modifier]

La première phase d’approche s’appuie sur une analyse mécanique des organisations, qui
peuvent nous paraitre « bien huilées » pour reprendre une image post révolution industrielle.
Cette perception, telle une machine, est apparue pour mieux comprendre les grandes
e e
entreprises industrielles au passage du XIX au XX siècle, à travers l’organisation
scientifique du travail de Taylor. La décomposition du travail est faite en tâche individuelle
pilotée uniquement par la direction, sans feedback des individus qui deviennent ainsi
exécutants. La seconde phase d’approche des organisations s’appuie sur une observation de la
« fonction d’administration » des organisations. L’analyse se porte alors sur les modalités
de planification, de commandement, de direction, et de régulation de l’activité. Enfin, ou
plutôt en complément, une troisième approche mécanique repose sur la théorie de la
bureaucratie181. Elle nous permet d’apporter une analyse d’un point de vue de la sociologie
des organisations. Cette théorie, un idéaltype, défend l’idée que les individus d’une
organisation, les agents, appliquent les ordres d’une direction, en respectant le contrat de leur
fiche de poste.
Bartoli, A., & Ewango-Chatelet, A. (2016). Quels processus de déploiement des initiatives innovantes dans
les organisations éducatives complexes ?, How do Innovative Initiatives Spread In Complex Educational
Organizations ? Gestion et management public, me 5 / n° 1(3), 25-44. Consulté à l’adresse
http://www.cairn.info/revue-gestion-et-management-public-2016-3-page-25.html
Musselin, C. (2005). Le marché des universitaires: France, Allemagne, États- Unis. Presses de Sciences Po.
Taylor, F. W., & Chatelier, L. (1911). Principes d’organisation scientifique des usines . Dunod et Pinat.
Morgana, L. (2012). op. cit.
Weber, M., Braam, A., & de Blok, J. J. M. (1972). Gezag en bureaucratie. Universitaire Pers Rotterdam.
Ces visions de l’organisation prônent toute une efficacité de l’organisation, mais peuvent
ignorer le volet humain de ceux qui suivent les règles de ce type d’organisation : ne percevoir
les organisations uniquement de ce point de vue nous paraît utile mais cependant incomplet.


2.2.2 L’organisation : une vision plus humaine[modifier]

Percevoir l’organisation seulement vue d’en haut, le nez au-dessus de la « machine », comme
nous le présentions précédemment, offre un point de vue mais nous apporte des limites
puisque nous pouvons difficilement rendre compte du volet humain des organisations, et plus
particulièrement en ce qui concerne ceux qui ne pilotent pas les organisations. Ce paradigme
du bon fonctionnement de ces dernières, repose, selon Maslow, aussi sur le respect des
« besoins humains fondamentaux »182, comme la motivation ou bien l’accomplissement de
soi. C’est ainsi que l’efficacité de l’organisation peut dépendre aussi de tous les acteurs : elle
est alors considérée alors comme un système humain vivant, avec des acteurs en interactions.
Complétée par l’école des relations humaines, dont un des chercheurs en langue française est
G. Friedmann183, cette approche fonde les bases de la sociologie du travail. Une des
expériences emblématiques de cette école s’est déroulée au sein de Western Electric : l’attrait
porté par des chercheurs sur un groupe d’ouvriers témoin (qui n’a pas eu ses conditions de
travail améliorées par un meilleur éclairage des ateliers) augmente la productivité. Porter de
l’intérêt, recueillir des informations auprès de tous les acteurs, voici un point de vue qui
inverse le flux informationnel.
Pour reprendre Bernoux ces deux approches offrent une triple perspective « techniciste car
c’est l’organisateur qui pense le travail des individus et non eux-mêmes, individualistes car il
s’agit de l’épanouissement de chacun humaniste, car elles disent explicitement vouloir
l’épanouissement et le bonheur de l’homme »

2.2.3 Organisations, institutions et système[modifier]

Il nous faut aussi disposer d’une vision macro-sociale de l’ESR, chaque Université, chaque
COMUE, pouvant être pour nous un des sous-systèmes, un objet d’étude. Pour cela nous
Maslow, A. H. (1943). A theory of human motivation. Psychological review , 50(4), 370.
Georges, F. (1946). Problèmes humains du machinisme industriel. Paris, Gallimard , 287.
Bernoux, P. (2014). Sociologie des organisations. Initiation théorique suivie de douze cas pratiques (La):
Initiation théorique suivie de douze cas pratiques. Points.
faisons appel à l'approche englobante de Commons185. Bien qu’énoncé dans le domaine de
l’économie, la recherche des interactions dans les organisations de Commons nous attire, car
il fut un des premiers à réunir l'économie, le droit et l'éthique, une approche pluridisciplinaire,
c’est ce que nous retenons, pour analyser la création du capitalisme : les actions collectives
ayant autant d’importance que les actions individuelles.
Les actions collectives fondent l’institution qui contrôle l’action individuelle, cette même
action individuelle prenant la forme de transactions : marchandes, managériales, et
redistributives. Pour l’Université, nous pouvons difficilement faire un transfert total de ce
point de vue de chercheur, notamment pour le type d’interactions marchandes, mais nous
pouvons envisager qu’il existe bien des transactions d’organisations (management interne des
services de formation
r exemple), et des transactions redistributives (attribution de
reconnaissance financière ou avancement pour un travail donné).
De ce fait, chez Commons, « La société est un ensemble emboîté d'organisations actives au
sommet duquel figure l'État » : cette représentation nous paraît fort intéressante pour le
service public de l’ESR, qui de ce fait peut s’envisager comme un ensemble emboité
d’universités, de COMUE, actives, au sommet duquel se trouve le ministère de l’ESR, l’État.
Mais se limiter à la perception de Commons, pourrait obscurcir l’analyse des universités qui
sont constituées depuis tout temps comme une communauté d’individus, possédant un intérêt
commun, et qui fonctionne aussi sur des règles spontanées et des coutumes. North propose
ainsi de percevoir les règles qui constituent les organisations comme les « contraintes établies
par l'homme et qui structurent les r elations humaines »187. Il distingue ainsi les règles
produites avec une intention délibérée et celles produites par évolution à travers le temps : il
fait ainsi apparaître une classification binaire constituée des « contraintes formelles (règles,
lois, constitutions) et informelles (normes de conduite, coutumes, traditions, ...) : les secondes
sous-tendent et complètent à la fois les premières. »188
Nous retenons de ces deux points de vue que nous devons posséder une observation
permettant de regarder ces organisations comme des systèmes possédant des règles d’actions,
comme le pense Commons, ces mêmes règles étant formelles ou informelles, d’après North.
Commons, J. (1934). Institutional Economics: Its Place in Political Economy (Madison. University of
Wisconsin Press.
Chavance, B. (2001). Organisations, institutions, système  : types et niveaux de règles. Revue d’économie
industrielle, 97(1), 85-102. https://doi.org/10.3406/rei.2001.1801
North, D. C. (1990). Institutions, institutional change and economic performance. Cambridge university press.
Chavance, B. op. cit. p 99
En cherchant les règles sociales générales qui régissent les organisations universitaires, le
chercheur peut faire apparaître les pratiques d'interactions entre acteurs qui se déroulent dans
ou hors des organisations.


2.2.4 Une évolution des organisations[modifier]

Les organisations ne sont pas statiques, elles évoluent au fil du temps, pour des raisons qui
peuvent être évolutionniste ou évolutive, l’un est l’autre ont déjà été observés.


2.2.4.1 Approche évolutionniste ou évolutive des organisations[modifier]
Parler d’évolution, c’est pour nous faire un lien avec la théorie darwinienne de l’évolution.
Les organisations étant pour nous des systèmes vivants, nous pouvons porter un regard sur les
théories des biologistes. Pour Darwin, il existe quatre principes pour sa théorie de
l’évolution189.
Le première est qu’il existe bien « une compétition entre les individus car les ressources de
leur environnement sont limitées et les organismes produisent en général plus d’individus
qu’il ne peut en survivre. ». Cette compétition existe pour nous aussi pour les organisations
universitaires, les classements internationaux en sont une des preuves irréfutables.
La deuxième concerne « une variabilité interindividuelle au sein de chaque population.
Certaines de ces variations sont héréditaires. ». Ce point de vue rejoint notre perception du
volet humain des organisations : chacune d’elle étant constituée d’individus, ce principe
s’applique naturellement aux universités.
Le troisième est que dans un environnement donné, certains individus s’adaptent au point de
devenir plus efficaces que d’autres « dans la lutte pour la survie et la reproduction. ». Ce
principe nous paraît exploitable, au niveau de raisonnement de l’organisation qu’est
l’Université dans le système de l’ESR. En effet, pour durer, une Université ne peut seulement
compter à l’évolution de son propre destin : elle doit tenir compte des universités
avoisinantes, des regroupements, et envisager qu’elle peut disparaître en tant qu’organisation
indépendante.
Enfin, la quatrième principe, la sélection naturelle, celle qui fait que certains « individus
porteurs de traits avantageux se reproduisent plus qu e les autres et transmettent leurs traits
héritables à leur descendance. » nous paraît plus difficilement applicable aux niveaux des
Darwin, C. (1859). De l’origine des espèces par voie de sélection naturelle. On the Origin of Species by
Means of Natural Selection .
individus mais semble prendre une exploitation intéressante au niveau des règles qui les
régissent. La « sélection naturelle » permanente des bonnes règles et l'élimination des
mauvaises règles par les membres de l’Université est à la base de son évolution.
L’approche évolutive complète pour nous cette approche évolutionniste. En s’emparant du
paradigme évolutif, Van Griethhuysen reconnaît quatre avantages à développer cette pensée
« (1) elle propose une vision intégrée des interactions entre science, technique, société et
milieu naturel » ; (2) elle permet de situer l’origine des situations (…) et d’en préciser les
principales caractéristiques ; (3) elle propose une terminologie (…) comme mode de pensée
et de raisonnement et comme valeur et mode d’action sociale ; (4) elle permet d’entrevoir les
principales difficultés liées à la mise en œuvre institutionnelle (...) »190
2.2.4.2 Vers des règles d’évolution des organisations[modifier]
Le système observé peut ainsi être regardé statiquement, comme une photographie, mais aussi
dynamiquement, d’un point de vue évolutif, en cherchant les éléments qui les font évoluer.
Nous retrouvons cette approche dans les écrits précités de Chavance, qui définit un processus
stationnaire et un processus évolutif dans les organisations.
Pour le premier processus, le stationnaire, « les comportements individuels sont déterminés
par le cadre organisationnel et institutio nnel, les organisations se forment et évoluent dans le
cadre institutionnel, les institutions sont établies et se stabilisent dans le cadre du système,
c'est-à-dire d'une configuration donnée de règles générales. Ce processus stationnaire est
fondé sur un englobement hiérarchique déterminé de quatre niveaux. »
Nous pouvons voir sur la figure suivante que qu’il n’y a pas d’interactions entre le système
qui englobe le sous-système analysé et la circulation de l’information est exclusivement
descendante.
van Griethuysen, P. (2004). Pour une approche évolutive de la précaution. Revue européenne des sciences
sociales. European Journal of Social Sciences, (XLII-130), 35-70. https://doi.org/10.4000/ress.344
Figure 18 : Modèle stationnaire des organisations (Chavance, 2001).
Tout ce passe comme si ce dernier évoluait de façon stable dans le temps, avec ses règles
préétablies, dictées par ceux qui pilotent, non remises en cause par les individus.
Pour le deuxième processus, le processus évolutif, « il repose sur l'interdépendance et
l'interaction entre les niveaux et les formes de changement. Par opposition au processus
stationnaire, on peut représenter une ligne de causalité inverse, qui montre les répercussions
du changement ou de l'innovation, du niveau englobé vers le niveau englobant : la
modification des comportements individuels et collectifs conduit au changement
organisationnel ou institutionnel, l'action transformatrice des organisations fait évoluer le
cadre institutionnel, les mutations institutionnelles engendrent l'évolution, voire la
transformation du système. »
Cette modalité représentée figure suivante nous offre une vision plus négociée du sous-
système où à chaque niveau, des interactions existent et permettent une circulation de
l’information des individus vers le système et inversement.
Figure 19 : Modèle évolutif des organisations (Chavance, 2001).
Bien entendu, nous pouvons transférer cette représentation à notre objet d’étude, et ainsi
réinterpréter les deux modèles évolutifs des organisations proposés en retenant que ces deux
visions sont stéréotypiques et qu’il existe une multitude d’autre représentations des
interactions entre ses quatre éléments, Chavance reconnaît alors que « la hiérarchie
stationnaire des niveaux devient une hiérarchie enchevêtrée dans le processus évolutif, la
causalité simple devient une causalité circulaire, cumulative et complexe. ».
C’est donc un système dont l’organisation est constamment en mouvement que nous nous
préparons à observer.


2.2.4.3 Une régulation des usages du numérique à l’Université[modifier]
La « systémique » nous vient des sciences dites dures, plus exactement des biologistes qui
souhaitaient disposer d’une méthode globale, interdisciplinaire et pragmatique pour analyser
la complexité du monde vivant. Notre approche s’appuie sur la théorie générale des
systèmes191. Le numérique provoque davantage d’interactions entre les professionnels, entre
les usagers de l’ESR et leur contexte d’exercice de leur profession.
Bertalanffy, L. V. (1968). General System Theory: Foundations, Development, Applications (Revised
edition). George Braziller Inc.
Gouvernance
du numérique
Figure 20 : Régulation des usages du numérique.
Nous utiliserons le « macroscope » de Joël de Rosnay, cet outil pour voir le monde de haut et
dans sa globalité qui propose aussi cette vision pour « distinguer le complexe du
compliqué ». Plus trivialement, « on peut considérer la systémique, dans le champ de
l’humain et des organisations en tout cas, comme un ensemble d’idées et d’outils qui permet
de fonctionner au quotidien d’une façon plus profitable »193.
Ce qui pourrait caractériser cette méthode, c’est son côté exhaustif et non agrégatif des choses
et des humains qui composent le système. Ce système est un assemblage de parties en relation
les unes avec les autres qui forment un tout, « ce qui est tissé ensemble »194. Pour autant
comprendre chaque élément du tout ne suffit pas, il faut en mesurer les interactions et la
finalité globale du système pour le comprendre.
Nous entendrons « système » au sens de Joël Rosnay, « ensemble d’éléments en interaction
dynamique, organisée en fonction d’un but ». Il s’agira bien ici de l’Université dans le cadre
de certains terrains, et du système de l’ESR dans d’autres. La régulation, au sens de
Dominique Beriot est une « action qui s’exerce par des rétroactions positives et négatives et
qui visent à réduire les écarts entre objectifs fixés et résultats atteints »196. Dans cette
configuration une gouvernance se retrouve à l’articulation de la régulation de l’Université qui
souhaite, ou doit par injonction des textes officiels, développer les usages du numérique.
Rosnay, J. de. (1977). Le macroscope - Vers une vision globale. Paris: Seuil.
Benoit, D., & Perez-Benoit, F. (2006). L’Intervention Systémique Brève (Vol. Vol. XII). ESKA. Consulté le
25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=RIPS_026_0097
Morin, E. (2014). Introduction à la pensée complexe . Paris: Points.
Rosnay, J. de. (1977). op. cit.
Bériot, D. (1992). Du microscope au macroscope: l’approche systématique du changement dans l’entreprise.
ESF éd.


2.2.5 L’Université comme organisation apprenante[modifier]

Pour Garvin, une organisation apprenante est « une organisation capable de créer, acquérir et
transférer de la connaissance et de modifier son comportement pour refléter de nouvelles
connaissances »197. La démarche qu’il suggère propose cinq points de travail des
organisations pour devenir apprenante.
Les quatre premiers correspondent bien à notre avis aux activités d’organisations évolutives :
(1)« la résolution de problèmes en groupe », en proposant de faire participer chacun des
acteurs aux décisions, (2)« l 'expérimentation par des projets » en mettant en œuvre une
organisation de financement par projet, les appels à projets recherche BQR par exemple,
(3)« la collecte d’informations pour tirer des leçons des expériences », en mettant en œuvre
au niveau de la direction un pilotage par les indicateurs (4)« l’intégration des tous pour mieux
comprendre à toutes les échelles de l’organisation », point cruciale de reconnaissance des
organisations évolutives.
C’est sur le dernier point de cette démarche, le (5)« transfert des connaissances » que nous
souhaitons faire inscrire en toute modestie notre démarche de recherche.


2.2.6 Une représentation systémique de l'organisation[modifier]

Dans le cadre d’une formation à l’ Université du Québec à Montréal, une organisation est
définie comme un système dans lequel on retrouve « un ensemble de composants inter reliés
et organisés en un tout, qui est séparé de son environnement par une frontière » 198. Ce
système transforme « des entrées en sorties (processus de transformation) pour réaliser la
mission/vision pilotée par des processus de management ». Nous pouvons ainsi adapter
l’approche systémique à toute organisation humaine, et plus particulièrement aux
établissements de l’ESR.
Plus exactement, cette formation en ligne propose que ces principaux composants qui
permettent d'envisager une organisation comme un système sont : « la frontière et interfaces,
l’environnement, les entrées et les sorties (les ressources), le processus de transformation et
le processus de management. »
Garvin, D. A. (1993). Créer une organisation intelligente. Harvard Business Review .
St-Amant, G. (2010). Formation à l’approche systémique de l’organisation. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.er.uqam.ca/nobel/r20014/ManTic/Approchesystmiquedelorganisation.html#Topic9
Figure 21 : Approche systémique de l’organisation (St-Amant, 2010).
  • L’environnement : « un ensemble d'acteurs qui ont une influence sur l ’organisation,
et/ou qui sont influencés par l’organisation »
  • La frontière : « les limites qui séparent l’organisation de son environnement »
  • L'interface est « la frontière commune entre deux systèmes. Elle permet des échanges
entre des systèmes. »
  • L’organisation est un système qui se compose de :
o La mission qui est « la raison d’être d’une organisation tandis que la vision
est la place que l'organisation veut occuper dans le «futur» »
o Les entrées : « l’ensemble des ressources qui proviennent de l’environnement
et qui seront transformées par le système qui va leur ajouter de la valeur »
o Les processus de transformation : « l’ensemble des activités (actions) qui
transforment des entrées en sorties pour atteindre une mission (la raison
d’être d’une organisation), »
o Les sorties : « l’ensemble des ressources produit par le système et qui sont
échangées et consommées par les acteurs de son environnement. »
o Les processus de management : « l’ensemble des activités et des décisions de
planification, de direction, d’or ganisation et de contrôle qui permettent la
coordination et l'intégration, grâce aux données de rétroaction, des entrées, du
processus de transformation, des sorties pour réaliser la mission. »
o la rétroaction est « un flux de données relatives à la performance du processus
de transformation. D'une part, la rétroaction informe le processus de
management sur la performance du processus de transformation et des sorties,
et d'autre part, transmet des décisions du processus de management au
processus de transfor mation pour s'assurer de la performance du processus de
transformation dans un environnement en évolution. »

2.3 Mobiliser l’approche complexe de la réalité[modifier]

Afin de mobiliser l’approche complexe de la réalité, nous mobilisons une approche
systémique, plus qu’analytique, basée sur la théorie de la pensée complexe. Cette vision
macroscopique nous permet de mieux appréhender la réalité. Nous l’accompagnons de la
notion d’acteur, fonctionnant en réseau. Enfin, convaincu de l’approche de l’École de Palo
Alto, nous portons notre regard sur les interactions entre les acteurs de ce système complexe.


2.3.1 Théorie de la pensée complexe[modifier]

L’objet de recherche, le numérique du système universitaire, ne peut se réduire à une analyse
consistant à regarder chacune de ses missions de services publics (la formation, la recherche
et l’insertion professionnelle) en relation avec les TIC, l’une indépendamment de l’autre. Si
l’on ajoute le caractère imprévisible de l’Humain au cœur de ce système, nous nous trouvons
devant un système que nous pouvons caractériser de complexe, au sens de Morin, le
« complexus », « ce qui est tissé ensemble »199.
Edgar Morin énonce dans introduction à la pensée complexe200, trois principes selon
lesquelles nous pourrions intellectuellement mieux percevoir les systèmes complexes. Le mot
complexité « ne peut qu'exprimer notre embarras, notre confusion, notre incapacité à définir
de façon simple, à nommer de façon claire, à ordonner nos idées » pour reprendre ce célèbre
chercheur. La science, longtemps positionnée sur une approche cartésienne, doit reconnaître
le complexe, et proposer des outils pour analyser le réel : la pensée complexe propose ainsi
une approche par plusieurs disciplines académiques et étudiant, aussi, les interactions entre
Morin, E. (1990). op. cit.
200 Morin, E. (1982). Science avec conscience. Paris, Fayard.
elles. Morin nous invite donc à laisser de côté le paradigme cartésien (disjonction, réduction
et simplification) et nous engage vers un nouveau paradigme, défini par quatre notions
(ordre, désordre, interaction et organisation) basé sur trois principes complémentaires.
Le premier principe, est le « principe dialogique » : deux notions ou principes semblent
s’opposer à première vue, mais finalement elles sont intimement liées et permettent de
comprendre une même réalité. Ce premier principe mobilisé intellectuellement doit nous
permettre d’isoler deux notions, de les garder en ligne de mire de notre analyse des terrains et
en déduire une meilleure compréhension du réel. Il peut être ainsi intéressant de rapprocher
gouvernance du numérique et usages du numérique, efficience et service public.
Le deuxième est le « principe récursif », qui s’explique en ce sens où le système
s’autoalimente et s’autorégule de ces propres informations : la cause et l’effet s’entretiennent
mutuellement. En isolant la boucle génératrice du développement des usages du numérique
dans les universités, nous proposons de repérer ce qui provoque ces usages, les situations
d’enseignement par exemple, et de constater que ces situations sont aussi le lieu de
développement des usages. De cette machine à réguler, que sont les organisations humaines,
Edgar Morin retient l'idée de rétroaction empruntée à la cybernétique Norbert Wiener201. La
cybernétique revendique un examen de l’objet ou du sujet sous l’angle de l’information. Cette
vision transdisciplinaire revendique que les organisations sont mécaniques, autogouvernées, et
disposent de dispositifs de contrôle intrinsèques qui fonctionnent comme des régulations sur
le système.
Enfin le dernier, le « principe hologrammatique » s’appuie sur le fait que l’ensemble du
système est un tout, qui peut être observé en tant que tel, et que chaque partie de cet ensemble
est aussi un tout. En terme d’organisations, nous retenons que la complexité organisationnelle
du tout nécessite la complexité organisationnelle des parties, laquelle nécessite récursivement
la complexité organisationnelle du tout. Ce troisième point montre l’importance de situation
repérée de développement des usages, qui seront autant de cas, réutilisable en d’autres points
par analogie.
201 Wiener, N. (1971). Cybernétique et société (1950). Paris: Union Générale d’Editions .


2.3.2 Les théories de l’acteur[modifier]

Cette approche sociologique est apparue à la fin des années 1970202, en voulant se démarquer
de l’approche alors classique (en sociologie) qui était de considérer l’individu comme faisant
partie de classes, de rôles sociaux ou de style de vie. Cette vision de Crozier et Friedberg
permet d’envisager l’individu comme acteur, en termes d’initiative et d’autonomie, et cela en
respect de son environnement proche. Crozier et Friedberg proposent que le comportement de
l’acteur, dans la situation donnée, contribue à structurer un champ d’actions, et ainsi
construire des règles qui régiront les organisations.
Pour Gaudin203, la notion d’acteur dans les problématiques contemporaines des sciences
sociales offre un renouveau méthodologique pour, au moins, trois raisons : appréhender des
problématiques systémiques, échapper à une analyse normative en considérant les actions,
construire sociologiquement la réalité. En premier lieu, le raisonnement systémique permet de
faire apparaître des frontières dans l’analyse mais aussi des interactions entre différents
intervenants, en cherchant à contextualiser les approches relationnelles. Le psychologue
américain Herbert Simon a déjà partagé cela en nous invitant à envisager chaque acteur-en-
interaction dans des situations sociales concrètes, situations issues de « choix
rationnels limités »204 selon lui. Dans représentation l’analyse reste « dans un cadre de
raisonnement contraint par son actionnalisme même »205. En second lieu, l’acteur est
considéré comme un individu possédant un projet personnel. Jean-Pierre Gaudin nous propose
de prendre en compte « des conduites humaines, prévisibles à l’avance et associées à des
motifs et des états de conscience. », et dont nous analysons les actions. Cette approche
microsociologique, à l’échelle de l’individu, permet selon Schütz de mieux comprendre les
phénomènes au sein des organisations. Enfin, le courant des constructivismes sociaux nous
amène à considérer l’acteur comme un des éléments de « la société [alors considérée]
comme un ensemble de dépendances réciproques, reliant entre eux les individus », toujours
selon ce sociologue.
Pour nous, l’utilisation de cette notion d’acteur nous permettra tour à tour de nous intéresser à
des individus en action, et d’en déduire des cas existants, pouvant contribuer à la vérification
d’un hypothèse, ou bien de considérer le système dans son ensemble et de tenter d’en
202 Crozier, M., & Friedberg, E. (1977). L’acteur et le système, édition du Seuil. Paris, 435p .
203 Gaudin, J. P. (2001). L’acteur. Une notion en question dans les sciences sociales. Revue européenne des
sciences sociales. European Journal of Social Sciences, (XXXIX-121), 7-14. https://doi.org/10.4000/ress.641
204 Simon, H. A. (1964). On the concept of organizational goal. Administrative science quarterly , 1-22.
205 Gaudin, J.P. op. cit. p 10
représenter une réalité, plus compréhensible pour nous, dans un souhait de nous extraire de la
complexité des terrains.


2.3.3 La logique de réseau[modifier]

2.3.3.1 Réseaux d’acteurs[modifier]
La technique n’étant pas la principale cause de tous les changements à divers niveaux, nous
nous positionnerons sur la logique de réseaux, et plus particulièrement « La logique de
réseaux qui présuppose donc un décloisonnement complet à la fois des services de
l’administration publique et de celle-ci par rapport à son environnement. »206.
La littérature scientifique nous renvoie que la notion de réseau peut s’appliquer à « un
ensemble d’éléments, sociaux, biologiques ou techniques, qui ont en commun de lier entre eux
des individus, dans une forme de relation particulière, qui peut être représentée par une toile,
un filet »207. Cette appellation englobe aussi bien le maillage d’un territoire que les réseaux
d’amis, qu’ils soient sur support numérique ou non.
Nous retrouvons l’analyse des réseaux dans plusieurs champs scientifiques, en neurosciences,
en mathématique et pour ce qui nous intéresse dans le domaine des sciences de l'information
et de la communication, dans la modélisation des réseaux de communication, du télégraphe de
Chappe à l’Internet.
e
C’est au XVIII siècle, au travers des travaux de Claude Henri de Rouvroy, comte de Saint
Simon, que la notion de réseau devient une clé majeure d’explication des phénomènes
complexes, « bien avant la modernité technologique. »208. L’apparition de la notion de
« rhizome », concept inventé par G. Deleuze et F. Guattari, en 1980, donne même une
dimension philosophique aux réseaux : « Le rhizome connecte un point quelconque avec un
autre point quelconque, et chacun de ses traits ne renvoie pas nécessairement à des traits de
même nature ». Nous retiendrons de ce point de vue deleuzien que l’ « agencement des
éléments ne suit en aucun cas la très classique organisation hiérarchique » et que « Contre
les systèmes centrés (même polycentrés), à communication hiérarchique et liaisons
préétablies, le rhizome est un système acentré, non hiérarchique et non signifiant, [...] sans
206 Gagnon, Y.-C., Posada, É., & Bourgault, M. (2001). L’impact des technologies de l’information et des
communications sur la création d’un État-réseau  : le cas du Québec. Gestion, 26(1), 38-45. Consulté le 25
septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RIGES_261_0038
207 Dortier, J.-F. (2013). op. cit.
208 Musso, P. (1998). Télécommunications et philosophie des réseaux. Presses universitaires de France.
mémoire organisatrice ou automate central, uniquement défini par une circulation
d’états »209.
Dans le cadre des théories des réseaux, il devient possible de procéder à leur analyse, en se
centrant, par exemple, sur leurs modes de fonctionnement, les interactions en interne, ou des
interrelations entre différents réseaux. Nous rappelons pour ce dernier exemple, du
« problème de petit monde »210, une théorie développée par le psychologue social américain,
Stanley Milgram, en 1967, dans le prolongement des travaux de par Frigyes Karinthy, la
théorie des 6 degrés de séparation211, où comment n’importe quel individu de la planète peut
serrer la main d’un autre en moins de 6 relations.
Une plongée dans la littérature scientifique nous a permis de déceler que l’analyse des réseaux
sociaux dispose de son « inventeur », l’anthropologue John Barnes, par l’intermédiaire de son
étude sur une petite île norvégienne212, qui nous montre que « ce sont les mêmes facteurs
externes, les mêmes principes d’organisation et les mêmes valeurs qui exercent leur influence
sur ces différentes dimensions de la vie sociale. ». Barnes nommera cette notion social
network.
Plus récemment, Pierre Musso nous rappelait que « la métaphore du réseau (…) correspond
au contraire à une vision qui se veut moins hiérarchisée de nos sociétés, d’un monde non plus
vertical (…) mais horizontal, avec ses technologies multiples et ses communautés
planétaires »213 . Émile Durkheim recommandait en effet de s’attacher aux « symboles
visibles, des faits sociaux : observer la solidarité ou la morale au travers des
for mes cristallisées produites par l’histoire et l’action humaines »214 .
Nous tenterons ainsi de mettre en évidence des symboles visibles de cette influence du
numérique dans la gouvernance215 des établissements de l’ESR, en repérant les dispositifs
horizontaux dans certains établissements de l’ESR.
209 Deleuze, G., & Guattari, F. (1980). Capitalisme et schizophrénie II: Mille plateaux. Paris: Les Éditions de
Minuit . P 32
210 Milgram, S. (1967). The small world problem. Psychology today , 2(1), 60-67.
211 Karinthy, F. (1929). Chains. Everything is Different, Budapest.
212 Barnes, J. A. (2014). Classes sociales et réseaux dans une île de Norvège. Réseaux , (182), 209-237. Consulté
le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RES_182_0209
213 Musso, P., Coiffier, S., & Lucas, J.-F. (2015). Pour innover, modéliser l’imaginaire . Manucius.
214 Durkheim, E. (1894). Les règles de la méthode sociologique . Editions Flammarion.
215 Lacroix, I., & St-Arnaud, P.-O. (2012). La gouvernance: tenter une définition. Cahiers de recherche en
politique appliquée , 4(3), 19-37.


2.3.3.2 Les réseaux socionumériques et les interactions de leurs acteurs[modifier]
C’est l’Internet qui accélérera la production de connaissance dans le domaine de l’analyse
sociologiques des réseaux : « La sociologie des réseaux sociaux consiste à prendre pour
objets d'étude non pas les caractéristiques des individus, mais les relations entre ces individus
et les régularités qu'elles présentent, pour les décrire, rendre compte de leurs transformations
et analyser leurs effets sur les comportements »216. En effet, la multiplicité des liaisons, des
interactions sur un nombre important de nouveaux outils, font apparaitre à la fois un véritable
objet d’études et des techniques d’analyse.
Pour ce qui concerne l’objet d’étude, et pour recentrer sur nos propos, il s’agit de l’analyse
sociotechnique des réseaux socionumériques, appelés communément (et à tort ?) « réseaux
sociaux ». Concernant les techniques d’analyse, nous pouvons nous appuyer sur les
représentations mathématiques. L’approche traditionnelle des réseaux sous forme de graphes
issus de la théorie des graphes, notamment la « décomposition arborescente »217 propose un
mode de représentation satisfaisant, pour autant il peut montrer ses limites pour décrire les
multitudes d’interactions humaines qu’induit ce réseau socionumérique.
Figure 22 : Exemple de décomposition arborescente (Ouali, Loudni, Loukil, & Lebbah, 2014).
Nous retrouvons aussi cette décomposition en arborescence au sein de différents travaux
représentés sur la figure ci-dessus218 . Par ailleurs, l’analyse mathématique des réseaux, permet
216 Mercklé, P. (2016). Sociologie des réseaux sociaux (3e édition). Paris: La Découverte.
217 Robertson, N., & Seymour, P. D. (1986). Graph minors. II. Algorithmic aspects of tree-width. Journal of
algorithms, 7(3), 309-322.
218 Ouali, A., Loudni, S., Loukil, L., & Lebbah, Y. (2014). Une approche parallele coopérative exploitant la
décomposition arborescente dans VNS. In 11ème Colloque sur l’Optimisation et les Systèmes d’Information et
les Systèmes d’Information (COSI 2014) (p. P1-12).
aussi de modéliser les liens entre les individus, les positions dans un tissu de relations, mais
aussi des flux, à travers des outils comme des graphes, des matrices219.
Figure 23 : Exemple de représentation utilisant la théorie des graphes (« groupe fmr | (flux, matrices,
réseaux) », 2016).


2.3.4 Pragmatique de Palo Alto appliquée au système de l’ESR et à son[modifier]

contexte
Il est pour nous important de remonter à l’école de Palo-Alto pour trouver un des fondements
de cette section. Elle a révolutionné pour nous le champ des sciences humaines en plaçant la
communication et la notion de système au centre de sa théorisation. L’approche « s’appuie
dans le champ de la communication interpersonnelle, la résolution des problèmes humains et
la thérapie dite systémique »220. L’approche systémique sera au cœur de nos préoccupations
bien que nous garderons un œil sur une approche analytique en trois niveaux, « niveau
d’analyse du système productif global, niveau de l’organisation administrative et structurelle
et le niveau de la mise au travail ou de l’organisation du travail. »221.
Il existe beaucoup d’écrits sur l’école de Palo Alto, cette école de penseurs qui à la sortie de la
seconde guerre mondiale a vu se regrouper des équipes pluridisciplinaires en sciences
humaines autour de l'anthropologue Grégory Bateson, en un seul lieu, actuellement au cœur
de la Silicon Valley. Grégory Bateson s’appuie en partie sur la « cybernétique »222 de
219 Degenne, A., & Forsé, M. (1994). Les résaux sociaux: une analyse structurale en sociologie. Paris: Armand
Colin.
220 Vidal, M., & Garcia-Rivera, teresa. (2013). Palo alto à l’école . Supagro. le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.supagro.fr/web/UserFiles/File/palo-alto-supagro.pdf
221 Bouzon, A., Meyer, V., Groupe Org & co (France), & Harmattan (Firme). (2006). La communication
organisationnelle en question méthodes et méthodologies. Paris: L’Harmattan.
222 Wiener, N. (1971). Op cit
Wiener, notamment les concepts de régulation, de système, de consigne et de commande
empruntés à l’automatique223. Bien entendu, l’anthropologue qu’est Bateson, ne s’appuiera
pas sur des systèmes d’ingénierie, des machines mais bien sur des humains, seul et
interagissant avec d’autres en groupe organisé ou non. Cette vision très humaine, tout
d’abord utilisée dans une finalité uniquement thérapeutique, conduit à proposer des analyses
puis des changements, qui conduisent « à la dissolution des problèmes dans les dynamiques
systémiques »224. Le champ s’étend alors au domaine des sciences de l’information et de la
communication. Utiliser les concepts de l’école de Palo Alto c’est reconnaître, en d’autre
termes, que nous ne changeons pas les individus, mais que nous sommes en capacité de
modifier leurs interactions afin de résoudre le problème qui les regroupaient.
Mobiliser l’école de Palo Alto, c’est reconnaître qu’il existe un système sur lequel nous
allons poser notre regard, pour nous, il s’agit du système de l’ESR et de son contexte actuel.
Cette étude des relations peut être observée selon plusieurs paradigmes, nous prendrons pour
notre travail de recherche les interactions suivantes : la relation au cadre réglementaire, la
relation au public, les relations entre pairs, et la relation à la connaissance.


2.3.4.1 La relation au cadre réglementaire[modifier]
Nous estimons que cette relation existe entre les établissements de l’ESR et le ministère de
tutelle au travers du cadre législatif et règlementaire. Elle est imposée par les lois de
définitions du rôle de ces établissements. L’organisation institutionnelle des universités a été
profondément réformée avec la loi du 10 août 2007 sur les libertés et les responsabilités des
universités (LRU). Elle attribue « de nouvelles compétences aux universités – gestion du
patrimoine immobilier, recrutement des personnels, gestion des ressources humaines…»225, et
renforce la fonction de Président d’Université.
Depuis l’entrée en vigueur de la loi LRU, le nouvel article L. 712-2 C. éduc. dispose que « le
président de l’ Université est élu à la majorité absolue des membres élus du conseil
d’administration parmi les enseignants-chercheurs, chercheurs, professeurs ou maîtres de
conférences, associés ou invités, ou tous autres personnels assimilés, sans condition de
223 Wiener. (1961). Cybernetics or Control & Communication in the Animal & the Machine 2e (2nd Revised
edition). MIT Press.
224 Vidal, M., & Garcia-Rivera, teresa. (2013). op. cit.
225 Conférence des Présidents d’Université. (2016, septembre). Guide juridique  : Compétences et responsabilité
des Présidents d’Université et de COMUE.
nationalité. Son mandat, d’une durée de quatre ans, expire à l’échéance du mandat des
représentants élus des personnels du conseil d’administration. Il est renouvelable une fois. ».
La loi relative à l’ESR de 20 13 n’a que peu modifié le statut du Président d’Université qui
avait été profondément réformé par la loi du 10 août 2007. Elle distingue toujours différentes
fonctions dans le décisionnel des universités : le Président prend des décisions ; le Conseil
d’administration rend des délibérations ; le Conseil académique, qui peut aussi rendre des
délibérations, formule également des avis (articles L. 712-1 C. éduc.), tous « assurent
l’administration de l’Université ».
L’article L. 712-2 C. éduc. dispose à titre liminaire que « le président assure la direction de
l’Université. » Cet article précise aussi que « le président est assisté d’un bureau élu sur sa
proposition, dont la composition est fixée par les statuts de l’établissement. ».
Le cadre réglementaire est ainsi fixé.


2.3.4.2 La relation au public[modifier]
La relation au public concerne les interactions avec les usagers des universités. Les étudiants
et les stagiaires sont les premiers usagers du service public de l’enseignement supérieur. Les
« principes, obligations et pré rogatives du service public leurs sont applicables. Ils peuvent
également s’en prévaloir »226 pour reprendre le Guide Juridique de la CPU.
L’Université est aussi amenée à étendre son activité de recherche et de formation. Elle
développe des activités économiques et sociales qui doivent toujours avoir un lien avec le
service public dont l’Université a la charge : de nouveaux public apparaissent alors, en marge
d’un point de vue quantitatif.


2.3.4.3 Les relations entre pairs[modifier]
La relation entre pairs peut-être observée à plusieurs niveaux, en interne ou en externe aux
universités. En interne, il s’agit d’observer les relations interpersonnelles d’individus
partageant une mission de service public, quel que soit le statut, mais ce sont aussi des
relations entre corps de métiers qui peuvent être observées. Nous prendrons la première
position comme la position d’analyse la plus courante quand nous porterons notre regard sur
le numérique de ces universités. En externe, nous pouvons étudier les relations entre
226 Conférences des Présidents d’Université. (2016). Guide juridique  : Compétences et responsabilité des
Présidents d’Université et de COMUE.
universités, regroupées ou non au sein de Communauté d'universités et établissements
(COMUE), afin d’observer les éventuels accords et tensions.


2.3.4.4 La relation à la connaissance[modifier]
Nous décidons de positionner notre observation sur la relation à la connaissance.
Dans un premier temps, nous étudions le rapport entre connaissance et Université d’un point
de vue économique. Selon Chris Lorenz, l’économie mondiale est une « économie de la
connaissance », l’Union européenne estime que « l’enseignement supérieur européen devait
lui aussi devenir le plus dynamique et le plus compétitif du monde. » 227. Cette idéologie
toujours selon cet auteur, signifie donc simplement que « la production de la connaissance
relève du domaine de l’économie ».
En conséquence, l’idée générale derrière les projets éducatifs de l’Union européenne est donc
économique et s’apparente au travail de standardisation des économies nationales : « il s’agit
d’augmenter la compétitivité en réduisant les coûts ». C’est sur ce modèle que le processus de
Bologne228 s’est construit sur quelques principes que nous énumérons ici : l’achèvement de la
construction de l’espace européen de l’ESR, l’harmonisation des règles de diplomations entre
les États membres, l’augmentation de la mobilité enseignante et étudiante, l’appui au
partenariat entre universités européennes, la contribution à une meilleure visibilité des
universités à l’échelle de l’Europe.
Dans un deuxième temps, nous portons le regard sur l’accès à la connaissance, L'Internet a
fondamentalement transformé les réalités matérielles et économiques de la diffusion de la
connaissance scientifique, en conséquence les établissements de formation n’ont plus le
monopole de la détention de la connaissance. La multiplication des sources de connaissances,
le développement de l’open-access initié dans les années 1990, grâce à l’essor de l’Internet, et
la création de l’archive ouverte ArXiv229 en 1991 par Paul Ginsparg y contribuent
grandement. Les universités se retrouvent ainsi concernées dans leur mission : le modèle
227 Lorenz, C., et al. (2007). ‘L’économie de la connaissance’, le nouveau management public et les politiques de
l’enseignement supérieur dans l’Union européenne. Les ravages de la « modernisation » universitaire en
Europe. Paris: Éditions Syllepse, 33–52. le 25 septembre 2017 à l’adresse
https://www.researchgate.net/profile/Chris_Lorenz2/publication/254826061_Lconomie_de_la_connaissance_le_
nouveau_management_public_et_les_politiques_de_lenseignement_suprieur_dans_lUnion_Europenne/links/54d
15bfd0cf25ba0f041263d.pdf
228 Conseil de l’Europe. (2010) Processus de Bologne. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.coe.int/t/dg4/highereducation/EHEA2010/BolognaPedestrians_fr.asp#P16_305
229 Cornelluniversity Library. (2017) arXiv.org e-Print archive. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://arxiv.org/
économique de la diffusion de la production de recherche et l’accès à la connaissance facilité
aux étudiants, aux stagiaires.


2.4 Articulations entre communication et information[modifier]

Pour nous, les sciences de l'information et de la communication ont gagné le statut
interdisciplinaire, en s’intéressant au travail ou à ses objets, et en mêlant une approche
plurielle selon l’information, la communication et l’organisation. Ces trois disciplines se
doivent d’exister car elles ne s’opposent pas, ne se mélangent pas, mais il n’est pas toujours
aisé de les distinguer lors de l’observation d’un terrain. Nous partageons l’avis de Béatrice
Vacher : ces trois domaines « ne s’identifient pas seulement en négatif ou par
complémentarité l’un par rapport à l’autre, ils ne forment pas seulement un nouage
inextricable, ils ne peuvent tout simplement pas se passer les uns des autres et s’articulent,
plus ou moins harmonieusement. »230. Cette interdépendance est la clé d’une analyse complète
de la réalité, nous jouerons alors dans les observations menées tour à tour avec l’information,
la communication et l’organisation.


2.4.1 La communication et la communication interpersonnelle[modifier]

La communication est un terme polysémique en sciences sociales, ce qui l’a desservi pendant
bien longtemps dans le cadre de travaux scientifiques, tant les définitions étaient différentes :
à la fin des années 1960, Dance relevait plus de 15 définitions231. Un dictionnaire des
sciences sociales nous propose de dégager une acception commune à tous les concepts
énumérés de cette époque : « la communication désigne toute interaction sociale à travers un
message » .
La communication s’appuie ainsi sur un canal, et sous-entend une relation entre un émetteur
et un récepteur dans un contexte donné, et dont l’interprétation du message envoyé dépend de
la culture des deux protagonistes. Porter un regard sur la communication, c’est étudier le
langage, la sociologie, la philosophie et d’autres disciplines intimement liées. Pour les
e
sémiologues du début du XX siècle, tel que Ferdinand de Saussure, la communication est
l’étude de tout « système de signe », où le signifiant et le signifié sont indissociables.
230 Vacher, B. (2009). Articulation entre communication, information et organisation en SIC. Les Enjeux de
l’information et de la communication, 2009(1), 119-143.
231 Dance, F. E. (1967). Toward a theory of human communication. Human communication theory: Original
essays, 288-309.
232 Mesure, S. (2006). Le dictionnaire des sciences humaines . Presses Univ. de France.
Ayant accepté cette position, nous pouvons aussi nous intéresser au processus de
communication, la représentation de cette interaction entre l’émetteur et le récepteur. Parmi
les définitions, le plus élémentaire appartient aux mathématiciens, dans le champ
d’application des techniques de télécommunication : « Un émetteur, grâce à un codage,
envoie un message à un récepteur qui effectue le décodage dans un contexte perturbé de
bruit. »233 . Ce modèle, celui de la théorie de l’information de Shannon et Weaver, met en
évidence une approche très transmissive et ne propose pas d’interaction possible entre le
destinataire et l’expéditeur, pas de rétroaction.
Figure 24 : Le schéma communicationnel de Shannon.
Durant les mêmes années, la communication est étudiée d’un point de vue fonctionnaliste, le
« Who says What to Whom in Which channel with What effect »234 de Lasswell : la
communication comme un moyen de persuasion politique, déjà abordée par le même auteur
qui préconise un « contrôle gouvernemental des techniques de communication » 235 .
Ces modèles ont montré leur limite, concernant la vision d’un processus linéaire centré sur un
transfert d’informations, en oubliant le rôle de l’émetteur et du récepteur qui sont totalement
différents, le premier étant actif, le second passif, et surtout cette représentation ne tient pas
compte de l’inter-influence entre les deux personnes.
Cette inter-influence sera apportée par la sociologie. Dans le modèle de Riley & Riley, chacun
des acteurs appartient à un système social236, ce qui influence la façon de voir et de juger le
message transmis. Il apparaît alors une boucle de rétroaction lors de cette interaction.
En introduisant la notion d’action du récepteur en retour de l’émetteur, de rétroaction, ou
« feedback », certains chercheurs ont tenté de compléter cette première représentation. Elle fut
233 Weaver, W., Shannon, C. E., Moles, A. A., Cosnier, J., Dahan, G., & Economidès, S. (1975). Théorie
mathématique de la communication. C.E.P.L.
234 Lasswell, H. D. (1950). Politics: Who gets what, when, how . P. Smith New York.
235 Lasswell, H. D. (1938). Propaganda technique in the world war.
236 Riley, J. W., & Riley, M. W. (1959). Mass communication and the social system.
popularisée par une autre théorie mathématicienne, celle de Norbert Wiener en 1948, qui
revendique que les systèmes humains ou des mécanismes disposent d’une forme
d’autocontrôle237, qui s’appuient sur des principes communs réunis sous l’appellation
cybernétique.
La communication interpersonnelle238 propose ainsi d’ajouter une régulation, un feedback au
schéma de communication, la relation de communication entre deux individus n’est plus alors
directive, mais entendue réciproquement, voire de manière circulaire. Cette vision mécaniste
de la communication, représentation de la réalité tronquée, fut rompue par les linguistes.
Dans son « Schéma général de la communication »239, Roman Jakobson, ce linguiste influent
e
du XX siècle, nous précise qu’il distingue six facteurs dans la communication : l’émetteur, le
récepteur, le message bien entendu, mais aussi le contexte, le code et le contact. Les trois
derniers facteurs sont alors nouveaux dans l’approche de l’analyse de la communication, et
permettent de revenir aux « sources » : le signifiant et le signifié pris alors dans leur globalité
(code, liaison physique entre l’émetteur et le récepteur, puis les conditions sociales, le
contexte). Mais la principale singularité de ce schéma est de combiner une approche
fonctionnaliste : à ces 6 facteurs correspondent six fonctions dans le langage : la fonction
référentielle ou représentative (pour saisir le contexte), la fonction expressive, la fonction
conative, la fonction phatique (pour provoquer et maintenir le contact), la fonction
métalinguistique ou métacommunicative (vérifier que les protagonistes utilisent bien le même
code), et la fonction poétique (pour la forme du message).
Figure 25 : Schéma de la communication, d'après Jakobson.
237 Wiener, N. (1948). Cybernetics: Control and communication in the animal and the machine. Wiley New
York.
238 Lazarsfeld, P. F., Berelson, B., & Gaudet, H. (1948). The People’s Choice: How the Voter Makes Up His
Mind in a Presidential Campaign . Columbia University Press.
239 Jakobson, R. (1981). ESSAIS DE LINGUISTIQUE GENERALE. Les fondations du langage. Paris: Editions
de Minuit.
En complément, il ajoute et propose le schéma ci-dessus, précisant que chaque message relève
de ses fonctions mais que l’une d’elle domine toujours.


2.4.2 Approche communicationnelle[modifier]

Nous partageons l’idée développée par Alex Muccchielli : « avoir une approche
communicationnelle d’un phénomène c ’est l’analyser comme élément d’un système
contribuant, dans un mouvement circulaire, à l’émergence d’un autre phénomène »240. Dans
une organisation humaine, les acteurs de ce système créent des interactions, se structurent
avec plus ou moins d’efficacité, essayent d’avancer dans la même direction, de porter leur
projet, parfois par tâtonnement, essai-amélioration jusqu’à une forme organisationnelle. Une
approche communicationnelle nous permet de porter notre attention sur le rôle de la
conception de la communication qui a permis de faire naitre cette forme d’organisation. Cette
approche spécifique « tend à insister avec un certain pragmatisme sur des situations de
communication dans lesquelles la mise en circulation des savoirs prend forme. »241. Nous
pouvons aussi nous attarder sur les formes de circulation de l’information, car « les travaux
qui s’inscrivent dans cette approche affichent souvent un intérêt plus marqué pour les
situations que pour l’attention au contexte », puis sur les objets qui sont mis en œuvre.
L’approche communicationnelle repose ainsi sur le triptyque situations, objets et formes.
L’analyse de l’information, la mise en œuvre de catégorisation de phénomènes complète une
approche systémique en sciences sociales et humaines.


2.4.3 Catégorisation de l’information[modifier]

Dans le prolongement de l’approche communicationnelle, nous utiliserons une activité
mentale qui consiste à placer ensemble les objets dans différentes catégories cognitives, un
ensemble d’objets équivalents selon des critères donnés. Cette activité offre l’avantage
d’offrir une vision simplifiée de la réalité complexe pour nous, en prenant toujours garde de
ne pas rendre la catégorisation stéréotypique.
La littérature scientifique fait état de plusieurs approches de catégorisation en sémantique :
l’approche classique, l’approche des sciences cognitives ou théorie du prototype, et enfin
l’approche hiérarchique.
240 Mucchielli, A. (2006). op. cit. p 65.
241 Quet, M. (2014). Research in Brief: Pour une approche communicationnelle des enjeux scientifiques et
techniques. Canadian Journal of Communication, 39(4), 651.
L’approche classique, est appelée ainsi car elle repose une théorie ancienne, énoncée dans les
Catégories, une des œuvres majeures d’Aristote : « Les mots, quand ils sont pris isolément,
expriment chacun l'une des choses suivantes : ou substance, quantité, ou qualité, ou relation,
ou lieu, ou temps, ou position, ou état, ou action, ou enfin passion. »242 Il s ‘agit de regrouper
l’information en créant des catégories aux frontières délimitées sur la base de propriétés
communes. Un élément informationnel appartiendra à une catégorie de manières nécessaires
et suffisantes d’un point de vue des propriétés énoncées.
Cette approche fut remise en cause par Eleanor Rosch, au profit d’une approche des sciences
cognitives. Les frontières sont moins franches entre les catégories, et les membres d’une
catégorie n’ont pas tous un statut égal : certains sont plus représentatifs de la catégorie que
d’autres, ils seront nommés « prototypes »243. Le prototype est le meilleur représentant de la
catégorie, reconnu comme tel par les individus consultés.
L’approche hiérarchique propose une catégorisation en classe et sous-classe, comme les
classifications des êtres vivants en biologie. Cette classification est utilisée pour des
organismes vivants, elle a été nommée taxinomie ou taxonomie. « Le but est essentiellement
de placer les objets dans des cases reflétant la place qu'ils occupent dans l'arbre de
l'évolution »244

2.4.4 L’image de marque d’une université[modifier]

Associer la notion d’image de marque à une université, c’est reconnaître que l’ESR
fonctionne aujourd’hui, aussi, à travers des processus appuyés sur des concepts de marketing,
qui pour nous seraient « à la fois l'activité, l'ensemble des institutions et des processus visant
à créer, communiquer, délivrer et échanger les offres qui ont de la valeur pour les clients, les
consommateurs, les partenaires et la société au sens large. »245
L’idée peut faire débat, nous en faisons juste le constat en identifiant quatre points, qui
définissent un des fondements de ce concept, les 4P de Philip Kotler.
  • les formations s’adaptent à leur public en adaptant l’offre pour répondre aux
motivations et attitudes de la des étudiants ou des entreprises qui recrutent. (Produit),
242 Barthélemy-Saint-Hilaire, J. (1839). Logique (Vol. 2). Ladrange.
243 Rosch, E. (1999). Principles of categorization. Concepts: core readings, 189.
244 Jolley, J. L., & Plessis, C. (1968). Le traitement des informations , p103.
245 Keller, K. L., & Kotler, P. (2016). Marketing management . Pearson, p. 5.
  • les universités, toutes présentes sur les réseaux socionumériques, les salons de
l’étudiant, se donnent les moyens d’améliorer la connaissance de leur existence et des
conditions d’accès à une offre de formation pour (Promotion et/ou publicité),
  • la position des offres de formation en termes de prix par rapport aux autres offres
(Prix),
  • les moyens et infrastructures pour mettre en avant l’offre de formation des universités
(Place / Distribution)
Si nous acceptons cette idée, nous pouvons nous interroger sur l’image de marque.
Elle concerne le sens que nous donnons aux marques qui représentent les organisations et
nous nous appuyons sur cette définition propre aux neurosciences qui s’appuient l’idée que
nous mémorisons en réseau d ’associations : « tout ce qu’un consommateur peut associer à
une marque donnée »246.
Keller247 distingue l’image de marque de la notoriété, mais considère que ces deux concepts
fonctionnent ensemble, l’un nourrissant l’autre et inversement : il définit cela comme « la
connaissance de la marque ». Nous retiendrons que cet auteur propose un classement en trois
catégories de l’image de marque : les attributs, les bénéfices et l’attitude envers la marque.
Les attributs peuvent être liés à au produit ou au marketing du produit. Les bénéfices seront
alors « fonctionnels (souvent liés aux besoins physiologiques) , expérientiels (sensations
procurées par l’utilisation des produits de la marque), et symboliques (comme par exemple le
besoin d’approbation sociale) »248 et la conséquence est l’évaluation globale de la marque,
l’attitude envers cette marque.
L’auteure Isabelle Barth considère, en parlant de l’image de marque des universités, que la
marque est « un actif immatériel de l’entreprise », « qu’elle a pénétré tous les univers et celui
de l’enseignement supérieur n’y échappe pas »249 . Pour elle, la stratégie doit s’en emparer car
il y a des avantages pour les étudiants à être diplômés d’une Université qui possède une bonne
image de marque, avantages étudiés et révélés par Philip G. Juo pour les universités
246 Mitchell, A. A. (1982). Models of memory: Implications for measuring knowledge structures. ACR North
American Advances .
247 Keller, K. L. (1993). Conceptualizing, measuring, and managing customer-based brand equity. the Journal of
Marketing , 1-22.
248 Korchia, M. (2000). Une nouvelle typologie de l’image de marque. Actes du Congrès de l’AFM .
249 Barth, I. (2015). La marque  : capital immatériel des écoles et universités | Cracking the management code.
Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://blog.educpros.fr/isabelle-barth/2013/12/15/la-marque-capital-
immateriel-des-ecoles-et-universites/
américaines250. Les étudiants ont plus de facilité à « obtenir des entrevues et des offres
d'emploi auprès de grandes entreprises prestigieuses. ». Lors de leur premier emploi, « Les
grandes entreprises (…) offriront des positions de départ plus favorables et des salaires plus
élevés. » et les managers « auront une meilleure impression initiale de votre part même si
elles n'ont pas encore vu votre travail. » de ces étudiants. Dans le cadre de l’économie
numérique, ces étudiants participent plus facilement à une start-up et enfin lors de sélections
dans le cursus de formation « Il sera plus facile pour vous d'être admis dans les écoles
supérieures renommées. »
Pour les universités, nous voyons bien qu’il est possible de définir une image de marque qui
peut reposer sur la proposition de Keller et permettrait à ceux qui pilotent la stratégie d’ajuster
aussi bien la communication que les formations elles-mêmes.
Image de marque
Attributs BénéRices Attitudes
Non liés aux Meilleurs
Liés aux formations formations(mix) Fonctionnels Expérientiels Symboliques classements
Catalogue de La recherche Recrutement de Sentiment approbation sociale Plus d'étudiants
formations meilleurs étudiants d'appartenance des étudiants
Meilleur approbation sociale
Formations à public
ciblé Le nom reconaissance des Meilleure réussite des partenaires Meilleur Rinancement
employés socio-économiques
Formations à
distance Le logo réseau d'anciens
MOOC les slogans
L'humanisation de la
communication
les produits dérivés
les boutiques
Figure 26 : Liste non exhaustive d’éléments pouvant constituer l’image de marque d’une Université.
Nous considérons que le « produ it d’Université » est l’offre de formation dispensée en son
sein, quelle soit initiale ou continue. Ce choix repose sur le fait que la formation recouvre
250 Guo, P. (2009). The advantages of attending a prestigious name-brand university. Consulté le 25 septembre
2017, à l’adresse http://www.pgbovine.net/advantages-of-name-brand-school.htm
deux des trois missions de l’Université, qu’elle est visible par les usagers du service public
offert par ces établissements.
Nous retrouvons la distinction entre les attributs liés à la formation et ceux qui ne le sont pas.
Pour les premiers, nous proposons des éléments d’influence comme le catalogue de formation
et le type de formation diplômante (à public ciblé, à distance) ou certifiante (les MOOC). Pour
les seconds, il s’agit de retrouver la recherche et les éléments tel que le nom, le logo, les
slogans, l’humanisation de la communication (« ce sont les étudiants qui sont mis en avant
pour les programmes en formation initiale, et les enseignants quand il s’agit d’évoquer la
recherche. »251 pour reprendre Isabelle Barth, les produits dérivés et leurs lieux de vente.
Concernant les bénéfices fonctionnels, une meilleure image de marque permettrait d’attirer
davantage d’étudiants, et si un numérus clausus existe, de recruter les meilleurs en termes de
prérequis. C’est aussi une occasion de valoriser le travail réalisé en interne et offrir une forme
de reconnaissance aux membres de l’Université. Pour les bénéfices expérientiels, nous
retenons le sentiment d’appartenance et une meilleure réussite. Enfin pour la valeur
symbolique, nous imaginons que l’approbation sociale des étudiants relayée par un réseau
d’alumni, permet à l’Université d’être présente à travers ses étudiants et anciens étudiants
dans le monde socio-économique.
L’attitude envers cette image de l’Université pourrait, pour nous, déboucher sur des meilleurs
classements, qu’ils soient internationaux ou nationaux, une augmentation du nombre
d’étudiants et l’occasion de trouver davantage de financements, contrats.
Nous reprendrons la visée intégratrice de Philippe Breton et Serge Proulx252 . Pour ces deux
auteurs, l’information s’insère comme un des trois pôles de la communication : elle est un
contenu, le plus objectif possible, une description des faits au plus près du réel, une
représentation fidèle complétée par l’argumentatif et l’expressif. « La combinaison de ces
trois idéaux, permet de repérer avec finesse les caractéristiques marquantes de telle ou telle
organisation »253 pour reprendre Vacher.
251 Barth, I. (2015). op. cit.
252 Breton, P., & Proulx, S. (2012). op. cit.
253 Vacher, B. (2009). op. cit.


2.5 Performance et efficience des organisations :[modifier]

concept et mesures
Dans un article conjointement écrit avec deux collègues de sciences de gestion, intitulé
« Quand la transformation numérique dans le secteur bancaire prend « chaire » »254, nous
avons étudié la résistance au changement des TOP-managers d’un établissement bancaire
qu’implique la transformation numérique. Cette expérience de recherche nous a permis
d’entrer dans une analyse plus « gestionnaire » de ce changement d’état des organisations, en
observant notamment le désordre provoqué par l’arrivée de cet objet technique qu’est le
numérique. Dès lors, nous souhaitons transférer cette analyse vers notre objet d’étude.
Comme beaucoup de secteurs professionnels, le contexte concurrentiel et institutionnel des
organisations de l’ESR a connu de profonds changements ces dix dernières années, marqué
notamment par une importante pression concurrentielle, et par une évolution de la
réglementation.
Ces évolutions ont eu des répercussions sur le fonctionnement et l’organisation interne des
établissements de l’ESR liées en particulier à l’arrivée du numérique et des technologies
associées, conduisant alors à la mise en place de nouveaux services, à l’émergence de
nouveaux acteurs et de nouveaux métiers (ENT, formation en ligne, MOOC..) à de nouveaux
outils de travail (usage des ressources numériques…), à de nouveaux modes d’organisation du
travail (travail à distance…), à de nouveaux produits (Itunes U, …)…
En référence au titre du colloque MTO 2015, « Désordres numériques : incertitude et
opportunités », force est de constater que nous sommes bien là en présence d’une
transformation d’une organisation, les établissements de l’ESR, qui est éclose suite au
désordre, au sens noble du terme255. Ce désordre est synonyme de changement d’état, et pour
lequel « il devient important de mieux comprendre les différentes formes de désordre, leur
genèse, leur nature et leurs conséquences ». Il devient alors crucial pour ces organisations de
lever ces incertitudes et de saisir cette véritable opportunité permettant de gagner en
performance en transformant son organisation et son pilotage.
254 Mocquet, B., Villeseque-Dubus, F., & Mannarini, M. (2017). Quand la transformation numérique dans le
secteur bancaire prend “chaire”. In Yves Barlette, Daniel Bonnet, Michel Plantié, & Pierre-Michel Riccio (Éd.),
Numérique et organisations. Presses des mines.
255 Weller, J.-M. (2008). Le désordre et l’organisation. Annales des Mines - Gérer et comprendre, N° 91(1),
81-83. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=GECO_091_0081
L’établissement en transformation numérique prend alors une position proactive face à cette
transition numérique et se positionne dans une logique de « métamorphose »256 : « chaque
individu composant l’organisation est partie prenante du tout. »

2.5.1 Trois concepts de l’analyse stratégique[modifier]

L’analyse stratégique que nous souhaitons mettre en œuvre lors des terrains, des universités
françaises, repose sur les théories de l’acteur précitée, mais aussi sur l’analyse stratégique.
Bernoux nous invite à considérer « trois concepts clés »257 pour mener l’analyse stratégique :
le système d’action concret, la zone d’incertitude et le pouvoir.
L’analyse stratégique s’appuie sur ces trois principaux concepts pour représenter la réalité des
organisations.


2.5.1.1 Le système d’action concret[modifier]
Pour ce sociologue, le système d’action concret est le point de départ de cette analyse. Il faut
définir ce système qui est pour lui un ensemble humain structuré, un construit social en
ajustement permanent, ces ajustements relevant de la prise de décision des acteurs ou en
résultante d’interactions entre membres de l’organisation. Il nous précise toute la finesse que
doit trouver le chercheur qui oscille entre le raisonnement stratégique et le raisonnement
systémique : l’acteur doit être considéré comme créant le système car avec son réseau, il
résout des problèmes concrets de la vie de l’organisation. Cette création du système réalisé
par l’acteur et son réseau s’appuie sur une régularisation des relations et des alliances entre
acteurs.
Nous mobilisons ensuite la théorie générale des systèmes258. Toute organisation sera alors
généralement décrite par une schématisation simple, comme une boite noire, dans laquelle
entre l’apport de ressources input, sort la fourniture d’un produit output à travers un processus
de transformation troughtput. Le mode de fonctionnement de la dite boite noire s’appuie sur
les interdépendances et les interactions des acteurs. Bernoux réalise cette distinction en ce
sens où il considère que certaines interdépendances entre acteurs sont indispensables pour
256 Darwin, C., & Hoquet, T. (2013). L’origine des espèces  : Texte intégral de la première édition de 1859. Paris:
Seuil.
257 Bernoux, P. (2014). Op cit p153
258 Bertalanffy, L. V. (1968). General System Theory: Foundations, Development, Applications (Revised
edition). George Braziller Inc.
faire fonctionner l’organisation, sans pour cela qu’il existe une quelconque interaction.
L’analyse stratégique a pour but de « débusquer les cas où, tout en restant interdépendants,
les acteurs ne sont plus en interaction »259
2.5.1.2 La zone d’incertitude[modifier]
Dans le domaine des TIC, toutes les organisations courent le risque de la « kodakisation » qui
désigne l’incapacité à se transformer, à anticiper, à changer de marché, de business model, de
circuit de distribution en réfutant l’intégration d’une nouvelle technologie. Le nom est apparu
lors de l’arrivée du numérique dans les appareils photographiques. Kodak, alors leader de ce
marché, ayant négligé cette arrivée, a vu réduire considérablement son activité. Les
organisations risquent un phénomène de « kodakisation » si elles ne comprennent pas les
mutations auxquelles elles sont confrontées, ni comment les résoudre au mieux. C’est la
mauvaise estimation de ce type d’incertitude qui peut faire disparaître une organisation, et non
pas l’incertitude elle-même.
Toute organisation connaît des incertitudes, et celles-ci entrent, d’après Bernoux, non pas
mécaniquement dans le fonctionnement des organisations, en les contraignant, mais bien au
sein du jeu des acteurs, créant des nouvelles relations au pouvoir et en diminuant l’autonomie
de chaque acteur. Le rôle de l’analyse stratégique est donc de braquer la focale sur toute
situation organisationnelle en y cherchant la marge d’incertitude. Ces incertitudes
apparaissent aussi bien en interne mais proviennent plus majoritairement des contraintes
imposées par l’environnement proche.


2.5.1.3 Le pouvoir[modifier]
Le pouvoir ne se résume pas à une position hiérarchique considérée comme supérieure en
termes de positionnement sur un organigramme d’une organisation. Le pouvoir est selon
Brenoux, « la capacité d’un acteur ou groupe de se rendre capable de faire agir un autre
acteur ou groupe, chance de faire triompher sa propre volonté dans une relation sociale. »260.
Cette idée basée sur la relation inclut aussi la réciprocité de la relation, une négociation entre
celui qui souhaite faire triompher sa propre volonté, le changement, et celui qui mettra tout en
œuvre pour la réaliser. Le changé, pour reprendre une terminologie de Leavitt261 a le pouvoir
de la décision finale, bien que le changeur dispose de plusieurs type de ressources pour le
Bernoux, P. op. cit. p.156
260 Bernoux, P. Ibid. p160
261 Leavitt, H. J. (1963). Psychologie des fonctions de direction dans l’entreprise. Hommes et Techiques.
convaincre : la contrainte sur le subordonné imposée par l’organigramme de l’organisation,
mais aussi la légitimité, qui peut aussi s’appuyer sur la confiance interpersonnelle.
Les sources du pouvoir ont été dénombrées par Crozier et Friedberg262 ils en recensent
quatre : l’expertise à la résolution des problèmes, l’adhésion du groupe aux conclusions de
l’expert, la communication et son réseau de diffusion, et enfin l’utilisation des règles
organisationnelles.
Nous mettrons en œuvre cette approche lors de l’analyse stratégique des terrains de recherche.


2.5.2 La performance des organisations : conception et différentes[modifier]

approches
La mise en place de la responsabilité des compétences élargies suite à la loi de réforme des
universités a renforcé la mise en place de mécanismes de régulation au sein des universités
afin que leur fonctionnement financier ne se trouve pas en déficit budgétaire, et donc en
danger d’existence.
Ce mécanisme s'inspire aussi bien des anciens modèles du new public management que des
techniques de management plus modernes empruntées aux organisations privées.
La diminution des finances publiques provoque une nécessité d’optimiser les modes de
fonctionnement de ces organisations publiques, en agissant notamment sur leur performance
organisationnelle.
Ce thème, le concept de performance, est central en théorie des organisations ; nous nous
souvenons que la théorie des organisations permet de développer de la connaissance qui
contribue au meilleur fonctionnement des organisations et donc à leur performance263.
Parallèlement à cette législation un mouvement consumériste de société pousse les usagers de
ce service public à devenir plus exigeants. Ils ne sont plus étudiants ou apprenants mais plutôt
des individus qu'il faut attirer vers un enseignement de qualité pour que l'Université puisse
survivre sur le territoire sur lequel elle est implantée.
Les équipes présidentielles, des établissements de l’ESR, ont peut-être découvert alors
qu'elles doivent avoir « une approche marketing dans la gestion de leur établissement »264.
262 Crozier, M., & Friedberg, E. (1977). L’acteur et le système, édition du Seuil. Paris, 435p .
263 Cameron, K. S., & Whetten, D. A. (1983). Models of the organizational life cycle: Applications to higher
education. The Review of Higher Education , 6(4), 269.
264 Bartoli, A. (2005). Le management dans les organisations publiques (2e édition). Paris: Dunod.
Comme nous le démontre Annie Bartoli dans le « Management dans les organisations
publiques », un tel management existe déjà il est « probablement même antérieur à son
développement entrepris par le secteur public ». Cette auteur invite l’équipe présidentielle et
les équipes de direction des universités à adopter une démarche qui s’appuierait sur une
conceptualisation rénovée et adaptée au contexte particulier des organisations publiques et
ceci malgré des difficultés évidentes de limitation budgétaire liées au mouvement de réforme
publique.


2.5.2.1 Les établissements de santé précurseurs de la transformation de[modifier]
gouvernance
Les réformes de l’organisation publique des services santé publique ont débuté avec la
réforme de 2005, le Plan Hôpital 2007, et concernent une première réforme dans le domaine
de la gouvernance hospitalières dans un souci de responsabiliser davantage les dirigeants
hospitaliers. En 2005, il est reproché à la gouvernance des Hôpitaux d’être « un
enchevêtrement des pouvoirs entre le directeur, le conseil d’administration et la commission
médicale d’établissement (CME) qui conduit à ce qu’il n’y ait pas de véritable responsable du
bon fonctionnement de l’hôpital »265. Cette ordonnance de 2005266 centrée sur la gouvernance,
vise alors à lever « les freins qui pèsent sur les hôpitaux et mettre fin au dangereux
désenchantement des praticiens et de l’ensemble du personnel soignant et administratif. »267.
Dans « la performance organisationnelle des organismes publics de santé »268, Claude
Sicotte et al. font une exégèse de la littérature concernant la théorie des organisations de
système public hospitaliers : bien que tout ce travail concerne les hôpitaux, nous sommes
tentés de transférer cette analyse aux organisations de l’ESR qui, aujourd’hui, offrent des
e
similitudes d’organisation avec les organisations hospitalières du début du 20 siècle. Nous
retenons de l'article, et donc de cette littérature propre aux sciences de gestion que :
265 Vie publique. (2010, juillet 15). La nouvelle gouvernance hospitalière,. La politique hospitalière. Politiques
publiques - repères [text]. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.vie-publique.fr/politiques-
publiques/politique-hospitaliere/gouvernance-hospitaliere/
266 Ordonnance n° 2005-406 du 2 mai 2005 simplifiant le régime juridique des établissements de santé.
267 Vie-publique.fr. (2010). La nouvelle gouvernance hospitalière,. La politique hospitalière.. Consulté 3 octobre
2017, à l’adresse http://www.vie-publique.fr/politiques-publiques/politique-hospitaliere/gouvernance-
hospitaliere/
268 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). La performance organisationnelle des
organismes publics de santé. Ruptures, revue transdisciplinaire en santé , 6(1), 34-46.
  • des « modèles différents reflètent différentes dimensions de la performance » donc la
performance dans des actions, mélange entre compromis et tensions entre ses
différentes dimensions,
  • différentes dimensions peuvent être « mises en valeur par les différents acteurs qui
interagissent dans l'organisation »,
  • il est complètement « illusoire de posséder un indice synthétique de cette
performance »,
o « la performance est un concept complexe et même paradoxal » en ce sens où
l'on est pas performant tout le temps dans toutes les dimensions mais « c'est
une recherche constante une poursuite de l'excellence ».
Dans « Définition de la performance hospitalière »269, Anne-Lise Guisset nous propose une
synthèse des modèles d’organisation des structures hospitalières, en en dénombrant quatre
types :
  • Rational/Goal model, rationnel/accomplissement des objectifs de l’organisation.
Ces modèles proposent une vision instrumentale et rationnelle de l’organisation. Il
s’agit de la théorie de Price270 selon laquelle les organisations existent pour
« remplir un certain nombre de buts et d’objectifs ». La performance est liée à la
mesure de l’accomplissement de ces buts et objectifs, ce qui peut être délicat tant
le système est complexe.
  • Human Relations/Satisfactions/stratégic constituancy/natural system model : un
modèle basé sur le facteur humain. Ce modèle mêle l’école des relations humaines
et la dimension politique. Il y a une grande confiance en l’individu qui n’a pas (ou
peu) besoin d’être contrôlé. La performance est mesurée ici « sur le climat social,
le moral, l’absence de conflits, la cohésion entre les membres ».
  • Open system model : système ouvert sur l’environnement. L’organisation est « une
entité étroitement dépendante de son environnement271, la mesure de la
performance s’appuie sur l’obtention de ressources nécessaires à sa croissance ».
269 Guisset, A.-L., Sicotte, C., Leclercq, P., & D’Hoore, W. (2002). Définition de la performance hospitalière  :
une enquête auprès des divers acteurs stratégiques au sein des hôpitaux. Sciences sociales et santé, 20(2), 65–
104. http://doi.org/10.3406/sosan.2002.1553
270 Price, J. L. (1972). Handbook of organizational measurement.
271 Yuchtman, E., & Seashore, S. E. (1967). A system resource approach to organizational effectiveness.
American sociological review , 891-903.
  • Internal/decision process model : orientation vers les processus internes. Cette
orientation « met en avant la gestion de l’information, qui devient crucial pour la
prise de décision éclairée. »
Dans l’objet d’étude qui nous intéresse, il nous apparait que le modèle Open system model,
bien que décrit ici, est moins présent dans les établissements de l’ESR. Il en est de même pour
le Rational/Goal model, il paraît difficile d’évaluer la performance globale d’un établissement
de l’ESR. Pour en témoigner, des classements existent, notamment le très célèbre Classement
Académique des universités Mondiales 2015 (ARWU) publié chaque année par le Centre de
Recherche des universités au premier rang Mondial dans l’Université Jiao Tong de Shanghai.
Ce classement ne prend en compte que le volet Recherche des établissements en ciblant « six
critères, comme le nombre de prix Nobel et médailles Fields, le nombre de chercheurs les
plus cités dans leur disc ipline, le nombre de publications dans les revues scientifiques Nature
et Science, le nombre de chercheurs répertoriés dans, le Science Citation Index-Expanded
(SCIE) et le Social Science Citation Index (SSCI), et la performance moyenne des
professeurs. », pas les deux autres missions des universités en France.
Il nous faut donc trouver une base d’analyse qui s’appuierait sur divers modèles dominants, et
qui puisse par là-même être un modèle intégrateur au sein duquel les diverses perspectives de
la performance organisationnelle sont bien intégrées. La finalité de cette vision est d’essayer
d’enrichir le concept de performance en rendant visible plusieurs dimensions de cette
performance des établissements de l’ESR.


2.5.3 Vers un outil d’analyse de la performance : le fonctionnalisme[modifier]

parsonien
Toujours inspiré par les travaux en sciences de gestion dans le domaine des organisations
hospitalières, c’est le modèle Parsonien qui enrichirait à ce jour notre capacité à analyser.
Résumer la sociologie de Parsons en peu de paragraphe semble illusoire, mais certains de ses
travaux, notamment sur le fonctionnalisme, étudié avec précision et parfois controverse par
Guy Rocher272, nous incite à utiliser le concept de fonctionnalisme parsonien dans notre thèse.
En effet, il se caractérise selon cet auteur d'une triple manière :
272 Rocher, G. (1971). La sociologie parsonienne: influence et controverses. Sociologie et sociétés, 3(2), 135–
150. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.erudit.org/revue/socsoc/1971/v3/n2/001647ar.html
  • le « fonctionnalisme systémique », cette conception du fonctionnalisme s'alimente
chez Parsons à la biologie contemporaine. C'est sur cette dernière qu'il s'appuie
pour affirmer que « la notion de fonction est corrélative à celle du système
vivant, que ce soit un système biologique ou un système d'action ». Il associe
dans cette vision, la notion de structure, l’organisation statique, et la notion de process,
l’aspect dynamique des organisations.
  • « le fonctionnalisme parsonien n'est pas seulement celui du système d'action, c'est
aussi le fonctionnalisme d'un système en action. » Il combine une approche
structurelle-fonctionnelle à l’approche systémique. La théorie de nature structurelle-
fonctionnelle « présentait à ses yeux l'avantage d'offrir un cadre analytique rigoureux,
utilisé dans les sciences dites dures ». Dans ce nouveau modèle, « la notion de
fonction est dissociée de celle de structure pour s'identifier à celle de système, ce qui
la place au niveau le plus général d'analyse, qui est vraiment le sien ».
  • le troisième caractère du fonctionnalisme parsonien est de nature à en diminuer la
qualité : c'est le « fonctionnalisme évolutionniste ». Parsons était depuis toujours
évolutionniste à son insu et son fonctionnalisme en a été profondément marqué. Son
avis sur l’évolutionnisme des organisations se forge en étudiant la société industrielle
qui est, selon lui, « la société la plus parfaite parce que c'est en elle que l'organisation
sociale et la rationalité de l'homme se déploient et se réalisent le mieux. »
Toujours dans le domaine des organisations hospitalières, nous empruntons le raisonnement
de Claude Sicotte, dans « La performance organisationnelle des organismes publics de
santé » 273 qui s’appuie sur Parsons274 .
273 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). op.cit. p 37
274 Parsons, T. (1977). The evolution of societies. Prentice Hall.
Figure 27 : Conceptualisation de la performance organisationnelle de Parsons.
Ces travaux définissent quatre fonctions essentielles des organisations dans ce modèle de la
performance organisationnelle : l’adaptation, l’atteinte des buts, le maintien des valeurs et
climat organisationnel, et enfin la production.
L’adaptation touche ici « la métaphore du système vivant, qui doit trouver des ressources
pour survivre tout en se tran sformant pour s’adapter à un environnement dynamique »275. A
court terme, les établissements de l’ESR se doivent de « maintenir leur activité » en
mobilisant des ressources internes et externes. A plus long terme, il s’agit de « développer son
habilité à se transformer afin de s’adapter aux changements externes (habileté à innover et à
se transformer). »276
L’atteinte des buts est liée à « la capacité de l’organisation d’atteindre ses buts
fondamentaux »277. Pour les établissements de l’ESR, il s’agit de faire référence à
l’amélioration des trois missions de service public (la formation, la recherche et l’insertion
professionnelle) dans un cadre d’économie de moyens (efficience) pour satisfaire les
différents groupes d’acteurs internes ou externes.
275 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). op.cit. p 39
276 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 40
277 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 41
La production touche ici « le noyau technique de l’organisation ». Dans le cadre de l’ESR,
cela concerne la plupart des indicateurs de réussite des usagers du service public, ceux des
plans quadriennaux et ceux de contractualisation avec l’Etat. C’est dans cette fonction que
l’ « on trouve généralement le plus d’indicateurs »278 .
Le maintien des valeurs et climat organisationnel est « tributaire des valeurs partagées ou
non par les différents groupes d’acteurs œuvrant dans l’organisation. ». Cette fonction est
« celle qui produit du sens, de la cohésion au sein de l’organisation. » et « produit et
reproduit le système de valeurs au sein duquel baignent les trois autres fonctions. »279. Dans
les établissements de l’ESR, elle dépend de la « personnalité » de la gouvernance et de
l’équipe décisionnelle.
Figure 28 : Les dimensions de la performance organisationnelle selon Sicotte.
278 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 42
279 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 43
L’équilibre entre ces quatre fonctions (figure ci-dessus) se réalise, toujours selon Claude
Sicotte. Toute la richesse de ce modèle repose sur cet équilibre, que nous pouvons mettre en
évidence en saisissant les interactions et liens réciproques entre ses quatre fonctions
essentielles : les six fonctions d’alignement (figure suivante)
Qui dit équilibre, dit surtout système cherchant à trouver l’équilibre, et donc système
fondamentalement dynamique « parce qu’en permanence les six fonctions d’alignements sont
négociées par les différents acteurs de l’organisation »280.
L’alignement stratégique correspond à la « planification st ratégique classique ». Cette
dimension concerne d’une part « l’appréciation de la compatibilité de la mise en œuvre des
moyens en fonctions de la finalité organisationnelle », et d’autre part «en réciprocité, la
pertinence des buts » au regard de l’environnement changeant des établissements de l’ESR
(Nouvelles lois, Nouvelles régions, COMUE, contexte de fusions) et « la recherche d’une
plus grand e adaptation organisationnelle ».
L’alignement allocatif réside d’une part « dans la justesse des moyens alloués parmi les
processus de production pour atteindre un but » et d’autre part, toujours par réciprocité,
« l’évaluation des mécanismes de d’adaptation afin qu’ils demeurent compatibles avec les
impératifs de production »281. Le fonctionnement en démarche de projet des établissements de
l’ESR favorise cette performance, et permet de relever des indicateurs concernant cette
mesure.
L’alignement tactique s’interroge « sur la pertinence des buts ». Cette performance réside
dans la « capacité des mécanismes de contrôle découlant des choix organisationnels à
gouverner le système de production, et d’autre part à évaluer comment les résultats de
production viennent modifier les choix des buts. »282 Le choix stratégique d’un établissement
est-il conforté par des résultats positifs au niveau local, national ou international ? Le suivi de
l’outil de mise en œuvre, la production, est-il mesurable ?
L’alignement opérationnel consiste à s’intéresser à la performance « dans la capacité des
mécanismes de génération de valeurs et du climat organisationnel à mobiliser positivement
ou négativement le système de production »283. On s’interroge ainsi sur les bienfaits ou
méfaits de l’impact des résultats de la production sur le système de valeurs et le climat
280 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 43
281 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 43
282 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 44
283 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 44
organisationnel. Dans le cadre des établissements de l’ESR, la mise en place d’une formation
ouverte à distance, a-t-elle un impact sur le climat ?
L’alignement légitimatif concerne « la performance dans la capacité des mécanismes de
génération des valeurs et du climat organisationnel à l’atteinte des buts organisationnels » et
d’autre part « en réciprocité, l’évaluation de la poursuite des choix et des buts de
l’organisation qui viennent modifier les valeurs et le climat »284. La mise en œuvre d’une
stratégie visant par exemple à optimiser l’offre de formation en regard des capacités de
l’établissement en termes de compétence parmi les acteurs présents, provoque-t-elle
l’adhésion de ces mêmes acteurs ?
Enfin l’alignement contextuel, ou « comment les mécanismes de génération de valeurs et de
climat mobilisent positivement le système d’adaptation » et réciproquement, « les impératifs
de l’adaptation qui viennent modifier les valeurs et le climat organisationnel. »285. La mise en
œuvre d’une nouvelle stratégie, une transformation numérique, crée des nouveaux projets
(colloque, réponse à appel d’offre) dans ce domaine.
Figure 29 : les 6 interactions permettant un alignement des 4 fonctions essentielles dans la performance
des organisations selon Sicotte.
284 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 45
285 Sicotte, C., Champagne, F., & Contandriopoulos, A.-P. (1999). Ibid. p 46

2.5.4 Vers la mesure de la performance des établissements de l’ESR :[modifier]

trois niveaux de mesure
Quelle que soit la fonction essentielle, ou les interactions précitées, des organisations, la
performance peut être mesurée et apporter une vision de la complexité du système observé.
Concernant cette mesure, il apparaît dans toutes les réformes de la fonction publique, un
contrôle de gestion chiffré, dont les éléments centraux se forgent autour d’indicateurs. Ces
derniers possèdent en effet, pour reprendre Catherine Paradeise286 « la vertu de proposer une
appréhension des objets identifiés à travers eux d’une manière plus uniforme, plus précise,
plus exhaustive, et en ce sens plus rigoureuse. ». Elle ajoute que « La rigueur des chiffres
fonde » selon Porter287 « l’objectivité des indicateurs, au sens où elle met les objets qu’une
société souhaite évaluer à distance des passions et des intérêts des acteurs qui en sont parties
prenantes. »288. Cette mesure peut alors concerner trois niveaux de l’organisation : l’individu,
le service et finalement l’organisation elle-même.


2.5.4.1 La performance individuelle[modifier]
Quel est intérêt de mesurer la performance d’un individu, si nous avons en tête que « le tout
est supérieur à la somme des parties » pour reprendre Aristote ? Cette régulation de la
performance en gestion des ressources humaines, permet de mettre en avant certaines
défaillances, mais reste à prendre avec précaution, chaque individu étant singulier. Il s’agit ici
de plus mesurer la motivation et de provoquer la motivation mais pour rappeler Anne
Bourguignon289, il existe « plusieurs sources de motivation, telles que l’estime de soi, la
reconnaissance, la réputation, ou la valorisation financière ».


2.5.4.2 La performance des services[modifier]
A ce niveau d’analyse, plus haut que le précédent, il s’agit de positionner la performance au
niveau des fonctions supports des établissements de l’ESR : le système d’information, la
gestion financière, la gestion des ressources humaines etc.… Chacune d’entre elles étant
286 Paradeise, C. (2013). Le sens de la mesure. La gestion par les indicateurs est-elle gage d’efficacité ? Revue
d’économie du développement, Vol. 26(4), 67-94. http://doi.org/10.3917/edd.264.0067
287 Paradeise, C. (2013). op. cit. p80

: : : : 288 Paradeise, C. (2013). op. cit. p85

289 Bourguignon, A. (2004). Performance management and management control: evaluated managers’ point of
view. European Accounting Review, 13(4), 659-687.
considérée comme un centre de coût de l’établissement qui doit justifier, chaque année
budgétaire, des moyens alloués pour mener à bien sa mission au sein de l’organisation.


2.5.4.3 La performance globale[modifier]
Comme nous l’avons écrit dans le paragraphe précédent, il nous paraît plus intéressant de
mesurer la performance globale de l’organisation, la mesure se fera alors sur les 6 interactions
entre les fonctions essentielles de l’organisation. Certains indicateurs sont d’ailleurs explicites
pour les universités, ils font parties des indicateurs contrat-État demandés aux équipes
présidentielles des établissements de l’ESR.
Dans le tableau ci-dessous, nous retrouvons les sous-dimensions, et les fonctions essentielles,
étayées par des exemples d’indicateurs extraits de rapport d’établissement.
Fonctions Sous dimensions Exemples de sous-dimensions appliquées à l’ESR
essentielles d’une Université (données anonymes recueillies lors
d’une évaluation HCERES en 2016)
Atteintes des • Efficacité Taux de passage de l1 en l2 (source sise)
buts • Efficience Taux de réussite en licence en trois ans (source sise)
  • Satisfaction des Evaluation des enseignements
groupes d’intérêts avec les Taux d’occupation des locaux
résultats Variation des horaires d’ouverture
Adaptation • Capacité d’acquisition Flux d’étudiants entrants en master : part des nouveaux
des ressources étudiants entrants dans l’établissement
  • Orientation vers les Taux d’étudiants inscrit en formation continue
besoins populationnels Aide à l’insertion professionnelle
  • Capacité d’attraction Mobilité internationale sortante et entrante
des publics Nombre de production de ressources pédagogiques
  • Habileté à mobiliser
l’appui communautaire
  • Habileté d’innovation
et de transformation
Production • Volume de services Revenus consolidés de la valorisation de la recherche
produits Qualité du pilotage en matière de gestion immobilière
  • Coordination Nombre de formation dématérialisée
  • Productivité Nombre de production de ressources pédagogiques
  • Qualité Pilotage du système d’information et des services
numériques aux usagers
Qualification du système d’information
Pilotage financier
Ressources de fonctionnement
Part des biatss sur des fonctions soutien
Maintien des • Consensus autour de Endorecrutement des enseignants-chercheurs : bilan et
valeurs et climat valeurs fondamentales prévision
organisationnel (professionnalisme, Mise en place de contrat pour favoriser le
dévouement, éthique) développement des compétences des ressources
  • Climat organisationnel humaines
(motivation, allégeance
organisationnelle)
Tableau 5 : Les sous-dimensions de la performance organisationnelle.


2.5.4.4 La relation numérique-performance : les facteurs intervenants[modifier]
Pour nous, il peut exister une relation entre la performance globale de l’établissement de
l’ESR et l’usage du numérique en son sein. Nous décidons de nous caler sur le modèle de
Parsons, et de le transférer dans le domaine de l’organisation de l’établissement de l’ESR, en
ne regardant que le numérique défini précédemment.
Nous avons ainsi construit la figure suivante, en nous interrogeant sur les « bonnes
questions » à se poser concernant les performances du numérique mise ou à mettre en place.
Ces questions, non exhaustives par nature, pourraient paraitre réductrices, mais
correspondent, à notre avis, aux premiers questionnements dans l’approche de l’analyse du
numérique d’un établissement. Les terrains nous apporteront confirmation ou infirmation de
cette première approche.
Figure 30 : Stratégie organisationnelle du numérique des établissements de l’ESR : quelles questions pour
quelles performances ?
Nous avons délimité l’externe et l’interne, avec une frontière qui serait fondée sur les
frontières naturelles des établissements, ainsi pour l’externe nous trouvons les nouvelles lois,
les partenaires socio-économiques, le contexte des nouvelles régions, les COMUE, et contexte
de fusions… Pour l’interne, il s’agit de se concentrer sur les services, les composantes, les
laboratoires de recherche, les conseils et leurs commissions…
Les moyens concernent le nombre d’emplois consacrés au numérique, la reconnaissance
horaire dans l’innovation par le numérique.
Les fins, fortement liées à la production, concerneraient le nombre de MOOC, de FOAD, les
taux d’usage de l’ENT, le numérique et recherche, le système d’information…
Nous avons aussi porté notre intérêt sur un questionnement au sujet des six fonctions
d’alignement du modèle de Parsons :
  • Quelle gouvernance de la politique numérique ? pour l’alignement stratégique,
  • Quel budget consacré au volet numérique ? pour l’alignement allocatif,
  • Quelle adhésion des acteurs ? pour l’alignement légitimatif,
  • Quelle pertinence du numérique dans les missions ? pour l’alignement tactique,
  • Quelle adoption de l’usage du numérique ? pour l’alignement opérationnel,
  • Quelles créations de valeurs pour l’établissement ? pour l’alignement contextuel.


2.6 Une approche conceptuelle de l’Université[modifier]

résolument systémique et complexe
Nous l’avons vu dans ce chapitre, l’approche que nous avons des TIC est explicitement
sociotechnique. Elle s’appuie autant sur la connaissance des TIC elles-mêmes que sur leurs
effets ou leurs usages. Nous considèrerons que la perception des TIC diffère suivant la posture
que nous prendrons dans l’organisation qu’est l’Université. Nous ferons aussi attention à la
perception des TIC que se font les acteurs, en cherchant le sens qu’ils donnent à ce concept.
Nous remarquons comme Philippe Bernoux que « la sociologie des organisations a évolué
depuis ces vingt dernières années »290 . Des concepts de réseaux, de communication
interpersonnelle, et bien sûr les TIC, bouleversent l’analyse stratégique des organisations que
nous souhaitons réaliser. Il devient impossible d’observer uniquement l’Université
analytiquement, et la complexité prend toute sa place dans nos schémas de compréhension. Il
n’y a pas une logique qui explique l’organisation mais bien des logiques, qui seront tour à tour
antagonistes, complémentaires, interagissant l’une sur l’autre… Nous défendons ainsi l’idée
que l’analyse à travers les sciences de l'information et de la communication des organisations
290 Bernoux, P. (2014). Op cit p271
offre cette richesse d’observation. Les universités seront donc considérées comme des
systèmes vivants et dynamiques, constamment en mouvement, qui possèdent des
caractéristiques intrinsèques (performance, image de marque, par exemple) leur permettant
d’évoluer dans le système universitaire de l’ESR français et mondial.
Cette deuxième partie nous a amené à mieux appréhender l’Université, mais ce serait
réducteur. Des signes d’adaptation aux deux mouvements cités en introduction apparaissent
depuis 2013, à travers la loi relative à l’ESR. Il faut nous préparer à une analyse dynamique
des phénomènes créatifs de l’évolution organisationnelle, qu’elle semble prendre, et tout
particulièrement le design organisationnel dans le domaine de la gouvernance du numérique
universitaire.
3 Vers un nouveau design de la gouvernance du
numérique universitaire centré sur les usages
« Le design comme méthode de conception et d’innovation, encore trop peu
répandue, mérite toutefois d’être prise en compte dans sa dimension
stratégique et d’engagement sociétal »291
(Vieira, 2014)
« L’usager est investi de compétences spécifiques : non seulement il possède
une maîtrise relative du dispositif technique mais surtout, il agit de manière (à
la fois) autonome et contrainte dans sa situation de travail compte tenu des
dispositions et compétences acquises dans le contexte organisationnel de la
situation »292
(Proulx, 2015)
Cette partie consacre des propositions de perception de l’objet de recherche au regard des
concepts énoncés dans la partie précédente. Plus en lien avec le terrain, nous proposons notre
interprétation de la réalité complexe du système de l’ESR, en introduisant des outils de la
pensée comme l’idéaltype. C’est aussi l’occasion de mieux appréhender la gouvernance du
numérique des universités, de tenter une définition de la nouvelle gouvernance et de la
transformation numérique de l’ESR.
291 Vieira, L. (2014). Design, vous avez dit Design? Présenté à 10E colloque international EUTIC 2014, LIsboa,
Portugal.
292 Proulx, S. (2015). La sociologie des usages, et après ? Revue française des sciences de l’information et de la
communication, (6). https://doi.org/10.4000/rfsic.1230

3.1 Caractérisation des usages du numérique par[modifier]

publics des établissements de l’ESR
Nous constatons que si les actuelles connaissent parfaitement les formes des publics des
universités, en interne (enseignants, enseignants-chercheurs, chercheurs, personnels
techniques, personnels administratifs, personnels des bibliothèques, les étudiants et
stagiaires), en externe (les politiques, le grand public, les autres universités …), elles sont
encore en recherche d’une représentation typologique des formes d’usage du numérique
commune l’ensemble des universités ou singulière à chacune d’entre elle. Avec cette
connaissance, cette « nouvelle gouvernance » des établissements de l’ESR pourra élaborer de
nouveaux modèles de stratégie, d’action, permettant la mise en place de dispositifs
numériques efficients pour ces publics visés.
Nous souhaitons dans cette partie de la thèse confronter deux approches celle qui viendrait de
l’analyse des usages existants des membres de l’Université (une typologie des usages
numériques public) et celle qui viendraient de l’existence de référentiel métier une sorte de
norme indispensable des usages du numérique.


3.1.1 Vers une typologie des publics d’usagers du numérique des[modifier]

universités en contexte d’apprentissage
Pour faire suite au raisonnement précédent nous souhaitons mieux appréhender les publics des
universités et leurs usages293 en développant l’idée d’une approche écologique typologique.
Pour cela nous avons réalisé une démarche typologique sur un des cas qui pourrait nous
intéresser : les étudiants en apprentissage.
La méthode idéale-typique de Weber294, dans l’analyse qualitative du développement des
usages du numérique lors du processus d’apprentissage au sein de certains établissements de
l’ESR peut nous apporter cela. Ce paragraphe propose de présenter les questions soulevées
293 Mocquet, B., & Vieira, L. (2016). Vers une typologie des publics d’usagers du numérique des universités en
contexte d’apprentissage. Présenté au Colloque international, Problématiques de la notion de type en Sciences
Humaines et Sociales, Université Jean Jaurès, Toulouse.
294 Weber, M. (1904). L’objectivité de la connaissance dans les sciences et la politique sociales. Essais sur la
théorie de la science, 180-181.
par cette approche méthodologique : une recherche à caractère exploratoire, visant à mettre au
point un ou des outils conceptuels à des fins ultérieures.


3.1.1.1 La problématique de recherche : la compréhension de rapports[modifier]
d’interaction
Il s’agit ainsi d’appliquer une méthodologie existante et reconnue sur un terrain de la
sociologie des usages du numérique. Déjà abordée par Marx295 et par Durkheim296, Weber a
repris cette notion d'idéaltype. Il s'agit d'une construction intellectuelle qui fonctionne comme
modèle pour comprendre la réalité et permet au sociologue de comprendre la signification des
phénomènes concrets. L’idéaltype comprend quatre formes, selon que l'action de l'individu est
fondée sur la coutume, sur le sentiment, sur une conviction ou sur une confrontation
rationnelle des moyens et des buts.297
Nous nous positionnons volontairement sur l’analyse et la compréhension des rapports
d’interaction entre le processus d’apprentissage et les usages du numérique des apprenants.
Cette manière de percevoir la réalité est singulière car elle s’intéresse finalement à
l’interaction entre une situation réelle de nos universités et un processus plus globalisant, le
développement des usages du numérique de nos étudiants.
C’est donc l’étude de la nature et des formes prises par les interactions multiples et
incessantes entre l’usage du numérique et les processus qui ont amené à son développement
dans les universités qui oriente cette communication. Raisonner en termes d’interaction
permet d’élaborer un questionnement des rapports entre le processus d’apprentissage et le
développement des usages du numérique : nous prenons en compte la manière dont le
développement des usages du numérique induit des changements dans la manière
d’apprendre, et comment cette transformation facilite ou génère des nouveaux usages du
numérique.


3.1.1.2 Une exploitation de la méthode idéal-typique de Max Weber[modifier]
Ce qui nous intéresse dans la conceptualisation idéal-typique, c’est avant tout la construction
logique, méthodique, sous l’angle de laquelle sera examinée la réalité empirique.
295 Marx, K. (1862). Class Conflict and Law. Karl Marx: Selected Writings for Sociology and Social Philosophy,
ed. TB Bottomore and M. Rubel. Middlesex, UK: Penguin.
296 Durkheim, E. (1893). 1964. The division of labor in society. New York: Free Press.
297 Larousse, (2016). Encyclopédie Larousse en ligne - Max Weber. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Max_Weber/138958
L’écosystème du numérique dans les universités est particulièrement complexe, et il nous
paraît judicieux d’élaborer cette démarche pour éclaircir le fonctionnement et la nature dans le
champ des sciences sociales de ce terrain. En nous appuyant sur Max Weber, plus
particulièrement sur son concept d’idéaltype, nous espérons ainsi « résoudre
méthodiquement les problèmes soulevés par les écarts – souvent importants – entre la réalité
sociale telle qu’elle peut être observée ou mesurée et les représentations, globalisantes ou
partielles, que sont les théories et les modèles. »298
Nous tentons ici de produire des concepts les plus clairs possibles afin de nous permettre de
mieux comprendre la réalité des universités aujourd’hui.
Le concept de types appliqués aux usages du numérique
Le concept de types a joué un rôle important depuis le début de sciences sociales empiriques,
et plus particulièrement pour Weber299 comme nous l’avons rappelé. Notre démarche s’appuie
sur les sciences de l'information et de la communication, nous percevons un intérêt à
appliquer une démarche empruntée à une autre discipline. Une démarche similaire a été
réalisée dans un tout autre domaine, et dont nous retenons, outre la méthode, que les types
sont construits pour comprendre et expliquer les réalités sociales complexes, aider à mieux
conceptualiser cette réalité.
Chaque fois que nous percevons la réalité ce qui nous entoure, nous procédons à un exercice
de catégorisation, mais comment procède-t-on pour catégoriser ? « la catégorisation se fait
sur la base de propriétés communes »300. Cette base de propriétés communes qui constituera
la catégorie, permet de regrouper des objets observés à leur future catégorie. Pour constituer
une catégorie, nous devons nous appuyer sur un certain nombre d'attributs en commun. Ainsi
pour vérifier si un objet appartient à une catégorie précise, nous observons tous si cet objet
possède les attributs de la catégorie. Si tel n'est pas le cas, l'objet en question ne fait pas partie
de la catégorie. Cette conception de la catégorisation répond à un modèle de « conditions
nécessaires et suffisantes » qui est connu sous le nom « CNS » selon Kleiber.
298 Jeanne, L. (2001). Exemple de construction d’un idéal type  : le cas de la diffusion spatial et idéaux-types de
pratique du karaté. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.ssnpstudents.com/wp/wp-
content/uploads/2015/02/ideal-type.pdf
299 Weber, M. (1904). Op cit.
300 Kleiber, G. (1988). Prototype, stéréotype: un air de famille? DRLAV. Revue de Linguistique , (38), p21.
Construction du modèle idéal-typique et extraction d’une typologie classificatoire dans
une situation d’apprentissage
Nous nous attacherons à montrer dans cette partie le cheminement pour construire le modèle
idéal-typique devant permettre de mettre en évidence les interactions entre le processus
d’apprentissage et des usages du numérique des apprenants. Ce modèle permet de dégager
une typologie qui regroupe les principales formes d’usages du numérique observés.
Quatre idéaux-types d’usage du numérique en situation d’apprentissage ont été élaborés sur la
base d’une confrontation constante avec des situations concrètes dans des établissements de
l’ESR. Ces quatre idéaux-types de l’usage du numérique dans la situation d’apprentissage ont
été élaborés sur la base d’une observation non participante de situations concrètes
d’enseignement entre apprenants et enseignants de l’Université. Cette catégorisation s’appuie
sur trois premières catégories de Proulx, l’interaction entre l’apprenant et les environnements
numériques de travail, la coordination entre l’apprenant et l’enseignant, le tout dans la
situation de l’usage c’est-à-dire dans un contexte d’apprentissage.
Le Tableau ci-dessous montre la démarche suivie pour identifier les quatre idéaux-types.
Caractérisation en termes d’interaction entre
l’apprenant et les environnements numériques de
travail
Technicité de l’usage du numérique
Débutant Expert
(Taches essentielles (Taches professionnelles)
transversales)
a t
l e Idéal type Idéal type
e t « l’apprenant en « l’apprenant en
d n
a présentiel débutant en présentiel expert en
n
s e l numérique» numérique»
r
e e
p i
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r a n Idéal type 1 Idéal type 2
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o g « l’apprenant à distance « l’apprenant à distance
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a o n s débutant en expert en numérique»
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a o n r
o e o
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C c l F
Tableau 6 : L’espace d’attributs permettant d’extraire les idéaux-types des usagers du numérique de
l’Université en contexte d’apprentissage.
Les quatre idéaux-types permettent donc de différencier des polarisations possibles, selon
quatre orientations. Ces types idéaux sont en même temps les quatre idéalisations qui
structurent les imaginaires collectifs construits et reproduits dans les universités.
Chaque idéaltype est la combinaison de deux attributs élémentaires :
  • Idéal type 1 « l’apprenant en présentiel débutant en numérique ». Il est caractérisé par
la réalisation de tâches essentielles (utilisation d’un poste dont les fichiers sont en
local, traitement de texte sans mise en forme imposée, recherche d’informations sur le
web, communiquer par courriel) durant un processus d’apprentissage en présentiel ;
  • Idéal type 2 « l’apprenant en présentiel expert en numérique» Il est caractérisé par la
réalisation de tâches professionnelles (utilisation d’un poste dont les fichiers sont en
local et à distance, outils professionnels dont bureautique avec une mise en forme
imposée, production d’informations sur le web, communication par plateforme avec
identification) durant un processus d’apprentissage en présentiel ;
  • Idéal type 3 « l’apprenant à distance débutant en numérique». Il est caractérisé par la
réalisation de tâches essentielles (utilisation d’un poste dont les fichiers sont en local,
traitement de texte sans mise en forme imposée, recherche d’informations sur le web,
communication par courriel) durant un processus d’apprentissage à distance ;
  • Idéal type 4 « l’apprenant à distance expert en numérique». Il est caractérisé par la
réalisation de tâches professionnelles (utilisation d’un poste dont les fichiers sont en
local et à distance, outils professionnels dont bureautique avec une mise en forme
imposée, production d’informations sur le web, communication par plateforme avec
identification) durant un processus d’apprentissage à distance ;
Première réduction typologique
Dans la réalité, l’idéal type 4 est une fin en soi, un objectif optimal à atteindre par la stratégie
de gouvernance du numérique des établissements de l’ESR. Cependant si l’on pousse cette
logique à l’extrême, cela entraîne une conséquence qui ferait que les activités des universités
se dérouleraient « hors les murs », ce qui n’est pas forcément le résultat recherché d’une
manière générale en formation initiale.
Nous considérons que cette position idéale ne sera pas influencée par des stratégies de
gouvernance du numérique, et à des fins de simplification nous réduirons notre typologie aux
trois autres idéaux.
L’apparition progressive de ces types idéaux dans la formation des apprenants
La représentation graphique proposée a l’avantage de montrer les positions possibles, il nous
faut maintenant présenter les effets et le développement des usages du numérique.
  • Etape 1 : du non-usage du numérique à « l’apprenant en présentiel débutant en
numérique » (idéaltype 1),
Figure 31 : une dimension dans la progression de l’usage.
  • Etape 2 : de « l’apprenant en présentiel débutant en numérique » à « l’apprenant en
présentiel expert en numérique» (idéaltype 2) : la grande majorité des formations dans
les établissements de l’ESR s’appuie sur une modalité en présentiel, la position se
développe le long de la diagonale reliant une position à l’autre.
Figure 32 : deux dimensions dans la progression de l’usage.
  • Etape 3 : de « l’apprenant en présentiel débutant en numérique » à « l’apprenant à
distance expert en numérique» (idéaltype 3) : si l’on se place d’un point de vue
évolution du numérique dans l’ESR, l’enseignement à distance s’est peu à peu
développé sur les plateformes numériques. Sur la figure suivante, nous retrouvons
ainsi le positionnement possible, il prend ici la forme d’un triangle hachuré en bleu.
Figure 33 : Trois dimensions dans la progression de l’usage.
Ce positionnement dans chaque situation suit deux principes :
  • l’usage du numérique est toujours orienté par un ou plusieurs idéaux-types. Cela
signifierait que si l’un des idéaux-types s’affaiblit en termes de positionnement, c’est
l’un des deux autres qui prendrait le relais.
  • Les idéaux-types étant exclusifs les uns aux autres, cela voudrait dire que le
positionnement est une combinaison de l’un des trois, ce qui fait apparaître l’espace
hachuré en bleu comme espace possible.
Avec cette représentation graphique, nous pouvons mesurer un pourcentage de poids par
idéaltype, de manière qualitative, étant dans la difficulté de mesurer de manière quantitative.
Passage du modèle idéal-typique à une typologie classificatoire
En utilisant une pondération en trois classe, comme indiqué dans le tableau ci-dessous, nous
pouvons proposer la représentation ternaire de cette typologie.
Classe Signification
( « classe » et « signification » centré et en gras pour lisibilité du tableau)
Non Pas ou peu d’éléments liés à l’idéal type Idéaltype exclu
Moyennement Des éléments observables mais peu répétés, Idéaltype secondaire
Beaucoup Orientation nettement dominante. Idéaltype Dominant
Tableau 7 : Description de l’échelle représentative.
La représentation en diagramme triangulaire, ou graphique ternaire, permettra ainsi de
proposer une représentation en poids par idéaltype.
Par ailleurs, dans un souci de compréhension, nous avons nommé l’évolution sur les arêtes du
triangle principal en :
  • Mise à distance du dispositif de formation,
  • Autonomie par rapport aux contenus,
  • Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils numériques
On peut noter que sur l’axe de la mise à distance, peuvent apparaître les formations dites
« hybrides »301 alternant des formes d’apprentissage présentielles et à distance.
301 Perriault, J. (1996). La communication du savoir à distance: autoroutes de l’information et télé-savoirs.
Editions L’Harmattan.
Figure 34 : Représentation des positions d’usage en diagramme ternaire.
Afin de mieux appréhender la figure ci-dessus, nous choisissons de prendre comme exemple
l’un des cas de la typologie, représenté ci-dessus par le n°6 : cas d’un apprenant utilisant un
dispositif de formation sans mise à distance, ayant moyennement besoin d’accompagnement
dans la maitrise des outils numériques et non autonome par rapport aux contenus.
Le tableau 8 permet d’opérer toutes les combinaisons d’attributs possibles : les 9 cas
paraissent possibles, il n’apparaît pas pour nous à ce stade de restriction de type par
incompatibilité avec la réalité du contexte d’apprentissage.
Secteur Pondération Combinaison Qualificatio
n
1 Très Mise à distance du dispositif de formation Possible
Non Autonomie par rapport aux contenus
Non Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
2 Moyennement Mise à distance du dispositif de formation Possible
Non Autonomie par rapport aux contenus
Moyennement Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
3 Moyennement Mise à distance du dispositif de formation Possible
Non Autonomie par rapport aux contenus
Non Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
4 Moyennement Mise à distance du dispositif de formation Possible
Moyennement Autonomie par rapport aux contenus
Non Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
5 Non Mise à distance du dispositif de formation Possible
Non Autonomie par rapport aux contenus
Très Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
6 Non Mise à distance du dispositif de formation Possible
Non Autonomie par rapport aux contenus
Moyennement Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
7 Non Mise à distance du dispositif de formation Possible
Moyennement Autonomie par rapport aux contenus
Moyennement Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
8 Non Mise à distance du dispositif de formation Possible
Très Autonomie par rapport aux contenus
Moyennement Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
9 Non Mise à distance du dispositif de formation Possible
Très Autonomie par rapport aux contenus
Non Besoin d’accompagnement dans la maitrise des outils
numériques
Tableau 8 : Combinaisons des attributs et deuxième réduction typologique.
De notre point de vue, notre raisonnement met en évidence des types qui méritent d’être
confrontés avec la réalité, dans le cadre d’une situation d’apprentissage à distance, car ils nous
informent sur des cas théoriquement possibles. Pour autant, il nous paraît très difficile de
déterminer les types dominants en termes de population, ce qui influencerait ou alerterait, en
amont de la formation, les dispositifs à mettre en place pour développer les usages du
numérique.


3.1.1.3 Intérêt de cette analyse typologique[modifier]
La finalité de notre analyse est de nous interroger sur la place que prend la notion de type
dans l’évolution de ces usages du numérique à l’Université. Il semble en effet utile de pouvoir
à terme caractériser une standardisation des usages afin de d’optimiser l’accompagnement des
évolutions de l’industrie de l’informatique ainsi que des méthodes pédagogiques qu’elles
facilitent. Vers une caractérisation des usages du numérique : approche par les référentiels de
compétences

3.1.2 Approche par les référentiels de compétences du numérique[modifier]

Dans ce paragraphe nous inversons notre approche en travaillant sur l’usage du numérique
dans les établissements de l’ESR à travers les référentiels de compétences des différents
acteurs du système.


3.1.2.1 Les usages du numérique pour un étudiant à l’Université[modifier]
Usages en relation avec les compétences de la certification C2i
Dans le domaine de la reconnaissance des compétences du numérique transversales, en
France, il existe un brevet et deux certifications : le Brevet Informatique et Internet Adultes
(B2iAdultes), le Passeport de Compétences Informatique Européen (PCIE), le Certificat
Internet et Informatique (C2i). Le C2i est une certification instituée par le MENESR attestant
l’acquisition de compétences numériques nécessaires à la poursuite d’études ou à l’insertion
dans la vie professionnelle. On distingue le C2i1, des C2i2, ces derniers s’appuyant sur des
spécialités professionnelles. Le C2i1 se prépare dans les universités en présentiel, ou en
hybride, comme il est décrit par l’expérimentation du projet C2i Université Laval-Université
de Bordeaux302
Ce référentiel s’articule en domaine de formation (figure suivante) : travailler dans un
environnement numérique évolutif, être responsable à l’ère du numérique, produire traiter
exploiter et diffuser les documents numériques, organiser la recherche d’information à l’ère
du numérique, puis travailler en réseau, communiquer et collaborer.
302 Lévesque, J.-F., Rouissi, S., & Mottet, M. (2010). Une formation à distance pour la certification des
compétences à l’ère du numérique: le projet C2i Université Laval-Université de Bordeaux. Revue internationale
des technologies en pédagogie universitaire/International Journal of Technologies in Higher Education, 7(3),
19–31. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.erudit.org/revue/ritpu/2010/v7/n3/1003561ar.html
Figure 35 : Les cinq domaines de compétences du référentiel C2i1.
En licence, le C2i 1 a été généralisé dans la plupart des établissements de l’ESR dans le cadre
de la mise en place du plan Licence en 2010.
En master, pour les C2i2, peu d’établissements sont entrés dans cette logique de certification,
qui s’appuie sur les spécialités métiers. Les universités peuvent proposer la mise en place de
ces certificats de compétences informatiques dans les métiers de l'environnement et
l'aménagement durables, les métiers du droit, les métiers de l'ingénieur, de l’administration et
les métiers de l'enseignement.
Figure 36 : les cinq certifications C2i2.
Le processus de généralisation de cette certification dans les universités est intéressant à
observer a posteriori . En effet, cette mise en place entre 2004 et 2010 a été confiée, dans une
logique de conduite de changement visant la performance, à un porte-parole : le
correspondant C2i de l’établissement. Sa mission a été d’œuvrer pour mettre en œuvre la
formation, la certification et mais aussi pour mieux apprécier l’usage du numérique des
étudiants.
Lors du dernier séminaire C2i en février 2016 à l’Université de Perpignan, Sophie Pêne, Vice-
Présidente du Conseil National du Numérique, nous a rappelé l ‘« extraordinaire rôle des
correspondants C2i qui sont en lien direct avec les étudiants et les directions des
établissements »303. Elle ajoutera qu’ils sont aujourd’hui « les mieux placer pour estimer les
usages des étudiants et construire un véritable projet de certification des compétences
numériques avec les équipes présidentielles ». Elle ajoutera qu’il s’agit ici d’ « une véritable
puissance humaine et le meilleur réseau de veille qui existe concernant les usages du
303 Platinium. (2016). Allocution introductive du séminaire national C2i . Perpignan. Consulté à l’adresse
http://platinium.univ-perp.fr/fr/menu/seminaire-c2i/replay-du-seminaire/replay-44713.kjsp
numérique des étudiants à l’Université »304. Elle a ajouté que « ce sont des capteurs beaucoup
plus en prise avec le monde étudiant que la majorité des enseignants »305
Les points d’amélioration de ce référentiel
Toujours lors du même séminaire, Claude Bertrand, conseiller stratégique pédagogie
DGESIP-MENESR, estime que « le projet de refonte part du constat que le C2i ne
correspond plus aux besoins que nous lui avions assignés à l’origine, notamment de donner
aux étudiants une culture numérique ». Le processus est engagé depuis un an environ et le
nouveau C2i devrait être efficient « avant la fin de l’année 2016 ou courant 2017 », ce
processus verra apparaître PIX, une plateforme en ligne d'évaluation et de certification des
compétences numériques des citoyens francophones306. Claude Bertrand souligne un point
important pour le futur : la différentiation entre la formation et la certification, non plus d’un
point de vue pédagogique mais ici organisationnel.
Pour avoir participé à des groupes techniques sur cette refonte de cette certification, et à des
ateliers lors de ce séminaire, nous estimons, comme un grand nombre de correspondants, que
cette certification doit résoudre à la fois des problématiques d’échec et les problématiques de
non reconnaissance des employeurs : deux arguments qui démotivent les étudiants à entrer
dans une démarche de certification.
Nous proposons alors une approche par score (figure suivante) déjà utilisée dans le domaine
de certification en langue Test of English for International Communication (TOEIC)307 ou
Test of English as a Foreign Language (TOEFL)308 créés et administrés par un organisme
basé aux États-Unis , l'ETS : Educational Testing Service. Puisqu’il s’agit d’obtenir un score
suite à une évaluation, il n’y a pas d’échec. Ce score sera interprété en fonction du métier
choisi ou de l’activité demandée par l ‘employeur. La reconnaissance des employeurs apparaît
au travers de l’exigence fixée, par exemple lors de l’annonce.
304 Ludovia Magazine. (2016). Séminaire C2i à Perpignan : nouvelle certification des compétences numériques  ?
le 25 septembre 2017 à l’adresse https://www.youtube.com/watch?v=hcVUq1fc_j0&feature=youtu.be
305 Ludovia Magazine. (2016). Ibid
306 PIX. (2017) Une plateforme en ligne d’évaluation et de certification des compétences numériques des
citoyens francophones. Consulté 28 septembre 2017, à l’adresse https://pix.beta.gouv.fr/
307 TOEIC. (2016). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse https://www.ets.org/fr/toeic
308 Les tests TOEFL / Tests et préparation / France Site - ETS GLOBAL [France-fre]. (2016). Consulté le 25
septembre 2017 à l’adresse https://www.etsglobal.org/Fr/Fre/Tests-et-preparation/Les-tests-TOEFL
Figure 37 : Proposition de création d'un score C2i comme pour les certificats de langues
Cette nouvelle certification reposerait sur une progression tout au long de la vie ferait
apparaître différents paliers des notions d’opérationnalisation (le socle), une notion
d’organisation du travail numérique est une notion décisionnelle.
Des points seraient alors attribués par un centre de certification, qui validerait des activités,
ayant reçu un barème, défini de façon normative par la tutelle en responsabilité de cette
certification.


3.1.2.2 Les usages du numérique pour la recherche[modifier]
Entre 2003 et 2007 la direction des ressources humaines du CNRS a produit un référentiel
d’activités professionnelle métier de chercheur309. Cet observatoire des métiers introduit un
outil des descriptions multicritères permettant des laboratoires de présenter le profil
scientifique et le profil professionnel de chercheur. Dans le cas du profil scientifique nous
retrouvons classiquement une description par approche disciplinaire, 40 disciplines dans le
cadre du CNRS par exemple.
Pour définir le profil professionnel une méthode de l’approche par l’activité du chercheur a
été réalisée. Ainsi dans son laboratoire il ou elle utilise des activités très différentes de l’ordre
de la méthodologie, de l’organisationnel, de la gestion financière, de la communication pour
ne citer que ceci.
Ce travail s’est décomposé en une phase de conception en 2003 une phase expérimentale de
2004 à 2005 et enfin une phase généralisée en 2005 à 2006. C’est le seul document qui
concerne le référentiel métier d’un chercheur ; avec ses 10 ans d’ancienneté nous prendrons
son contenu sur les usages du numérique avec précaution.
Ce référentiel se décompose en sept domaines calés sur des activités emblématiques du
chercheur, la construction du projet de recherche (R1), la réalisation du projet de recherche
(R2), l’exploitation et la diffusion des résultats (R3), la coordination et l’évaluation
scientifique (R4), la formation par la recherche et l’enseignement (R5), la valorisation
scientifique économique et culturelle (R6) et enfin le fonctionnement du dispositif de
recherche (R7).
L’usage du numérique dans le référentiel métier du chercheur
Nous prenons le parti pris d’analyser ce référentiel et de d’isoler les compétences qui mettent
en œuvre un usage du numérique dans le métier de chercheur. Il résulte de ce référentiel un
certain nombre d’outils qui seront le terrain de développement d’usages du numérique
lorsqu’ils seront contextualisés sur une situation professionnelle.
Dans le cadre de la construction du projet de recherche (R1), nous estimons que la
compétence R11 (« Définir, positionner, stopper un thème/projet de recherche et/ou un
309 DRH CNRS. (2007). MCPI  : Métier de chercheur-e, profils et itinéraire s. Les notes de l’observatoire des
métiers. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
https ://www.dgdr.cnrs.fr/drh/omes/publi/documents/mcpi/NoteMCPI-CP_OutilRH.pdf
champ d'investigation ») et plus particulièrement « Effectuer une veille scientifique
(bibliographie, documentation, brevets, congrès...) » sont l’occasion de mettre en œuvre une
recherche critèriée sur des bases de données en ligne à accès public ou privé, au moyen d’un
gestionnaire de bibliographie (EndNote, Zotero…). Par ailleurs, toujours dans ce domaine R1,
la compétence « Elaborer des modes d'approches, des démarches, des protocoles » (R12),
permet de mobiliser une compétences plus instrumentales comme « Préparer les supports,
produits, techniques… » (R124) au moyen de suites bureautiques ou des logiciels de création
ou de modification d’images vectorielles ou matricielles.
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R11. Définir, positionner, R111. Effectuer une veille scientifique Recherche critèriée sur base de
stopper un thème/projet de (bibliographie, documentation, brevets, données en ligne à accès public ou
recherche et/ou un champ congrès...) privé,
d'investigation
Gestionnaire de bibliographie
R12. Elaborer des modes R124. Préparer les supports, produits, Suites bureautiques
d'approches, des techniques,...
Logiciels de création ou de
démarches, des protocoles
modification d’images vectorielles
ou matricielles
Tableau 9 : Compétences du numérique pour la construction du projet de recherche (R1-CNRS).
Pour la réalisation du projet de recherche (R2), les logiciels de simulation ou de modélisation
peuvent être mis en œuvres (R21 et R22), ainsi que les suites bureautiques, les logiciels de
création ou de modification d’images vectorielles ou matricielles, et les logiciels d’enquête et
de traitement des enquêtes (R22) (Tableau 10).
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R21. Réaliser des études R214. Confronter le modèle avec les Logiciels de simulation ou de
théoriques résultats de l'expérimentation ou les modélisation
résultats des simulations numériques
R22. Procéder à des R221. Acquérir, préparer des Suites bureautiques
expérimentations données/échantillons
Logiciels de création ou de
R222. Mettre en place, optimiser des modification d’images vectorielles
techniques, moyens d'essais et de ou matricielles
mesure...
Logiciels de simulation ou de
R223. Conduire, réaliser des modélisation
expérimentations, protocoles,
Logiciels d’enquête et de
démarches, tests, essais, prototypes...
traitement des enquêtes
R224. Suivre les résultats, adapter les
protocoles, démarches, tests, essais,
prototypes...
Tableau 10 : Compétences du numérique pour la réalisation du projet de recherche (R2-CNRS)
Dans le cadre de l’exploitation et la diffusion des résultats, les mêmes outils cités
précédemment peuvent être mobilisés dans le cadre de R31 et R32 (Tableau 11). Nous notons
que la sous-compétence R321. « Rédiger des publications/articles » permet d’exploiter un
logiciel gestionnaire de bibliographie.
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R31. Exploiter, interpréter R311. Analyser les résultats Logiciels d’enquête et de
les résultats traitement des enquêtes
R312. Discuter/commenter les résultats
intermédiaires et finaux Suites bureautiques
R313. Synthétiser et mettre en forme les Logiciels de création ou de
résultats modification d’images vectorielles
ou matricielles
R32. Rédiger et diffuser les R321. Rédiger des publications/articles Gestionnaire de bibliographie
connaissances scientifiques
R322. Rédiger des rapports scientifiques Suites bureautiques
produites
R323. Elaborer des communications Logiciels de création ou de
scientifiques (poster, présentation modification d’images vectorielles
orale...) ou matricielles
Tableau 11 : Compétences du numérique pour l’exploitation et la diffusion des résultats (R3-CNRS).
Le domaine de coordination et d’évaluation scientifique fait plutôt appel à des compétences
de communication, et de gestion de travail collaboratif. Nous estimons ainsi la mobilisation
d’outils comme les plateformes collaboratives à distance, la gestion électronique des
documents, les logiciels de messagerie ou les réseaux socionumériques (Tableau 12).
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R41. Animation scientifique R411. Animer un projet Plateforme collaborative à
distance
R412. Collaborer avec d'autres
équipes Gestion électronique des
documents
R413. Développer, animer,
coordonner un réseau de Logiciel de messagerie
collaborations, d’expertise,
Réseaux socionumériques
association, en France ou à
l'étranger …
Tableau 12 : Compétences du numérique pour la coordination et l’évaluation scientifique (R4-CNRS).
Pour le domaine de l’enseignement et la formation par la recherche, nous retrouvons les
usages liés au TICE sur plateforme de formation publique ou privée, ainsi que les outils pour
l’enseignement en présentiel, utiles à la création de supports d’enseignement (Tableau 13)
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R51. Formation par la recherche R515. Mettre en place un suivi Plateforme de formation ouverte à
personnalisé tutorat en présence ou distance publique ou privée
à distance
R52. Enseignement R521. Préparer les enseignements Plateforme de formation ouverte à
distance publique ou privée
R522. Dispenser des
enseignements Gestionnaire de bibliographie
R525. Evaluer et définir des Suites bureautiques
enseignements
Logiciels de création ou de
modification d’images vectorielles
ou matricielles
R53 Se Former - Plateforme de formation ouverte à
distance publique ou privée
R54. Gérer le dispositif de - Plateforme de formation ouverte à
formation distance publique ou privée
Tableau 13 : Compétences du numérique pour l’enseignement et la formation par la recherche (R5-
CNRS).
Dans la cadre de la valorisation scientifique, économique et culturelle (Tableau 14), il s’agit
d’activé de médiation de la recherche, domaine où nous estimons que les réseaux
socionumériques et les sites web ou carnet de recherche peuvent être mis en œuvre
individuellement ou en équipe.
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R61. Partenariat / valorisation R611. Promouvoir les résultats, les Réseaux socionumériques
compétences, … de l'unité (auprès
Site web ou carnet de recherche
tutelles, partenaires, monde socio
économique, …)
R612. Promouvoir les résultats, les
compétences... du CNRS à
l'international
R62. Diffusion de l’information R624. Pour rédiger des articles Site web ou carnet de recherche
dans la société pour des revues grand public
Tableau 14 : Compétences du numérique pour la valorisation scientifique, économique et culturelle (R6-
CNRS).
Enfin pour le dernier domaine, celui lié au fonctionnement du dispositif de recherche, il s’agit
essentiellement d’un usage sur les outils d’administration du système d’information (Tableau
15).
Compétences du référentiel Sous-compétences du référentiel Propositions d’outils des TIC
R71. Activités liées à la vie R711. Assister les utilisateurs du Outils d’administration du système
collective de l’unité parc informatique d’information
R714. Gérer les systèmes
d’information
Tableau 15 : Compétences du numérique pour le fonctionnement du dispositif de recherche (R7-CNRS).
Éventuels points d’amélioration de ce référentiel
Ce référentiel, ayant été réalisé il y a plus 10 ans, ne met pas en évidence le besoin de
compétences dans le domaine de la formation de dispositifs hybrides de formation dans
l’ESR310. En 2016, il n’est plus possible d’ignorer l’existence de projet pédagogique en ligne,
en France ou à l’international. Les plateformes de MOOC (France Université Numérique,
Coursera, OpenClassroom..) ont mobilisé une activité importante de la communauté de
recherche, et si à leur début, ce modèle était très décrié, elles sont à ce jour présentes comme
dans la formation de l’ESR.
  • La formation
Nous estimons que les usages du numérique dans le domaine de la formation doivent être
approfondis notamment pour répondre au besoin des cours massifs en ligne.
  • La médiation numérique
Par ailleurs, notre connaissance de l’objet d’étude, le contexte universitaire, nous fait émettre
un doute sur la réalité des compétences dans le domaine de la valorisation scientifique et
culturelle, sur les réseaux socionumériques. Nous nous sommes basés sur le constat, relayé au
sein d’un article du Monde, « Twitter et les chercheurs, l’exception française  ? » de Sylvain
Deville311 ou sur « l’observatoire 2014 de l’usage des réseaux sociaux par les organismes de
recherche » de la société Sircome312 qu’il existait un usage de Twitter chez les acteurs
employés de l’enseignement supérieur. Cet usage se professionnalise de plus en plus, mais
reste encore réservé à certains pionniers. Certains classements rendent visible cette activité. Il
310 Burton, R., Borruat, S., Charlier, B., Coltice, N., Deschryver, N., Docq, F., … Villiot-Leclercq, E. (2011).
Vers une typologie des dispositifs hybrides de formation en enseignement supérieur. Distances et savoirs , 9(1),
69-96. Consulté à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=DIS_091_0069
311 Deville, S. (2014, février 5). Twitter et les chercheurs, l’exception française ? Le Monde.fr . Consulté le 25
septembre 2017 à l’adresse http://www.lemonde.fr/sciences/article/2014/02/05/Twitter-et-les-chercheurs-l-
exception-francaise_4360491_1650684.html
312 Sircome. (2014). Observatoire 2014 de l’usage des réseaux sociaux par les organismes de recherche -.
Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://sircome.fr/Observatoire-2014-de-l-usage-des#synthese
s’agit du classement des personnalités influentes d’Olivier Rollot313 ou bien encore les
classements des établissements et des présidents sur Twitter par le consultant Manuel
Canévet .
Le premier article nous informait que ce type de réseaux sociaux, le micro-blogging,
contrairement aux pays anglo-saxons, était peu utilisé dans la recherche en France. Dans la
médiation de la recherche, cet observatoire nous indique que le processus de médiation de la
recherche est en train d’apparaître. Pour les classements, il montre une émergence d’usage
dans les universités et chez certains présidents d’Université.
  • Vers la formation des nouveaux chercheurs en SHS.
Cette amélioration a été travaillée dans le cadre de notre expérience professionnelle en
collaboration avec Thierry Spriet, Vice-Président Numérique de l’Université d’Avignon, et
Magali Clareton-Perrotin, alors DSI à l’Université Paul Valéry de Montpellier en 2015.
Il en résulte une approche de formation pour les doctorants futurs chercheurs avec un plan de
formation complémentaire au plan de formation actuelle des universités citées mais en
insistant sur les usages du numérique à développer.
Cette formation, qui prendrait à terme la forme d’un MOOC, reposerait sur le développement
des usages du numérique en nous appuyant sur des contextes de « Communication/Médiation
» et « Recherche ». Il s’agirait d’aider à la réussite des étudiants doctorants en Lettres et
Sciences Humaines, en les amenant à choisir les outils numériques en adéquation avec leur
recherche dans le domaine des humanités, en contribuant à faire émerger des groupes
souhaitant se constituer en réseau ou en communauté, en leur apprenant à diffuser, partager et
mettre en valeur leur recherche et en leur permettant de développer leur « savoir-être
numérique ».
Par ailleurs, le choix du MOOC, de type socio-connectiviste, serait aussi un dispositif
d’observation, recherche et réflexion sur les mutations du métier de chercheur universitaire
induites par le numérique. Il s’agit aussi de rompre avec l’isolement de certains doctorants,
éviter les abandons et contribuer à faire émerger des groupes de doctorants souhaitant se
constituer en réseau lors de leur première année de thèse. Cette formation se veut en
313 Rollot, O. (2017). Education  : quelles personnalités ont le plus d’influence sur Twitter ? Consulté 28
septembre 2017, à l’adresse http://blog.headway-advisory.com/education-qui-le-drinfluence-sur-Twitter/
314 Canévet, M. (2016, janvier). Classement des universités et écoles sur Twitter. Consulté le 25 septembre 2017,
à l’adresse http://www.manuelcanevet.fr/2016/01/26/janvier-2016-ecoles-et-universite-sur-Twitter/
complément, et non en remplacement, des formations existantes dans les écoles doctorales et
les bibliothèques universitaires.
Plus exactement, la cible pourrait être les étudiants souhaitant démarrer leur thèse, ou en cours
de doctorat dans les domaines des LETTRES, LANGUES ET SCIENCES HUMAINES ET
SOCIALES, les enseignants chercheurs souhaitant mettre à jour leurs compétences dans
l’outillage numérique d’une thèse de leur doctorant ou toutes personnes souhaitant se
renseigner sur la méthodologie de recherche, et son outillage par des dispositifs numériques.
Le scénario envisagé de ce MOOC dans ses premiers contours serait décomposé en trois
thématiques

1. une présentation méthodologique d’une thèse en sciences humaines, par école[modifier]

AA:doctorale, ou spécialiste(s?) de la méthodologie,

2. une présentation des humanités numériques,[modifier]

3. des exemples précis, par discipline, histoire, sociologie, psychologie, langues, et tout[modifier]

AA:autre discipline souhaitant une participation, présentant les outils du numérique, de la AA:source à la publication en openedition, en passant par l’analyse partagée et/ou AA:pluridisciplinaire AA:Les grandes lignes ont d’ailleurs été tracées, avec le scénario suivant : AA:* « C’est quoi être un doctorant », mettre en place une première session sous la AA:forme d’un Teaser avec des interviews de type success story.

AA:* Les sources numériques de l’information, et les notions suivantes (Gestion AA:bibliographique , Les bases de données, Les statistiques, Les bibliothèques AA:numériques, Les archives numériques, Les réseaux sociaux AA:* Les flux e-mails – vidéo – images – crawler - enquêtes en ligne, Les questions AA:juridiques sur la propriété des données , Les SIGs) AA:* Les collaborations numériques (Les nouveaux réseaux scientifiques de recherche AA:et publications (ex : fabula.org, reseau-terra.eu,), Les outils d’écriture collaborative AA:(les Pad ; les Wiki...), Les bibliographies collaboratives (ex. : Wikindx ), Les AA:systèmes collaboratif d’édition en ligne (ex. : système "Spip" ; système "Lodel"...), AA:Les recherches collectives et questions juridiques du plagiat) AA:* Le dépôt électronique des thèses et des articles (modalités du dépôt électronique AA:de la thèse, dépôt d’un article dans une archive ouverte, aspects juridiques du AA:dépôt électronique) AA:* Les aspects juridiques de la thèse (comment intégrer des ressources extérieures AA:dans sa thèse, notamment des images, illustrations, etc. ; quelles sont les règles à AA:connaître-, la question du plagiat) AA:* Le doctorant et la publication scientifique (Repères sur la publication AA:scientifique, La publication LSH à l’ère du numérique, les nouvelles modalités de AA:publication et de diffusion des travaux de recherche, le Libre Accès : les Archives AA:Ouvertes, les revues en libre accès, les blogs scientifiques) AA:* Le doctorant à la recherche de son identité numérique (Stratégie de présence AA:numérique, Gestion active des réseaux socionumériques, Les blog) AA:* Les audiences numériques (Formes d’écritures numériques et audience - AA:Audience Internet et audience des médias traditionnels (Presse, Radio, Télévision) – Supports techniques des listes de diffusion (logiciels "Mailman", "Sympa"...) - AA:Cadre juridiques des listes de diffusion (listes en "opt-in" et listes en "opt-out") – AA:Audience des réseaux sociaux - Echanges numériques et Internationalisation - AA:PageRank, Classements et évaluation des audiences et des recherches).

AA:Ce projet est encore en gestation à ce jour, et pourra trouver son application lors de la refonte AA:éventuelle du référentiel métier du chercheur.


3.1.2.3 Les usages du numérique pour l’enseignement[modifier]
Comme nous avons vu précédemment les enseignants chercheurs intègrent dans leur métier
les outils numériques dans leurs travaux de recherche, il reste des améliorations possibles
dans le domaine de l’enseignement.
Concernant l’enseignant affecté dans le supérieur il a reçu ou peut recevoir dans sa formation
initiale ou continue une certification lui permettant de développer des compétences dans le
domaine de la pédagogie utilisant des dispositifs numériques.
Cette certification s’intitule C2i2E, elle a été instituée par un arrêté du 14 décembre 2010 et
jusqu’en 2014 elle était obligatoire pour entrer dans la fonction publique de l’éducation
nationale via le CAPET, le CAPES, le CAPLP2 ou l’Agrégation. Cette certification « atteste
des compétences professionnelles dans l’usage pédagogique des technologies numériques
communes nécessaires à tous les enseignants et formateur pour l’exercice de leur métier »315.
315 MENSR. (2010). Certificat informatique et internet de l’enseignement supérieur C2i2E. op. cit.
Elle se décompose en deux sous-référentiels (figure suivante) : le référentiel A (3 domaines de
compétences générales liées à l’exercice du métier) et le référentiel B (4 domaines de
compétences nécessaires à l’intégration des TICE dans sa pratique).
Figure 38 : Le référentiel C2i2E.
Concernant la dernière catégorie d’enseignants les vacataires, il y a fort à parier et que les
compétences se rapprochent de celles d’un manager dans une entreprise (voir le paragraphe
suivant) et qu’aucune formation ne lui était faite avant de rencontrer un public étudiants.
Les points d’amélioration de ce référentiel
Institué depuis plus de six ans sous sa forme actuelle, le référentiel tient bien en compte les
compétences générales de l’exercice du métier ; pour autant dans le domaine de la
responsabilité professionnelle un certain nombre de textes de lois ont évolué ce qui
nécessiterait une mise à jour des compétences.
De la même façon, dans l’intégration des compétences nécessaires à l’intégration des TICE
dans sa pratique, ce référentiel mériterait une mise à jour sur les modalités d’enseignement
des outils numériques créés depuis 2010. Ainsi, il faudrait étendre les compétences aux
réseaux socionumériques qu’ils soient en intranet, ou sur internet. L’usage de tablette, qui se
généralise depuis la mise en place du plan école numérique par l’Etat316, mériterait une
réflexion sur les usages pédagogiques possibles aussi dans l’Enseignement Supérieur.
Nous pensons par ailleurs qu’il est peut-être utile de repenser ce référentiel en considérant non
plus le référentiel par public cible mais bien pour tous les métiers de la formation qu’elle soit
initiale ou continue. Nous pourrions imaginer un certificat d’aptitude à enseigner avec le
numérique à joindre au dossier des vacataires d’un établissement de l’ESR.


3.1.2.4 Les usages du numérique pour un manager[modifier]
Nous considérons que les cadres de l‘université ont la même problématique que tous les
managers des organisations publiques ou privées. Nous avons à ce sujet co-écrit un article317 à
ce sujet, qui traite des usages du cadre manageant la transformation numérique de son
organisation.
Le manager, personnel qui encadre et gère un service d’une organisation publique, se trouve
souvent pris entre deux positions : de type management d’une part, pour assurer « la
maintenance de l’organisation et la continuité de son développement », et d’autre part le
leadership pour transformer « les modalités organisationnelles en dirigeant durant le temps
incertain d’une transition et en assurant l’avènement d’un nouvel ordre »318. Les évolutions
des organisations conduisent parfois à la situation où les managers sont « mieux formés que
leurs équipes. Ce n’est pas le cas avec le numérique et la digitalisation »319.
Les managers doivent être en capacité « de penser comme un natif numérique, de penser
comme une start-up, d'aborder l'idée de concevoir une entreprise d'utiliser tous les progrès
de personnes, les processus, la technologie et les outils pour tuer votre propre entreprise »320.
316 MENSR. (2015). L’État s’engage à poursuivre l’accompagnement des collectivités territoriales pour
raccorder les écoles et les établissements scolaires à l’Internet haut débit. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.education.gouv.fr/cid86587/l-etat-s-engage-a-poursuivre-l-accompagnement-des-
collectivites-territoriales-pour-raccorder-les-ecoles-et-les-etablissements-scolaires-a-l-internet-haut-debit.html
317 Mocquet, B., & Rouissi, S. (2017). Méta-usages du numérique chez le manager  : Nouveaux enjeux pour les
formations dans l’enseignement supérieur. Terminal. Technologie de l’information, culture & société, (120).
Consulté à l’adresse https://terminal.revues.org/1644
318 Basso, O. (2007). L’ambivalence du métier de manager. L’Expansion Management Review , N° 125(2),
92-101. le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/article.php?ID_ARTICLE=EMR_125_0092
319 Stiegler, B. (2015). La Société automatique: 1. L’avenir du travail. Fayard.
320 Braden Kelley. (2016, Février). Digital Transformation versus Digital Strategy – Innovation Excellence.
Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://innovationexcellence.com/blog/2016/02/17/digital-
transformation-versus-digital-strategy/
Ce principe de disruption321 est pour nous tout à fait applicable, encore faut-il disposer de
cette manière de penser, de s’appuyer sur des usages du numérique connus et maîtrisés.
En nous référant au rapport Mettling, nous ajoutons que la mise en place d’une nouvelle
organisation qu’implique la transformation numérique, met en tension la position de certains
managers qui se retrouvent dorénavant en charge d’un projet numérique : c’est « une grande
part de la réussite ou de l’échec de la transformation digitale »322. Déstabilisé par cette
transformation, il est crucial d’accompagner ce manager dans ces nouvelles fonctions.
Dans le contexte de transformation numérique que nous évoquions précédemment, les usages
du numérique sont à l’œuvre mais il nous semble que cela se fait avec un niveau de
complexité supérieure. Nous proposons ainsi d’introduire le terme de méta-usages du
numérique qui sont, selon nous, des usages sur des usages du numérique. Ils peuvent être
identifiés chez des managers qui créent ou conduisent le développement de ces usages avec
une approche réflexive dans la transformation numérique. Le préfixe méta provient du grec
(µετά) et signifie « après », « au-delà de », « qui englobe ». Il induit un niveau d’abstraction
supérieur qui apparaît notamment au niveau des managers en charge de la conduite de ces
changements indépendamment du secteur d’activité professionnelle ou de la filière. En nous
inspirant du projet de « théorie des usages » de Serge Proulx, nous proposons une analyse des
méta-usages en cinq niveaux (notés MU1 à MU5) dans le contexte de transformation
numérique des universités :
321 Dru, J.-M. (1996). Disruption: Overturning conventions and shaking up the marketplace (Vol. 1). Wiley.
322 Mettling, B. (2015). Transformation numérique et vie au travail. le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/154000646.pdf
Interaction entre
le manager et
son
environnement
numérique
Coordination
Positionnement
dans Méta-usages entre le manager
et le concepteur
l’écosystème de
numérique de
l’environnement
l’organisation. du numérique.
numérique
chez le
manager
Situation de
Éthique, l’usage
déontologie et numérique dans
aspects un contexte
juridiques. d’encadrement
d’équipe
Figure 39 : Des méta-usages du numérique chez le manager.
MU1. Interaction entre le manager et son environnement numérique.
Le manager doit être compétent dans son environnement numérique : compétence
informationnelle (recherche, veille, fiabilité des données...), production autonome de
documents numériques, activités au sein de plateformes sécurisées ou non, évolution des
connaissances (formation en ligne)...
MU2. Coordination entre le manager et le concepteur de l’environnement numérique.
Avec l’arrivée du numérique dans l’organisation, chaque manager peut-être concerné. Il
participe par son métier à la conception ou l’amélioration de dispositifs numériques. Il est
aussi le garant de la bonne mise en œuvre de ces derniers dans le cadre des équipes qu’il
dirige.
MU3. Situation de l’usage numérique dans un contexte d’encadrement d’équipe.
La mise en place d’activités collaboratives au sein de plateformes en ligne de plus en plus
simples à utiliser (au sein ou en dehors de l’organisation), implique de nouvelles compétences
pour le manager, celles de conduites et d’accompagnement de pratiques numériques. C’est
aussi une vision plus globale des échanges de données entre individus (outils de travail en
réseau, interopérabilité, sécurisation, etc.).
MU4. Éthique, déontologie et aspects juridiques.
L’éthique, la déontologie et les aspects juridiques (propriétés intellectuelle et industrielle, loi
informatique et libertés, licences logicielles, etc.) doivent aussi être connus des managers pour
former leurs collègues mais aussi pour estimer ce que l’organisation peut récolter et utiliser
comme données personnelles.
MU5. Positionnement dans l’écosystème numérique de l’organisation.
Posséder une vision globale de l’organisation numérique doit permettre au manager de
délimiter les interventions de l’organisation vers l'extérieur, d’éviter des doublons en interne
et permettre des rapprochements entre services quand le besoin se fait sentir. C’est aussi
l’occasion de mieux appréhender la mobilité apportée par la connexion sans fil et les
nouveaux lieux de travail dont une des conséquences serait une hyper connectivité des
employés. La délimitation entre sphères numériques privée et professionnelle nécessite un
regard distancié (e-réputation, informations sensibles etc.).


3.1.2.5 Les usages du numérique pour un personnel non-cadre[modifier]
Il s’agit de déterminer les usages du numérique indispensables des professionnels de l’ESR.
Nous l’avons vu, ce référentiel existe pour les enseignants, les chercheurs, mais un tel travail
ne nous est pas apparu dans la littérature ou les textes officiels pour les autres personnels de
l’ESR. De nouveau, nous nous tournons vers la fonction hospitalière, qui en octobre 2013,
dans le cadre de publication réalisée dans le cadre du programme national hôpital numérique,
a réalisé la rédaction d’un Référentiel de compétences en système d'information323 de l’ANAP
(Agence Nationale d'Appui à la Performance des établissements de santé et médico-sociaux).
Ce document propose une synthèse de plusieurs référentiels existants (Le Répertoire National
des métiers de la Fonction Publique Hospitalière, Le CIGREF, Le ROME, Le C2i2santé).
La volonté est purement stratégique, puisqu’il s’agit d’accompagner la réforme dite de
l’Hôpital numérique » abordée précédemment. Le référentiel se présente « sous forme de
323 ANAP. (2013). Référentiel de compétences en système d’information. Consulté le 25 septembre 2017 à
l’adresse
http://www.metiers-
fonctionpubliquehospitaliere.sante.gouv.fr/fichiers_repertoire/ANAP_Referentiel_competences_SI_2013.pdf
fiches d’activités SI et compétences afférentes pour les métiers de la DSI et les métiers
utilisateurs du SI ainsi que de fiches rôles SI simples et d’appropriation rapide. »
Il a été choisi dans ce document de décrire les usages à travers des macro-processus, des
processus puis des activités. À ce jour 9 macros processus 31 processus et 88 activités métiers
sont répertoriés.
Macro-processus du SI
1-Pilotage stratégique du système d’information
2-Management opérationnel du système d’information
3-Projet système d’information
4-Maintien en condition opérationnelle
5-Gestion de la sécurité du système d’information
6-Utilisation du système d’information
7-Processus support au processus système d’information
8-Gestion de la qualité
9-Conduit du changement
Tableau 16 : Les macro processus du référentiel SI de la fonction hospitalière.
En excluant les métiers du système de production de système d’information nous pouvons
extraire les usages des personnels dans la rubrique 6-Utilisation du système d’information.
6 - Utilisation du SI
Processus Activités
Utilisation des outils Utilisation de suites bureautiques (traitement de texte, tableur grapheur,
« basiques » (Bureautique) logiciel de présentation) et des outils informatiques « basique »
(formulaires, tableaux de bord,…) nécessaire au métier
Utilisation des logiciels Utilisation des applications métier/logiciel (hors suites bureautiques)
métiers nécessaires au métier
Utilisation des systèmes Utilisation des matériels (postes de travail fixes et mobiles, imprimantes,
téléphonies, visios,..)
Tableau 17 : Activités permettant de développer l’usage du numérique de la fonction hospitalière.
Le but dans cette partie n’est pas de faire l’exégèse de ce document mais de constater qu’une
filière peut avoir une approche globale du numérique dans un système, et ainsi anticiper les
usages qui y sont exigés à travers la description d’activités emblématiques du métier, qui sont
autant de situation à développer des usages.
Il serait intéressant qu’un tel travail soit aussi réalisé dans le cadre de la fonction publique de
l’enseignement supérieur et la recherche, car aujourd’hui par défaut, c’est le référentiel C2i1
qui a été choisi dans le cadre des plans de formation des personnels cités pour certaines
universités.


3.1.3 Un outil d’auto-positionnement: indicateurs du développement[modifier]

numérique dans les établissements de l’ESR
Dans le cadre des accréditations, les universités reçoivent comme point d’aide à la décision, et
en amont de la remontée de leur offre de formation, et du projet d’établissement au Ministère
de l'ESR, un outil permettant de s’auto-positionner. C’est pour nous une manière de
caractériser les usages du numérique des universités vues par ceux qui pilotent le numérique
et qui rendent compte à la Tutelle.
La finalité de cet indicateur est d’optimiser l’offre de formation et la gestion des
établissements de l’ESR. Il fait partie du programme 150 (Formations supérieures et
recherche universitaire), objectif 6 (améliorer l’efficience des opérateurs) du plan annuel des
performance des universités.


3.1.3.1 Description de l’indicateur analytique[modifier]
Cet indicateur, dont la création a été piloté par Thierry Bedouin, créé par les experts contrat
de la MINES (mission numérique pour l'enseignement supérieur) du Ministère, se compose de
six thèmes en 2012-2014 : la gouvernance de la politique numérique et du système
d’information, le système d’information et les services numériques, le numérique au service
de la formation des étudiants, la politique de gestion des ressources numériques dédies à la
formation et à la culture scientifique technique, le numérique au service de la recherche de la
valorisation et de la conduite du changement et la politique d’accompagnement à l’usage
pédagogique du numérique. Les experts contrats sont des DSI, des référents des
établissements de l’ESR. Ils participent à l’évaluation de l’accréditation de l’établissement, se
déplaçant en amont de la validation de la contractualisation au sein des établissements.
À chacun de ces thèmes est associé un certains nombre de sous thèmes. Ce qui nous intéresse
dans cet indicateur, c’est la vision analytique qu’il propose du numérique de l’Université.
Gouvernance du système d’information et de la politique numérique
Cet indicateur analytique est constitué par l’auto-évaluation de cinq domaines, chacun noté
entre 0 et 1. Il concerne bien entendu le volet stratégique du numérique de l’université. Nous
retrouvons ainsi « la mise en œuvre d’une gouvernance formalisée et intégrée au pilotage de
l’établissement », « la mise en place d’un schéma directeur couvrant l’ensemble des domaines
du SI », « les moyens financiers et humains au regard des moyens globaux », « la définition et
mise en œuvre d’une stratégie de mutualisation adaptée au contexte de l’établissement » et
« l’évaluation des usages et satisfaction des usagers ».
Figure 40 : Indicateur sur la gouvernance du système d’information et de la politique numérique
Le système d’information et les services numériques
Cet indicateur analytique concerne le SI et les services numériques proposés dans l’université,
décomposé en 5 items, noté chacun entre 0 et 1. Nous retrouvons « la démarche qualité et
démarche de formalisation des processus et de dématérialisation », l’ « efficience de la
couverture applicative et mise en œuvre d’un référentiel [SI]» , « les services numériques à
disposition des étudiants », « les services numériques à disposition des personnels » et les
« moyens au service du pilotage et de l’aide à la décision »
Figure 41 : Indicateur sur le système d’information et les services numériques
Le numérique au service de la formation des étudiants
Cet indicateur cible la formation des étudiants. Il est composé de cinq items, chacun noté de 0
à 1. Nous pouvons lister « le développement et certification des compétences numériques des
étudiants notamment par les C2i1 et C2i2 », l’ « usage de l'environnement numérique
pédagogique par les étudiants », « l’usage de l'environnement numérique pédagogique par les
enseignants », « la formation à distance (FOAD) » et « l’évaluation des dispositifs [TIC] de
formation ».
Figure 42 : Indicateur sur le numérique au service de la formation des étudiants
La politique de gestion des ressources numériques dédies a la formation et la culture
scientifique technique
Cet indicateur concerne aussi bien la production que la diffusion de ressources numériques
dédiées à la formation ou la médiation. Il regroupe « la politique de production des ressources
numériques », « la démarche d’indexation et de référencement des ressources numériques »,
« la mise à disposition de ressource sur la plateforme pédagogique », « la politique de
diffusion de ressources et de valorisation de la production de l’établissement, y compris à
l’international » et « l’adhésion aux UNT »
Figure 43 : Indicateur sur la politique de gestion des ressources numériques (formation et médiation)
Le numérique au service de la recherche et de la valorisation
Le 5ème indicateur concerne le numérique au service de la recherche et de la valorisation de
cette recherche. Noté entre 0 et 1 pour chacun des cinq items, il est composé « de la politique
du numérique en direction de la recherche », « du dispositif d’archive ouverte et de
référencement de la production scientifique », « des ressources numériques à disposition des
chercheurs », « des dispositifs numériques de gestion et valorisation de la recherche » et « des
dispositifs de formation et accompagnements des jeunes chercheurs et doctorants »
Figure 44 : Indicateur sur le numérique au service de la recherche et de la valorisation
La conduite du changement et politique d’accompagnement à l’usage pédagogique du
numérique
Enfin, le dernier indicateur concerne la conduite du changement et la politique
d’accompagnement à l’usage pédagogique du numérique. Composé également de cinq items,
noté chacun entre 0 et 1, il caractérise le niveau de développement pour « la ou les structures
d’appui à la pédagogie universitaire avec le numérique », « la politique incitative à la
réalisation de projets [pédagogiques]», « la formation et l’accompagnement des enseignants et
personnels dans les activités pédagogiques », « la définition d’un référentiel enseignant
intégrant les activités pédagogiques numériques dans le service d’enseignement », et « la
communication et valorisation des dispositifs »
Figure 45 : Indicateur sur la conduite du changement et politique d’accompagnement à l’usage
pédagogique du numérique
Effet de ces indicateurs sur la gouvernance numérique universitaire
Il appartient à chaque équipe présidentielle d’établissement de construire son propre
diagnostic, de noter son niveau (note de 0 à 5) dans chaque sous-thème. La note est ainsi
moyennée pour le thème puis pour la totalité des thèmes. Le même travail est à faire en
projetant l’établissement à 5 ans. La construction de cet indicateur fait donc apparaître la
position à l’instant t, et sa projection à 5 ans.
Nous avons vécu la construction de cet indicateur dans notre université (la première fois en
tant que correspondant C2i, la deuxième fois en tant que Vice-président Numérique). Nous
ne nous permettrons pas de généraliser, mais nous avons constaté à deux reprises un effet sur
l’organisation du numérique de notre université : plus de concertations, plus d’échanges, plus
d’interrogations sur certains sous-thèmes.
Dans la figure suivante, nous disposons d’un indicateur d’une des universités observées, dont
nous garderons l’anonymat, ce document n’étant pas public.
1-La gouvernance
de la politique
numérique et du
système
d’Information
6- La conduite du 4
changement et la 3,5
3 2-Le système
politique 2,5 d’information et
d'accompagneme 2 les services
nt à l'usage 1,5
pédagogique du
1 numériques
numérique 0,5 Situation actuelle (année N)
Cibles (année N+5)
5-Le numérique 3-Le numérique
au service de la au service de la
recherche et de la formation des
valorisation étudiants
4-La politique de
gestion des
ressources
numériques
dédiées à la
formation (et la
culture
Figure 46 : Exemple d’indicateurs complétés par une université
Sur cet exemple, concernant la gouvernance, nous pouvons interpréter que cette Université
possède à ce jour une transformation mise en œuvre (au delà de 3/5, selon elle), mais estime
qu’elle est capable d’atteindre le niveau 5 d’ici 4 ans dans 3 des 6 domaines. Cela révèle une
forte volonté gouvernante de devenir une référence en la matière. Nous retrouvons à contrario
un indicateur stable sur la conduite du changement et la politique d’accompagnement à
l’usage dans la pédagogie universitaire : cette université n’a pas d’ambition de progression
dans ce domaine.


3.1.3.2 Points d’améliorations et limites de cet outil de mesure[modifier]
Cet outil possède un avantage majeur dans le cadre de la gouvernance du numérique naissante
parce qu’il fait apparaître les exigences de la tutelle en un seul indicateur : il permet à des
nouvelles équipes de se fixer des objectifs atteignables en un seul mandat et de mieux
comprendre la caractéristique transversale du numérique universitaire.
En effet les six parties sont extrêmement explicites et il est « relativement simple à mettre en
œuvre »aux dires des VP Numériques interrogés durant la préparation de cette thèse lors des
différents groupes organisés. C’est pour l’un d’entre eux « une excellente photographie prise
par les gouverna nts du numérique de l’ Université », et « l’occasion de travailler tous
ensemble sur le projet numérique de l’Université ».
Pour autant, la vitesse de changement imposée par les évolutions technologiques fait de cet
outil « une direction à suivre » plus « qu’un aboutissement au bout de cinq ans ». Le sujet
des MOOC est revenu à ce sujet, car la plupart des universités interrogées n’ont pu ou su
anticiper cette arrivée, et ne mesuraient pas l’ampleur de cette innovation pédagogique.
La durée semble à retravailler « pour réduire le temps d’analyse et réguler plus agilement la
gouvernance du numérique », ainsi que la participation à cette évaluation de tous les membres
de l’Université pour l’un d’entre eux.
Enfin, l’approche analytique proposée ne suffit pas exclusivement pour comprendre le
numérique universitaire et sa gouvernance.


3.1.4 Vers une nouvelle stratégie du numérique : cibler le[modifier]

développement des usages du numérique
En reprenant la littérature de sciences de gestion, Jarnias et Oiry proposent une analyse fine
des référentiels de compétences324. Ils nous rappellent que Oiry et Sulzer325 ont travaillé sur
l’enjeu des référentiels de compétence, notamment pour les décideurs. Ils ont constaté que les
référentiels peuvent être sensiblement différents : sur leur forme, sur leur intention, sur les
modalités de leur usage dans le cadre de stratégie. En effet un référentiel de compétences peut
être considéré comme « un élément d’évaluation a posteriori d’un salarié »326 mais aussi
comme « l’expression d’un objectif atteindre a priori »327 en quelque sorte une norme dans le
cadre des compétences numériques qui nous concernent.
Rouby, Oiry et Thomas ont prolongé cette réflexion en envisageant que « les référentiels de
compétences puissent avoir comme objectif de relier les compétences des salariés avec la
324 Jarnias, S., & Oiry, E. (2013). Vers un repérage des types de référentiels de compétences. @GRH, (8), 11-41.
Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=GRH_133_0011
325 Oiry, E., & Sulzer, E. (2002). Les référentiels de compétences: enjeux et formes. La gestion des compétences,
Economica, Paris , 29-47.
326 Jarnias, S., & Oiry, E. (2013). op.cit. p20
327 Jarnias, S., & Oiry, E. (2013). Ibid . p20
stratégie de l’entreprise. »328. Ce point de vue retient particulièrement notre attention dans le
cadre de la stratégie du développement des usages numériques d’un établissement
universitaire. Il est ainsi envisageable que des gouvernances « les utilisent pour transformer
l’organisation dans laquelle ils se situent »329 pour reprendre la conclusion de Jarnas et Ourik.
Nous estimons alors qu’il est possible d’influencer le développement de la compétence du
numérique en construisant une véritable stratégie top-down, s’appuyant sur les référentiels
existants. Nous résumons cela dans la figure suivante.
Figure 47 : Stratégie Top-down s’appuyant sur les référentiels de compétences.
De la même façon, l’approche typologique nous a montré qu’il était possible de mieux
connaître les usages numériques de chacun des membres de l’Université, en le qualifiant, puis
en construisant un processus d’accompagnement de cet usage par public.
Nous mettons ainsi en évidence une stratégie basée sur l’usager, c’est-à-dire sur les acteurs
eux-mêmes. Nous parlerons ici de stratégie Bottom-up, représentée sur la figure suivante.
Figure 48 : Stratégie Bottom-up s’appuyant sur les usages personnels.
328 Rouby, E., Oiry, E., & Thomas, C. (2012). Un référentiel pour articuler les compétences stratégiques et
individuelles. Management & Avenir , (7), 37-56.
329 Jarnias, S., & Oiry, E. (2013). op.cit. p40
La superposition des actions de stratégies
Dans sa conférence en juin 2014, Serge Proulx aborde « L’injonction à participer à l’ère
numérique » 330 lors d’un congrès de la société française des sciences de l’information et de la
communication. Il nous interpelle sur la structure du changement, sur les deux mouvements
contradictoires de la participation à l’ère du numérique : une approche top-down,
« concentration du pouvoir et domination », et une approche bottom-up, « production
coopérative de communs informationnels ». Il propose une injonction simultanée des deux
processus (figure suivante)
Figure 49 : Une double approche pour développer les usages.
Les schémas directeurs du numérique, processus descendant dit top-down, sont ainsi apparus
dans nos universités pour établir une structuration de ce changement d’état. Ils recueillent
toute la stratégie de l’Université, permettent d’anticiper les changements et orientent vers des
dispositifs clés. Un des documents emblématiques, le guide de la caisse des dépôts et
consignations331 nous donne les éléments méthodologiques, qui reposent sur un état des lieux
du numérique, une définition des axes stratégiques de développement du numérique, la
conception d’un plan d’actions détaillé́ , des dispositifs, un calendrier de réalisation et les
actions d’accompagnement à mettre en œuvre. La mise en œuvre du plan pluriannuel de
330 Proulx, S. (2014). Sfsic14 140604-proulx . Éducation. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://fr.slideshare.net/sfsic/sfsic14-140604proulx
331 Caisse des dépots et consignations. (2009). op. cit.
dispositifs et le suivi de la mise en œuvre du plan pluriannuel de ces dispositifs s’ajoutent à
cette stratégie.
Pour multiplier les processus ascendant ou bottom-up, un des points d’entrée peut-être de
faciliter l’accès aux services et aux ressources, avec une finalité d’usage. Cette facilitation
passe par le développement de lieu réel (Learning center, fablab) et virtuel (plan wifi pour
tous des universités, le développement des Environnements Numériques de travail avec un
seul identifiant par usagers et membres de l’Université), et le développement de compétences
d’usage du numérique (Certification C2iNiveau1 pour les usagers, accompagnement pour les
enseignants).


3.2 Vers une définition de la gouvernance du[modifier]

numérique universitaire
Dans le cadre de la transformation numérique de l’Enseignement Supérieur et de la
Recherche, en mai 2016, un référentiel de transformation numérique
de l'Enseignement supérieur et de la Recherche est disponible en ligne aux commentaires et à
l’enrichissement. Ce référentiel est « un outil évolutif et appropriable par tous les membres de
l’Enseignement supérieur et de la recherche »332.
Ce référentiel est conçu sur le même mode opératoire et participatif que l’opération
« Ambition Numérique »333 : des ateliers répartis dans des universités, la Conférence des
Présidents d’universités, la Conférence des Grandes Ecoles, et une plateforme de contribution,
entièrement piloté par le Conseil National du Numérique pour le ministère de l’Enseignement
Supérieur et de la Recherche. La finalité est de définir un outil d’accompagnement au
changement qu’apporte le numérique dans le supérieur à destination des équipes dirigeantes
des universités.
Le résultat de ce processus participatif permet de proposer un référentiel composé de 6
polarités d’action (Gouvernance numérique, Lieux de vie et d'apprentissage, Services
numériques universitaires, Pratiques et contenus pédagogiques, Recherche et Création de
valeur & écosystème), décomposés en 200 actions et autant de faits, faits catégorisées en 9
332 MENSR, & CNNUM. (2016). Référentiel de transformation numérique de l’Enseignement supérieur et de la
Recherche. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse https://data.enseignementsup-
recherche.gouv.fr/pages/referentiel_de_transformation_numerique/
333 La Documentation française. (2014, septembre). Soutenir la transformation pédagogique dans l’enseignement
supérieur [rapport public]. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/144000579/
valeurs (collaborative, émancipatrice, éthique, inclusive, innovante, ouverte, rayonnante,
résiliente, sur mesure).
C’est un travail de définition qui s’appuie sur la perception de ceux qui pilotent la
gouvernance du numérique. Nous pouvons aussi, réaliser un tour d’horizon dans les autres
fonctions publiques, françaises et étrangères.


3.2.1 Un tour d’horizon non exhaustif de cette « gouvernance du[modifier]

numérique » dans les organisations publiques
3.2.1.1 Définition pour les collectivités territoriales[modifier]
Pour les collectivités territoriales, l’enjeu principal en 2017 sur le numérique, est le
déploiement du très haut débit (THD) sur l’ensemble du territoire français d'ici à 2022.
Nous trouvons peu de travaux académiques sur la question des modèles de gouvernance
propres aux TIC. Charlotte Ullman, nous propose de considérer la stratégie nationale du
développement du numérique comme un « millefeuille des politiques »334. Ce développement,
nous parlons ici de l’usage globalisé pour les entreprises, les services publics et pour tous les
citoyens, ne pourra se réaliser qu’à travers une infrastructure réseau fiable couvrant
l’intégralité du territoire. La « gouvernance du numérique » se traduit alors comme « la
manière par laquelle les acteurs régionaux se coordonnent entre eux et gèrent leurs
ressources (compétences, budgets) au service du développement numérique. »335 pour cette
auteure.
Certains travaux sur les modèles de stratégies du numérique ont abouti à quelques résultats
exploitables.
En premier lieu nous retenons le « réflexe institutionnel »336 (institutional reflexivity) élaboré
par Cooke, qui « traduit la capacité à prendre conscience de nouveaux enjeux qui obligent à
réorganiser la gouvernance des acteurs locaux et à rediriger les stratégies ». Nous pouvons
illustrer cela avec le cas de la ville de Montpellier qui « pour essayer d’émuler ce volet TIC et
334 Ullmann, C. (2007). Les régions françaises dans le millefeuille institutionnel des politiques de développement
numérique. Networks and Communication Studies , 21(1-2), 113– 136. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.netcom-journal.com/volumes/articlesV211/Netcom113 -136.pdf
335 Ullmann, C. (2007). Ibid . p 123.
336 Cooke, P. (1997). Institutional reflexivity and the rise of the region state. Space and Social Theory:
Interpreting Modernity and Post-Modernity , 285-304.
une forme de développement numérique utile à son image de « ville de la connaissance », (…)
s’est attaquée à la couche la plus basique du triptyque Tic : l’aménagement numérique. »337.
En second lieu, la nouveauté apportée par les TIC contraint les organisations à piloter en
apprenant (learning by monitoring), révélé sous le nom de concept de Sabel338 par l’auteure
précitée. Nous retenons ce point de vue pour la suite.


3.2.1.2 Définition pour les Nations Unies[modifier]
A une autre échelle du territoire, nous nous tournons vers les Nations unies, qui publient
depuis quelques années un classement mondial des nations en termes de développement
numérique : le « e-government index »339 basé sur « trois facteurs essentiels : les services en
ligne, le développement de l’infrastructure de télécommunications et le capital et
compétences humaines »340. Il s’agit de mesurer les effets d’une gouvernance du numérique
sur sa population plutôt que de mesurer ou définir cette gouvernance.
En 2014, la France est leader en Europe selon cet indicateur, et quatrième au monde comme
nous pouvons le constater sur le Tableau ci-dessous.
Tableau 18 : Les leaders mondiaux et régionaux de l'e-gouvernement, source United Nations.
337 Bakis, H., & Schon, A. (2012). Ville de la connaissance et terreau numérique. Netcom. Réseaux,
communication et territoires, (26-3/4), 275-306. https://doi.org/10.4000/netcom.1025
338 Sabel, C. F. (1993). Learning by monitoring: The institutions of economic development . Center for Law and
Economic Studies, Columbia University School of Law.
339 United nations. (2014). UN E-Government Survey 2014. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://publicadministration.un.org/egovkb/en-us/Reports/UN-E-Government-Survey-2014
340 Van Cuyck, A. (2013). L’open data comme nouvelle forme de gouvernance numérique: enjeux, marchés,
modèles, idéologies. In XIX° colloque international franco -roumain" Culture et Responsabilité sociale dans la
communication des organisations". Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse https://hal-univ-lyon3.archives-
ouvertes.fr/docs/00/96/33/37/PDF/article_bucarest_open_data.pdf
Nous voyons bien ici la volonté de comparer les nations entre elles, c’est un point que nous
pourrons exploiter lorsque nous aborderons la conséquence sur l’image de marque de
l’Université.


3.2.1.3 Définition concernant la saisie informatisée des données personnelles des[modifier]
citoyens, et de leur interconnexion
Lors d’un entretien sur la saisie informatisée des données personnelles des citoyens, et de leur
interconnexion réalisé par Yann Moulier-Boutang et Olivier Surel, Chatenay, Laurent et
Miller, nous révèlent que « Gouverner, c’est décider. Et la décision n’est jamais déductible ;
si c’est déductible, c’est une conséquence, ce n’est pas une décision. »341 : ce point de vue
nous paraît réducteur car il ne tient pas compte des rétroactions des usagers, et pourrait à
terme voir installer des outils, qui seraient indispensables pour ceux qui pilotent, mais non
compris et donc non utilisés par les citoyens.
Toujours lors de cet entretien, nous relevons que ces auteurs, en parlant de la gouvernance du
numérique, la caractérisent comme « gouvernance par le numérique, au nom du numérique et
pour le numérique », il nous semble qu’il s’agit bien de cela.
Pour nous il faut compléter cela par la position de l’usager du numérique pour pouvoir définir
cette gouvernance du numérique.


3.2.1 Le pilotage par indicateurs : nouvelle tendance des universités en[modifier]

Europe
Lors du Colloque EUTIC 2016, un réseau de recherche européen et pluridisciplinaire sur les
enjeux et usages des TIC, Carlos Correia nous présentait sa vision des nouvelles tendances de
la gouvernance des universités en Europe342. L’argumentation proposée s’appuie aussi bien
sur les recommandations de l’association des universités européennes343, que sur le
341 Chatenay, G., Laurent, É., & Miller, J.-A. (2005). Le calcul du meilleur  : alerte au tsunami numérique.
Multitudes , no 21(2), 195-209. le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=MULT_021_0195
342 Correia, C. (2016). The new trends in governance of universities in europe. Présenté à Colloque EUTIC 2016,
Zakhyntos (Gr).
343 European University Association. (2017). Home. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.eua.be/
pragmatisme de l’orateur concernant les indicateurs de gouvernance de l’Université Nova de
Lisbonne344.
Nous retenons de cette présentation que du fait du développement de l’autonomie des
universités, les équipes qui les dirigent se voient en pleine mutation, et devraient notamment
faire appel à de nouveaux concepts de management s’appuyant sur des tableaux de bord
d’indicateurs appelés autonomy scorecard.
Les principaux défis liés à la gestion d'un plan stratégique sont pour lui, la mise en place d’un
tableau de bord prospectif, autant d’indicateurs permettant le pilotage de l’établissement, et
tout ceci dans une logique de développement de l’autonomie stratégique de l’université.
Dans les pays où l’autonomie est à développer, nous relevons que la mise en place de
Fondation publique offre une meilleure autonomie financière en faisant appel à des fonds
privés sur des projets spécifiques.


3.2.2 Gouvernance du numérique et exemples d’enjeux de la formation[modifier]

initiale
Nous estimons que le modèle de New Public Management (NPM) se présente comme une
remise en cause de la distinction traditionnelle entre les principes de gestion des organisations
privées (entreprises) et publiques (administrations) : ce que beaucoup de personnes discutent.
Il offre aujourd’hui des limites, car il nous semble plus opportun d’évaluer les stratégies de
gestion publique en termes d’effet direct sur la résolution des problèmes sociaux visés, plus
que sur leur mode de fonctionnement.
La stimulation à comparer le public au privé reste cependant un facteur observé et validé345,
qui peut nous permettre de mieux comprendre nos fonctionnements. Le concept de « digital
era governance » 346 proposé par Dunleavy et al. entre dans cette logique et admet que le
NPM est mort au profit d’un autre mouvement. Ce mouvement global incorporant ces
nouveaux changements est la «gouvernance de l'ère numérique» (DEG). Elle implique, pour
ces auteurs, « la réintégration des fonctions dans la sphère gouvernementale, l'adoption de
344 Universidade NOVA de Lisboa. (2017) Universidade NOVA de Lisboa. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.unl.pt/en
345 Meyer, J. W., & Scott, W. R. (1992). Organizational environments: Ritual and rationality. Sage Publications,
Inc.
346 Dunleavy, P., Margetts, H., Bastow, S., & Tinkler, J. (2006). New public management is dead—long live
digital-era governance. Journal of public administration research and theory , 16(3), 467-494.
structures holistiques et axées sur les besoins, et le progrès de la numérisation des processus
administratifs »347
Il ne s’agit d’observer les usages numériques ou bien les performances d’organisations, mais
bien de porter un regard sur la capacité de la fonction publique à résoudre son problème
social, caractérisé ici par le défaut de compétences du numérique dans la vie courante et
professionnelle.
Figure 50 : Effet de la formation aux usages du numérique, schéma traduit et librement adapté de
Dunleavy (2006).
Pour nous, un des objectifs de la gouvernance à l’ère numérique est d’amener chacun des
citoyens à utiliser intelligemment et de manière critique les dispositifs numériques. Cette
gouvernance est de nature à influencer la résolution du problème social (flux 1) en
l’encourageant. Mais cela ne suffirait pas car à un niveau institutionnel, la mise en œuvre
politique pourrait afficher des effets négatifs (flux 3) comme pour le flux 5 (injonction de la
gouvernance à développer les compétences). C’est ainsi que pour réduire les problèmes au
niveau social, les flux 4, 6 et 2, représentent la création des dispositifs favorisant le
développement des compétences. Ce développement permettrait de résoudre le problème
social en offrant l’autonomie de compétences du numérique chez les citoyens. Nous
proposons d’adjoindre à ce raisonnement, le rôle des établissements de l’ESR, en ajoutant une
boucle de rétroaction, prenant en compte les besoins des usagers (flux 8) et la mise en place
des formations (flux 7). Nous rappelons ainsi le rapport bijectif entre compétence et
autonomie : « une compétence avérée est une condition nécessaire pour se voir reconnu une
347 Dunleavy, P., Margetts, H., Bastow, S., & Tinkler, J. (2006). Ibid, p 470.
forte autonomie, en même temps que cette dernière est une condition du déploiement, mais
aussi du développement de la compétence »348
Les établissements du supérieur pourraient ainsi favoriser le développement des compétences
en favorisant l’autonomie, en s’appuyant sur des dispositifs portés politiquement par la
gouvernance du numérique.


3.3 Design agile et gouvernance du numérique[modifier]

universitaire
Nous parlons ici de design informationnel, et de la manière dont il permet la gouvernance du
numérique universitaire. Il est envisageable, selon Lise Vieira, si l’organisation est
« adaptative »349 et si son « design organisationnel » a tenu compte de sa : « faculté de
produire des objets nouveaux, innovants en poursuivant un but (un idéal) »350. L’idée ainsi
émise dans cette article est que ce qui importe surtout dans l’idée de design informationnel,
c’est l’idée de stratégie et d’adaptation : « il s'agit de s'adapter au mieux aux situations
concrètes, aux besoins tout en prenant en compte les ressources humaines participant à cette
création. » 351
Une solution de réorganisation informationnelle pourrait-être de s’appuyer sur des concepts
d’agilité à l’instar de la conception de design numérique. Cette « agilité organisationnelle »352
ne peut pas apporter un nouvelle vision de restructuration des organisations : elle permet de
proposer des actions-réactions plus à l’image de la réactivité des organisations qu’imposent le
numérique. Nous appuyons cette idée sur la façon dont les universités se sont adaptées à
l’arrivée des MOOC, dispositifs de formation non anticipés pars les schémas du numérique
antérieurs à 2013.
Il s’agit alors de mettre en place un pilotage de l’organisation du numérique en s’appuyant sur
des concepts d’agilité, nés de la nécessité de mieux programmer les applications
informatiques353 : ce pilotage s’appuie sur une stratégie du numérique explicitée.
348 Perrenoud, P. (2002). L’autonomie, une question de compétence. Résonances , 1, 16-18.
349 Barbaroux, P. (2010). Modularité de l’organisation et design des organisations adaptatives: une analyse de la
transformation des organisations de défense americaines. Innovations , 31(1), 33-50.
350 Vieira, L. (2014). op . cit. p 39
351 Vieira, L. (2014). Ibid, p 39
352 Boudarel, M.-R. (2010). op. cit.
353 Agile Alliance. (2001). Manifesto for Agile Software Development. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.agilemanifesto.org/
L’agilité organisationnelle est « la capacité d’adaptation permanente de l’entreprise en
réponse à un environnement caractérisé par la complexité, la turbulence et l’incertitude »354.
Nous proposons d’adapter « Les 12 concepts clés »355 d’Agileo pour la conception agile des
applications, vers la conception agile des organisations de l’ESR, dans un premier temps en
faisant une analogie des acteurs.
Conception agile des applications Conception agile des organisations ESR
Le commanditaire L’équipe présidentielle
Les développeurs L’équipe technique en charge du numérique (ingénierie)
Les utilisateurs ou clients ? Les usagers
Tableau 19 : Les acteurs de l’agilité de l’Université.
Puis dans un deuxième temps, en proposant une nouvelle rédaction des 12 concepts adaptés à
aux organisation de l’université, en remplaçant « client » ou « utilisateurs »par « usager »,
« équipe de développeurs » par « l’équipe en charge du numérique », « Un logiciel
opérationnel » par un « p rojet numérique opérationnel », « Une attention continue à
l’excellence technique et à une bonne conception » par « Une attention continue à l’efficience
et à une bonne organisation »et enfin « l ’équipe » par « la gouvernance ».
354 Goldman, S. L., & Preiss, K. (1994). Agile Competitors and Virtual Organizations: Strategies for Enriching
the Customer (1 edition). New York: Wiley.
355 Agile Alliance. (2001). Manifesto for Agile Software Development. Consulté 25 Septembre 2017, à l’adresse
http://www.agilemanifesto.org/
Conception agile des organisations à l’Université
1-Notre plus haute priorité est de satisfaire l’usager de 7-Un projet numérique opérationnel est la principale
l’université en livrant rapidement et régulièrement des mesure d’avancement.
fonctionnalités à grande valeur ajoutée.
2-Accueillez positivement les changements de besoins, 8-Les processus Agiles encouragent un rythme de
même tard dans le projet. Les processus Agiles développement soutenable. Ensemble, l’équipe
exploitent le changement pour donner un avantage présidentielle, la gouvernance, l’équipe en charge du
compétitif à l’usager. numérique et les usagers devraient être capables de
maintenir indéfiniment un rythme constant.
3-Livrez fréquemment des états d’avancement du 9-Une attention continue à l’efficience et à une bonne
projet avec des cycles de quelques semaines à quelques organisation renforce l’Agilité.
mois et une préférence pour les plus courts.
4-Les usagers ou leurs représentants et l’équipe en 10-La simplicité – c’est-à-dire l’art de minimiser la
charge du numérique doivent travailler ensemble quantité de travail inutile – est essentielle.
quotidiennement tout au long du projet.
5-Réalisez les projets avec des personnes motivées. 11-Les meilleures organisations émergent d’équipes
auto-organisées.
Fournissez-leur l’environnement et le soutien dont ils
ont besoin et faites-leur confiance pour atteindre les
objectifs fixés.
6-La méthode la plus simple et la plus efficace pour 12-À intervalles réguliers, la gouvernance (l’équipe
transmettre de l’information à l’équipe en charge du présidentielle, l’équipe en charge du numérique, et les
numérique et à l’intérieur de celle-ci est le dialogue en usagers) réfléchit aux moyens de devenir plus
face à face. efficace, puis règle et modifie son comportement en
conséquence.
Tableau 20 : Les 12 concepts d’agilité appliqués à la gouvernance du numérique universitaire.
Ce pilotage implique un mode collaboratif des différentes parties prenantes de la mise en
œuvre du numérique, et des consultations régulières des usagers eux-mêmes via des enquêtes.
L’organisation agile impose donc une nouvelle organisation et un nouveau positionnement de
ceux qui pilotent la gouvernance des universités, car ils doivent tenir compte dorénavant d’un
processus ascendant ou bottom-Up, accompagné de régulation très régulière.


3.3.1 Changements pour la gouvernance des établissements de l’ESR[modifier]

3.3.1.1 Vers la fin d’un modèle de l’imposition des outils TIC[modifier]
Il fût un temps où il a été considéré comme pertinent par les gouvernances du numérique, de
choisir un dispositif TIC répondant peu ou prou au besoin des acteurs de l’Université sans les
consulter. Si le modèle paraissait fonctionner, pour des raisons de technicités, concernant les
infrastructures et leurs modalités de connexion à la fin du XX° siècle, ce raisonnement a
commencé à montrer des faiblesses avec l’arrivée des Environnements numériques de travail
(ENT). Cette observation a été portée par Rizza, Cerisier, Ologeanu-Taddei et Lemarchand-
Millois concernant le déploiement de l’Environnement Numérique de la Formation Initiale de
Télécom Paris. Ces auteurs ont révélé que ce dispositif est « au cœur d’un processus de
changement de l’école initié par sa direction »356. Il est ainsi « la conséquence, d’une volonté
politique et inst itutionnelle d’intégration des TICE au sein de l’école »357, qu’il « constitue un
enjeu pour ses acteurs, et s’inscrit par là même dans des stratégies individuelles et
collectives »358 et qu’il « contribue à la réorganisation des parcours de formation proposés
aux élèves autour des unités d’enseignement (UE) »359. Les auteurs démontreront que les
acteurs de cet ENT le considère comme un « objet frontière »360 au sens de Star et Griesemer,
déclinable en quatre dimensions « (1) l’abstraction (facilite le dialogue entre mondes), (2) la
polyvalence (plusieurs activités ou pratiques sont possibles), (3) la modularité (différentes
parties de l’objet peuvent servir de base de dialogue entre acteurs) et (4) la standardisation
de l’information incorporée dans l’objet (rend interprétable l’information). »361
Concernant l’innovation attendue par la direction avec ce changement apporté par l’ENT, le
constat n’est pas aussi élémentaire que l’on pouvait croire avant sa mise en place :
« L’innovation n’est pas [l’ENT] (…) en lui-même mais le dispositif et les processus de
construction des parcours au sein desquels [l’ENT] (…) joue un rôle déterminant ».


3.3.1.2 Accompagner les usages du numérique[modifier]
Dans le système qu’est l’Université, comme nous l’avons dit précédemment, nous nous
concentrons sur l’usage de numérique. En quoi cela est-il transformant ? Il s’agit
essentiellement de la transformation des usages individuels, en usages intégrés dans les
processus organisationnels, intégrés au fonctionnement du système Université. Le
changement au sens de Dominique Beriot est une : « opération de transformation d’un
356 Rizza, C., Cerisier, J.-F., Ologeanu-Taddei, R., & Lemarchand-Millois, S. (2008). Pertinences et
impuissances d’une politique globale de changement autour des TICE face aux stratégies d’acteurs.
Communication et organisation, (33), 109-118. https://doi.org/10.4000/communicationorganisation.507 p109.
357 Rizza, C., Cerisier, J.-F., Ologeanu-Taddei, R., & Lemarchand-Millois, S. (2008). Op. cit. p109.
358 Rizza, C., Cerisier, J.-F., Ologeanu-Taddei, R., & Lemarchand-Millois, S. (2008). Op. cit. p109.
359 Rizza, C., Cerisier, J.-F., Ologeanu-Taddei, R., & Lemarchand-Millois, S. (2008). Op. cit. p109.
360 Star, S. L., & Griesemer, J. R. (1989). Institutional ecology,translations’ and boundary objects: Amateurs and
professionals in Berkeley’s Museum of Vertebrate Zoology, 1907-39. Social studies of science, 19(3), 387-420.
361 Trompette, P., & Vinck, D. (2009). Retour sur la notion d’objet-frontière. Revue d’anthropologie des
connaissances, 3, n° 1(1), 5-27. Consulté à l’adresse https://www.cairn.info/revue-anthropologie-des-
connaissances-2009-1-page-5.htm
système pour s’adapter aux variations de son environnement. Le changement peut concerner
les objectifs, les processus, la structure »362 .
Les usages du numérique se démocratisant, le changement des usages venant « par la rue »,
ils entrent dans l’entreprise par le salarié. L’objectif n’est plus pour l’Université d’organiser
de sessions de formation de ses membres sur les usages du numérique mais bien à l’Université
d’accompagner ces usages pour les rendre professionnels et améliorer leur efficience. Cela
bouleverse le processus organisationnel de l’établissement, une révolution copernicienne se
réalise sur les flux d’informations de la gouvernance du numérique. Pour les processus du
changement, nous sommes aux premières étapes de ce que les psychologues appellent la
courbe du changement (Figure suivante).
Temps
Figure 51 : Courbe du changement de Kübler-Ross (1969)
Elisabeth Kübler-Ross propose une démarche363 qui tient compte de l’approche temporelle :
les acteurs subissant un changement passent par plusieurs états, une succession de réactions
face à une situation précise. Le premier état (1) est le déni (denial), il intervient après
l’annonce du changement, les acteurs peuvent exprimer par exemple qu’il n’est pas possible
que cela arrive. Le deuxième état (2), dit de résistance regroupe le choc (shock), la colère
(anger), la négociation (Bargaining) et dépression (depression). Cet état est indispensable, il
362 Bériot, D. (1992), op. cit. p 51
363 Kübler-Ross, E. (1969). On death and dying. New York: Scribner’s .
signifie que le processus de changement est en train de s’activer au sein de l’organisation. Cet
état permet de prendre en considération le changement, de bien le comprendre pour se
préparer à l’accepter. Le troisième état (3) est la phase d’expérimentation (acceptance). C’est
le début du processus d’apprentissage permettant d’augmenter ses compétences pour tirer
profit du changement. Enfin la dernière étape est la phase d’engagement (commitment),
synonyme de stabilisation dans l’organisation.
Ce que nous retenons, c’est qu’il appartient alors au pilotage de la gouvernance du système de
comprendre que les acteurs et l’organisation de l’université vont connaître successivement
« des états de déni, de perte de repères, voire de colère, avant d’admettre définitivement les
principes. »364 . La deuxième phase, dite de conduite du changement, est de proposer des
structurations permettant de provoquer le déclic, qui entrainera l’engagement.


3.3.2 Mettre en place une nouvelle gouvernance[modifier]

L’Université est une organisation par nature complexe, avec des interactions en interne, en
externe, des obligations nouvelles de gestion du risque, de rentabilité et des nécessités de
fonctionner en mode projet. C’est une organisation dorénavant en recherche d’améliorations
constantes dans son organisation.
Comme nous l’avons rappelé, l’ « approche analytique » de l’Université doit être remplacée
progressivement par une « approche systémique ». Il faut donc trouver une nouvelle position
d’analyse de cette organisation, l’analyse des services créée pour répondre à une
fonctionnalité de l’organisation, par exemple la gestion de scolarité, ne répondant plus à la
complexité de l’organisation.
Le management systémique par les processus propose une alternative pour améliorer les
organisations.
Il s’appuie sur la décomposition du système complexe en sous-système appelé processus,
concept réellement apparu pour les entreprises dans les années 1985365. Nous pouvons en
rependre la définition normée par l’AFNOR « Un processus est un système d’activité qui
364 Bériot, D. (1992), Ibid. p 53
365 Brandenburg, H., & Wojtyna, J.-P. (2006). L’approche processus, mode d’emploi (2e édition). Paris: Editions
d’Organisation.
utilise des ressources pour transformer des éléments d’entrée en éléments de sortie »366, ou
bien s’appuyer sur cette définition de processus comme « le résultat des interrelations en
termes d’échanges d’informations entre les différents services internes concernant les
exigences des usagers ».367
Le management systémique par les processus, c’est-à-dire « connaître toutes les activités
nécessaires à la production des prestations satisfaisantes pour les clients et à en harmoniser
le fonctionnement »368, toujours selon les mêmes auteurs.
Cette notion de nouvelle gouvernance apparaît comme une nouvelle approche de la régulation
et du contrôle du système universitaire. Le numérique est par nature transversal et son
pilotage stratégique nécessite une vision transversale de l’Université tout en autorisant la
remontée d’information pour ajuster. Ce passage à une vision à la fois horizontale et verticale
nécessite une nouvelle approche du pilotage : le numérique d’une Université ne piloterait
plus par les services à l’usager mais par le besoin de ces mêmes usagers.
Nous avons repéré cette prise en charge de la considération de la gouvernance du numérique,
sans pour l’exploiter sur ce terrain, lors de la création de la gouvernance du numérique de
l’Université Toulouse fédérale. Philippe Raimbault, l’actuel Président de cette COMUE,
propose la création d’une co-construction du schéma stratégique du numérique de manière
paritaire.369

3.4 Vers un concept de transformation numérique des[modifier]

établissements de l’ESR
La construction d’une stratégie numérique pour une organisation serait « l’art de se construire
un avantage concurrentiel » selon Jean-Philippe Timsit, professeur de stratégie compétitive &
digitale à l’ESC de Rennes. Nous partageons cet avis en ce sens où cette stratégie ne peut se
construire sans une réflexion aboutie sur l’avenir de cette organisation, et sur sa stratégie
globale. A ce jour, un grand nombre d’organisations s’intéressent à leur stratégie numérique,
ce que nous considérons comme un demi-échec de l’informatisation à outrance des activités
366 AFNOR. (2005). Norme X 50-176, Management des processus. le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://grandsorganismes.gouv.qc.ca/upload/cego/editor/asset/Veilles%20strat%C3%A9giques/Optimisation%20d
es%20processus/Management%20des%20processus.pdf
367 Mougin, Y., & Maillard, P. (2003). Processus : les outils d’optimisation de la performance. Paris: Editions
d’Organisation.
368 Mougin, Y., & Maillard, P. (2003). op. cit.
369 Université de Toulouse. (2017). SI et Numérique | Un projet pour l’Université de Toulouse. Consulté le 25
septembre 2017 , à l’adresse http://universite-integree.univ-toulouse.fr/si-et-numerique
des organisations : il n’est plus question de faire du « digitalwashing », en clin d’œil, à cette
notion tant décriée de « greenwashing »370 en développement durable.


3.4.1 Transition numérique et transformation numérique[modifier]

Toujours dans l’article conjointement écrit avec deux collègues de sciences de gestion, intitulé
« Quand la transformation numérique dans le secteur bancaire prend « chaire » »371, nous
avons abordé le concept de transformation numérique.
Il s’agit bien d’une transformation des organisations, des compétences-métiers, qu’implique
l’arrivée du numérique dans les universités : dans une logique de performance des
organisations, mais aussi dans le cadre de l’aménagement d’une politique de ressources
humaines visant à redéfinir les métiers de l’organisation publique au regard de cette
transformation numérique.
Cette transformation est le résultat d’un mécanisme endogène au système et d’un changement
exogène au système de l’établissement au sein de l’ESR, une des conséquences du
changement de la société.
Nous estimons que la résistance au changement provient de l’attachement des individus aux
normes du groupe : normes formelles, normes implicites (sociales, culturelles, etc.). Il est
nécessaire d’agir sur les normes du groupe pour permettre le changement : les processus de
changement les plus efficaces sont ceux portés par le groupe. Il est « plus efficace de
réduire les forces négatives du changement (résistances) que d’augmenter les forces
positives (arguments en fave ur d’un nouveau comportement) »372 pour reprendre Bériot.
D’un point de vue linguistique, « transition et transformation présentent un même préfixe «
trans », qui indique « le sens du mouvement que la matrice trans implique » 373 comme nous
le rappelle Ivana Padoan. Il y a bien un lien commun entre ces deux notions, propre à la
systémique et les analyses des interactions, l’auteure ajoutant d’ailleurs que « le sens du
mouvement que la matrice trans implique se développe dans un processus de synergie interne,
relationnelle, un médium, en réciprocité avec l’environnement extérieur. »374
370 Beers, D., & Capellaro, C. (1991). Greenwash. Mother Jones , 16(2), 38-43.
371 Mocquet, B., Villeseque-Dubus, F., & Mannarini, M. (2015). op. cit.
372 Bériot, D. (1992), op. cit.
373 Padoan, I. (2016). Transaction, transition et transformation avec des notes de genre. Pensée plurielle , (41),
55-68. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=PP_041_0055
374 Padoan, I. (2016). Ibid. p55
La transition connaît son point de départ et son point d’arrivée dans une dynamique de
changement. Elle est, pour Ivana Padoan, « plus longue, aléatoire, fortuite, conflictuelle à
cause de la déstandardisation de la vie et de ses structures »375. Elle ajoute qu’elle est « la
conséquence d’un modèle social. »376.
Depuis l’Antiquité, le concept de transformation, toujours selon Ivana Padoan, représente
« une dynamique au sens épistémique et une perspective diversifiée, source de multiples
significations et de métamorphoses : du mouvement au changement de forme, de la variation
imaginaire aux dispositifs, des perspectives souhaitées à de nouvelles topologies de
formes. »377. La transformation possède l’avantage de connaître le point de départ du
changement, mais d’en ignorer le point d’arrivée, sous-entendu, qui pourra évoluer en
fonction des étapes du changement. Le système est alors plus vivant, et plus à l’écoute de ses
modifications endogènes et exogènes : il en devient plus efficace, ce qui est le premier but
recherché.
L’art de la stratégie numérique est défini comme « l’ensemble des méthodes et
techniques numériques permettant à l’entreprise de construire un avantage concurrentiel. »378
par Jean-Philippe Timsit. C’est un secteur de l’organisation « où l’analyse est fondamentale
pour laquelle nous utilisons de multiples méthodes et techniques. » : elle précède toutes
décisions organisationnelles de la gouvernance. Cette analyse stratégique, pour reprendre cet
auteur, permet aux responsables du développement des organisations d’« identifier les
menaces qui pèsent et les opportunités qui (…) permettront de [les] transformer »
Pour mener à bien le processus d’analyse stratégique, Jean-Philippe Timsit propose de
conduire le cheminement suivant:
  • « affirmation de l’intention stratégique » du projet de l’équipe présidentielle : la
rédaction d’un schéma stratégique du numérique de l’établissement,
  • « détermination la projection dans le futur ». Cette vision va piloter les actions
suivantes, et peut prendre la forme d’un schéma directeur du numérique en trois
grandes sous-parties
375 Padoan, I. (2016). Ibid. p58
376 Padoan, I. (2016). Ibid. p58
377 Padoan, I. (2016). Ibid. p58
378 Timsit, J.-P. (2016). La stratégie digitale, l’art de se construire un avantage concurrentiel |. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://www.frenchweb.fr/la-strategie-digitale-lart-de-se-construire-un-avantage-
concurrentiel/256367
o « élaboration du diagnostic » : un état des lieux de votre organisation et
une comparaison avec les autres organisations existantes,
o « f ormulation de la décision stratégique et conception des plans
d’action »: rédaction du schéma directeur du numérique et construction des
quatre pôles, des interactions et des six fonctions d’alignement du modèle
de Parsons
o « suivi de la planification de l’exécution de chaque plan d’actions »: en
mettant en place un suivi de projets et des indicateurs de réussite.
Jean-Philippe Timsit relève « deux sources principales d’avantage concurrentiel » : la
première est la différenciation, la deuxième est l’efficience. En marketing, selon Bathelot, la
différenciation est une « politique produit » par laquelle une entreprise va « différencier son
produit vis à vis de ceux de la concurrence » 379. Cette différenciation peut concerner la
nature du produit, une modalité inédite par exemple, mais aussi par une éventuelle stratégie de
prix, par exemple. La différenciation peut également « se faire par le bas en proposant un
produit plus « basique » mais moins cher » ou se « reposer sur des caractéristiques réelles ou
être artificielle et reposer d’avantage sur l’image. ». L’efficience quant à elle, nous l’avons
déjà repéré dans le cadre d’une des sous-fonctions de l’atteinte des buts, est « un moyen de
réduire les coûts pour être moins cher que les concurrents ». Pour Jean-Philippe Timsit, « la
différenciation est plutôt une stratégie à long terme; l’efficience est plutôt transitoire », il faut
donc jouer sur ces deux sources d’avantage concurrentiel.
Pour rendre « l’avantage concurrentiel soutenable, défendable, il est donc indispensable
d’innover plus vite que les concurrents » : l’innovation que peut apporter la stratégie
numérique favorise pour nous l’avantage concurrentiel.


3.4.2 L’innovation comme conduite du changement de cette[modifier]

transformation
On ne peut parler de changement organisationnel sans parler de Kurt Lewin et de ses
influences empruntées aux théories de l’acteur-réseau de Callon et Latour. Kurt Lewin
profondément humaniste se préoccupait principalement de la résolution des conflits sociaux
afin d’améliorer la condition humaine. Le changement selon Lewin est un processus lent, qui
379 Bathelot (2016). Différenciation. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.definitions-
marketing.com/definition/differenciation/
suit un cheminement en trois étapes380 : le dégel, la transition et le regel. Durant la première
phase, le processus de changement doit permettre d’aider les acteurs à comprendre le
changement en les informant sur les tenants et les aboutissants, afin de limiter le choc. Ceux
qui pilotent le changement doivent s’attendre à une forme de résistance de la part des acteurs.
La deuxième phase contribue à aider les acteurs à changer, en associant à des phases d’écoute,
des moyens de formations nécessaires. Enfin, en dernier lieu, un soutien des individus dans
leurs nouveaux rôles, et des reconnaissances doivent permettre de stabiliser l’organisation.
Ce modèle de conduite du changement traduit une mise en application, les « moments » de
Callon, que nous présentons dans le Tableau 21. Nous voyons bien ici le rôle des acteurs du
système et particulièrement celui de porte-parole, nous y reviendrons ultérieurement dans le
cadre de la description du rôle de vice-président en charge du numérique.
Moments Description vu par Walsh381
Perception de la nécessité du changement Le besoin de changement est ressenti est exprimé par
un acteur qui voit les opportunités ancrées dans le
changement.
Identification des actants et problématisation Les actants doivent être identifiés au travers de leurs
problématiques diverses et le changement envisagé
doit être traduit de telle manière qu’ils devient
congruent avec ces problématiques au travers de
l’opportunisme de chacun des actants.
Intéressement et alliances Les influences externes au réseau en train de se
constituer doivent être bloquées afin de ne pas polluer
les alliances en train de se consulter avec l’aide de
divers intéressements.
Distribution des rôles et enrôlement Dans le réseau organisationnel, les rôles sont
distribués est accepté, de manière informelle, le plus
souvent.
Mobilisation des porte-paroles Chaque actant a des porte-paroles désignés ou
émergents qui sont mobilisés autour du projet de
changement.
Tableau 21 : Les moments de la conduite du changement de Callon vu par Walsh.
Les moments de la conduite du changement de Callon étant mobilisés, nous sommes tentés de
les transférer sur le domaine d’étude qui nous intéresse, le contexte universitaire français.
380 Lewin, K. (1991). Conduite, connaissance et acceptation de nouvelles valeurs. traduction Claude Lagadec, in
Roger Tessier et Yvan Tellier, Changement planifié et développement des organisations, Presses de l’Université
du Québec, 6, 1-12.
381 Walsh, I., & Renaud, A. (2011). La théorie de la traduction revisitée ou la conduite du changement traduit.
Application à un cas de fusion-acquisition nécessitant un changement de Système d’Information. Management &
Avenir , (39), p291. Consulté à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=MAV_039_0283
Nous retrouvons ainsi les cinq moments précités que nous allons illustrer avec des situations
propres à notre objet d’étude.


3.4.2.1 Perception de la nécessité du changement[modifier]
Dans le cadre de la perception de la nécessité des changements nous estimons que nous
devons observer le système d’un point de vue interne et d’un point de vue externe. Cette étape
est un véritable diagnostic indispensable à la transformation numérique.
  • La prise en compte des priorités nationales et régionales : facteurs exogènes
Les facteurs exogènes issus des priorités nationales sont communs à l’ensemble des
établissements : politique nationale de l’ESR, changement de la société, généralisation de
l’usage du numérique chez les citoyens etc. Dans le cadre de priorités régionales, le contexte
territorial de l’établissement entre en jeu dans le diagnostic : fusion d’universités, association
d’universités, changement échelle de la région…
  • La prise en compte du contexte interne : facteurs endogènes.
Les facteurs endogènes sont singuliers à chaque établissement. Il s’agit d’estimer le point de
départ de cette transformation en évaluant la capacité de l’organisation à absorber ce
changement. Bien évidemment cette capacité à évaluer l’établissement dans son état initial ne
concerne pas uniquement le volet numérique. Le numérique étant transversal à l’organisation
de l’établissement, il faut aussi estimer si les services d’appui (financiers, ressources
humaines) sont en capacité de se lancer dans cette transformation. Ce diagnostic ne peut être
réalisé que par une approche globale de l’établissement, par un groupe pluridisciplinaire,
paritaire de préférence, et associant dès le début les usagers, pour en garantir le succès.


3.4.2.2 L’identification des actants et problématisations[modifier]
Le deuxième moment de Callon s’appuie sur les acteurs et sur la définition des différentes
problématiques que devra résoudre cette transformation numérique. C’est sûrement durant
cette phase que la théorie des acteurs réseau prend toute sa force en mobilisant toutes les
personnes concernées par la transformation de l’organisation. Il s’agit aussi de faire remonter
les besoins des usagers et les dysfonctionnements éventuels du système existant afin d’en
connaître parfaitement les points à améliorer. Une approche typologique de public peut nous
aider à identifier les acteurs et mettre en évidence la problématisation.
Identification des acteurs concernés
Cette phase est cruciale car il s’agit d’associer tous les acteurs de l’Université : les étudiants,
le stagiaire de la formation continue, le personnel enseignant, les chercheurs, les personnels
administratif, technique et de bibliothèque. Chacune de ces catégories de personnel a besoin
d’usage du numérique propre à son métier, c’est cet usage qu’il faut identifier durant cette
phase.
Regroupement des usages communs et problématisations
Dans une logique d’efficience, la phase de regroupement des usages communs est une phase
indispensable à la rationalité de cette transformation. En effet sans ce regroupement des
usages, il est possible de faire vivre côte à côte des outils dans le système d’information qui,
peu ou prou, proposent les mêmes fonctionnalités, mais qui ont été séparés parce qu’ils ne
concernent pas la même catégorie de personnel. Nous pouvons prendre l’exemple d’un outil
de gestion de l’emploi du temps et des salles : certains y verront un outil de contrôle de
service des enseignants, d’autres un planning de la semaine, ou bien encore un outil pour
assister la surveillance des salles en termes de sécurité incendie.
Identification des services d’appui
Ces service d’appui sont en fait tous les services qui vont mettre en œuvre une production qui
interviendra dans la transformation numérique : typiquement dans les universités nous
retrouverons la DSI, le service informatique, la communication, le service TICE et le service
documentation ou bibliothèque universitaire. Une bonne identification permettra un
enrôlement des directeurs de ses services, et par là même des personnes de leurs services.
Planification de financement des investissements
Cette planification prend la forme d’un document rédigé qui identifiera les projets liés à cette
transformation numérique et les classera par ordre de priorité ou de chronologie. Un important
travail de planification budgétaire pluriannuel devra être précisément réalisé. Nous pouvons
citer par exemple le renouvellement de serveurs ou de salles pédagogiques qui ne doivent plus
se faire de manière curative mais dans une logique de maintenance prédictive programmée.
Intéressement et alliance
La transformation numérique étant un projet d’établissement, il faut trouver au sein des
conseils un intéressement de la part des membres et créer des alliances avec d’autres projets
de l’établissement. Nous pouvons citer pour exemple de projet commun, une alliance avec le
vice président recherche dans le cadre de la sécurisation les données de recherche :
investissement dans un data Center en local, ou déploiement d’une politique de sauvegarde
des données recherche commune à l’établissement.
La validation par les instances et les tutelles
La phase de validation du projet de transformation numérique par les conseils de
l’établissement précède la validation par la tutelle.


3.4.2.3 Distribution des rôles et enrôlement[modifier]
Chaque projet permettant la mise en place de cette transformation numérique doit disposer
d’un porteur de projet identifié ayant pour mission de suivre la réalisation, et de rendre
compte de l’avancée. Cet acteur n’est pas nécessairement du métier de l’informatique ou des
télécommunications (IT), il sera de préférence du métier concerné par le projet. Il est de toute
évidence la personne la plus à même pour réguler temporellement et fonctionnellement le
projet.
L’importance d’une conduite de projet adaptée
La conduite qui nous semble le plus appropriée pour une transformation numérique réussie,
s’appuie sur une certaine agilité organisationnelle, indispensable pour autoriser la nature
dynamique des dispositifs numériques.


3.4.2.4 Mobilisation des porte-paroles[modifier]
Dans la théorie de Callon, les porte-paroles ont un rôle à la fois d’animation et de régulation
ce qui permet de donner de la dynamique humaine à ce système perpétuellement en
mouvement.
De la nécessité d’un porte-p arole unique
L’importance de la transformation numérique dans le projet d’établissement nécessite la mise
en place d’un interlocuteur unique, identifié, qui sera à la fois le chef d’orchestre de cette
transformation mais aussi celui ou celle où toutes les informations relatives aux projets
convergent.
Des délégations de porte-paroles par projets
Pour reprendre Yves-Chantal Gagnon, professeur, titulaire de la Chaire Bell en technologie et
organisation du travail, à l’École nationale d’administration publique du Québec « C’est la
qualité et la richesse de l’interaction qui s’établit entre les différents groupes d’intervenants
et la prise en compte des facteurs critiques de succès déjà connus qui font en sorte que le
changement sera plus ou moins facile et, surtout, qu’il donnera des résultats positifs ou
non. » .
Cette dynamique humaine au plus profond de l’organisation permet d’apporter de la
motivation parmi tous les acteurs concernés : ceux qui produisent le changement et ceux qui
utilisent la production du changement.


3.4.2.5 Conduite et gestion du changement de processus communicationnel[modifier]
Le processus communicationnel dans les établissements de l’ESR est en plein mouvement :
l’augmentation des interconnexions exponentielles de tous les acteurs du système
universitaire en est la cause principales. Ces interconnexions sont multiples et bien souvent
externes au système universitaire : évolution des infrastructures de connexion, possession de
terminaux téléphoniques de type « Smartphone », développement personnel des usages de
type réseaux socionumérique… Tous ces éléments concourent à la fois à une appropriation
plus personnelle de ces outils et à l’augmentation des interactions communicationnelles dans
le cadre de son travail.
Le processus communicationnel dans les établissements de l’ESR semble donc subir un
changement de paradigme : nous assistons aujourd’hui à une cohabitation de pratiques
communicationnelles top-down et « transversales » et même bottom-up. Il lui faudra
composer avec « d’autres schémas que la communication descendante traditionnelle mais
pour cela elle devra d'abord créer une dynamique participative, de co -construction, de co-
création, de connexion des intelligences et des savoirs »383.
Système de communication d’un établissement de l’ESR se transformant
Dans le cadre de cette transformation numérique, et donc des transformations qui seront avant
tout organisationnelles, « Les dirigeants sous-estiment souvent le bouleversement – conflits
382 Gagnon, Y. C. (2012). Les trois leviers stratégiques de la réussite du changement technologique. Téléscope.
383 Choquet, I. (2015). Environnements numériques et PME: figures du chaos et nouveaux usages. Université
Michel de Montaigne-Bordeaux III.
internes et humains – qui accompagne toute rupture d’avec un mode de pensée et de
travail »384. Par ailleurs, « ce n’est pas la technologie qui améliore la performance de
l’organisation, mais bien la façon dont les humains l’utilisent »385. Nous devons nous
intéresser à l’approche communicationnelle de cette transformation afin de mieux comprendre
les interactions provoquées par l’arrivée du numérique dans l’organisation.
Le système d’action de ce changement
Dans « Les trois leviers stratégiques de la réussite du changement technologique », Gagnon
nous propose les trois leviers suivants : « l ’état de la connaissance, les logiques d’action des
intervenants et la dynamique qui s’établit entre ces derniers. »386 qui reprennent les moments
de Callon. Il propose aussi une représentation graphique des acteurs et des interactions
(Figure suivante) de cette transformation créée par un changement technologique. De toute
évidence, c’est « une opération complexe où s’entremêlent des considérations liées au
processus, à la technologie , au budget, à l’échéancier et aux ressources humaines. »
Nous y voyons tous les acteurs du système, et au centre le projet d’implantation, et les
technologies associées.
Dans cette représentation (Figure 52) les utilisateurs, qui dans ce cas présent concernent un
service public non éducatif, sont à l’extérieur du système. Dans le cadre du contexte
universitaire nous devons reconsidérer ce schéma en intégrant les utilisateurs dans
l’environnement interne du système : ils font partie de la construction de cette transformation
en part entière. Les étudiants sont considérés comme des acteurs-clés de la gestion de leur
Université.387 Le site de l’Université de Nantes précise d’ailleurs que « leur participation est
essentielle à la bonne marche de l'Université et à une meilleure prise en compte du point de
vue étudiant dans tous les aspects de la gestion de l'établissement. »388
384 Goss, T., Pascale, R., & Athos, A. (2001). Réinventer les montagnes russes: descendre aujourd’hui pour
mieux monter demain. Harvard Business Review, 93-125.
385 Co, H. C., Eddy Patuwo, B., & Hu, M. Y. (1998). The human factor in advanced manufacturing technology
adoption: an empirical analysis. International Journal of Operations & Production Management, 18(1), 87-106.
386 Gagnon, Y. C. (2012). Op. cit. p75
387 Université Paris Diderot - Paris 7. (2016). Etudiants, devenez acteurs de votre formation. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://www.univ-paris-diderot.fr/sc/site.php?bc=accueil&np=pageActu&ref=8252
388 Université de Nantes. (2016). Les étudiants acteur-clés de la gestion de l’Université. Consulté le 25 septembre
2017, à l’adresse https://www.univ-nantes.fr/68080083/3/fiche___pagelibre/&RH=ORG
Figure 52 : Le système d’action d’un changement technologique (Gagnon, 2012).
Cette approche que les établissements de l’ESR emprunte au marketing, s’intitule « outside-in
approach » ou « d’intégration de l’expérience client dans la chaine décisionnel »389, selon
Bouchet, qui montre que « le réenchantement de l'offre (…) qui sont davantage centrées sur
les expériences » des usagers.
Les modifications de certains flux d’informations
L’intégration de l’expérience des usagers dans la boucle décisionnelle contraint l’organisation
à se repenser. En effet, la structure hiérarchique historique de l’information décisionnelle
descendante, le « Top-Down », permet difficilement d’intégrer ce retour d’expérience.
Pour reprendre Gagnon, « les structures organisationnelles ne peuvent être assimilées à de
simples courroies de transmission d’un niveau hiérarchique à l’autre, qui feraient en sorte
que tout y serait entièrement réglé ou contrôlé a priori »390. La transmission des flux
d’information devient plus complexe : par moment elle est étagée à d’autres moments un
usager peut être directement en contact avec un décideur.
389 Bouchet, P. (2004). L’expérience au cœur de l’analyse des relations magasin-magasineur. Recherche et
Applications en Marketing , 19(2), 1-19.
390 Gagnon, Y. C. (2012). Op. cit. p78
C’est l’imposition de ce flux d’informations de type bottom-up, que peuvent apporter les TIC,
qui procurent aux organisations l’adhésion de chacun des acteurs. « Chaque acteur dispose
sur les autres d’un certain pouvoir qui est à la mesure de l’importance de la source
d’incertitude qu’il contrôle. »391 pour rappeler Gagnon ce qui contraint le décisionnel a
inventer des nouveaux espaces, des nouveaux lieux d’échange d’informations de type bottom-
up.
Dans sa conférence introductive de l’ITES Innovation Summit en 2016, Gilles Babinet,
entrepreneur, ancien Président du Conseil National du Numérique et « digital champion »
auprès de la commission européenne, souligne qu’ on « peut mesurer sa performance à la
fréquence de ses interactions avec ses clients »392. Il ajoute que l’on ne mesure pas la réussite
de cette transformation au retour sur investissement ou rentabilité du capital investi car « c'est
une question de management avant tout »393.


3.5 Redessiner la gouvernance du numérique[modifier]

universitaire
Nous connaissons le niveau académique des étudiants entrant dans nos universités, leurs
situations sociales, au moins par stéréotypie. Nous connaissons encore peu les types
d’étudiants en fonction des usages du numérique. C’est ce que nous avons proposé en relatant
l’expérience d’observatoire des usages, ou en proposant une caractérisation des usages du
numérique dans le cadre d’une situation apprentissage dans un dispositif de formation
hybride. D’ailleurs, nous reconnaissons que le rôle de l’Université est aussi de rendre un
individu capable de se former en toute autonomie sur des plateformes de FOAD ou de
MOOC : nous pourrons ainsi le former tout au long de sa vie.
Le système universitaire est en pleine transformation numérique, et chaque université pourrait
mettre en œuvre une stratégie dans le domaine du numérique universitaire pour faciliter ce
changement. En appuyant une stratégie sur l’expérience des usagers dans ce domaine, en
nommant un porte-parole, en se fixant des projets numériques réalisables et compris de tous,
chaque établissement peut se construire une nouvelle gouvernance du numérique universitaire
permettant de simplifier le changement.
391 Gagnon, Y. C. (2012). Ibid. p78
392 Christophe Solier. (2016) Gilles Babinet #ITES Innovation Summit 2016. Consulté à l’adresse
https://www.youtube.com/watch?v=beAzptR5FDY
393 Christophe Solier. (2016) Ibid.
Ce changement, nous recommandons qu’il s’appuie sur des techniques d’agilité
organisationnelles, en favorisant tous les échanges informationnels décisionnels, ascendants et
descendants, et en travaillant sur tous les niveaux de la hiérarchie.
Cette nouvelle gouvernance pourra mettre en place des dispositifs nationaux, ou observés
dans une autre université, elle devra aussi estimer leurs réussites. Le paragraphe suivant traite
des dispositifs TIC, s’appuyant sur le développement des usages, exogènes et endogènes au
système universitaire.
4 Vers une catégorisation des dispositifs
développant les usages du numérique dans le
contexte universitaire
« La seule façon d’aborder les conséquences de tous ces changements,
c’est de suspendre son jugement »
(Serres, 2012)
Le développement raisonné et continu des usages du numérique doit viser à présent l’adhésion
du plus grand nombre, avec une recherche d’intégration du numérique dans les pratiques
professionnelles. La rapidité avec laquelle s’est installé le numérique dans tous les domaines
de la vie des individus rend parfois difficile son appropriation par les usagers dans le contexte
professionnel. « Pour les universités, c ’est le manque d’information, de formation et
d’accompagnement qui est un risque majeur de fracture numérique.395 »
En augmentant la lisibilité des dispositifs en place et en sollicitant la participation des acteurs
de l’Université, nous incitons à ce que les gouvernances visent l’adhésion de tous les usagers :
il s’agit de construire et de rendre visibles les fondements d’un numérique partagé.
Nous décidons dans ce paragraphe de nous positionner dans une démarche de description des
différents dispositifs exogènes ou endogènes au système universitaire. Pour autant nous
prenons une précaution indispensable : il ne s’agit pas de faire un catalogue des dispositifs
exhaustifs mais bien de détecter parmi ceux existants, ceux qui pourraient être mis en œuvre
par une équipe présidentielle.
394 Serres, M. (2012). Petite poucette . Paris: Editions le Pommier.
395 Université de Strasbourg (2013) , Le Centre de culture numérique - Services numériques de l’Université de
Strasbourg ». Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://services-numeriques.unistra.fr/culture-
numerique/centre-de-culture-numerique.html

4.1 Des dispositifs exogènes à l’ESR[modifier]

Nous avons choisi trois dispositifs exogènes à l’enseignement supérieur et la recherche qui
nous paraissent aujourd’hui influencer la mise en place de la transformation numérique des
établissements (Figure suivante)
Figure 53 : Des influences externes à l’ESR sur le numérique d’une université.
Le premier est le rapport de Bruno Meetling, qui fournit une étude commanditée par l’État sur
les implications du numérique sur le monde du travail : « La transformation numérique fait
l’objet d’une grande attention au regard des atouts qu’elle peut apporter au monde
économique et au monde du savoir. »396. La réflexion ici porte sur trois points précis : « les
conditions de travail, l’organisation travail et le management »
Le deuxième est le rôle du Conseil national du numérique, CNNum, une commission
consultative indépendante, dont les missions ont été redéfinies et étendues par un décret du
Président de la République du 13 décembre 2012. Ses membres ont été nommés par un décret
396 Mettling, B. (2015). Transformation numérique et vie au travail. Consulté à l’adresse
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/154000646.pdf
du Président de la République du 8 février 2016. Le CNNum a pour mission de « formuler de
manière indépendante et de rendre publics des avis et des recommandations sur toute
question relative à l’impact du numérique sur la société et sur l’économie »397 .
Le troisième, et cela afin de préparer le futur, est la très récente adoption définitive par le
Sénat la Nouvelle loi numérique398. Ce qui peut être assez influençant dans cette nouvelle loi
pilotée par la Secrétaire d’Etat au numérique, Axelle Lemaire, est tout aussi bien son contenu
que la modalité de création. Pour son contenu, il s’agit de « libérer l’innovation en faisant
circuler les informations et les savoirs, pour armer la France face aux enjeux globaux de
l'économie de la donnée », de « créer un cœur de confiance clair, garant de droits des
utilisateurs et protecteur des données personnelles » et de « construire une République
numérique ouverte et inclusive, pour que les opportunités liées à la transition numérique
profitent au p lus grand nombre. ». Mais c’est la modalité participative de la création de cette
loi, le dispositif Ambition Numérique399 que nous estimons d’une réelle influence pour les
années à venir.


4.1.1 Influence du rapport « Transformation numérique et vie au[modifier]

travail » de Bruno Mettling
Le rapport de Bruno Mettling, directeur général adjoint en charge des ressources humaines et
la communication interne chez Orange, a été remis, en septembre 2015, à Madame le Ministre
du travail de l’emploi et de la formation professionnelle et du dialogue social, Myriam El
Khomri.
Cette mission structurée autour d’un groupe d’experts a permis d’identifier les principaux
impacts de la transformation numérique sur le travail. Les domaines impactés par le
numérique sur le travail sont aussi bien, d’après ce rapport, les outils que les métiers, les
compétences, que l’environnement de travail des cadres, l’organisation ou le modèle
managérial.
Il propose un certain nombre de leviers permettant de favoriser la réussite de la transformation
397 Missions du CNNum. (2012, février 6). Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://cnnumerique.fr/missions/
398 Projet de loi pour une République numérique - Sénat. (2016). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.senat.fr/espace_presse/actualites/201603/projet_de_loi_pour_une_republique_numerique.html#c623
399 CNNUM. (2015, juin). Ambition Numérique. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://contribuez.cnnumerique.fr/sites/default/files/media/CNNum--rapport-ambition-numerique.pdf
numérique, ainsi que les modifications éventuelles du contrat de travail et sur la qualité de vie
au travail (le Droit à la déconnection par exemple). C’est aussi l’occasion de formuler 36
préconisations pour la réussite de la transformation numérique au sein des entreprises.
Nous estimons que ce rapport va influencer ou influence déjà le système de l’ESR dans un
premier temps dans le domaine des préconisations éducatives et dans un deuxième temps dans
l’organisation des établissements de l’ESR.


4.1.1.1 Dans le domaine de la formation[modifier]
Deux préconisations retiennent notre attention dans le domaine de la formation. La première
concerne « l’importance deux mobiliser les moyens de la formation afin d’accompagner la
transition numérique au sein de l’entreprise »400. La deuxième concerne l’intégration du
numérique parmi les savoirs fondamentaux de l’école.
Selon le rapport, « L’éducation à l’informatique, ainsi que la littératie numérique, constituent
une condition pour que les élèves et étudiants disposent des clés pour comprendre le
monde numérique de demain, pour se préparer à des évolutions professionnelles
permanentes »401. Cette notion de littératie numérique est empruntée à Michael Hoechsmann
et Helen DeWaard qui indiquent que « la littératie numérique n'est pas une catégorie
technique qui décrit un niveau fonctionnel minimal de compétences technologiques, mais
plutôt une vaste capacité de participer à une société qui utilise la technologie des
communications numériques dans les milieux de travail, au gouvernement, en éducation, dans
les domaines culturels, dans les espaces civiques, dans les foyers et dans les loisirs »402
4.1.1.2 Dans le domaine de la recherche[modifier]
Afin de mieux comprendre et anticiper les changements apportés par le numérique dans les
entreprises publiques ou privées, le rapport propose en préconisation « d’encourager la
recherche en sciences humaines et sociales et expérimenter pour développer une réponse
française pertinente aux enjeux sociaux et économiques posés par la transformation
numérique »403. Pour cela Bruno Mettling propose d’inscrire en préconisation n°34404 « dans
400 Mettling, B. (2015). op.cit. p2
401 Mettling, B. (2015). op.cit. p9
402 Hoechsmann, Michael, DeWaard, Helen. Définir la politique de littératie numérique et la pratique dans le
paysage de l’éducation canadienne. [en ligne] HabiloMédias . 2015. Disponible sur :
http ://habilomedias.ca/sites/mediasmarts/files/publication-report/full/definir-litteratie-numerique.pdf
403 Mettling, B. (2015). Ibid. p 58
404 Mettling, B. (2015). Ibid. p 60
les priorités du prochain plan d’action de l’agence nationale de la recherche des axes plus
prospectif en lien avec la transformation numérique » et « de financer la recherche en
sciences humaines et sociales ». Notre démarche de chercheur s’intègre pleinement dans ces
préconisations.


4.1.1.3 Dans l’organisation interne des établissements[modifier]
L’auteur du rapport, en conclusion, voit la transformation numérique comme « une
opportunité pour permettre la mise en place progressive de nouvelles organisations du travail
plus transversales, plus souples, de nouveaux modes de fonctionnement, plus coopératifs et
plus collectifs »405.
Ces préconisations concernent aussi bien la régulation de l’usage des outils numériques que
des politiques de ressources humaines visent à renforcer le travail collaboratif, que de
développer des espaces tiers lieux propices à l’expression d’une culture numérique
universitaire, et d’intégrer le numérique dans la mesure et la prévention des risques
professionnels.
Il est à noter aussi que ce rapport préconise les remontées informationnelles bottom-up dans
les organisations : plus de participation des usagers ou des acteurs dans le choix décisionnel
des outils mis en place.


4.1.2 L’influence des actions du CNNUM[modifier]

En amont des élections présidentielles de 2007, un processus de concertation, et donc de
réduction de la distance, a été mis en place autour de la candidate Ségolène Royal, avec cette
idée faire participer des contributeurs anonymes à la réflexion politique : le concept de
démocratie participative à travers des plateformes numériques apparaît alors au grand public.
Ce processus, après la présidentielle de 2007, verra alors une transformation vers un think
tank, naissance de Terra Nova406 .
En octobre 20 14, le conseil national du numérique, présidé par Benoit Thieulin, lançait en
compagnie de Manuel Valls, alors premier Ministre, le lancement de la contribution
« Ambition numérique » comme nous l’avons rappelé précédemment.
405 Mettling, B. (2015). Ibid. p 62
406 Padis, M.-O. (2012). Pourquoi il fallait bousculer les idées à gauche. Esprit, Août/septembre(8), 204‑208
Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=ESPRI_1208_0204
Le Conseil national du numérique a pour mission de « formuler de manière indépendante et
de rendre publics des avis et des recommandations sur toute question relative à l'impact du
numérique sur la société et l'économie »407. Ce conseil est une commission consultative
indépendante, qui peut être consulté par le gouvernement surtout projet législatif ou
réglementaire dans le domaine du numérique. Il est composé de membres représentatifs de
l’écosystème numérique français privé ou public.
C’est en fait en 2014 que l’on commence mesurer l’innovation que peut avoir ce conseil pour
l’ESR par la mise à disposition du rapport Jules Ferry 3.0 intitulé « Bâtir une école créative
est juste dans un monde numérique », et par la mise en place d’une concertation nationale sur
le numérique, de manière participative. Ce qui est à remarquer aussi, c’est qu’il est porté par
deux secrétaires d’état, Axelle Lemaire, secrétaire d’État chargée du Numérique et Thierry
Mandon, secrétaire d’État à la Réforme de l’État et à la Simplification.
Ambition numérique regroupe quatre thématiques reprises ci-dessous intégralement :
  • Croissance, innovation, disruption – Le numérique occupe une place de plus en plus
importante dans l’économie européenne et française. Il provoque une restructuration
de nombreux secteurs de l’économie. Face à ces défis, comment faire du numérique un
levier de croissance, de compétitivité et d’emploi ?
  • La loyauté dans l’environnement numérique – L’environnement numérique est de
plus en plus caractérisé par des déséquilibres forts entre le pouvoir des grandes
plateformes et celui de leurs usagers ; entre les Etats et leurs citoyens. Comment
garantir la loyauté et le respect des droits et libertés dans l’environnement numérique ?
  • La transformation numérique de l’action publique – Le numérique constitue un
vecteur majeur de transformation de l’action publique et un enjeu de souveraineté pour
l’Etat. Comment le numérique peut-il être un levier de modernisation des services
publics et un gage d’une meilleure efficience des politiques publiques ?
  • La société face à la métamorphose numérique – Le numérique induit une
métamorphose du monde et de la société. Santé, éducation, travail, vie citoyenne… il
s’impose partout et bouleverse certains fondements de notre modèle social, Comment
faire du numérique la clé d’une transition vers une société plus juste et inclusive ?
407 Peugeot, V. (2016). À quoi sert le Conseil national du numérique ? I2D – Information, données & documents ,
me 53(4), 23-25. Consulté à l’adresse http://www.cairn.info/revue-i2d-information-donnees-et-documents-2015-
4-page-23.html
Les concertations sont orchestrées par des ateliers organisés au sein d’organismes publics ou
privés, puis une synthèse qui a été rendu au gouvernement après un tour de France de
communications. Cette synthèse permettrait la construction d’une nouvelle stratégie d’Etat
dans le domaine du numérique, la proposition de nouvelles lois afin de favoriser une
alternative française à la dominance des sociétés américaines, les GAFA, pour Google
Amazon Facebook Apple. Ces GAFA possèdent aujourd’hui possèdent l’essentiel du marché
de l’économie numérique, mais aussi les données personnelles.


4.1.2.1 Dans le domaine du conseil à la stratégie[modifier]
Nous avons repéré que le CNNum est intervenu au moins à deux reprises dans le conseil
stratégique du numérique universitaire auprès des équipes présidentielles, lors d’ambition
numérique et lors de la création du référentiel de gouvernance du numérique.
Ateliers participatifs avec la CPU
En novembre 2014, le CNNum a structuré cette concertation autour de vingt-six consultations
réparties en quatre thèmes : « Croissance, innovation, disruption » ; « La loyauté dans
l'environnement numérique » ; « La transformation numérique de l'action publique » ; « La
métamorphose numérique de la société ».
Lors de cette concertation certaines universités ont participé mais c’est surtout la Conférence
des Présidents d’universités par l’intermédiaire d’une journée consacrée à cela que nous avons
pu constater une nouvelle interaction entre ce conseil et le monde universitaire.
Corédacteur du compte-rendu de ce séminaire d’une demi-journée le 23 janvier 2015 qui se
tenait dans les locaux de la CPU., à Paris, nous pouvons en retirer les retours d’une partie de
notre communauté, les référents numériques des universités (DSI, Vice-Président, Chargé de
mission) de chaque Université. Chacun d’entre eux était invité à cette journée de contribution
par le responsable du Comité Numérique de la CPU (CPUNum), le président François
Germinet de l’Université de Cergy.
Ce séminaire composé de 4 ateliers contributifs sur les thèmes suivants : open data, évolution
du modèle social et travail, santé et numérique et formation et numérique. Ces ateliers ont fait
l’objet de restitutions intégrées ultérieurement dans le document final de la concertation.
Le point d’entrée de cette journée était la donnée et plus particulièrement « la stratégie de la
donnée, sur tous ses aspects, toutes ses facettes, politiques, juridiques, techniques… »408 La
question centrale étant pour François Germinet « Quelle stratégie de la donnée pour l'Etat et
pour les différents acteurs publics et privés ? »
Le premier atelier, le domaine de l’Open data, la CPU a pris des positions pour « favoriser le
libre accès aux publications à la recherche », à savoir la limitation, par voie législative, de la
période d’embargo sur les publications (6 mois en sciences dures et 12 mois en SHS). Elle
insiste aussi pour « rendre obligatoire la possibilité d'exploiter le contenu de la production
scientifique par du texte et data mining (TDM) et faciliter ainsi l'accès du chercheur à la
donnée. Il convient, dans cette optique, de s’interroger sur l'émergence de tiers de confiance
public, garantissant l'effectivité du TDM. »
La CPU propose qu’une réflexion soit faite sur « la possibilité de donner un statut juridique
ouvert aux données de recherche, et intégrer au code de la recherche le principe d’une
science ouverte, partagée. »
Dans le cadre de l’atelier 2, consacré à la conduite du changement d’un point de vue
managérial, la CPU considère que « le passage aux modèles contributifs est une évolution
culturelle lourde et complexe qui deviendra indispensable pour améliorer l’efficacité de
toutes les organisations. ». La CPU souhaite à ce sujet que le travail des pionniers soit mis en
valeur, « par la diffusion de démonstrateurs créant de la convivialité et du confort, et le
développement de pratiques collaboratives et de la transparence. »
Dans l'atelier 3, avec le domaine de l’open-science en santé, ou open data santé, la CPU
relève deux enjeux : « l'accès aux données pour la recherche en santé, et le développement de
la santé préventive ou personnalisée. » Concernant le premier enjeu, il est proposé
« d ’intégrer dans les équipes de recherche des spécialistes BIG_DATA avec accréditation sur
les données santé, et de permettre l’accès des chercheurs à des bases de données
anonymisés. » Concernant le second, c'est une possible révolution qui annonce, avec déjà une
certaine avance sur le continent nord-américain. Il faut « développer les initiatives en Europe
tout en sécurisant le cadre juridique et protéger les données personnelles des individus. »
Dans le cadre de l’atelier 4 concernant la formation et numérique, la CPU préconise « la
nécessité de développer dès les petites classes une culture du numérique, aux côtés des
408 F. Germinet, Éléments de conclusion de la journée Ambition Numérique, 23 janvier 2015, Conférence des
Présidents d’Université,
sciences naturelles et de l'histoire-géographie, paraît s'imposer aujourd'hui pour donner à
chacun les clefs de compréhension d'un monde toujours plus façonné par le numérique ».
Dans le cadre de la formation dans le supérieur, deux grandes recommandations ont été faites.
La première concernant l'évolution du statut des Enseignants et Enseignants Chercheurs :
« faire sauter le verrou de l’heure en présentiel en formation initiale et continue, en évoluant,
p ar exemple, vers la comptabilité de la charge de travail que représente l'acquisitions d'un
volume donné de compétences. »
La seconde concerne les outils de la transformation pédagogique qui doivent être pensés selon
trois strates :
  • un niveau stratégique : « l'investissement dans des infrastructures publiques pour le
stockage de la donnée et le développement des logiciels essentiels (ex Renater, Amue,
Cocktail...) »
  • un niveau de délégation de service public lorsque la puissance publique estime ne
pas être en mesure de déployer un service ou bien ne pas être dans son rôle - et donc
une aide juridique à la mise en l'œuvre de DSP maîtrisée (l'expertise des collectivités
serait utile)
  • un niveau rapidement évolutif : le développement du BYOD « bring your own
device » (« apportez vos appareils personnels ») pour l'usage en mode agile de
fonctionnalités non assumées par les deux premiers niveaux.
En conclusion de cette journée, pour François Germinet, « la situation du pays est
comparable aux années 50, dans le domaine de la gestion de l’énergie : notre pays entend-il
maitriser sa propre gestion de la donnée où bien s'appuyer sur de grands opérateurs privés ?
Il parait nécessaire de s’interroger sur une structuration publique de la donnée et/ou sur la
structuration vers des sociétés non publiques avec un nécessité de contrôle et de suivi de la
gestion de la donnée par des tiers de confiance publique».
Ateliers participatifs avec le MENSR
En mai 2016, le CNNum409 met en place avec le Ministère de l'Éducation nationale, de
l'Enseignement supérieur et de la Recherche et le Cabinet du Ministre, un dispositif de
409 CNNUM. (2016). Université numérique du temps des explorateurs à celui de la transformation : référentiel
d’action. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://cnnumerique.fr/wp-
content/uploads/20 16/05/CNNum_Re%CC%81fe%CC%81rentiel-de-transformation-ESR.pdf
concertation sur la transformation numérique de l’ESR. Le résultat est un référentiel proposé
aux acteurs de l’ESR. Il propose 10 actions permettant de faire passer la stratégie numérique
des établissements de l’état « d’expérimentation » à l’état de « consolidation » dans le
domaine du numérique universitaire.
Ces 10 actions couvrent les missions de service public de l’ESR, et tiennent compte à notre
avis des recommandations ultérieures :
  • « installer une gouvernance numérique transversale,
  • partager les politiques de transformation numérique,
  • organiser les scénarios de transformation,
  • faire de l'évaluation et du suivi un levier de co -pilotage avec les usagers,
  • accompagner la transformation pédagogique numérique,
  • développer l'accès à la littératie numérique dans tous les cursus,
  • traduire la transformation numérique de la société dans l'offre de formation,
  • améliorer l'accessibilité des formations universitaires,
  • renforcer leur attractivité,
  • encourager les communs,
  • faciliter l'enrichissement des espaces de cours pour l'étude et l'expérience de
recherche collective
  • faciliter l'usage des "lieux numériques" pour l'apprentissage
  • développer une R&D de l'éducation et de l'apprentissage
  • se doter de recherches actions sur le sens social des techniques numériques »
Ces préconisations, à cette heure, sont encore en version béta pour reprendre le descriptif de la
page de couverture du rapport. Elles mériteraient un travail complémentaire, qui pourrait être
la mesure de l’effet des dites recommandations au sein des universités et plus globalement sur
le système de l’ESR.


4.1.2.2 Dans le domaine de la formation[modifier]
Dans domaine de la formation, la coordination du volet « numérique et formation » de l’école
à l’Université est confié à Sophie Pène, ancienne vice-présidente TICE à l’Université Paris-
Descartes. Le premier travail coordonné, Jules Ferry 3.0, concerne l’école au sens large, et la
e
proposition repose sur deux axes, « des enseignements numériques : l’informatique en 3 ,
l’option ISN pour toutes les filières, les humanités numériques à travers un bac général, la
littératie numérique perfusant les enseignements disciplinaires. »410 et « un tissu éducatif
élargi aux associations éducatives, aux collectivités locales, aux entrepreneurs du numérique,
aux familles, et au monde numérique de l’open knowledge et de l’édition coopérative, des
industries éducatives et des entrepreneurs de la filière numérique »411. Il est aussi précisé en
conclusion412 qu’une des conditions de réussite « est que l’initiative prenne source dans les
établissements », que ce projet soit « local et humain ».


4.1.3 L’effet des nouvelles lois sur le numérique[modifier]

Deux lois ont été publiées au Journal Officiel en 2016 concernant le numérique. L’influence
de ces lois, très récentes, pourrait générer des modifications dans l’organisation interne des
établissements.
La loi pour une République numérique, publiée au Journal officiel du 8 octobre 2016413, vise à
« favoriser l’ouverture et l a circulation des données et du savoir, à garantir un
environnement numérique ouvert et respectueux de la vie privée des internautes et à faciliter
l’accès des citoyens au numérique. ». Elle nous interpelle aussi dans la façon d’interroger les
usagers du service public puisque cette loi est dite « collaborative et participative » dans sa
modalité de création.
La loi Travail institue un droit à la déconnexion pour les salariés. À ce jour peu
d’établissements sont en capacité de déterminer la nature et la charge de travail que
représentent le numérique dans l’Université.


4.1.3.1 Effet de la loi pour une République numérique[modifier]
Effet sur l’organisation interne des établissements
La circulation des données et du savoir, la protection des droits dans la société numérique,
l’accès au numérique, l’organisation de tous les services publics se trouvera impactée par la
mise en œuvre des décrets à paraître. Pour l’ESR, nous devrions ressentir des modifications
dans le domaine de la circulation des données et du savoir, la protection des droits dans la
410 Pène, S., Abiteboul, S., Balagué, C., Blecher, L., Bloch-Pujo, N., Briand, M., … others. (2014). Jules Ferry
3.0, Bâtir une école créative et juste dans un monde numérique. Consulté à l’adresse https://hal.archives-
ouvertes.fr/hal-01144070/ p102
411 Pène, S., Abiteboul, S., Balagué, C., Blecher, L., Bloch-Pujo, N., Briand, M., … others. (2014). Ibid . p102
412 Pène, S., Abiteboul, S., Balagué, C., Blecher, L., Bloch-Pujo, N., Briand, M., … others. (2014). Ibid . p102
413 LOI n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, 2016-1321 (2016).
société numérique. Le premier devrait modifier le statut de l’information produite par la
recherche, par la formation, le deuxième devrait plutôt concerner des nouvelles protections de
nos usagers et des membres de l’ESR. A l’heure où nous éditons cette thèse il est difficile de
prédire les futurs décrets et leurs impacts, nous resterons donc très attentif à la mise en œuvre
de cette loi sur notre objet d’étude, en réalisant une veille active sur cette thématique.
Effet sur les dispositifs de recueil des souhaits des citoyens
Le processus de création de cette loi a débuté par une participation collaborative et
participative organisée sur tout le territoire français. Cette phase totalement coordonnée par le
CNNum a montré qu’il était possible de collecter les desiderata d’un certain nombre de
citoyens dans le cadre d’ateliers réels et virtuels. L’adossement d’une plateforme de
collaborative a permis durant tout le processus de construire des synthèses successives sur une
plateforme.
Au total, « ce sont 21 330 contributeurs qui ont voté près de 150 000 fois et déposé plus de
8500 arguments, amendements et propositions de nouveaux articles sur le site republique-
numerique.fr. »414 pour reprendre le dossier de presse de cet évènement.
Ce site web est « un dispositif d’écriture, mettant en scène un système scripto-iconique et
audiovisuel qui engage et guide le contributeur dans les différents espaces de contributions
qui lui sont proposés. »415. Cette « plateformisation » de la politique est un processus qui
interroge sur des nouvelles méthodes pour faire remonter l’information bottom-up,
régulièrement régulée par les participants eux-mêmes.
En effet, il est fort probable que cette nouvelle participation citoyenne, une co-création des
citoyens, soit renouvelée voire mise en œuvre dans nos établissements de l’ESR.
Nos usagers se trouveront ainsi en possibilité de participer à la vie démocratique, cette
participation est d’autant plus provoquée que le numérique véhicule des valeurs en son sein,
comme la collaboration (partager, décider, produire) ou la coopération (produire une tâche
unique en synchrone avec plusieurs personnes pour le bien commun).
414 Ambition numérique | Concertation nationale sur le numérique. (2015). Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse https://contribuez.cnnumerique.fr/
415 Alexis, L., Chevret-Castellani, C., Labelle, S., & Mouratidou, E. (2017). Vers le partage du savoir-écrire la
loi ? Analyse sémio-discursive du dispositif republique-numerique.fr. Semen. Revue de sémio-linguistique des
textes et discours, (42). Consulté à l’adresse http://semen.revues.org/10624
Cette revitalisation de la citoyenneté se trouve aussi renforcée par la prise de parole offerte au
peuple, parole directe , dans une liberté d’expression accélérée par la production d’écrits
personnels, partagée, dupliquée, via les blogs, les réseaux socionumériques…
Effet sur la communication entre citoyens et politiques
En 2007, la commission Européenne propose de s’emparer de ce mode de communication
dans une volonté de « provoquer l’engagement du citoyen416 . Les gouvernements commencent
ainsi à engager une nouvelle communication en proposant une forme plus directe de la
démocratie. Cette relation bijective fait apparaître des stratégies de communication politique
centrées sur l’individu et sa capacité à développer une image de marque sur l’Internet,
permettant « L’individualisation de la propagande », et des réponses quasi-immédiates de son
camp ou de son opposition politique. Les réseaux sociaux, le Web 2.0, sont alors le terrain de
prédilection de cette communication . Cette réduction de la distance, s’appuie par ailleurs sur
une des valeurs du numérique : l’ « horizontalité de la communication » 417 et l’interpellation
de l’individu quelque soit sont statut dans la société.


4.1.3.2 Effet de la nouvelle loi travail : le droit à la déconnexion[modifier]
L’adoption de ces technologies dans la sphère privée et professionnelle par un grand nombre
de personnes actives et l’arrivée d’articles de loi concernant l’« adaptation du droit du travail
à l'ère du numérique » notamment l’article 55 de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative
au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours
professionnels, nous offre une opportunité d’observer un changement dans le domaine des
sciences de l'information et de la communication : la déconnexion maitrisée à ces
technologies.
Nous sommes conscient que cette déconnexion peut résulter d’une réflexion418 critique sur les
technologies419. Nous nous interrogerons sur les effets possibles de ces dernières dans le cadre
des comportements des salariés des universités, notamment la liaison entre la technologie,
l’organisation du travail et les comportements420.
416 European Commission. (2007a). Communicating about Europe via the Internet. Engaging the citizens,
SEC(2007) 1742, Brussels, 21.12.2007
417 Perriault, J. (2012). Réseaux de communication horizontale, un aperçu à travers le temps. Le Temps des
médias, 18(1), 148. http://doi.org/10.3917/tdm.018.0148
418 Domenget, J.-C. (2014). Formes de déconnexion volontaire et temporalités de Twitter. Réseaux , (4), 77-103.
419 Jauréguiberry, F. (2014). La déconnexion aux technologies de communication. Réseaux , (4), 15-49.
420 Liu, M. (1981). Technologie, organisation du travail et comportements des salariés. Revue française de
sociologie, 205-221.
Pour nous, « le modèle d’usage des TIC a été influencé par les modes d’organisation et de
sociabilité au sein de la famille et de l’entreprise, il faut également constater que ces outils
contribuent aux définitions identitaires des individus, à l’élaboration de leurs réseaux de
relations. »421. Ce souhait individuel de connexion/déconnexion à la société par la
technologie, nous interpelle. En effet cet usage pourrait aussi faire apparaître un « nouvel
isolement social », non subi mais maitrisé422 et appuyé par le code du travail. Il redistribue
aussi les modalités d’évaluations des salariés : l’employé du mois ne serait plus dorénavant
jugé sur son hyper connectivité mais par sa capacité à bien gérer ces déconnexions aux TIC.
Notion de connexion
Il s’agit ici de nous intéresser à la connexion entre les individus à travers les TIC, et par
opposition à la déconnexion. Nous souhaitons porter notre regard plus particulièrement sur la
connexion dans le cadre de la vie professionnelle, au moyen des outils et méthodes donnés par
l’employeur (e-mail, agenda numérique…). Etre connecté pour nous signifie bien être en
connexion avec son organisation professionnelle, qui fonctionne de plus en plus en réseaux.
En effet, en termes d’organisation du travail, nous sommes passés au cours du siècle dernier
du taylorisme à l’entreprise réseau. Cette entreprise réseau « ne fait pas que produire, elle se
produit »423.
Pour nous il serait devenu normal d’être connecté à son organisation via des dispositifs
s’appuyant sur les TIC. Cette norme apparente montre d’ailleurs pour nous un formidable
paradoxe entre l’individualité de ces usages, et une obligation professionnelle, provoquant
« une tension permanente entre l’autonomie et le contrôle »424
Cette tension provoquerait, selon Flichy, notamment chez les cadres, « un brouillage des
frontières » entre les temps de travail et les temps de congés ou de repos, « L’internet et le
mobile permettent de continuer à travailler à la maison mais aussi de dégager des plages de
temps personnel dans la journée de travail. »
421 Flichy, P. (2004). L’individualisme connecté entre la technique numérique et la société. Réseaux , no 124(2),
17-51. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=RES_124_0017
422 Vézina, M., Derriennic, F., & Monfort, C. (2001). L’impact de l’organisation du travail sur l’isolement social.
Travailler, (5), 101-117. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=TRAV_005_0101
423 Rallet, A. (1989). De l’entreprise-réseau aux réseaux d’entreprises. Réseaux, 7(36), 119-144.
https://doi.org/10.3406/reso.1989.1355
424 Flichy, P. (2004). op. cit. p315
Nous comprenons bien ainsi l’enjeu de la connexion aux TIC de son organisation
professionnelle. Nous dissocions volontairement la déconnexion involontaire et la
déconnexion volontaire.
Déconnexion involontaire
Les causes de déconnexion involontaires sont pour nous des manques d’accès aux TIC. Les
causes peuvent être multiples, nous pourrions comme le suggère Adel Ben Youssef retenir «
l’accès aux équipements et aux infrastructures (fracture de premier degré) », «les inégalités
(…) [des] usages qui sont faits par les individus et par les groupes sociaux », «l’efficacité de
ces usages » et enfin « les modalités d’apprentissage dans une économie fondée sur la
connaissance ».
La conséquence de cette déconnexion a été beaucoup étudiée et une recherche académique
fournie existe depuis la fin des années 1990 concernant cette déconnexion involontaire qui
engendre une « fracture numérique ».
Nous pourrions ajouter que ces inégalités peuvent aussi être cumulées, ce qui pourrait
provoquer à terme un écart social important entre les connectés et les déconnectés.
Déconnexion volontaire
Nous portons plus d’intérêt à la déconnexion volontaire dans ce paragraphe. Nous
n’aborderons pas les mouvements militants d’alerte sanitaire, qui clament « que les ondes
électromagnétiques qui permettent de se connecter sont néfastes pour la santé »425, mais
plutôt un mouvement d’usage, très individuel, qui apparaît, dans le souhait d’une bien
meilleure maîtrise professionnelle des usages426 et surtout une meilleure concentration sur les
potentiels de l’humain427.
Selon F. Jauréguiberry, cette nouvelle organisation du travail des individus qui la pratique «
n’est pas seulement une sorte de fuite alimentée par un désir de souffler, de reprendre son
rythme ou de préserver un temps à soi. »428, c’est aussi un « moment ou période de dialogue
de soi à soi, de réflexivité, de confrontation avec le sens de sa vie, la déconnexion est alors
vécue comme pratique de son intériorité et renvoie directement [...] à la notion de sujet dans
425 Group, B. W. (2012). BioInitiative 2012. A Rationale for a Biologically-based Public Exposure Standard for
Electromagnetic Fields (ELF and RF) . Sage C and Carpenter DO: Bioinitiative.
426 Jauréguiberry, F., & Proulx, S. (2011). Usages et enjeux des technologies de communication. Erès.
427 Vieira, L. (2016). Apologie du désordre et complexité numérique. In Y. Barlette, D. Bonnet, & P.-M. Riccio,
Désordres numériques : incertitude et opportunités. Presses des Mines.
428 Jauréguiberry, F. (2014). op. cit. p21
une société hypermoderne »429. Pour lui, un des éléments déclencheurs de cette déconnexion
volontaire serait une protection personnelle aux réactions extrêmes d’addiction au numérique,
« elles visent précisément à éviter de rentrer dans la zone rouge du burn out et de subir des
situations de surcharge informationnelle insupportables. »430.
Les deux sociologues précités proposent une caractérisation typique de l’usager du
numérique431, répartie en trois conduites spécifiques : « le zapping » (attitude très active qui
permet un maximum d’interactions professionnelles), « le filtrage » (attitude prudente visant à
prendre du recul) et « la préservation » (attitude de défense vis à vis des outils TIC afin de se
protéger) : tout serait une question de dosage propre à chaque personne, à chaque situation
pour gérer sa connexion et sa déconnexion volontaire.
Concernant la déconnexion volontaire dans l’Enseignement Supérieur et de la Recherche,
l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) a financé l’intégralité du programme
Déconnexion volontaire aux technologies de l’information et de la communication
(DEVOTIC)432. Coordonné par Francis Jauréguiberry, ce projet ANR a mobilisé une
quinzaine de chercheurs appartenant aux laboratoires SET (CNRS – Université de Pau),
LISST (CNRS – Université de Toulouse 2), MICA (Université de Bordeaux 3), LCS
(Université de Paris 7) et GRICO (Université d’Ottawa). Un des terrains d’analyse concerne
40 universitaires de la région de Toulouse (France) afin de cerner leurs pratiques de
connexion/hyperconnexion/déconnexion en matière de courriers électroniques. Le résultat
montre qu’elles se distribuent entre deux figures idéal typiques433 : la résistance à
l’envahissement par « une déconnexion temporelle stricte organisée pour créer une
séparation d’engagement, personnels et professionnels en particulier ». Et une seconde est
paradoxalement celle de l’hyperconnexion afin « d’échapper à la pression qu’une
accumulation pourrait produire. »
Vers un nouvel isolement social ?
Nous comprenons mieux les attitudes de connexions et de déconnexions, et nous cherchons ce
qui empêcherait un individu de basculer volontairement dans l’une ou l’autre des attitudes.
429 Jauréguiberry, F. (2014). Ibid. p21
430 Jauréguiberry, F. (2013). Déconnexion volontaire aux technologies de l’information et de la communication.
p30
431 Jauréguiberry, F., & Proulx, S. (2011). Ibid .
432 Jauréguiberry, F. (2013). Déconnexion volontaire aux technologies de l’information et de la communication .
Consulté à l’adresse https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00925309
433 Jauréguiberry, F. (2013). Op. cit. p35
Comme nous l’avons dit, l’entreprise fonctionnant massivement en réseau, ce réseau utilisant
les TIC, il est probable que le raccourci soit fait par certains, déconnexion = isolement de
l’entreprise : l’individu non connecté pourrait se sentir en vulnérabilité relationnelle434 et
entrer dans une impression d’exclusion du groupe social entreprise.
Concernant l’isolement social, Jean-Claude Kaufmann, nous invite à mesurer toute « la
difficulté d'objectiver certains aspects pourtant centraux, comme les oppositions : isolement
« positif » /isolement « négatif »; isolement « actif » / isolement « passif »435
  • Isolement actif / Isolement passif
Le choix de l’isolement, dans le cadre des TIC nous apparaît clairement avec l’analyse
précédente. L’isolement actif est pour nous assimilable à une déconnexion volontaire, et par
opposition l’isolement passif à une déconnexion involontaire.
  • Isolement positif / Isolement négatif
Concernant cette opposition, il s’agit d’observer les effets de la déconnexion volontaire, qui
provoque l’isolement. Nous proposons de nous intéresser au bien-être au travail comme
élément de mesure : « L’individu se considèrera dans un état de bien-être quand les
manifestations positives l’emporteront sur les négatives. »436.
Fort de ces définitions, nous faisons la proposition de réunir en une seule figure les deux
échelles (figure suivante, avec une superposition sur l’axe des ordonnées de la déconnexion et
des formes d’isolement au TIC.
434 Castel, R. (1991). De l’indigence à l’exclusion, la désaffiliation. Précarité du travail et vulnérabilité
relationnelle. Face à l’exclusion. Le modèle français , 137-168.
435 Kaufmann, J.-C. (1994). Vie hors couple, isolement et lien social: Figures de l’inscription relationnelle. Revue
française de sociologie , 35(4), 593-617. https://doi.org/10.2307/3322185
436 Biétry, F., & Creusier, J. (2013). Proposition d’une échelle de mesure positive du bien-être au travail
(EPBET), Proposition d’une échelle de mesure positive du bien-être au travail (EPBET).
Revue de gestion des ressources humaines , (87), 23-41. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://www.cairn.info.ezproxy.univ-perp.fr/revue-de-gestion-des-ressources-humaines-2013-1-p-23
VOLONTAIRE ACTIF
Déconnexion Forme d’isolement au TIC
LE MANQUE
LA SÉRÉNITÉ
NUMÉRIQUE
NUMÉRIQUE
NÉGATIF POSITIF
Effet sur l’individu
L’INSOUCIANCE
LA FRACTURE
NUMÉRIQUE
NUMÉRIQUE
INVOLONTAIRE PASSIF
Figure 54 : Les formes d'isolement aux TIC et leurs effets sur l’individu.
Cette représentation nous fait apparaître quatre cadrans, que nous considérerons comme des
domaines idéaux typiques :
  • L’isolement actif ayant un effet négatif sur l’individu, le domaine de la situation de
manque pour les addictifs au numérique
  • L’isolement passif ayant un effet négatif sur l’individu, celui de la fracture
numérique
  • L’isolement passif ayant un effet positif sur l’individu, celui de ceux qui ne se
préoccupe pas de cela, ne s'en inquiète pas, l’insouciance numérique,
  • L’isolement actif ayant un effet positif sur l’individu, celui de la sérénité
numérique.


4.2 Les dispositifs endogènes à l’ESR mais dont la[modifier]

stratégie est exogène à l’établissement
Le choix s’est porté pour cette catégorie sur trois dispositifs qui influencent le numérique
universitaire (figure suivante). Deux d’entre eux sont antérieurs à la loi relative à l’ESR de
2013, il s’agit de la Mission numérique de l’enseignement supérieur (MINES) de la direction
générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle (DGESIP) et la
Conférence des Présidents d'Université. Le troisième est postérieur à cette loi : le plan
stratégique France Université Numérique (FUN).
Figure 55 : Des influences interne à l’ESR sur le numérique d’une université.


4.2.1 La Mission numérique de l’enseignement supérieur (MINES)[modifier]

Rattachée à la direction générale de l'enseignement supérieur et de l'insertion professionnelle
(DGESIP), qui « élabore et met en œuvre la politique relative à l'ensemble des formations
supérieures, initiales et tout au long de la vie, relevant du ministre chargé de l'enseignement
supérieur »437, la MINES a été instituée en 2007, pour que le numérique soit « un levier pour
la réussite des étudiants et le rayonnement des établissements » Elle « soutient : la cohérence
nationale ; la mise en commun des actions, des expériences et des moyens ; les projets
437 DGESIP. (2014). DGESIP - ESR  : enseignementsup-recherche.gouv.fr. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.enseignementsup-recherche.gouv.fr/cid24149/dgesip.html
innovants ; la visibilité internationale. »438. En 2013, sa mission s’étend à la pédagogie
universitaire, elle changera de nom pour devenir Mission de la pédagogie et du numérique
pour l'enseignement supérieur (MIPNES).


4.2.1.1 Le rapport de Claude Bertrand[modifier]
La rapport sur « la transformation pédagogique dans l’enseignement supérieur »439 a été
présenté au Cneser le 15 septembre 2014, commandité par la DGESIP du Ministère de
l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, il a été porté par
Claude Bertrand, alors Chef de la mission de la pédagogie pour l’enseignement supérieur.
Ce rapport concerne la transformation pédagogique des établissements universitaires, il
s’appuie sur « 52 entretiens réalisés avec différents acteurs, dont 15 au sein de la DGESIP,
10 experts étrangers et 2 avec des représentants d’associations étudiantes. La durée des
entretiens a varié de 45mn à 2h ».
Décomposé en 6 parties, il conseille à la DGESIP que l’Enseignement Supérieur et de la
Recherche de mettre en place sa transformation pédagogique, en levant les freins (« manque
de reconnaissance de l’activité d’enseignement, défaut de portage politique, manque de
formations des enseignants et insuffisance de connaissances dan s ce domaine ») et en
soutenant la pédagogie universitaire au travers de dix pistes d’actions à engager (« intégration
de la pédagogie dans la procédure d’accréditation, « Grenelle » de la pédagogie de
l’enseignement supérieur, Appels à projets France Université Numérique, Création de prix de
pédagogie innovante, Mise en place d’un observatoire national des pratiques pédagogiques
de l’enseignement supérieur, appui sur les IDEFI comme leviers de la transformation
pédagogique, lancement d’une étude sur les nouveaux étudiants : qui sont-ils ? comment
apprennent-ils ? Quels sont leurs besoins ?, Reconnaissance de l’activité d’enseignement,
Structuration et soutien à la formation des enseignants, Structuration du champ de recherche
en pédagogie de l’enseignement supérieur »)
Ce qui nous intéresse dans le cadre de notre recherche repose sur « les questions de pédagogie
universitaire et de formation des enseignants en lien avec les usages du numérique ». Pour les
auteurs, il est indéniable que le numérique universitaire agit comme catalyseur de la
transformation pédagogique. Le numérique « n ’est pas en lui-même garant d ’innovation
438 MIPNES. (2014, janvier 13). Le dossier numérique de compétences - Portail C2i. Consulté le 25 septembre
2017, à l’adresse https://c2i.education.fr/spip.php?article302
439 Bertrand, C. (2014). op. cit.
p édagogique (…) mais amène à imaginer de nouvelles formes d’apprentissage et contribue à la
promotion de modèles pédagogiques centrés sur l’étudiant »440.
Ce premier point nous paraît important car il recentre sur les usagers du service public, nos
étudiants. C’est une approche que nous considérons comme un élément de départ indispensable à
une construction d’une stratégie numérique d’Université.
Mais au-delà de cela, introduire le numérique provoque des limites dans les organisations des
parcours d’enseignement : la déformation du temps et de l’espace qu’apporte l’usage du
numérique actuel, nous interroge sur « de nouvelles possibilités pour l’organisation des
parcours, pour la flexibilit é du temps et de l’espace d’apprentissage »441 et ces organisations
se trouvent ainsi interrogées : « de nouveaux modes d’interaction entre les acteurs (étudiants,
enseignants, autres intervenants) apparaissent en transformant leur rôle respectif au sein de
communautés d’apprentissage »442 comme pour les MOOC.
Enfin, il relève que « l ’accès sans limites à d’innombrables ressources de formation » permet
de créer un « environnement personnel d’apprentissage » pour chaque étudiant.
Globalement bien accueilli par la communauté universitaire, ce rapport a permis la création
des premières Journées nationales de l'Innovation pédagogique dans l'Enseignement
supérieur, en mars 2016, et la remise de 6 initiatives ont été récompensées par un prix 443 :
  • "Apprendre le marketing autrement : le produit fil rouge" - I.U.T. Technique de
commercialisation, Université de Bordeaux
  • "Transfert de connaissances et aide à la décision pour former des géographes de la
santé" - Université Paris Ouest Nanterre La Défense - Université Paris Est Créteil
  • "Le Contrat Enseignant Pédagogie Innovante comme levier de l'innovation
pédagogique" - Université de Perpignan
  • "Conduire conjointement un soutien à la pédagogie, à l'usage du numérique et à
l'internationalisation des formations" - Grenoble I.N.P.
  • "Le CESIM : un centre de simulation tourné vers l'avenir" - Université Bretagne
Occidentale
440 Bertrand, C. (2014). op. cit p25
441 Bertrand, C. (2014). Ibid p25.
442 Bertrand, C. (2014). Ibid p25.
443 Prix PEPS. (2017). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.enseignementsup-
recherche.gouv.fr/cid111943/prix-peps-passion-enseignement-et-pedagogie-dans-le-superieur-2017.html
  • "Dispositif d'autoformation guidée en langues" - Université Lille 3
Nous estimons que ce rapport influence le développement des usages du numérique en
promettant une valorisation par un prix national pour la « pédagogie numérique » qui
contribuerait à l’amélioration de l’image de marque (bénéfice structurel, attitude changée
concernant l’Université récompensée).


4.2.1.2 Les universités Numériques en Région[modifier]
Les universités numériques en Région (UNR) ont été créées à l’initiative du ministère de
l’Enseignement supérieur et de la Recherche en partenariat avec la Délégation
interministérielle à l’aménagement du territoire et à l’attractivité régionale (DATAR) et le
Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS).
À leurs créations les UNR apportent la base d’une mutualisation régionale des services à la
vie de l’étudiant, le développement des usages, une politique de production, de diffusion et de
mutualisation des ressources pédagogiques pour reprendre leurs définitions initiales. Ce ne
sont pas des universités au sens juridique du terme mais bien des groupements de partenaires
à l’échelle régionale réunis autour de la problématique de la vie étudiante. Leur statut comme
leur influence différent suivant les Régions, en 2017, la plupart n’ont pas été redéfinies par le
nouveau découpage des Régions, certaines sont inactives structurellement.
Les UNR ont été au nombre de 17 lors de l’ancien découpage des 26 régions, et leur influence
s’est avérée visible autour de la mutualisation des Environnement numériques de travail, mais
pas seulement. L’animation de ce réseau est assurée par la MINES. L’influence des UNR
selon le rapport Issac porte aussi sur le développement des infrastructures et la mutualisation
des outils informatiques au sein d’une même région444 .


4.2.1.3 Le réseau des universités thématiques[modifier]
Comme nous l’avons vu lors de l’approche chronologique, le réseau des universités
Thématiques Numériques est apparu en 2003 créé à l’initiative du ministère de
l’Enseignement supérieur et de la Recherche, pour permettre aux étudiants de disposer de
ressources pédagogiques de qualité, validées par un comité scientifique.
Les universités numériques thématiques (UNT), ne sont pas des universités au sens juridique,
et différent toutes dans leur statut. Elles disposent cependant d’organisations communes
444 Isaac, H. (2008). Op. cit.
« centrées autour d’une instance collégiale décisionnaire constituée, d’un président, d’un
directeur, d’un conseil d’administration, et d’un comité de pilotage, d’un comité scientifique,
composés d’enseignants-chercheurs, ayant une autorité reconnue dans leur domaine. »445
Nous retrouvons 8 UNT, réparties en 7 domaines d’activité scientifique (Sciences
fondamentales (UNISCIEL), Sciences juridiques et politiques (UNJF), Santé et sport
(UNF3S), Environnement et développement durable (UVED), Économie et gestion
(AUNEGE), Sciences humaines et sociales, langues et art (UOH), Sciences de l’ingénieur
et technologie (UNIT) et une ciblée pour les IUT (IUT en ligne).
Leur mode de fonctionnement s’appuie sur des appels à projets inter-établissements,
sélectionnés par un comité de spécialistes du domaine scientifique ou pédagogique, des
acteurs de chaque Université membre.
Ce dispositif fonctionne pour nous comme un label de qualité, une sorte de normalisation des
bonnes pratiques en TICE dans l’enseignement supérieur. Elle représente un consensus quant
aux caractéristiques essentielles que doit posséder une formation en ligne, tant au niveau du
scénario pédagogique que dans la production des ressources et de la rigueur scientifique. Pour
reprendre Sylvie Rolland, lorsqu’elle parle de l’influence de la certification sur le système de
management de l’organisation « La norme fournit alors un modèle à suivre dans la mise en
place et le fonctionnement de ce système »446 .
Il s’agit ici d’une influence provoquée exercée par le Gouvernement au niveau politique dans
une logique de vouloir améliorer le niveau de compétences des usagers du service public des
universités, en proposant un dispositif normalisant.
Au sein des universités, nous constatons, au moins, trois types d ’effets relevés lors de nos
entretiens avec les acteurs des universités rencontrés à ce sujet. Ceci mériterait d’être
approfondi lors d’une étude de cas spécifique sur l’influence des UNT.
Le premier effet serait la mise en place d’un modèle économique de la production de
ressources numériques dans le domaine des TICE. Le fonctionnement en appel à projet
permet de proposer une aide financière non négligeable, généralement 50% du coût de la
création de la ressource pédagogique. Structurée autour d’une équipe pédagogique
d’Université portant le projet, cette contribution financière offre à l’équipe un budget
445 Aunege. (2015). Fonctionnement – L’Université Numérique. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://univ-numerique.fr/objectifs/fonctionnement/
446 Rolland, S. (2009) Un bilan de 20 ans de certification des systèmes de management de la qualité  : les apports
perçus de la certification ISO 9000 par les managers, Abstract. Management & Avenir , (29), 31-51. Consulté à
l’adresse http://www.cairn.info/resume.php?ID_ARTICLE=MAV_029_0031
permettant d’arriver à ses fins pédagogiques, voire d’employer un ingénieur pédagogique
dédié à la création de cette ressource.
Le deuxième effet est la création d’une communauté d’enseignant autour d’une thématique
scientifique et souhaitant la traiter pour produire une ressource pédagogique. Nous estimons
que cette communauté fonctionnerait sur le modèle de la « communauté de pratique »447 de
Wenger, un groupe de personnes qui travaillent ensemble en utilisant des plateformes internes
que proposerait la production de cette ressource.
La troisième effet est l’opportunité offerte aux universités pilotant les projets retenus, qui
s’assurent ainsi des bénéfices en termes d’image de marque au niveau symbolique auprès des
étudiants et expérientiels auprès des membres de l’Université.


4.2.2 La Conférence des Présidents d’Université (CPU)[modifier]

La CPU est une association Loi de 1901 qui « rassemble les dirigeants exécutifs des
universités et établissements d’enseignement supérieur et de recherche afin de porter la voix
et les valeurs des universités dans le débat public. »448
4.2.2.1 Le réseau des référents numériques des universités de la CPU[modifier]
Sur ce point, en attendant les nominations des vice-présidents chargés des questions et des
ressources numériques dans une logique de site, les universités se sont organisées autour de la
Conférence des Présidents d’Université et ont institué la CPU-NUM, le un réseau des
référents numériques des universités. Ce réseau s’est réuni en juin 2014, lors du séminaire
« Le numérique à l’heure des COMUE »449. (Conférences des Présidents d’Université 2014)
Ses problématiques concernent l’organisation du nouveau paysage numérique avec le
développement des nouvelles entités universitaires. Le point d’entrée de ce réseau est de
considérer, le numérique, comme instrument ou objet de structuration des nouvelles entités
universitaires. Il s’agit de faire émerger des phénomènes de mutualisation, (la mutualisation
des data-centers par exemple) au sein de regroupements d’universités. Mais aussi de prendre
le temps de la réflexion sur et les mutations qu’entrainent le numérique, mutation
447 Wenger, E., McDermott, R. A., & Snyder, W. (2002). Cultivating communities of practice: A guide to
managing knowledge. Harvard Business Press.
448 Conférence des présidents d’Université. (2014). Mission de la CPU. Consulté 29 août 2017le 25 septembre
2017, à l’adresse http://www.cpu.fr/presentation/un-role-defendre-et-promouvoir-luniversite-francaise/
449 Conférences des Présidents d’Université. (2014). Le numérique à l’heure des COMUE. Consulté à l’adresse
http://www.cpu.fr/wp-content/uploads/2014/06/S%C3%A9minaire-num%C3%A9rique-5.pdf
pédagogique notamment, et mais aussi mutation d’échelle nouvelles échelles territoriales
universitaires au niveau des territoires universitaires.


4.2.2.2 Le colloque sur l’Université 3.[modifier]
Le colloque « Université 3.0 : nouveaux enjeux, nouvelles échelles à l’ère numérique » qui
s’est déroulé à l’Université de Strasbourg a permis la rédaction par les participants de
propositions pour « penser les mutations induites par la révolution numérique au niveau des
modes d’apprentissage, de l’organisation des universités, de la structuration de l’espace ou
de la redéfinition du lien social »450.
Ces dix propositions qualifiées d’enjeux du numérique au sein des universités
concernent plusieurs points et contribueront à la mise en place de dispositifs concernant le
numérique de l’ESR.
Dispositifs mis en place Propositions issues de ce colloque
en juin 2017 et
contribuant à cette
proposition
Pix La formation à la e‐citoyenneté depuis la maternelle jusqu’au doctorat, pour une
culture de l’environnement numérique
Développer des compétences numériques des diplômés pour une meilleure insertion
professionnelle
PEPS L’incitation aux enseignants à investir de nouvelles pédagogies pour les étudiants
avec une facilité de service, de carrière et de formation continue
Référentiel de la S’approprier les nouvelles organisations de travail que le numérique génère
gouvernance numérique
Construire de nouveaux schémas directeurs 3.0 autour de l’usager et de la donnée
Développer des lieux d’apprentissage et de vie pour favoriser le collaboratif, et
l’innovation
Colloque sur « Campus en Développer des lieux d’apprentissage et de vie pour favoriser le collaboratif, et
mouvement » en 2016 l’innovation Développer des lieux d’apprentissage et de vie pour favoriser le
collaboratif, et l’innovation
Création du GIP FUN- Développer par le numérique une offre de formation vers de nouveaux publics,
MOOC fédérer les initiatives, et penser le modèle économique
Tableau 22 : Propositions sur le numérique issues du colloque de la CPU « Université 3.0 ».
Nous retrouvons dans les dispositifs mis en place, que le référentiel gouvernance du
numérique réalisé avec l’appui du CNNum répond aussi aux attentes de la CPU.
450 Conférences des Présidents d’Université. (2016). Colloque annuel de la CPU - « Université 3.0  : nouveaux
enjeux, nouvelles échelles à l’ère numérique ». Consulté 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.cpu.fr/actualite/colloque-annuel-de-la-cpu-universite-3-0-nouveaux-enjeux-nouvelles-echelles-a-
lere-numerique/
Nous estimons qu’en fixant le thème du numérique de l’ESR lors de son colloque annuel,
l’association CPU a permis de mettre en place un débat au niveau des universités, corroborant
la mise en place du plan FUN. Ce colloque a permis aussi de faire émerger une communauté,
dont les individus étaient auparavant cantonnés en interne dans les universités ou en externe
dans des groupes de travail des UNT : la communauté de, ceux qui pilotent le numérique,
sous l’intitulé référents numériques des universités.


4.2.3 France Université Numérique[modifier]

Dans un monde de la connaissance mondialisée, et face à la concurrence anglo-saxonne
(COURSERA, EDX,…) naissante, en 2013 le Gouvernement français a adopté une feuille de
route ambitieuse sur le numérique. La priorité fixée par le Président de la République
concerne la jeunesse, l’école et l’Université. En octobre 2013, nait le plan France Université
Numérique. Il permet « le développement de nouveaux services numériques pour les
étudiants et la rénovation des pratiques pédagogiques. »451, ce dispositif appuiera son activité
principale sur une plateforme de Massive Online Course (MOOC), ou Cours en Ligne Ouvert
Massif, (CLOM) proposée aux universités.


4.2.3.1 Le plan FUN et les dispositifs mis en place[modifier]
En 2013, le plan FUN est un schéma stratégique du ministère dans le domaine du numérique
de l’ESR, décliné en 18 actions dont l’articulation centrale est « d’utiliser le numérique
comme un levier de la réussite des étudiants ».
Nous proposons de porter notre attention sur certains dispositifs mis en place depuis 2013, en
repérant les domaines d’actions du plan FUN (Tableau 23).
451 FUN-MESR. (2013). 18 Actions - France Université Numérique - FUN. Consulté 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.france-universite-numerique.fr/18-actions.html
Listes non-exhaustives des Domaines d’appartenances aux actions du plan FUN
dispositifs mis en place ou
en projet en 2017
Application Post-Bac 1/ Faciliter et renforcer la mise en place de dispositifs d’aide à l’orientation
des lycéens et étudiants
Journée de la pédagogie 2/ Favoriser la réussite des étudiants grâce à une pédagogie rénovée par le
innovante numérique
Prix PEPS
Plateforme MOOC 2/ Favoriser la réussite des étudiants grâce à une pédagogie rénovée par le
numérique
3/ Lancer une plate-forme nationale pour héberger, sur un site unique, les
formations numériques, MOOC certifiants et formations en ligne
diplômantes ou qualifiantes
4/ Favoriser une meilleure insertion professionnelle des étudiants grâce au
numérique
5/ Proposer une offre innovante de formations en ligne pour répondre aux
besoins croissants de formation continue
6/ Former et accompagner les enseignants et les équipes pédagogiques à
l’usage du numérique dans leurs pratiques pédagogiques
Prix PEPS 7/ Mieux reconnaître et valoriser, dans l’évolution de la carrière des
enseignants-chercheurs, leur investissement pour intégrer le numérique
dans leurs pratiques pédagogiques
Attribution de postes à 8/ Accompagner les établissements dans la mise en place d’une stratégie
profils spécifiques numérique, en y consacrant 10% des 1.000 postes par an attribués par le
MESR
Indicateurs contrat 11/ Donner une impulsion forte à la recherche sur la pédagogie numérique
(les digital studies) et notamment à la recherche dans l’e-education
Rapport Bertrand 14/ Intégrer le numérique et l’évolution pédagogique qu’il induit dans les
constructions et les rénovations de bâtiments universitaires.
Schéma stratégique des
universités dans la
pédagogie numérique
universitaire
Tableau 23 : Quelques dispositifs en relation avec les 18 actions de FUN.
Nous relevons que la plateforme MOOC répond à plusieurs actions, ce dispositif devient alors
emblématique de la politique d’encouragement au développement des usages des TIC, et
peut-être considérée comme un « objet frontière »452 . Nous en analysons l’influence dans le
paragraphe suivant.
452 Star, S. L., & Griesemer, J. R. (1989). Institutional ecology,translations’ and boundary objects: Amateurs and
professionals in Berkeley’s Museum of Vertebrate Zoology, 1907-39. Social studies of science, 19(3), 387-420.


4.2.3.2 La plateforme FUN-MOOC[modifier]
Comme nous le rappelions dans un article453 publié en compagnie de nos collègues Santi,
Ammari et Marchand, dans la Revue internationale des technologies en pédagogie
universitaire, c’est dans un souci de démocratisation de l’enseignement supérieur, ainsi que
de la formation tout au long de la vie, le ministère de lancé en octobre 2013 sa plateforme de
MOOC nommée France Université Numérique (FUN). En 2016, nous relevions que cette
plateforme a proposé « plus de 138 MOOC différents conçus par 45 établissements
d’enseignement supérieur français ainsi que par 4 établissements francophones si bien qu’un
million d’inscrits a été dépassé en septembre 2015 ».
Cette plateforme, comme il est rappelé dans son descriptif « dans un souci de service public »
propose des « MOOC gratuits, fournissant une attestation en fin de formation », mais « cette
attestation n’a pas de valeur académique, l’identité de l’apprenant n’étant pas vérifiée ».
Nous avons repéré que tous les MOOC fonctionnent en autonomie pédagogique (un MOOC
par objectif de certification), sauf quand il y a une interdépendance pédagogique entre
plusieurs MOOC, ils sont alors organisés en collection de MOOC : c’est le cas de la collection
de MOOC C2i.
Piloté initialement par le ministère, cette plateforme de MOOC trouve sa structuration au sein
d’un GIP, en 2016 : « le projet FUN est transféré aux institutions mobilisées autour du projet
dans le cadre d’une structure publique indépendante, le groupement d’intérêt public (GIP)
FUN-MOOC. »
Le dispositif fait apparaître ainsi une modalité de pilotage en inter-Université, qui influencera
d’une manière ou d’une autre les universités membres, mais surtout non-membres de ce GIP.
D’après le bilan d’activité455 de ces deux années de fonctionnement, il apparaît que la
majorité des inscrits (61 %) sont des salariés en activité ; les lycéens ou étudiants représentent
seulement 13 % des apprenants. Nous en déduisons que cette plateforme et plus
particulièrement les MOOC ont donc un rôle essentiel à jouer dans la formation continue. Elle
453 Mocquet, B., Santi, C., Ammari, I., & Marchand, T. (2016). De l’inscription à un MOOC à la certification
académique Le cas de la collection de MOOC « compétences du numérique et C2i Niveau 1 ». Revue
internationale des technologies en pédagogie universitaire, 13(1). https://doi.org/10.18162/ritpu-2016-v13n1-04
454 Mongenet, C. (2016). FUN, une plateforme de MOOCs au service des établissements d’enseignement
supérieur. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.annales.org/site/ri/2016/resumes/mai/08-ri-
resum-FR-AN-AL-ES-mai-2016.html
455 FUN. (2015, septembre). Une enquête pour mieux connaître les inscrits sur FUN-MOOC. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse //www.france-universite-numerique-mooc.fr/news/enquete-apprenants-2015/
permet de proposer un dispositif numérique de formation universitaire, et pourrait contribuer à
la transformation numérique de la société.
C’est sans doute la deuxième influence visible de FUN sur les universités. Pour reprendre la
conclusion de l’article précité qui relate l’expérimentation du processus de certification
académique en sortie de MOOC, un des bénéfices pour les universités est bien qu’« il est
possible d’attirer des candidats aux MOOC vers une certification académique iden tique sur
plu sieurs universités »456. Développer une stratégie pour l’établissement en direction de la
création de MOOC, contribue directement à l’amélioration de l’image de marque
fonctionnelle des universités.


4.3 Des dispositifs endogènes à l’établissement[modifier]

Dans cette partie, nous ne souhaitons pas établir un catalogue des dispositifs emblématiques
permettant le développement des usages du numérique. Il serait caricatural de penser que ce
qui fonctionne dans une université peut être totalement copié dans une autre avec les mêmes
résultats sur la transformation numérique. Comme nous l’avons déjà dit, chaque université est
singulière, possède sa propre histoire et des spécificités de fonctionnement. Il s’agit plutôt de
nous engager dans une description de dispositifs existants, et connus de notre communauté,
afin de nous préparer à les observer dans nos études de cas. Nous espérons, en faisant ce
travail de caractérisation, estimer le degré d’avancement de la transformation numérique de
l’établissement par exemple, en regardant un des dispositifs caractérisés.


4.3.1 La gouvernance du numérique[modifier]

Comme nous l’avons rappelé précédemment, nous considérons que la gouvernance du
numérique d’une Université est un dispositif interne et complexe d’échanges informationnels
entre les membres, les usagers, ceux qui réalisent ce changement et ceux qui pilotent
l’établissement : ce dispositif rejoindrait pour nous le concept de nouvelle gouvernance.
Ce dispositif est en réaction au changement sociétal qu’apportent les TIC, et permettrait aux
établissements de se positionner autrement en termes de stratégie, afin de permettre à ces
universités de prolonger leur existence, d’élaborer des stratégies, dans un monde devenu de
plus en plus concurrentiel.
456 Mocquet, B., Santi, C., Ammari, I., & Marchand, T. (2016). Op. cit. p 62.
C’est pour un dispositif interne, qui repose sur des différents outils de gestion, propre au
changement, tels que des commissions paritaires, des enquêtes d’usages réalisés, officialisés
auprès des conseils instituant l’établissement. Un porte-parole devra en être le coordonnateur,
pour en faciliter la mise en place.
C’est aussi un dispositif complexe en raison de sa transversalité, organisation qui diffère de la
structuration classique par composante, la multitude des acteurs qu’ils concernent et les
enjeux pour l’établissement. Cette vision transversale est devenue une posture incontournable
pour appréhender le numérique universitaire.
Une vision des échanges informationnels concernant les projets numériques et leurs effets sur
l’organisation, mais aussi le devenir à moyen termes de ces projets, doivent permettre d’
appréhender le périmètre de ce numérique universitaire. Cette gouvernance du numérique doit
aussi estimer les futurs succès apportés par les projets, certains pouvant devenir de véritables
innovations pour l’établissement.
Enfin une parfaite connaissance du rôle de chacun des acteurs du système nous paraît aussi un
des éléments observables pour estimer le degré d’avancement de la transformation numérique.


4.3.2 Les schémas du numérique[modifier]

Dans les années 1960, en France, nous constatons l’apparition d’outils pour manager
l’aménagement du territoire et sa transformation : les schémas directeurs d’aménagement
prennent leur place comme un dispositif de gouvernance457. Ces dispositifs techniques de
gouvernance458 permettent une prise en main du stratégique sur l ’écosystème d’un territoire
géographique. Avec le développement de la société numérique, cette nécessité de piloter la
gouvernance dure459. C’est Pierre Musso, qui nous parlant des territoires virtuels d’un point de
vue critique, souligne l’aspect dual de cette expression : elle peut désigner la digitalisation
d’un territoire mais aussi le développement d’« un second monde artificiel noué au territoire
existant »460. Nous estimons que la Caisse des dépôts et consignations a joué un rôle dans le
transfert de ce dispositif de gouvernance de l’aménagement du territoire vers le numérique, en
457 Jacques, L. (1966). Guichard (Olivier)-Aménager la France. Revue Économique , 17(6), 1027-1027.
458 Chia, E., Torre, A., & Rey-Valette, H. (2008). Conclusion  : Vers une «technologie» de la gouvernance
territoriale  = Plaidoyer pour un programme de recherche sur les instruments et dispositifs de la gouvernance des
territoires. Norois. Environnement, aménagement, société , (209), 167-177. http://doi.org/10.4000/norois.2603
459 Côme, T. (2013). op. cit. p2
460 Musso, P. (2008). Critique de la notion de « territoires numériques ». Quaderni, 66(1), 15–29.
https://doi.org/10.3406/quad.2008.1843 p15
étendant son accompagnement financier aux universités pour la réalisation de schéma
directeur du numérique.
Nous distinguons le schéma stratégique et le schéma directeur du numérique d’un
établissement, et nous estimons que leur influence est effective lorsque les projets prescrits
correspondent aux projets réalisés.


4.3.2.1 Le schéma stratégique du numérique[modifier]
Le premier est pour nous succinct, et fait partie du projet politique de l’équipe présidentielle
en place. Il doit comporter des axes d’activités numériques couvrant les trois missions de
l’Université, la formation, la recherche et l’insertion professionnelle. Il soit aussi tenir compte
des contraintes administratives inhérentes à toute activité numérique dans une organisation, le
respect des lois, de l’éthique, et des politiques publiques de sécurité des systèmes
d’informations (PPSSI).
Des axes compréhensibles
Afin d’atteindre son but, il doit susciter l’adhésion de tous. S’adressant aux acteurs de
l’Université, ce schéma doit être le plus explicite possible en le décomposant en axe
stratégique compréhensible (éviter les termes trop technique, par exemple). Il devra être repris
dans des actions de communication pour permettre sa diffusion au plus grand nombre en
interne. En terme de communication, un effort sera à réaliser pour démystifier, au sens d’ôter
le caractère mystérieux, le numérique. Pour cela, nous suggérons de tenir compte des
perceptions éventuelles de chacun des acteurs, énoncées précédemment.
Les axes peuvent concerner tous les domaines de la stratégie, et le cadre de domaines partagés
entre plusieurs vice-président. Un porte-parole, pilote de cette stratégie, doit être désigné de
manière officielle. Le risque existe, par exemple, de développer une offre en e-learning en
écart de la politique de formation, ou bien de prôner une politique recherche sur la donnée
centralisée en un lieu (investissement sur un Datacenter universitaire) et laisser toute
l’autonomie de la sauvegarde de la donnée informatisée aux directeurs de laboratoire.
Respect du droit et de l’éthique sur les données personnelles
Concernant les données personnelles, le nouveau règlement européen sur la protection des
données personnelles est paru au journal officiel de l’Union européenne461 et entrera en
application le 25 mai 2018.
Il s’agit de renforcer trois objectifs liés aux données personnelles, relayés sur le site de la
commission informatique et liberté 462 : renforcer les droits des personnes, responsabiliser les
acteurs traitant des données et crédibiliser la régulation grâce à une coopération renforcée
entre les autorités de protection des données.
Pour les universités, à ce jour, elles devraient disposer d’un Correspondant Informatique et
liberté (CIL) désigné par le Président. Ce personnel, pas nécessairement un juriste de
formation, doit être nommé obligatoirement depuis la réforme de 2004 de la Loi Informatique
et Libertés463 et son décret d’application de 2005. Son rôle est de se placer en intermédiaire
entre le responsable des traitements des données concernées et la CNIL. Il doit à ce titre être
informé de la création et de la mise à jour d’une liste des traitements effectués sur les données
personnels, aider à l’accompagnement les responsables des traitements, alerter sa hiérarchie
des manquements au respect des principes de la protection des données personnelles et
informer au sujet de l’existence de leurs droits d’accès, de rectification et d’opposition les
membres et les usagers de l’Université.
Les nouveaux textes européens imposent à compter du 25 mai 2018 la nomination d’un
délégué à la protection des données pour toutes les organisations publiques. Il remplacera le
CIL actuel dans le fonctionnement de l’organisation, son périmètre d’action étant plus global,
il devra posséder des qualifications professionnelles de juriste.
Respect de la politique de sécurité des systèmes d'information (PPSSI)
L’État affiche sa volonté de se montrer exemplaire en matière de cybersécurité, la limitation
des risques pour l’organisation publique à l’utilisation des TIC. La PSSIÉ (Politique de
461 Le parlement européen et le conseil de l’union européenne. Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen
et du Conseil. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://eur-lex.europa.eu/legal-
content/FR/TXT/?uri=CELEX%3A32016R0679
462 CNIL. (2016). CNIL - Extranet Correspondant - Authentifiez-vous. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse https://www.correspondants.cnil.fr/cils/login.action
463 LOI n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de
données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux
fichiers et aux libertés, 2004-801 § (2004).
sécurité des systèmes d’information de l’État) s’inscrit dans ce contexte, la première version a
été publiée par circulaire le 17 juillet 2014464 .
Son champ d’application concerne l’ensemble des personnes physiques ou morales
intervenant dans le système d’information, membres ou partenaires sous-traitants de
l’Université. Destinée à l’ensemble de la communauté universitaire, elle s’adresse plus
particulièrement à ceux qui pilotent les universités ou ceux qui sont chargés de la sécurité et
de l’exploitation des systèmes d’information. Déclinée en 6 principes fondamentaux,
Gouvernance, Maîtrise des risques, Maîtrise des systèmes, Protection des systèmes, Gestion
des incidents, Evaluation, elle permet à l’université de se positionner et de se projeter à moyen
termes, par exemple sur un plan quadriennal.
Pour les universités, il s’agit de remplir une batterie d’indicateurs fournis par l’Agence
nationale de la sécurité des systèmes d'information (ANSSI)465, au moyen d’un tableur et de
faire émerger des graphes permettant de mieux appréhender le positionnement actuel et futur
de la PSSI.
Synthèse des indicateurs PSSIÉ - 2015
Gouvernance
6 Maîtrise des
Evaluation
4 risques
2 conformité
0
tendance
Gestion des Maîtrise des
incidents systèmes
Protection des
systèmes
Figure 56 : Exemple du positionnement d’une université (données rendues anonymes).
Dans l’exemple de la figure ci-dessus, l’information recueillie lors de nos entretiens auprès
d’un des vice-présidents en charge du numérique, nous observons un outil de type auto
déclaratif (courbe bleue), et sa comparaison à une norme (courbe conformité).
464 Instructions et circulaires récentes | Legifrance. (2014). Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://circulaire.legifrance.gouv.fr/index.php?action=afficherCirculaire&hit=1&retourAccueil=1&r=38641
465 ANSSI. (2017). La Politique de Sécurité des Systèmes d’Information de l’État (PSSIE). Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse https://www.ssi.gouv.fr/entreprise/reglementation/protection-des-systemes-
dinformations/la-politique-de-securite-des-systemes-dinformation-de-letat-pssie/
Le mot gouvernance englobe la notion de ceux qui pilotent l’université, l’équipe présidentielle
accompagnée de l’équipe de direction, mais aussi la modalité d’organisation, y compris de
l’existence de comité de pilotage paritaire.


4.3.2.2 Le schéma directeur du numérique (SDN)[modifier]
Dans les universités françaises, nous rappelons que la mise en place des SDN débute par une
politique d’État, par exemple le schéma directeur des espaces numériques de travail466, puis
par des politiques locales.
Le SDN est un portefeuille de projets numériques, un catalogue de projets pluriannuels
permettant de satisfaire la stratégie numérique de la structure. Il doit permettre une vision
globale des projets numériques en cours ou à venir de l’Université.
Nous estimons qu’il s’appuie sur le schéma stratégique du numérique, il en est la
conséquence. Pour autant sa mise en œuvre, peut faire apparaître des faiblesses ou des forces
pour l’Université, il peut être aussi utilisé comme un feedback pour ajuster le schéma
stratégique au besoin : sur ce point le meilleur exemple est l’arrivée de la plateforme FUN-
MOOC, l’arrivée des MOOC était peu anticipée par les établissements, et il a fallu réajuster la
stratégie pédagogique dans plusieurs établissements.
Il peut prendre la forme d’un document livrable à une date donnée, généralement créé suite à
un audit extérieur, ou bien d’une organisation de type managérial du schéma stratégique.
Entre 2012 et 2014, certaines universités ont été accompagnées par la Caisse des dépôts et
consignations, permettant la rédaction d’un guide des bonnes pratiques du schéma directeur
du numérique467 .


4.3.3 Les services numériques à l’étudiant dans les universités[modifier]

Les services numériques à l’étudiant sont d’autant de services que nous pouvons observer
dans les universités pour évaluer le degré d’avancement de l’usage du numérique dans cet
établissement.
466 MENSR. (2012). Schéma directeur des espaces numériques de travail version 4.0. Consulté le 25 septembre
2017, à l’adresse http://cache.media.eduscol.education.fr/file/sdet/61/1/SDET-v4.0_226611.pdf
467 Groupe Caisse des dépôts. (2014). Guide des bonnes pratiques numériques universitaires. Consulté le 25
septembre 2017 à l’adresse
http://www.caissedesdepots.fr/fileadmin/PDF/Rapports_et_etudes/numerique/guide_-
_bonnes_pratiques_sdn_Juin_2014.pdf
Nous nommons « services numériques à l’étudiant », aussi bien les services à l’étudiant
existants et portés sur des dispositifs numériques (emploi du temps en ligne, accès pour les
sites distants, gestion de la scolarité, des conventions de stage, consultation de données
universitaires ou administratives) que les « nouveaux » services qu’apportent les TIC, comme
l’accès à des plateforme de formation, à des catalogues de ressources universitaires en ligne…
Ces services détaillés dans le SDN peuvent être observés au travers des usages déclarés des
étudiants, ou des membres de l’Université. Chacun d’entre eux peut-être observé
spécifiquement, nous parlerons alors d’usage spécifique à un contexte, comme peut être
observé la réussite globale de ses services, nous parlerons alors d’usage global de ce service.
Les données pouvant être recueillies peuvent être de nature technique (nombre de connexion,
nombre d’étudiants connectés sur une durée, pour une composante, par exemple) ou issues
d’observatoire des usages ou encore d’entretiens auprès des usagers.
Les observatoires des usages nous aident à comprendre les nouvelles attentes des étudiants en
observant les usages des nouveaux outils des TIC mises en place : le résultat de cette
observation pouvant être la rationalisation du budget consacré en fonction du nombre
d’usagers actifs concernés par cet outil.
L’influence des services numériques à l’étudiant n’est plus à démontrer : ils provoquent des
interactions et il s’agit d’autant de situation d’usages propices au développement de
compétence du numérique, en les multipliant au sein de l’environnement numérique de travail
pour qu’ils soient accessibles à tous et toutes.


4.3.4 La formation au numérique[modifier]

Nous l’avons cité plus haut, un certains nombres de référentiels de compétences du numérique
existent pour les usagers ou les membres de l’Université : ils peuvent même être communs
aux deux types d’individus provoquant des interactions au travers d’une plateforme.
Une étude sur les modalités d’apprentissage et les technologies de l’information et de la
communication dans l’enseignement 468 réalisée pour le compte de la Conférence des recteurs
et des principaux des universités du Québec (15 020 étudiants et 2 640 enseignants de douze
universités québécoises y ont participé), montre que les TICE sont employées dans le cadre de
la formation universitaire. Selon l’étude, réalisée par un groupe de chercheurs qui était dirigé
468 Ferland, J.-F. (2012). Apprentissage universitaire et TIC  : Le maître surpasserait l’élève. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://www.directioninformatique.com/apprentissage-universitaire-et-tic-le-maitre-
surpasserait-leleve/15731
par les chercheuses Magda Fusaro et Annie Couture, de l’Université du Québec à Montréal,
« le numérique peut rendre la formation plus motivante, faciliter le travail sur projets et entre
pairs. En donnant accès en ligne à des ressources, en autorisant une communication
pédagogi que étendue dans le temps et dans l'espace, il permet d'alterner le travail en
autonomie et avec l'enseignant, de personnaliser et de diversifier les dispositifs »469
Chez les enseignants, 94 % se sont déclarés « de moyennement à très compétents » en
matière d’utilisation des TIC. 41 % ont dit qu’ils ont un niveau de compétence moyen, 38 %
un niveau avancé et 15 % un niveau expert.
Dans nombre d’études, les entretiens qualitatifs démontrent la nécessité de faire préciser s’il
s’agit d’une compétence évaluée en fonction des besoins conscients de l’individu ou par
rapport aux possibilités informatiques. Les enseignants maîtrisent globalement peu de
fonctions des suites bureautiques. Parmi celles qui leur font défaut, le sommaire automatique
et les styles, qui leur seraient pourtant bien utiles… Quant aux jeunes, ils sont encore moins
agiles, même s’ils consomment et emploient quotidiennement les outils socionumériques,
Internet, et la bureautique élémentaire.
La formation au numérique repose sur le plan de formation des personnels pour les membres
et sur l’offre de formation pour les usagers. Elle peut être diplômante ou certifiante. Dans les
deux cas, ce qui peut influencer est, bien évidemment, la réussite à cette formation.
Le rapprochement de ces deux documents peut nous apporter des informations croisées sur le
degré d’avancement du développement des usages du numérique. Un travail de collecte des
informations relatifs aux éléments précités et une analyse sémantique permettraient de relever
les communs et les différences. Nous pourrions relever le paradoxe d’une plateforme existante
mais qui n’aurait pas été accompagnée dans sa mise en place par un plan de formation pour
les membres de l’Université et par des séances de travaux dirigés (TD) pour les usagers.
Nous pouvons ainsi nous enquérir d’informations de réussite à des plans de formation ou à
des certifications. Nous estimons qu’un taux de réussite à une certification C2i ou PIX est un
indicateur pouvant contribuer à évaluer la performance globale de l’établissement dans sa
transformation numérique, au moins pour le volet accompagnement.
Pour la pédagogie numérique, des nouvelles organisations émergent et montrent une forte
dynamique des universités. Participant à des journées interuniversitaires de travail réunissant
des universités du grand Sud de la France, en l’Université d’Avignon, en 2016, coordonnée
469 MINES. (2008). op. cit.
par Thierry Spriet, nous avons pu relever un certains nombre de pratiques concernant la
formation des enseignants à l’usage du numérique dans leur profession.
Ces universités ont mis en place une structure visible permettant ce changement. Elle prend
la forme d’une « cellule innovation pédagogique » adossé ou non à un centre de pédagogie de
l’Université ou de la COMUE. Les actions de formation sont différentes, chaque équipe
s’étant adaptée aux contraintes de son établissement : ateliers ponctuels à thème, journées
d’accueil des primo-arrivants (diplômante pour certain établissements), journée annuelle sur
la pédagogie, ou dispositif plus complexe comme des contrats entre les enseignants et les
bénéficiaires470 .


4.3.5 La formation par le numérique[modifier]

Par l’expression « la formation par le numérique » nous désignons les dispositifs de formation
à destination des membres ou des usagers, s’appuyant sur une plateforme de formation en
ligne.
En associant aussi les formations à destination des membres de l’université, nous élargissons
la définition de l’Université de Sherbrooke qui est ainsi formulée : « Dispositif
d’enseignement-apprentissage qui utilise un ensemble de moyens techno-pédagogiques
organisés pour atteindre les cibles de formation d’un programme ou d’une activité
pédagogique tout en offrant à l’étudiante ou l’étudiant une flexibilité de lieu (possibilité
d’étudier dans le lieu de son choix) ou une flexibilité de temps (possibilité d’interagir de
façon simultanée ou différée avec le personnel lié à l’enseignement) »471.
D’un point de vue pédagogique, un dispositif de formation à distance peut être totalement à
distance, ou hybride. Pour la première modalité, il est composé exclusivement d’activités
pédagogiques offertes et réalisées dans un lieu non déterminé par l’Université et au choix de
celui qui la suit. Pour le dispositif hybride, plus complexe à mettre en œuvre, une typologie a
470 Mocquet, B., Amiot, P., & Witczak, A. (2016). Le développement des usages numériques dans
l’enseignement supérieur  : le cas d’un dispositif de soutien à la pédagogie dans une Université. Présenté à La
Rencontre internationale du Conseil Franco-québécois de coopération universitaire  :L’enseignement supérieur
face aux défis numériques, Université Laval, Québec, Canada.
471 Université de Sherbrooke. (2016). Politique sur l’enrichissement de la formation par le numérique . le 25
septembre 2017 à l’adresse https://www.usherbrooke.ca/accueil/fileadmin/sites/accueil/.../politiques/2500-
037.pdf
été élaborée en fonction de cinq dimensions : « l’articulation présence/distance, la
médiatisation, la médiation, l’accompagnement et le degré d’ouverture. » 472 .
D’un point de vue stratégique, le dispositif de formation peut être diplômant, nous parlerons
d’enseignement à distance ou certifiant, il s’agit alors de MOOC (ouvert à tous) ou SPOC
(restreint à des usagers inscrits à l’Université).


4.3.5.1 L’enseignement à distance[modifier]
L’activité pédagogique à distance correspond pour nous à une totale maitrise de l’Université
dans la production de ressources pédagogiques à fort volume horaire de formation. Ces
formations sont apparues « en marge des activités de formation en présence pour assurer une
continuité du service public auprès des étudiants empêchés »473 Elle démontre une réelle
organisation, de la création à la accompagnement administratif ou pédagogique, et nécessite
un réel usage du numérique de la part des membres. Nous l’avons vu dans notre proposition
de typologie en situation d’apprentissage permet aux usagers d’augmenter leurs compétences
numériques.


4.3.5.2 Les MOOC et SPOC[modifier]
Les MOOC ou SPOC sont des outils de formation par le numérique plus légers en termes
d’heures de formation mais plus complexes en termes de production de contenu. Nous
émettons l’avis que les « MOOC peuvent devenir un agent de changement en pédagogie
universitaire »474. Pour autant la valeur d’un MOOC repose à la fois sur la valeur de la
formation et sur la valeur de son évaluation475. Sur ce dernier point, l’académisme d’une
certification post-MOOC, via une plateforme comme FUN-MOOC, paraît aujourd’hui être
mis en défaut, principalement concernant « le processus de vérification de l’identité du
candidat, mais aussi sur la reconnaissance auprès d’une institution gouvernementale, ou
futur employeur des compétences validées »476. En effet, contrairement aux diplômes d’État,
472 Burton, R., Borruat, S., Charlier, B., Coltice, N., Deschryver, N., Docq, F., … Villiot-Leclercq, E. (2011).
Vers une typologie des dispositifs hybrides de formation en enseignement supérieur. Distances et savoirs, Vol.
9(1), 69-96. Consulté à l’adresse
http://www.cairn.info.ezproxy.univ-perp.fr/resume.php?ID_ARTICLE=DIS_091_0069
473 Paquelin, D. (2014). Présence, distance  : vers de nouvelles configurations organisationnelles ? Distances et
médiations des savoirs. Distance and Mediation of Knowledge, 2(7). https://doi.org/10.4000/dms.797
474 Karsenti, T. (2013). Révolution ou simple effet de mode? Revue internationale des technologies en pédagogie
universitaire, 10, 2. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse
http://karsenti.ca/archives/RITPU_VOL10_NO2_MOOCvf.pdf, p19
475 Karsenti, T. (2013), Ibid p 21
476 Mocquet, B., Santi, C., Ammari, I., & Marchand, T. (2016). op. cit. p48
organisés en grades licence, master, doctorat, tous reconnus par le Répertoire national des
certifications professionnelles selon l’application du L613-1 du Code de l’éducation français,
les certifications de MOOC en France n’ont pas (encore) cette reconnaissance.


4.3.6 Des lieux emblématiques de l’usage du numérique : incarner le[modifier]

numérique
Le dispositif observable serait lié au développement des lieux « racines », des lieux corollaires
labellisés, ainsi que des activités représentatives dédiées au numérique qui pourraient
représenter conjointement pour les usagers de l’Université une plateforme numérique et un
espace structurant, véritable « centre de bonnes pratiques » et d’accompagnement477 des
personnels. La finalité de ce dispositif est de représenter le numérique, perçu comme quelque
chose d’abstrait par certains des acteurs de l’université, sous une forme matérielle. Nous
utilisons la notion d’incarnation, compris ici comme prendre forme humaine ou « prendre
chair » comme nous avons pu le faire dans une de nos publications478.
Ces lieux sont aussi attendus par les étudiants, comme des « tiers lieux », par opposition aux
premiers et seconds lieux d’Oldenburg que sont, respectivement, le domicile et le bureau479
Dans le système universitaire, le contour est donné par les travaux de Didier Paquelin sur les
attentes et pratiques des étudiants de l’ESR480 ou sur les campus d’avenir481.
Dans l’apprentissage des langues482, des universités ont déjà conduit cette mutation en créant
des centres de Langues, permettant à tout un chacun d’acquérir une certification. Cette
stratégie certification est parfois étendue au C2i. La finalité de ce type de lieu est de permettre
une installation durable du numérique, incluant l’usage du numérique dans la pratique des
membres et des étudiants, pour développer à terme une culture numérique au sein de
l’établissement, ce qui influencerait l’image de marque du point de vue bénéfice structurel.
477 Menser. (2012). op. cit.
478 Mocquet, B., Villeseque-Dubus, F., & Mannarini, M. (2017). Op. Cit.
479 Oldenburg, R. (1989). The great good place: Café, coffee shops, community centers, beauty parlors, general
stores, bars, hangouts, and how they get you through the day. Paragon House Publishers.
480 Paquelin, D., Dussarps, C., & Pocéan, D. (2016). Attentes et pratiques d’apprent issage des étudiants dans
l’enseignement supérieur français. Laboratoire MICA Université Bordeaux Montaigne, Chaire de Leadership en
pédagogie de l’enseignement supérieur, Université Laval (Québec).
481 MENSR. (2015-a) Op. cit.
482 V. Pugibet, « Pour une nouvelle approche de l’hispanité grâce aux TICE - La formation d’enseignants
d’espagnol langue étrangère Towards a new approach of Hispanic culture thanks to ICT - Beginners training for
Spanish language teachers », Apprentissage des langues et systèmes d’information et de communication, vol. 09,
nᵒ 1, p. 129- 144, avr. 2006.
Comme il en existe pour les bibliothèques universitaires, nous mettons en œuvre une étude de
publics en nous appuyant sur une décomposition typique des publics de ces lieux. Comme le
rappelle Geoffroy Patriarche, « le public et l’usager ne sont pas des objets d’étude
cloisonnés »483, et nous nous permettons ce rapprochement entre le public et l’usager, en
considérant « le public comme formation socio-politique des usagers »484 : « Le public d’un
système d’information, c’est l’ensemble des usagers de ce système »485. Nous pourrions ainsi
afin de mieux estimer l’influence de ce type de dispositif sur l’usage du numérique. L’enjeu
est aussi de mieux qualifier et quantifier ses publics pour leur proposer de nouveaux services.
Nous considèrerons que chaque dispositif est un lieu de rencontre des usagers, qui peuvent
développer les mêmes usages ou des usages différents. Pour nous permettre cette observation,
nous proposons de caractériser les publics de ces « tiers-lieux » au moyen d’une grille
proposée dans le Tableau 24.
Public visé
Usagers du service public membres de l’Université
Formation Formations Professionnelles, Enseignants / Enseignants- BIATSS
Initiale Chercheurs
acteurs socio-économiques
Etudiants
x Licence
x Master x x x
x Doctorat
Tableau 24 : Grille pour un étude des publics pour les « tiers lieux ».


4.3.7 Un exemple d’usage du numérique dans la recherche : les[modifier]

humanités numériques en LSH
En 1949, date d’un voyage aux Etats-Unis, Roberto Busa découvre d’étrange similitude entre
la méthodologie de création des cartes perforées et sa façon d’aborder l’analyse linguistique et
littéraire. Il devient un des précurseurs de l’utilisation de l’informatique pour les Lettres et
sciences Humaines, met en avant plusieurs caractéristiques importantes de l’usage de
l’informatique dans le domaine des humanités. À ce titre, il définit les fondements des
483 Patriarche, G. (2008). Publics et usagers, convergences et articulations, PUBLICS AND USERS:
CONVERGENCES AND ARTICULATIONS. Réseaux , (147), 179-216. Consulté à l’adresse
https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2008-1-page-179.html p179
484 Patriarche, G. (2008). Ibid p216
485 Cacaly, S., Le Coadic, Y. F., Melot, M., Pomart, P.-D., & Sutter, E. (1997). Dictionnaire encyclopédique de
l’information et de la documentation. Réf. p 73
« digital humanities », qui prendront naturellement l’appellation d’humanités numériques en
traversant l’Atlantique, en 2006 : l’expression connaît dès lors un véritable succès.
Nous pouvons citer pour comprendre la relation qu’il imagine entre l’informatique et les
humanités numériques que « l 'utilisation des ordinateurs va donc nous conduire à une
connaissance plus profonde et systématique de l'expression humaine, en principe, il peut nous
aider à être plus humaniste qu'avant.»486. Ce concept, qui, à son début, s’appuie sur une aide
à l’analyse d’une donnée afin d’en produire une information, va se trouver étendu avec
l’arrivée de la digitalisation des sources et les différents projets internationaux, comme
Gutenberg487, Gallica488 ou Google Books489 à la fin du XX° au début du XXI° siècle.
L ‘étape ultime qui bouleverse la recherche dans nos universités, et qui fait profondément
évoluer celle-ci, est l’arrivée de plateforme ouverte : Calenda490, Hypothèse.org491,
Revues.org492ou bien humanités en ligne HAL493 permettent de partager les informations de la
recherche en lettres, langues et sciences humaines.
Il s’agit maintenant d’utiliser les systèmes numériques de traitement d’information pour
passer de la donnée brute à la connaissance de l’information utile à la prise de décision finale,
cette décision pouvant être prise de manière collaborative.
Toute la chaine de traitement de l’information se trouve ainsi touchée par la digitalisation, ce
qui bouleverse la manière de penser la recherche : son mode de publication et de
collaboration, autant que les possibilités de collaboration entre chercheurs.
486 Rouvière, G. (2013). Roberto Busa, « The Annals of Humanities Computing  : the Index Thomisticus », 1980 |
Introduction aux humanités numériques. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://archinfo4 1.hypotheses.org/195
487 Gutenberg. (2013). Free ebooks - Project Gutenberg. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.gutenberg.org/
488 Gallica. (2014). Plus de 2,5 millions de documents à portée de main. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://gallica.bnf.fr/
489 Google. (2014). Google Books. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://books.google.fr/
490 Calenda. (2014). Le calendrier des lettres et sciences humaines et sociales. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://calenda.org/
491 Hypotheses. (2014). Platform for academic blogs in the humanities and social sciences. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://hypotheses.org/
492 Revues.org. (2014). Portail de revues en sciences humaines et sociales. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.revues.org/
493 HAL. (2014). Hypertexte en ligne  : accueil. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://hal.archives-
ouvertes.fr/
4.3.7.1 Les humanités numériques aujourd’hui[modifier]
Il ne s’agit pas de faire un tour complet des humanités numériques aujourd’hui mais de
repérer, dans quelques publications récentes, les modalités de mise en œuvre des humanités
numériques à l’Université pour anticiper les leviers de réussite de développement de ceci.
Structurer
Dans son article « Les digital humanities aujourd’hui : centres, réseaux, pratiques et
enjeux »494, Corinne Welger-Barboza propose de définir, ce qu’elle a constaté dans les centres
de « digital humanities » des universités américaines. Une hyper-compétence nait de « la
coopération entre les chercheurs et les ingénieurs. » a vu le jour, « une hyper-compétence,
valant dans le sens d’hypertexte ». Au niveau de la structure même de ces centres, elle note
que cela change les méthodes de travail de tous car « la cyberinfrastructure est une notion
complexe parce qu’elle implique de travailler de façon concertée aussi bien sur le plan
technologique, au niveau de l’interopérabilité des données, par exemple, que sur la
normalisation des langages de balisage des documents. ». Cette structuration met en exergue
le fait que les humanités numériques et les métadonnées sont liées et, conclut l’auteur, que
« Ceci pour dire que l’on arrive à un moment particulier de méta-structuration du domaine ».
Utiliser
Dans « Faire des humanités numériques »495, Aurélien Berra lors de la lors de la Conférence
ARL PACA, 29 novembre 2011, nous rapporte la position du Chercheur en LSH au fil de
l’histoire de façon illustrée. Ces illustrations démontrent que le Chercheur a toujours été
accompagné par des documents, et que ces documents suivant les périodes utilisent différents
supports, de l’oralité au numérique ordonné en base de données. Il nous dit que la démarche
de considérer le numérique se fait dans une logique de transformer ce qui existe pour
l’améliorer. Concernant la nature des textes, il aime rappeler que « le texte est polymorphe.
C’est un fait ancien, mais aussi une réalité concrète pour nombre de lecteurs, (…). Si je suis
un amoureux des manuscrits, des livres, c’est avant tout le texte qui m’importe. Et s’il faut se
battre pour des supports, ce n’est pas pour eux-mêmes, mais bien pour ce qu’ils permettent, à
494 Welger-Barboza, C. (2012). Les digital humanities aujourd’hui : centres, réseaux, pratiques et enjeux.
OpenEdition Press. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://books.openedition.org/oep/244
495 Berra, A. (2012). Faire des humanités numériques. OpenEdition Press. Consulté le 25 septembre 2017 à
l’adresse http://books.openedition.org/oep/238
savoir une forme de communication, une forme de culture, une forme de réflexion. »496 Et
insiste sur le fait que « ce sont les usages qui font vivre les textes »497.
Développer les projets
Dans « Développer les sciences humaines numériques au Québec »498, Louis-Pascal Rousseau
chemine dans le monde de la recherche en histoire depuis une quinzaine d’années, De ses
années passées à l’Université Laval jusqu’à celles qui l’ont mené à l’Université de
Pennsylvanie ainsi qu’à l’École des hautes études en sciences sociales à Paris, il a acquis une
riche expérience dans les nouvelles pratiques de l’histoire. Il insiste tout au long de son article
sur le fait que ce processus de développement ne peut toucher toutes les personnes concernées
que si l’on fonctionne en mode projet. Il en propose une cartographie, pour commencer dans
son domaine qu’est l’histoire :
  • Le site Digital Humanities Now, tenu par le Center for History and New Media
(CHNM) de la George Mason University.
  • Le site Digital History, a Guide to Gathering, Preserving and Presenting the Past
on the Web, en lien avec un livre publié par ce même organisme.
  • Le site MATRIX, Center for Humane Arts, letters and Social science Online,
basé à la Michigan State University.
  • geoPratic (Observatoire des pratiques géomatiques dans les Sciences historiques),
qui propose un répertoire de projets de recherche basés sur des cartes
informatiques à contenu historique.
  • des blogues à ce sujet en français, tel que celui tenu par Claire Clivaz, assistante-
professeure à l’Université de Lausanne. Par ailleurs, l’Alliance of Digital
Humanities Organizations (ADHO) donne parfois des nouvelles sur des
événements francophones ou bilingues en la matière, notamment ceux tenus par la
Société canadienne des humanités numériques.
Vivre avec son temps
Marin Dacos, fondateur du Centre pour l'édition électronique ouverte (Cléo), nous informe du
classement des portails collaboratifs de publication de l’OpenEdition499, et maintient une
activité intense dans les humanités numériques. Nous retenons particulièrement son idée selon
496 Berra, A. (2012). Ibid
497 Berra, A. (2012). Ibid
498 Scallon-Chouinard, P. (2014). Développer les sciences humaines numériques au Québec | HistoireEngagée.
Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://histoireengagee.ca/developper-les-sciences-humaines-
numeriques-au-quebec/
499 Dacos, M. (2012). Vers des médias numériques en sciences humaines et sociales  : une contribution à
l’épanouissement de la place des sciences humaines et sociales dans les sociétés contemporaines. Tracés, n° HS-
12(3), 205-223. le 25 septembre 2017 à l’adresse http://www.cairn.info.ezproxy.univ-
perp.fr/article.php?ID_ARTICLE=TRAC_HS12_0205
laquelle les humanités numériques sont « une contribution à l'épanouissement de la place des
sciences humaines et sociales dans les sociétés contemporaines »
Dans « Digital Humanities / Humanités numériques »500, Marin Dacos défend aussi l’idée,
que, « Les Humanités numériques, ou Digital humanities, tout le monde en fait sans le savoir
vraiment. »

4.4 Une forme de catégorisation des dispositifs[modifier]

influençant le numérique universitaire
Pour préparer l’observation des études de cas, nous avons proposé dans ce chapitre une
catégorisation des dispositifs développant les usages du numérique à l’Université, en nous
intéressant à la nature de la gouvernance du numérique. Nous reconnaissons trois types de
dispositifs : ceux qui sont exogènes au système de l’ESR, ceux qui sont endogènes à ce même
système, mais dont la gouvernance du numérique est externe aux établissements et enfin, ceux
qui sont à l’échelle d’une université.
Pour la première catégorie, nous reconnaissons au moins trois dispositifs, mais ce ne sont
sûrement pas les seuls, qui ont un effet sur le système universitaire. Le rapport sur la
« Transformation numérique et vie au travail » de Bruno Mettling, tout d’abord, nous invite à
mieux considérer les impacts du numérique dans nos organisations, dans les domaines comme
la formation, la recherche ou l’administration interne des établissements publics. La
préconisation concerne aussi la modalité de gouvernance qu’il souhaite plus participative. Le
Conseil national du numérique (CNNum) est le deuxième dispositif exogène au système
universitaire que nous considérons comme ayant un effet sur le numérique universitaire. En
effet, il joue un rôle important dans le domaine du conseil à la stratégie, en ayant fait émerger
par la communauté universitaire un « référentiel pour la gouvernance numérique », mais aussi
dans le domaine de la formation, le plan « Jules Ferry 3.0 ». Dernier dispositif de cette
première catégorie, les nouvelles lois sur le numérique, la loi « république numérique » et la
loi « déconnexion au numérique ». L’une comme l’autre instituent des nouvelles directives
qui obligent les établissements à se réorganiser en interne. Nous retenons les modalités de
collecte de la loi « république numérique » qui, en s’appuyant sur des plateformes pour
500 Dacos, M. (2014). Dossier - Digital Humanities / Humanités numériques [Collection]. Consulté le 25
septembre 2017, à l’adresse http://books.openedition.org/392
recueillir les avis des usagers, permettent d’envisager des remontées d’informations
collectives nouvelles.
Pour la seconde catégorie, les dispositifs endogènes au système universitaire mais externes à
l’université, nous reconnaissons, pour deux d’entre eux, un aménagement de dispositifs
existant avant la loi ESR actuelle, le troisième étant le projet de l’État pour le numérique
universitaire depuis cette loi relative à l’ESR. Le premier est un service interne au Ministère
de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, la Mission
numérique de l’enseignement supérieur (MIPNES) de la direction générale de l’enseignement
supérieur et de l’insertion professionnelle (DGESIP). À travers le rapport Claude Bertrand,
qui affirme que le numérique est un levier de la pédagogie, ou bien la structuration en
universités Numériques en Région ou en réseau des universités thématiques, ce service du
Ministère montre bien son action dans le domaine du numérique universitaire. Le deuxième
dispositif de cette catégorie est la Conférence des Présidents d’Université, qui a su adapter ses
missions à la mesure de l’enjeu du numérique universitaire en mettant en place une
commission spécifique appuyée par un réseau d’acteurs, les référents numériques des
universités. Dernier dispositif de cette catégorie, le plan France Université Numérique, 18
actions pour transformer le numérique du système universitaire, dont certaines d’entre elles
ont permis l’installation de la plateforme FUN-MOOC.
Dernière catégorie de notre proposition, les dispositifs à l’échelle de l’université d’un point de
vue de la gourvernance du numérique. Ils sont pour nous endogènes à la fois dans le système
universitaire et dans l’université concernée. Nous retrouvons la gouvernance du numérique,
les schémas directeurs ou stratégiques, comme outils stratégiques des universités, des
services numériques innovants, de la formation au numérique et par le numérique , des « tiers-
lieux », et des incursions dans la recherche, avec les humanités numériques.
L’expérimentation proposée dans le chapitre suivant tiendra compte de cette proposition de
catégorisation.
5 Expérimentation
« The only way to understand new culture and behavior is to go native.
Going native refers to the process of observing, learning, and deepening the
involvement of an anthropologist with their hosts and their hosts’ cultures
through long-term fieldwork and participation » 501
«La seule façon de comprendre la nouvelle culture et ses comportements est
de devenir natif. Devenir natif se réfère au processus d'observation,
d'apprentissage et d'approfondissement de l'implication d'un anthropologue
avec les acteurs et les cultures des acteurs au travers de l’observation de
terrain à long terme, y compris en participant »
(Solis, 2011)
Nous reviendrons dans cette partie sur notre posture épistémologique et nos modalités
d’observation basées sur plusieurs études de cas permettant de tester nos hypothèses.
Les terrains retenus sont variés et représentatifs de la diversité des situations et des membres
qui constituent la communauté universitaire.
501 Solis, B. (2011). The end of business as usual: Rewire the way you work to succeed in the consumer
revolution. John Wiley & Sons.


5.1 Approche empirique du modèle théorique proposé[modifier]

5.1.1 Épistémologie et méthodologie d’observation[modifier]

Notre posture épistémologique est centrée sur les relations entre les acteurs du système
universitaire français et la signification des échanges. Elle s’appuie sur un modèle inductif et
interprétatif qui se construit à partir des observations de terrains dans lequel nous cherchons
des significations. « Fondée sur le projet résultant de l’interaction intentionnelle d’un sujet
sur un objet » 502, notre épistémologie est constructiviste, une « conception de la connaissance
comprise comme un processus actif avant de l’être comme un résultat fini »503 pour reprendre
les propos de Piaget. L’idée est bien ici « de participer à construire la réalité perçue des
acteurs »
Afin de mieux appréhender notre objet de recherche, il nous faut décoder la réalité perçue par
les acteurs. Nous n’avons pas de mal à entrer en contact avec les différents membres et
usagers de l’Université (étudiants, enseignants, administratifs et personnels techniques). Il est
plus délicat d’observer les acteurs en charge de la gouvernance des établissements de l’ESR.
Il est plus délicat d’observer les acteurs en charge de la gouvernance des établissements de
l’ESR. Bien que de taille réduite, moins de 100 individus, ce groupe social ne se prête pas à
une observation aisée, car il est de type fermé, et soumis à une certaine confidentialité
stratégique. Nous mettons à profit notre propre statut d’acteur au sein de cette communauté
pour adopter une position d’« observation participante »505.
Cette observation participante offre des avantages dans la collecte des données, elle permet
« d’être à la fois partie prenante du jeu social et observateur distancié »506 mais doit être
explicite dans notre approche afin de garder le recul nécessaire du chercheur. Cette méthode a
ses limites dues à la difficulté voire l’incompatibilité d’être simultanément participant et
observateur.
502 Piaget. (1970). Psychologie et épistémologie Denoel.
503 Piaget. (1970). Ibid. p75
504 Bertacchini, Y. (2009). Petit Guide à l’usage de l’Apprenti-Chercheur en Sciences Humaines & Sociales.
Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse https://halshs.archives-ouvertes.fr/sic_00432676/
505 Platt, J. (1983). The development of the « participant observation » method in sociology: Origin myth and
history. Journal of the History of the Behavioral Sciences, 19(4), 379-393.
506 Bourdieu, P. (1978). Sur l’objectivation participante. Réponse à quelques objections. Actes de la recherche en
sciences sociales, 23(1), 67-69.
Le sociologue Soulé507 nous invite à nous tourner vers une participation observante, plus
sélective, qu’il trouve judicieuse sur plusieurs points, notamment dans le cadre d’une
conversion de l’expérience en connaissances. Notre recherche s’appuie alors sur une
démarche méthodologique qui, dans la mesure où nous cherchons à donner de la valeur à
notre expérience de praticien, pour élaborer de nouveaux outils d’analyse, peut être qualifiée
de participation observante ouverte et déclarée. La part de participation sera explicite dans
cette méthodologie de recherche, nous, (chercheur) serons « participant et observateur à
temps partiel », c’est-à-dire « participant en public et observateur en privé » toujours selon
Soulé. Cette prudence méthodologique, s’appuyant sur les travaux de E.C. Hughes508, est
selon Chapoulie « le prix à payer pour rester sociologue dans l’aventure de la participation
».
Nous pouvons considérer que notre démarche bénéficie ainsi des « attributs et vertus de la
méthode anthropologique » loués par Godelier510 et nous permet l’analyse de cas particulier
en immersion au sein d’un petit groupe en espérant faire apparaître une logique sociale
d’ensemble.


5.1.2 Principe de superposition d’études de cas[modifier]

Nous partageons l’idée énoncée par Leplat qui nous rappelle que «toute technique appliquée à
une situation réelle porte sur des mécanismes complexes et multiples, à l’interférence de
plusieurs domaines de connaissances »511. Etant donné, d’un point de vue systémique, la
complexité de l’objet de recherche étudié, nous mettons en œuvre une méthodologie qui
s’appuie sur une succession d’études de cas. Chacune d’entre elle devient alors une unité
d’analyse permettant de « collecter un ensemble de données empiriques »512 dans un
507 Soulé, B. (2007). Observation participante ou participation observante? Usages et justifications de la notion
de participation observante en sciences sociales. Recherches qualitatives, 27(1), 127– 140. Consulté le 25
septembre 2017 à l’adresse
https://www.researchgate.net/profile/Bastien_Soule/publication/237661622_Observation_participante_ou_partic
ipation_observante_Usages_et_justifications_de_la_notion_de_participation_observante_en_sciences_sociales/li
nks/0a85e52ed0d592fb52000000.pdf
508 Hughes, E. C. (1971). Going concerns: The study of American institutions. The sociological eye, 52-64.
509 Chapoulie, J.-M. (1984). Everett C. Hughes et le développement du travail de terrain en sociologie. Revue
française de sociologie , p600.
510 Godelier, M. (2009). Au fondement des sociétés humaines: ce que nous apprend l’anthropologie. Albin
Michel.
511 Leplat, J. (2002). De l’étude de cas à l’analyse de l’activité. Perspectives interdisciplinaires sur le travail et la
santé, p1-33.
512 Bichindaritz, I. (1995). Incremental concept learning and case-based reasoning: For a co-operative approach.
In UK Workshop on Case-Based Reasoning (p. 91-106). Springer.
« environnement situé »513 et cela indépendamment de la discipline académique d’approche.
Ce dernier point pour nous est crucial dans le choix de cette méthode, les sciences de
l'information et de la communication étant par nature interdisciplinaire.
D’un point de vue épistémologie, il s’agit, pour reprendre Descartes, de « diviser chacune des
difficultés que j'examinerais, en autant de parcelles qu'il se pourrait, et qu'il serait requis
pour les mieux résoudre »514. Une fois cette division faite, nous réalisons l’analyse de chacun
des cas pour produire ensuite la synthèse globale. Ce principe de superposition nous permet
de canaliser notre attention sur un type d’interaction dans le système étudié, au cas par cas.
Le cas est ainsi volontairement choisi par le chercheur, à la fois en fonction de sa
connaissance globale de l’objet et de la singularité qu’il représente. Il permet de « rapporter
un événement à son contexte et à le considérer sous cet aspect pour voir comment il s’y
manifeste et s’y développe. En d’autres mots, il s’agit, de saisir comment un contexte donne
acte à l’événement que l’on veut aborder »515. Le chercheur peut ainsi se concentrer sur
l’observation de son terrain qui devient pour lui un sous-système intégré en fonctionnement.
Pour réussir ce travail de recherche s’appuyant sur une étude de cas, Hamel recommande
l’exigence qui alterne différentes techniques comme l’observation, les entretiens semi-
directifs ou les techniques d’analyse de contenu : « La variété des méthodes utilisées s’inscrit
dans le but de croiser les angles d’étude ou d’analyse »516.
Nous suivrons ainsi le processus de la figure suivante afin de faire bénéficier à notre
recherche toute la force de cette méthodologie tout en prenant garde de ne pas généraliser sans
précaution les faits trouvés.
513 Leplat, J. (2002). op. cit. p3
514 Descartes, R. (1637). Discours de la méthode .
515 Hamel, J. (1989). Pour la méthode de cas. Considérations méthodologiques et perspectives générales.
Anthropologie et sociétés , 13(3), 59-72.
516 Hamel, J. (1989). Ibid. p 65.
Figure 57 : Grandes étapes d’une étude de cas. (Leplat, 2002).
Il s’agit de d’observer plusieurs mises en place de dispositifs abordés dans le paragraphe
précédent, chacun d’eux étant emblématique d’une interaction entre acteurs dans le système
étudié.
Nous construisons les analyses à partir de plusieurs situations complémentaires pour vérifier
le corps d’hypothèses précité, non pas dans un souci de comparaison de terrains, mais bien de
vérification partielle d’une ou plusieurs hypothèses au sein des différents terrains
d’observation. Geneviève Vidal suggère la posture de recherche critique qui « permet de
considérer l’ambivalence des usages, leurs instabilité et permanence, dans le cadre des
stratégies industrielles de l’économie du numérique»517.
Nous estimons que notre approche systémique nous autorise cette démarche, et nous
choisissons de recourir à la représentation de Saint-Amant, abordée précédemment.
Les études de cas nécessitent un investissement important pour le chercheur, entre le choix, la
prise de contact avec les acteurs, l’immersion, l’exploitation des données et la généralisation,
517 Vidal, G. (2013). op. cit. p125
nous avons donc borné deux paramètres : le temps et le nombre de terrains. Pour le volet
temporel, l ’ensemble des études de cas a été réalisée durant les années 2012-2017, durée
correspondant au mandat présidentiel de la République : nous sommes ainsi dans un climat
politique ministériel relativement stable. Pour le second volet, notre activité professionnelle
en parallèle de ce travail de recherche n’offrant pas une disponibilité entière, nous avons fait
le choix de réduire à 5 terrains d’analyse (Figure suivante).
Observation 3
Observation 2
Observation 1
Observation 4
Observation 5
Figure 58 : Positionnement des observations terrain sur la représentation de Saint-Amant518.
C’est ainsi que lors de l’observation 1, nous analyserons le processus de développement des
usages chez les étudiants entre leur entrée et leur sortie de l’Université. Cette observation
s’appuie sur une étude de l’impact d’une généralisation de certification de compétences
numériques, une étude quantitative et qualitative réalisée dans une Université reconnue
nationalement comme instigatrice de cette démarche de généralisation.
518 St-Amant, G. (2015). op. cit.
Au travers de l’observation 2, nous portons notre regard sur l’interaction entre la demande de
l’environnement extérieur de l’Université, l’équipe présidentielle de l’Université et la mise en
œuvre et le processus de management de l’Université. Pour cela, nous avons concentré notre
attention sur le décisionnaire, au moyen d’entretiens menés auprès des vice-présidents en
charge du numérique de trois universités françaises pour connaître leur intention de mise en
œuvre, et sur l’analyse de actions visibles dans le domaine du numérique de ces mêmes trois
universités. La focale d’analyse est le management du changement de cette transformation
numérique de l’Université.
L’observation 3 a suivi l’opportunité de création d’une association professionnelle des vice-
présidents en charge du numérique des universités. Comme nous l’avons déjà dit, cette
fonction est nouvellement imposée pour les universités depuis 2013, sans en décrire les
contours fonctionnels. L’analyse réalisée concerne les feuilles de route des différents
personnels en poste, afin d’en faire apparaître les points communs et les différences.
L’observation 4 concerne, comme l’observation 1, l’analyse d’un processus de
développement des usages du numérique au niveau des employés de l’université. Pour cela,
nous avons observé le développement des usages d’un réseau socionumérique, comment il
était saisi par cette communauté et notamment dans quel but. L’enquête quantitative concerne
les usagers de ce réseau socionumérique et tente d’en cartographier les usages, entre pairs,
avec les étudiants ou avec des partenaires de l’Université.
Enfin l’observation 5, la plus récente chronologiquement, propose de cibler notre regard sur
les interactions entre le management et la transformation. Pour cela, nous avons réalisé une
enquête quantitative puis des entretiens semi-directifs avec certains des répondants, au sujet
de leur mode de connexion et de déconnexion, tout cela en tenant compte de l’application
future de la nouvelle loi travail sur la déconnexion aux TIC.


5.1.3 Exploitation des études de cas[modifier]

L’exploitation de ces terrains nous a permis d’alimenter des productions académiques lors de
colloques ou séminaires mais aussi de construire notre modèle empirique tout en tentant de
vérifier certaines hypothèses et sous-hypothèses au travers de ces différents terrains.
Pour cela, nous avons réalisé un découpage méthodologique permettant de recouvrir le champ
des hypothèses énoncées en début de cette recherche. Dans un souci de lisibilité de cette
partie de la recherche, nous codons les hypothèses et sous hypothèses :
  • H 11 : approche organisationnelle descendante et ascendante
  • H12 : évolution vers une nouvelle gouvernance
  • H2 : des dispositifs différenciés
  • H31 : meilleur positionnement d’une université en termes de concurrence
  • H32 : amélioration de l’image de marque d’une université
Nos terrains apparaissent en regard des hypothèses visées lorsqu’une des cellules du tableau
est cochée. Cette décomposition est représentée dans le tableau ci-dessous.
Hypothèses Hypothèse 1 : vers une Hypothèse 2 : Hypothèse 3 : vers un meilleur
nouvelle gouvernance des dispositifs positionnement d’une
différenciés Université au sein de l’ESR
pour
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d’observations u s u u u i u r
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Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32
Observation n X X
Tableau 25 : L’observation N teste les hypothèses H11 et H31.
L’observation 1 se situe au sein d’une université et dans le cadre du processus de
transformation du développement des usages. Elle s’appuie sur la généralisation des
certifications. Nous estimons que ce terrain est en mesure de nous apporter des pistes de
réponses aux hypothèses H12, H2 et H32. En effet pour H12, en augmentant le
développement des usages des étudiants et des autres membres de la communauté, les
universités permettent à certains d’entre eux de mieux appréhender la gouvernance du
numérique de l’établissement. Pour vérifier H2, nous trouvons intéressant de mesurer l’effet
d’un même dispositif sur des publics différents et enfin nous mesurerons les conséquences en
termes de visibilité dans l’ESR de cette université.
Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32
Observation 1 : Une enquête
quantitative et qualitative
auprès de 389 apprenants sur la
X X X
mise en place d’une
certification C2i1 dans une
Université
Tableau 26 : L’observation 1 teste les hypothèses H12, H2 et H32.
L’observation 2 se situe entre l’environnement extérieur, la Présidence et l’équipe
managériale des universités. Nous estimons qu’elle teste une partie de la nouvelle
gouvernance mis en place en s’intéressant à la fois aux moyens et aux méthodes employés
(H11, H12), et montre les interactions entre les différents acteurs. Cette partie illustre aussi
comment certaines universités se servent de cette stratégie numérique pour se positionner
dans le système universitaire.
Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32
Observation 2 : Focus groupe
auprès d’un échantillon de cinq
vice-présidents « numérique »
X X X
dans cinq universités
différentes : le management du
changement.
Tableau 27 : L’observation 2 teste les hypothèses H11, H12 et H31.
L’observation 3 est focalisée sur les vice-présidents numériques, personnages représentant la
présidence des universités pour le numérique de ces établissements. Nous souhaitons analyser
les interactions entre eux ou elles, et leurs relations avec l’environnement extérieur aux
universités. Il s’agit de tester une des parties de la nouvelle gouvernance (H12), d’en mesurer
les communs et les écarts entre université, et de tester si la stratégie amène à une meilleure
visibilité de l’université qu’ils ou elles représentent.
Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32
Observation 3 : Émergence
d’une communauté des
X X
référents numériques des
établissements de l’ESR
Tableau 28 : L’observation 3 teste les hypothèses H12 et H32.
L’observation 4, qui englobe tout le système, concerne un dispositif singulier, un réseau
socionumérique ; comment les membres de l’Université s’en emparent (ce qui contribue à
tester H2), puis comment les gouvernances des universités peuvent en tenir compte dans leur
nouveau mode de fonctionnement (H11).
Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32
Observation 4 : Une enquête
quantitative sur un dispositif
d’usage du
X X X
numérique spécifique :
« l’usage de Twitter dans
l’ESR »
Tableau 29 : L’observation 4 teste les hypothèses H11 et H2.
Par ailleurs, les propos créés par chaque acteur sont autant de messages dont le contenu peut
concerner l’image de marque de leur université (H32).
Enfin l’observation 5 fait apparaitre le processus du management du changement avec le
processus de transformation qu’est le développement des usages du numérique. En nous
focalisant sur les usages des acteurs sur la situation de connexion/déconnexion, nous estimons
pouvoir tester les hypothèses H12, chaque acteur pouvant participer davantage à la nouvelle
gouvernance. Par ailleurs, en développant les usages au travers de différents dispositifs (H2),
nous pensons participer à l’amélioration de l’image de l’Université (H32).
Codification des hypothèses H11 H12 H2 H31 H32
Observation 5 : Une enquête
quantitative sur les usages du
X X X
numérique des managers de
l’ESR
Tableau 30 : L’observation 5 teste les hypothèses H12, H2 et H32.


5.2 Observation 1 : Généralisation d’une certification[modifier]

pour les usagers et les membres d’une université

5.2.1 Choix du cas[modifier]

Ce cas est très emblématique de notre posture initiale de chercheur. Pour cette raison, nous le
traitons en premier lieu. En effet, nous ne cachons pas que notre démarche de recherche a
débuté en amont de notre statut de doctorant au sein du Laboratoire MICA de l’Université de
Bordeaux Montaigne. Notre approche s’appuie sur notre expérience professionnelle, et sur
l’analyse introspective de notre processus de création d’organisation mise en œuvre dans
notre propre université, l’Université de Perpignan. Cette mise en place a aidé à la réflexion et
parfois même a servi de modèle pour d’autres universités françaises. Nous nous sommes
pendant ces années de pilotage de la stratégie numérique souvent rappeler de la citation de
Pierre Soulages, au sujet justement de son processus de création, « C’est ce que je fais qui
m’apprend ce que je cherche. »519. Présenter ce terrain, c’est aussi démontrer toute notre
capacité construire notre observation participante, de 2012 à 2016, puis avec une prise de
recul notre observation sans participation depuis juin 2016.
En ce qui concerne notre terrain, il s’agit d’une université pluridisciplinaire, environ 9000
étudiants et 910 salariés, qui dans le cadre de son projet d’établissement met en œuvre depuis
2007 une stratégie de développement des usages du numérique pour tous ses usagers et
membres : enseignants, enseignants-chercheurs, personnels des bibliothèques et
administratifs. Cette démarche n’est pas singulière à cette université, mais celle-ci est
reconnue au sein de l’ESR en tant qu’établissement pilote pour France Université Numérique,
raison pour laquelle nous la prenons en exemple. L’observation menée se situe entre janvier
2014 et juin 2014, et a fait l’objet d’une communication520 dans le cadre du réseau EUTIC, un
réseau de recherche européen et pluridisciplinaire sur les enjeux et usages des TIC.


5.2.2 Finalité[modifier]

La finalité de ce terrain est multiple. Tout d’abord, il nous permet d’observer les usages du
numérique attendus dans le cadre d’une formation initiale, de recueillir ce que font les
519 Demartini, D. (2012). Entretien avec Pierre Soulages. Consulté 3 octobre 2017, à l’adresse
https://dfxdemartini.wordpress.com/entretiens-avec-des-artistes/entretien-avec-pierre-soulages/
520 Mocquet, B. (2014). op. cit.
étudiants, mais aussi les membres de la communauté universitaire. C’est aussi l’occasion de
constater les effets de la mise en place d’un dispositif pensé dans le cadre du pilotage
stratégique de l’établissement, et de nous projeter sur l’impact du processus de développement
des usages appliqués sur les étudiants entre leur entrée et leur sortie de l’Université.
Figure 59 : Positionnement de cette observation dans le schéma global des études de cas.
C’est aussi bien l’organisation qui est mise à l’épreuve dans cette étude de cas que le
processus de transformation des usages du numérique.
La question centrale pour cette observation pourrait-être « une stratégie de généralisation
volontariste via un dispositif C2i1 contribue-t-il au développement des usages du numérique
des membres et étudiants d’une université ? »

5.2.3 Phase de recueil de données[modifier]

La phase de recueil concerne tout d’abord la stratégie numérique de cette université, puis
l’organisation choisie, les dispositifs TIC et lieu créés pour incarner le numérique,
« matérialisé le virtuel » pour reprendre l’expression que nous donnions lors de la
présentation de ce projet dans nos conseils.


5.2.3.1 Recueil de la stratégie du numérique[modifier]
Mon implication directe au sein de cette université m’a permis de collecter tous les éléments
stratégiques de cette Université au moyen d’entretien non formel, mais toujours orientés
auprès des acteurs de cette stratégie : président, directeur général des services, directeur du
système d’information… mais aussi en analysant ma posture de vice-président en charge du
numérique.
La situation dans laquelle nous avons pris nos fonctions de vice-président en charge du
numérique (VP numérique) entre 2012 et 2016 est la suivante. Le schéma directeur
informatique et des systèmes d’information, rédigé en 2005, il était centré sur
l’organisationnel, la gouvernance du système d’information. Relayé par un rapport d’IGAEN,
il a permis de mettre en place une séparation du stratégique de l’opérationnel. Depuis 2012,
sous l’impulsion du nouveau Président, l’établissement s’est doté, avant l’obligation de la loi,
d’un VP numérique, qui a pour mission de définir cette stratégie avec le président et d’en
garantir la mise en œuvre avec les services idoines. Cette université n’a pas rédigé un schéma
directeur du numérique (SDN) comme c’est le cas pour d’autres. Cette rédaction n’a pu se
faire pour des raisons essentiellement budgétaires, et en raison d’une stratégie de prudence
liée au passage aux RCE. « Il n’était donc pas possible de se faire accompagner pour réaliser
cela », le DGS nous parle alors de l’accompagnement réalisé en collaboration avec la Caisse
des dépôts et Consignation. En questionnant notre posture de VP numérique concernant le
SDN, nous faisons part de l’élaboration « des éléments de rédaction du schéma directeur du
numérique, constituant son schéma directeur stratégique du numérique », dont voici les
éléments constituants.
Le projet est « de développer les communautés virtuelles comme levier d’intégration
professionnelle », « d’aider au pilotage de l'établissement dans une logique d’efficience »,
« d’accompagner tous les acteurs à l'usage du numérique dans leurs métiers », « de s'insérer
dans une stratégie du numérique régionale et transfrontalière », « tout en assurant
l’interopérabilité et la sécurité des systèmes d’information ». Ce schéma stratégique du
numérique se décompose en portefeuille de dispositifs dont la mise en œuvre et les bénéfices
s’entendent à l’échelle de l'établissement. Pour nous VP numérique, nous avons construit en
« adéquation avec la stratégie de la Présidence, réaliste, adapté à la capacité́ de
l’établissement, partagé par tous les acteurs », et il apporte « de la valeur à cette université et
à ses usagers » reprendra le Président.
Les éléments sont organisés au sein d’un document validé par les conseils centraux, en
plusieurs projets distincts, selon le formalisme suivant :
Nom du dispositif : à compléter
Appurtenance à l’AXE 1 AXE 2 AXE 3 AXE 4
(case coloriée)
Porteur(s) du projet : à compléter
Service(s) impacté(s) : à compléter
Public visé : à compléter
Figure 60 : Description d’un dispositif au sein du SSN de cette université.
Chaque dispositif est organisé en projet, agissant sur un ou plusieurs axes stratégiques. Un
responsable pour la communauté est nommé, comme porteur de projet. Nous comprenons
qu’il s’agit de celui ou celle qui rend compte de l’avancée du projet à la communauté
universitaire locale. Les services impliqués sont ceux sur lequel s’appuie le chef de projet, en
termes de ressources humaines, la communication pour les réseaux socionumériques par
exemple. Enfin, le public visé est inscrit explicitement dans le descriptif du projet.
La gouvernance du numérique de cet établissement est basée sur une forte impulsion
stratégique (budget identifié, dispositif innovant, porte-parole identifié) relayé par des
feedbacks trimestriels, un « comité d’organisation du système d’information » COSI, un
« conseil consultatif pour nos conseils centraux » nous confiera le Président. Par exemple,
nous relevons que pour la création des dispositifs, le document descriptif cité plus haut a été
proposé au COSI qui l’a complété avant passage en CA.
La composition de ce COSI est paritaire, validée en CA : Président, Vice-Président CA, VP
Numérique, DGS, Directeur du Service Financier, Directeur du SCD, Directeur des Systèmes
d’Information, Vice-Président Etudiants, Directeur du CRI, Directeur Direction du
Patrimoine, Responsable Administratif, Responsable Pôle Assistance CRI, Responsable de la
sécurité des S.I., Responsable Pôle Applications CRI, Responsable service Communication,
Contrôle de gestion, Elu Etudiant CEVU, Responsable administrative IUT, Directeurs
d’UFR, Président du Bureau des Etudiants.
Cette université ne dispose pas d’observatoire des usages mais réalise des statistiques sur les
usages des outils TIC mis en place
5.2.3.2 Les rôles des interlocuteurs[modifier]
Nous, en tant que VP Numérique, avons construit l’organisation de la gouvernance du
numérique de cette université en nous appuyant sur le « Guide Méthodologique de
l’Université Numérique »521. Nous avons présenté cela en Conseil d’Administration, en nous
appuyant sur des documents rédigés présentant le point de vue opérationnel de cette
gouvernance. Elle repose sur « une séparation MOA (maîtrise d’ouvrage – celui qui décide) /
MOE (maîtrise d’œuvre – celui qui réalise), de façon à accroître la cohérence et la capacité
de réponse aux besoins des utilisateurs des différents projets numériques mis en œuvre ». La
DSI est positionnée en « assistance à la MOA ».
Le VP numérique
Nous avons extrait les éléments constituants la feuille de route de cet enseignant. Il a un rôle
de conseiller auprès du Président en matière de numérique. Il est chargé de coordonner
l'élaboration et le suivi de la politique. Il contribue à la réalisation des objectifs fixés par la
présidence.
Il est le porte-parole de l’Université dans le domaine du numérique.
Il a pour missions :
  • D’analyser les enjeux auxquels doit faire face l’université, au regard des évolutions
internes et externes, de ces orientations, des attentes de ces utilisateurs et de ces
usagers en matière numérique et du bilan de l’exercice précédent.
  • De tracer les axes stratégiques offrant une réponse efficiente et pragmatique aux
enjeux identifiés tout en garantissant une continuité avec l’exercice précédent afin de
développer une vision prospective de ses services, usages et ressources numériques.
  • De définir les orientations et les décliner en programmes SI-TICe, supports des projets
permettant de disposer d’une maille de pilotage opérationnel et d’arbitrage tenant
compte des priorités et des ressources disponibles.
  • De participer à la maitrise d’ouvrage de grands projets numériques de l’université et
contribuer ainsi à la réflexion visant à doter l’établissement des moyens opérationnels
pour développer sa politique dans ce domaine au sein des missions formation,
recherche et insertion professionnelle.
521 Caisse des dépots et consignations. (2009). op. cit.
  • De proposer des mesures permettant de mettre en œuvre les axes inscrits dans le
contrat d’établissement dans le domaine du numérique pour l’enseignement, la
recherche, l’administration et la gestion.
  • D’animer le nouveau Comité d’Organisation du Système d’information dont il
proposera la composition au Président.
  • De proposer l’élaboration d’indicateurs statistiques, en conformité avec les attendus du
Ministère, en relation avec le contrôle de gestion de l’université permettant d’évaluer
la politique de l’établissement dans ce domaine.
  • De coordonner les actions de certifications numériques, les C2i
  • De participer aux actions du numérique avec les établissements d’enseignement
supérieur du PRES/COMUE.
  • D’initier et d’animer au sein de l’Université des actions conduites dans l’esprit des
projets interuniversitaires, Université Numérique Thématique notamment.
  • De suivre et de rendre compte de son action (objectifs, mise en œuvre et résultats) au
Président de l’université et l’informer de toutes difficultés qu’il pourrait rencontrer
dans l’exercice de ses fonctions. Dans ce cadre, il remettra au Président de l’université
un rapport annuel d’activités.
  • D’assurer l’équité d’accès au service à l’étudiant sur tous les sites de l’université.
Pour réaliser ses missions :
Il est assisté par la Direction des Services d’Information, et travaillera en collaboration avec le
Service du CRIUP. Il associe les acteurs TICe de l’Université aux réflexions sur les projets à
venir.
Il est la « personne ressource » et le contact privilégié pour toute information académique ou
ministérielle intéressant les équipes pédagogiques de l’établissement. Il apporte sa
contribution, en relation avec les responsables TIC académiques, au pilotage des TICE dans
l’établissement.
Le Directeur des systèmes d'information (DSI)
Il est chargé de conduire la mise en œuvre de la politique de l’Université des systèmes
d’information, des technologies de l’information et de la communication définie par le
Président et le Conseil d’Administration, via le Conseil d’orientation des systèmes
d’information (COSI) que préside le VP Numérique.
A ce titre, il conduit le processus d’élaboration du schéma directeur en cohérence avec les
exigences du pilotage de son université.
Il est rattaché à la Direction générale des services, il assiste le Vice-président Numérique dans
les prises de décisions en apportant sa connaissance des dossiers antérieurs, des directives
ministérielles et des orientations des autres universités.
Il travaille en consultation avec le Directeur du Centre de Ressources Informatiques (DCRI)
pour la maitrise d’œuvre, et pour le volet sécurité et informatique et libertés, avec le
Responsable de la Sécurité des Systèmes d’Information (RSSI).
Les missions de la DSI se déclinent selon la rédaction du schéma directeur du SI, la
cohérence, l'interopérabilité et la sécurité informatique du Système d'Information, le suivi et la
mise en œuvre de la politique du numérique, l'accompagnement du changement, l'audio-visuel
et les TICE, la téléphonie, l'informatique et les libertés et la veille en matière de Système
d'Information.
Le Centre de Ressources en Informatique (CRI)
Le CRI est rattaché au Directeur Général des Services. Composé en 2014 de 16
informaticiens, 2 secrétaires et un directeur (DCRI), le CRI est structuré en 3 pôles d’activités
le pôle Système & Réseau, le pôle Assistance aux utilisateurs et Gestion du parc micro-
informatique et le pôle Développement & Informatique de gestion.
Il a pour mission principale de définir, d’accompagner et de mettre en œuvre les moyens
informatiques nécessaires aux activités d’enseignement et de recherche de l’Université. Il
participe à l’élaboration de la stratégie numérique de l’établissement portée par le COSI et le
Vice-Président Numérique.
A ce titre, il est en charge de :
  • Garantir le bon fonctionnement et l'évolution des infrastructures et équipements
informatiques.
  • Assurer l'assistance aux utilisateurs et la gestion du parc informatique.
  • Assurer le déploiement, l’administration et l'évolution des applications informatiques.
  • Assurer l’accompagnement dans la mise en œuvre de projets informatiques (étude,
conception, développement, acquisition, etc.)
  • Assurer une veille technologique dans un secteur en constante évolution et gérer
l'impact de l'introduction de nouvelles technologies dans l'ensemble de l'architecture
informatique.
  • Garantir la sécurité informatique des infrastructures, équipements et applications
informatiques de l’établissement.
  • Exercer auprès des utilisateurs une activité de conseil, d'assistance et d'information
pour l’acquisition de matériels informatiques dans le cadre de la centrale d’achat de
l’établissement.
  • Assurer le relais d’information avec la cellule informatique du ministère (Groupe
Logiciel) et représenter l’établissement dans le cadre de ses missions informatiques
auprès de partenaires nationaux (RENATER, CSIESR, AMUE, Cocktail, etc.).


5.2.3.3 Recueil du dispositif « Certification C2i pour tous »[modifier]
La certification informatique et internet (C2i) est un élément important de la stratégie de la
Présidence, qui a institué dans le cadre du plan licence, depuis 2008/2009, une formation
systématique des étudiants de Licence au C2i1. Dans cette optique, cette impulsion
stratégique se voit être prolongée, naturellement, sur le même flux d’étudiants en master,
avec la mise en place de certifications professionnelles : les C2i2. Après une expérimentation
en C2i2MEAD en 2009/2010, le projet s’étend dorénavant au C2i2MD, C2i2MI et au C2i2E.
Cette certification est aussi proposée gratuitement aux membres de l’université, le C2i1 pour
tous les personnels, le C2i2E pour les enseignants et enseignants/chercheurs.
Nous relevons dans le schéma stratégique du numérique, que ce dispositif intitulé « C2i pour
tous » est la conséquence de l’axe 3 (Accompagner tous les acteurs à l'usage du numérique
dans leurs métiers) de cette Université, le porteur de projet est le vice-président, le service le
plus impacté est un lieu reconnaissable sur le campus, géographiquement, associé à un
bâtiment.
Lors des entretiens, nous avons souhaité savoir comment le dispositif « C2i pour Tous » avait
été installé. Il apparaît que la proposition émane de la présidence, la mise en œuvre via une
équipe enseignante pilotée par le Vice-Président en charge du numérique, et une proposition
au COSI, qui a pu réajuster lors de débat en présentiel. Le dispositif pour le C2i1 a été validé
en CEVU, il prend la forme d’une UE en L2, appelé « préparation au C2i1 », chaque étudiant
se voyant offrir la possibilité de se faire certifier. Pour les personnels, c’est le COSI, qui a
permis aux employés de passer cette certification dans le cadre du plan de formation continue.


5.2.3.4 Un lieu de pratique et d’accompagnement : création d’un service commun[modifier]
de développement des usages
Un service commun, que nous avons conçu avec l’équipe présidentielle, comme un lieu de
pratique et d’accompagnement, qui incarne cette stratégie. Il s’agit de pl@tinium, une
plateforme d’innovation pour une université numérisée522. Elle visait à asseoir une double
transition énergétique et numérique pour le patrimoine et la gestion durable du campus
bénéficiant et participant à sa transition numérique en matière d'enseignement. Ce doit être
« un modèle démonstrateur de double transition énergétique et numérique pour un
écoc@mpus d'avenir » nous précisera le Président. Plus précisément, « c’est un lieu dédié à
l’usage du numérique, à la construction de contenus pédagogiques, de compétences, de
recherche et de productions culturelles à destination des étudiants, des personnels et de
l'ensemble des partenaires du programme » ajouterons-nous en tant que Vp Numérique. Il
s'agit d'étudier « précisément l'impact des nouvelles pratiques numériques sur la durabilité
des usages et de la gestion bâtimentaire » ajoutera le Vice-Président Patrimoine rencontré au
sujet de la finalité de ce bâtiment

5.2.4 Exploitation et interprétation des données[modifier]

À partir des données collectées et nous souhaitons examiner les enseignements que nous
pouvons tirer de ces dispositifs et de la stratégie sur les usages du numérique afin de mettre en
avant les plus efficients en fonction des publics visés et des contextes. Nous avons fait le
choix de procéder méthodologiquement en deux temps à travers une enquête en ligne sur le
C2i1 puis sur une enquête en ligne et des entretiens individuels pour le C2i2E.
522 Mocquet, B. (2015). Platinium  : plateforme d’innovation numérique à l’université de Perpignan - sup-
numerique.gouv.fr. Consulté 16 octobre 2017, à l’adresse http://www.sup-
numerique.gouv.fr/cid94678/platinium-plateforme-d-innovation-numerique-a-l-universite-de-perpignan.html
5.2.4.1 Recueil sur le dispositif C2i1[modifier]
Contexte et méthodologie
Pour cette enquête, notre population au sens statistique est constituée par des étudiants et des
employés de l’université ayant reçu la formation intitulée « préparation au C2iNiveau1 » et
inscrits dans un processus de certification de leur compétence numérique. Ils ou elles ont été
contacté(e)s par courriel via l’environnement numérique de travail de l’établissement. Cette
population est de 1489 individus mobilisés entre le janvier et juillet 2014.
Notre dispositif de collecte est volontairement lié à l’outil de formation de l’université, il
s’agit du service enquête disponible sur la plateforme Dokeos 2.1. Ce choix porte plus sur
notre volonté de ne pas ajouter de nouveaux outils, et donc perturber les usages, plus que sur
la qualité de l’outil de collecte.
En ce qui concerne l’exploitation des résultats, notre choix se porte sur une analyse mono-
variée au moyen d’un logiciel tableur grapheur.
Questionnaire et variables
Le questionnaire, avec une durée de passation d’environ dix minutes, comporte 9 questions
très majoritairement fermées et admettant selon les cas une seule ou plusieurs réponses. Il est
organisé en deux sections :

1. Perception sur l’outil de formation/certification[modifier]

2. Usages du numérique déclarés par le répondant.[modifier]

AA:Au sein de ces deux sections, les principales variables étudiées se répartissent autour de l’effet AA:de la formation, de la mesure du niveau d’usage du numérique à travers une série d’outils et AA:dispositifs.

AA:Population et échantillon AA:Notre échantillon est de type volontaire. Nous dénombrons 382 répondants, soit un taux de AA:réponse de l’ordre de 26%, mais nous nous garderons bien de tirer des conclusions AA:généralisantes qui serait le fruit du hasard plus que de la statistique. Notre échantillon est AA:constitué essentiellement d’étudiants (89%), complété par 3% d’employés de l’Université et AA:8% ne souhaitant pas se définir dans cette catégorisation.

AA:Résultats AA:Afin d’avoir une idée de leurs connaissances préalables, il est demandé aux répondants de AA:rappeler leur score moyen obtenu au test anonyme disponible sur la plateforme ministérielle.

AA:Ce test, par nature, national, est indépendant de l’université et se compose de 60 questions AA:dans les 5 domaines de compétences du C2i1. Ce test renvoie au répondant un score en AA:pourcentage par domaine de compétences et un score moyenné : ceci permet à l’usager de AA:réaliser une évaluation diagnostique en début de parcours de formation.

AA:Nous relevons par la suite, l’enquête étant indexée sur les identifiants des étudiants, le score AA:réalisé par le répondant lors du passage du QCM C2i1 en fin de formation sur la même AA:plateforme nationale.

AA:Nous sommes conscients qu’analyser seulement le résultat à une épreuve théorique est AA:réducteur, mais nous choisissons ce paramètre car il est déterminant pour attribuer la AA:certification. C’est pour nous un critère important pour que les répondants puissent affirmés AA:qu’ils sont compétents car certifiés par un organisme de formation de l’ESR.

AA:Sur la population concernée, durant le second semestre de l’année universitaire 2013-2014, AA:les résultats sont les suivants : AA:Figure 61 : Comparaison début de formation (389 répondants) et fin de formation.

AA:Sur cette analyse quantitative, la comparaison des usages par un QCM ne montre pas une AA:différence significative du développement des usages du numérique, sauf pour la catégorie la AA:plus basse dans le test de début de formation. Cette information reste à confirmer AA:durablement.

AA:Concernant les usages révélés par la formation, il nous paraissait intéressant d’interroger les AA:répondants en regard des compétences abordées par la certification (le référentiel) afin de AA:repérer des usages déclarés.

AA:Figure 62 : Déclarations d'usage par domaines de compétences (389 répondants).

AA:En analysant les 5 domaines, nous constatons que les répondants déclarent avoir des usages.

AA:Ils sont en capacité de les évaluer en termes de fréquence (Pas du tout, un petit peu, AA:partiellement ou tout à fait). La fréquence « tout à fait disponibles » revient le plus souvent AA:durant cette enquête (49,52% pour D1, 44, 66% pour D2, 39,82% pour D3, 41,56% pour D4 AA:et 44,52% pour D5), ce qui nous permet de penser que ce référentiel, en 2014 serait en AA:adéquation avec le besoin de formation.

AA:Nous remarquons que la fréquence « pas du tout » est légèrement supérieure pour D5, le AA:travail collaboratif en 2014 étant totalement inconnu pour certains des répondants .

AA:L’enquête fait apparaître des résultats quasi-similaires suivant les domaines de compétences.

AA:Globalement les répondants affirment posséder des usages du numérique.


5.2.4.2 Recueil sur le dispositif C2i2E[modifier]
Contexte et méthodologie
Une deuxième enquête a été réalisée en juin 2014 auprès des étudiants de master des métiers
de l’éducation et de la formation avec une volonté d’estimer qualitativement l’usage de ces
étudiants.
Pour cette enquête, notre population au sens statistique est constituée par des étudiants et des
employés de l’université ayant reçu la formation intitulée « préparation au C2i2E ». Ils sont
toutes et tous inscrits dans un processus de certification de leur compétence numérique. Ils ou
elles ont été contacté(e)s au par courriel via l’environnement numérique de travail de
l’Université. Cette population est de 39 individus.
Notre dispositif de collecte est le service enquête disponible sur la plateforme Dokeos 2.1.
Comme pour l’enquête précédente, ce choix porte sur notre volonté de ne pas ajouter de
nouveaux outils pour les étudiants.
En ce qui concerne l’exploitation des résultats, notre choix se porte sur une analyse mono-
variée au moyen d’un logiciel tableur grapheur pour le quantitatif, et sur la construction d’un
corpus simple, constitués des réponses aux questions ouvertes, et l’affichage des fréquences
de réponse via des nuages de mots. Ce choix d’utiliser ce moyen plus qu’un entretien en
direct, nous permet de peu interférer sur la nature des réponses, étant pour les répondants, à la
fois l’enseignant de la matière et le chercheur construisant ce corpus.
Questionnaire et variables
Le questionnaire, avec une durée de passation d’environ cinq minutes, comporte 6 questions
très majoritairement fermées et admettant selon les cas une seule ou plusieurs réponses.
Une question est ouverte et concerne l’usage déclaré du numérique. L’enquête est organisée
en deux sections : la perception sur l’outil de formation/certification, et les usages du
numérique déclarés par le répondant.
Population et échantillon
Le type volontaire de notre échantillon et son effectif (14 répondants) nous mettent en garde
sur une généralisation éventuelle, la population n’étant pas assez nombreuses, et de manière
évidente non représentative. Pour autant, sur le qualitatif, il est pour nous intéressant d’en
analyser le contenu, considéré alors comme une tendance pour une université donnée.
Résultats
Le champ de compétences étant dans les usages professionnels, les métiers de l’enseignement,
nous proposons une grille d’auto-positionnement en début de formation et en fin de
formation. Il s’agit de confronter l’étudiant à quatre positions stéréotypiques, allant du novice
(« je ne suis pas à l’aise, je me qualifie de peu autonome » à l’expert « je suis à l’ aise, je
donne des conseils ») en passant par la normalité (« je ne suis pas à l’aise mais j’arrive seul à
produire des documents » et « j’utilise un ordinateur personnel normalement »)
Figure 63 : Ressenti face à l'usage du numérique.
Nous constatons qu’à ce niveau d’études (master) dans cette filière (enseignement), en 2014,
7% des étudiants se considèrent novices en début de formation, les autres possédant un usage
« normal » (50%) ou « expert » (43%).
En fin de formation, nous observons une progression du ressenti de l’usage sur cette cohorte
d’étudiants de master, et un glissement statistique allant vers plus d’experts déclarés (78%) et
plus du tout de novices.
Même constatation que sur le C2i1, ce dispositif semble favoriser le développement des
usages de ceux qui se déclarent le moins usagers en début de formation.
Souhaitant mettre en œuvre une qualification par les usagers eux-mêmes, cette même
promotion a fait l’objet d’un relevé libre de mots qui caractérisent l’usage personnel du
numérique en fin de formation.
Figure 64 : Définitions de leurs usages du numérique.
Ce nuage de mots fait apparaître les mots les plus employés, sans traitement lexical particulier
à part sur la fréquence des mots.
Nous observons des catégories de mots qui apparaissent comme des sentiments d’aisance,
d’autonomie, d’usage quotidien, ce qui paraît montrer que cette modalité de déconnexion est
en développement pour cette population, qui en ressent le besoin professionnellement.


5.2.5 Discussions pouvant contribuer à une piste de généralisation[modifier]

Comme nous le rappelions, cette étude de cas se situe au sein d’une université, dans le cadre
du processus de transformation du développement des usages, par la généralisation des
certifications C2i. Nous souhaitions constater l’effet de la mise en place de ce dispositif.
H12 : évolution vers une H2 : des dispositifs H32 : amélioration de
nouvelle gouvernance différenciés pour l’image de marque d’une
développer les usages Université.
Observation 1 : Une enquête
quantitative et qualitative
auprès de 389 apprenants
X X X
sur la mise en place d’une
certification C2i1 dans une
Université
Tableau 31 : L’observation 1 teste les hypothèses H12, H2 et H32.


5.2.5.1 Sous-hypothèse 1.[modifier]
Le dispositif ainsi observé fait apparaître des éléments montrant l’émergence d’une nouvelle
gouvernance du numérique : ce qui est nouveau pour le système observé tient autant du
portage, de l’organisation que de la régulation apportée par les représentants des usagers.
Le premier concerne le portage du dispositif. Au plus haut de l’échelle de décision, au niveau
de la vice-présidence nouvellement créée, il permet d’attribuer des moyens, ici des heures de
formation pour une cohorte d’étudiants, tous les L2, et tous les M2 concernés, pour répondre à
l’un des axes stratégiques. Nous constatons bien ici l’importance d’une gouvernance du
numérique décrite en projet, et maitrisée en termes de budget, allouant les moyens avant la
mise en œuvre.
Le deuxième concerne l’organisation de ce dispositif. Porté par un service commun, il offre à
la fois la neutralité inter-composante du dispositif (ce n’est pas une composante de
l’université qui en a la charge mais bien toute l’université) et la réduction de la zone
d’incertitude du pouvoir, la présidence étant fortement liée à la direction de ce service
commun.
Le troisième élément concerne l’offre étendue aux employés de l’Université. En effet, en
premier lieu, cette proposition n’avait pas été faite par la Présidence, et il s’agit bien de la
régulation par un organe interne, ici un conseil consultatif, qui permet de faire émerger un
nouveau besoin : la formation des personnels.
Nous avons gardé un œil sur ce terrain, et en 2015, le COSI a vu sa composition réajustée en
intégrant davantage d’usagers, certains d’entre eux ayant passé entre temps la certification
C2i1 ou C2i2E. Nous relevons ainsi que la certification a permis à certains individus à faire
reconnaître leur expertise, au point de participer à la nouvelle gouvernance du numérique de
l’établissement.


5.2.5.2 Hypothèse 2 : des dispositifs différenciés pour développer les usages[modifier]
La généralisation de la certification des compétences du numérique ainsi décrite est un
dispositif organisationnel qui répond bien aux critères précités. Impulsée par une politique
« externe », celle du ministère, il est « concrètement » mis en place (service commun,
attribution de budget de fonctionnement) « en interne » pour tous les acteurs de l’Université.


5.2.5.3 Sous-Hypothèse 3.[modifier]
Quand nous positionnons notre analyse en regard des six fonctions de Parsons, nous pouvons
regarder cela du point de vue de la performance de l’organisation.
La politique du numérique au travers de cette observation est explicite. Elle possède bien un
budget, ici consacré à la formation aux usages du numérique, et reçoit l’adhésion des conseils
centraux, une représentation des acteurs de l’université. Cette mise en œuvre a offert à
l’établissement, de part sa présence en tant qu’établissement pilote de FUN, en offrant une
visibilité le système de l’ESR, ce qui contribue à un alignement tactique dans ce système
aujourd’hui concurrentiel.
Bien entendu la généralisation des certifications n’est pas le seul point de déclenchement de
cette visibilité, mais elle montre une certaine maturité dans l’organisation du numérique
universitaire, et concourent avec d’autres paramètres de modernisation d’organisations de
certaines universités.
Cette amélioration de l’image de l’établissement se concrétisera par l’organisation d’un
séminaire national sur cette certification en 2016, pour le compte du Ministère de l'Éducation
nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (150 participants représentants la
totalité des universités françaises).


5.3 Observation 2 : Management du changement de la[modifier]

transformation numérique
Analyser le management de la transformation numérique racontée par ceux qui l’ont pensé,
c’est posséder une vision nouvelle des universités.


5.3.1 Choix du cas[modifier]

Nous nous proposons d’analyser l’impact de deux modes de gouvernance du numérique de
l’Université. Pour cela nous proposons d’utiliser un instrument d’analyse, instrument
considéré ici comme un « produit d’une opération de pensé e intellectuelle (doctrine d’usage,
schéma abstrait) » comportant « une dimension politique, implicite ou explicite, susceptible
d’être révélée dans le cadre d’actions organisées et finalisées. »523 et emprunté aux Sciences
de Gestion.


5.3.2 Finalité[modifier]

Nous parlerons dans cette étude de cas d’outillage de la gouvernance524 de stratégies
organisationnelles et de la transformation numérique dans le monde professionnel, plus
précisément du numérique dans les universités françaises. Nous tenterons de décrire deux
outils de pilotage permettant le développement des usages du numérique dans celles-ci. Le
premier outil concerne la mise en place d’un schéma directeur rédigé par un cabinet d’audit
externe à l’université. Le second repose sur une modalité organisationnelle agile interne créée
à partir d’un schéma stratégique du numérique précis.
Dans le schéma global de nos études de cas, cette observation met en en relation la
mission/vision avec les processus de management, en considérant l’influence de
l’environnement (communauté de l’ESR) sur l’université concernée.
Figure 65 : Point de vue de la mission/vision la transformation numérique de l’Université.


5.3.1 Phase de recueil de données[modifier]

Le recueil de données a été réalisé par une méthodologie d’entretiens de groupe focalisés
(focus group en anglais). Cette technique issue de psychologie sociale permet de confronter
les avis sur un thème donné par la discussion au sein d’un groupe. Elle est reconnue comme
523 Aggeri, F., & Labatut, J. (2010). La gestion au prisme de ses instruments. Une analyse généalogique des
approches théoriques fondées sur les instruments de gestion. Finance Contrôle Stratégie , (n°3), 5-37. Consulté le
25 septembre 2017 à l’adresse https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00639963
524 Chatelain-Ponroy, S., Mignot-Gérard, S., Musselin, C., & Sponem, S. (2012). op. cit.
permettant de mettre en évidence les actions mises en place dans les organisations525. Le focus
group est généralement utilisé pour répondre aux objectifs suivants : collecter des opinions,
des croyances et des attitudes concernant un sujet ou une problématique précise, confirmer
des hypothèses ou encourager la parole autour de problèmes particuliers. Notre focus group se
déroule en octobre 2015.


5.3.1.1 Les questions.[modifier]
Six questions courtes et claires ont été élaborées. Elles s’appuient sur la théorie de Parsons
énoncée en amont, st sur notre transposition à l’analyse stratégique de la gouvernance du
numérique d’une Université au paragraphe 2.6
  • Quelle gouvernance de la politique numérique ?
  • Quelle pertinence du numérique dans les missions ?
  • Quelle adhésion des acteurs ?
  • Quel budget consacré au volet numérique ?
  • Quelles créations de valeurs pour l’établissement ?
  • Quelle adoption de l’usage du numérique ?
Ces questions sont abordées dans un ordre chronologique, l’entretien est guidé par la
discussion plus que par la volonté de l’animateur, rôle que nous avons joué dans les focus
group . Ce qui nous intéresse ici c’est le traitement du management du changement que
réalisent ces universités pour accompagner leur transformation numérique. Par soucis de
confidentialité des stratégies des établissements, les données seront présentées de manière
anonyme.


5.3.1.2 Sélection des participants et modalités de la séance[modifier]
Une visioconférence a été programmée en octobre 2015, auprès d’un échantillon de cinq vice-
présidents « numérique » dans cinq universités différentes. L’outil de communication, Google
Hangout, était connu de tous et toutes avant l’entretien, il a été choisi pour cela. Par ailleurs,
un enregistrement du son de cette visioconférence est réalisé pour nous permettre de consulter
à posteriori la discussion et les débats.
525 Kitzinger, J., Markova, I., & Kalampalikis, N. (2004). Qu’est-ce que les focus groups? Bulletin de
psychologie , 57, 237-244.
Tous les participants ont des caractéristiques communes et homogènes en lien avec le thème
abordé : le pilotage de la stratégie numérique de leur université. Ceux sont tous et toutes des
professionnels, en charge d’une vice-présidence numérique dans une université française. Le
nombre de participants est de 5, tous volontaires. Chaque personne garde l’anonymat des
propos. Nous avons informé que les données recueillies de façon numérique (captation sonore
du focus groupe sauvegardé), sont utilisées à des fins de recherche, mais que le traitement
serait anonyme.
Chaque question est abordée en moyenne pendant 15 minutes et la séance dure environ 2
heures.


5.3.1.3 Modérateur et observateur.[modifier]
En tant que modérateur nous sommes chargés d’animer le groupe. L’objectif est de faire
émerger les différents points de vue. D’un point de vue dynamique de groupe, les personnes
se connaissaient en amont, et nous avons agi de manière non directive.


5.3.2 Exploitation et interprétation des données[modifier]

Pour l’exploitation de ce focus group, nous décidons de nous appuyer sur l’analyse SWOT
(Strengths – Weaknesses – Opportunities – Threats) ou AFOM (Atouts – Faiblesses –
Opportunités – Menaces). C’est un instrument d’analyse stratégique créé dans les années 1960
par Albert Humphrey utilisé dans les sciences de gestion. Il combine « l’étude des forces et
des faiblesses d’une organisation, d’un territoire, d’un secteur, etc. avec celle des
opportunités et des menaces de son environnement, afin d’aider à la définition d’une stratégie
de développement » (Humphrey 2005).
Loin d’être généralisable, il se distingue dans la discussion deux catégories typiques de
stratégie que nous rappelons ici : (1)la mise en place et le suivi d’un schéma directeur du
numérique créé par une société de consulting, et (2)la mise en place et le suivi d’un schéma
interne et stratégique du numérique interne.
La première repose sur le suivi d’une planification de transformation numérique pluriannuelle
rédigée précisément et l’autre repose sur un dispositif organisationnel agile qui s’adapte en
fonction des contraintes internes et externes. Ces deux cas sont des cas types, et représentent
pour nous des extrêmes, les deux méthodes étant citées en fonction des projets abordés, et non
pas comme un dogme suivi par l’une ou l’autre université.


5.3.2.1 Analyse SWOT du schéma directeur du numérique.[modifier]
Etude des forces
Les forces, « les aspects positifs internes », d’une stratégie de mise en œuvre par un schéma
directeur du numérique résident principalement en la capacité de l’équipe présidentielle à
contrôler sa stratégie et en la programmation pluriannuelle des projets permettant de mettre en
œuvre la stratégie du numérique. C’est avec cela que l’on peut « bâtir dans le futur, et
projeter l’organisation dans une transformatio n numérique » nous rapportera un des
interrogés.
Etude des faiblesses
Par opposition aux forces, les faiblesses sont « les aspects négatifs internes mais qui sont
également contrôlés par l’organisation, et pour lesquels des marges d’amélioration
importantes existent ».
Pour la stratégie de mise en œuvre par un schéma directeur du numérique, les faiblesses
apparaissent sur la priorisation des projets qui limitent l’innovation, et « la difficulté
d’intégration de nouveau projet, par exemple l’arrivée des MOOC à l’Université ».
Etude des opportunités
Les opportunités sont les « possibilités extérieures positives, dont on peut éventuellement tirer
parti, dans le contexte des forces et des faiblesses actuelles. ». Le développement des usages
du numérique, « dans la rue », par les usagers des universités est une opportunité, la politique
ministérielle aussi. La stratégie de mise en œuvre par un schéma directeur du numérique
permet difficilement d’intégrer des opportunités au fil de l’eau.
Etude des menaces
Les menaces sont « les problèmes, obstacles ou limitations extérieures, qui peuvent empêcher
ou limiter le développement ». Les menaces de la stratégie de mise en œuvre par un schéma
directeur du numérique sont la mise en œuvre d’une stratégie plus globale, par exemple
décidée dans le cadre des communautés d’universités et établissements (COMUE).
Forces Faiblesses
Capacité de la Priorisation des
gouvernance à projets
contrôler sa stratégie DifRiculté
Programmation d’intégration de
pluriannuelle nouveau projet
SDN
Opportunités
Risques
Développement des
usages du numérique Mise en œuvre d’une
des étudiants stratégie plus globale
Politique
ministérielle
Figure 66 : SWOT du schéma directeur du numérique.


5.3.2.2 Analyse SWOT du dispositif organisationnel agile.[modifier]
Etude des forces
Les personnes entretenues reconnaissent des forces dans une stratégie de mise en œuvre par
un dispositif organisationnel agile. Ces forces résident principalement en la capacité de
l’équipe présidentielle à contrôler sa stratégie dynamiquement, et cela en réalisant des
rétroactions régulières. Ces feedbacks se caractérisent par de la participation active et
régulière des équipes : « L’université paraît être à l’écoute de ses employés. » reconnaitra l’un
d’entre eux.
Etude des faiblesses
Pour la stratégie de mise en œuvre par un dispositif organisationnel agile, les faiblesses
apparaissent sur la mise en œuvre de projets lourds pour l’université, comme la mise en œuvre
d’un nouveau système d’information pour un métier.
Etude des opportunités
Les opportunités cités dans ce dispositif-là sont les mêmes que pour le dispositif précédent :
« le développement des usages du numérique dans la rue par les étudiants, les employés est
une opportunité », la politique ministérielle aussi reconnaitra l’un des entretenus. La stratégie
de mise en œuvre par un dispositif organisationnel agile « permet aisément d’intégrer des
opportunités au fil de l’eau ». Nous comprenons sur ce dernier point qu’il s’agit bien d’une
caractéristique qui rend réactive l’Université.
Etude des menaces
Les menaces de la stratégie de mise en œuvre par un dispositif organisationnel agile sont aussi
la mise en œuvre d’une stratégie plus globale, par exemple décidée dans le cadre des
Communautés d'universités et d'établissements.
Forces
Capacité de la
Faiblesses
gouvernance à
contrôler avec Mise en oeuvre des
rétroactions régulières projets "lourds"
Participation active
des équipes
Dispositif
agile
Opportunités Risques
Développement des Mise en œuvre d’une
usages du numérique stratégie plus globale
des étudiants
Politique ministérielle
Figure 67 : SWOT du dispositif organisationnel agile.
Nous avons pu décrire deux modalités de mise en œuvre de la stratégie du numérique d’une
université, l’un par un schéma directeur du numérique et l’autre par un dispositif
organisationnel agile. Notre constat fait apparaître que les deux outils sont similaires d’un
point de vue Atouts – Faiblesses – Opportunités – Menaces.


5.3.3 Discussions pouvant contribuer à une piste de généralisation[modifier]

Il n’est bien entendu pas question ici d’évaluer l’une ou l’autre manière de gérer sa
transformation numérique, mais bien de faire apparaître qu’il n’existe pas qu’une seule
manière de gérer cela. Chaque manière est représentée de manière idéal-typique, les
universités interrogées utilisant les deux méthodes, une question de dosage et de moyens
attribués à la création des outils de pilotage stratégique.
Codification des H11 : Approche H12 : évolution vers une H31 : meilleur
hypothèses organisationnelle nouvelle gouvernance positionnement d’une
descendante et ascendante Université en termes de
concurrence
Observation 2 : Focus
groupe auprès d’un
échantillon de cinq vice-
présidents « numérique » X X X
dans cinq universités
différentes : le management
du changement.
Tableau 32 : L’observation 2 teste les hypothèses H11, H12 et H31.


5.3.3.1 Sous-hypothèse H11 : approche organisationnelle descendante et ascendante[modifier]
et sous-hypothèse H12 : évolution vers une nouvelle gouvernance
Lors de la discussion, il est revenu que les universités interrogées ont toutes remis en cause
leur organisation du numérique depuis 2013, pour satisfaire deux nouvelles contraintes
extérieures : le passage au responsabilité et compétence élargies (RCE) et la désignation d’un
vice-président en charge du numérique, la première précédent l’autre chronologiquement.
Nous relevons aussi que les universités mettent en place des rétroactions dans leur
organisation à plusieurs niveaux hiérarchiques, mais aussi auprès de différents membres ou
public de l’Université.
Pour les universités faisant apparaître une modalité agile dans l’évolution de leur organisation,
les rétroactions sont encore plus importantes. La circulation de l’information se fait bien dans
les deux sens : pour recueillir les informations, le pilotage est à l’écoute de tous les acteurs
afin de pouvoir le cas échéant y remédier : l’existence d’une nouvelle gouvernance semble se
confirmer ainsi.


5.3.3.2 Sous-hypothèse H31 : meilleur positionnement d’une Université en termes[modifier]
de concurrence
Les vice-président(e)s interrogé(e)s font apparaitre durant la discussion que le principal risque
est la « mise en œuvre d’une stratégie plus globale » : les regroupements d’universités sont
pour eux la principale zone d’incertitude quant à l’avenir de l’établissement, ou de leur
fonction, pourrions-nous ajouter. Pour remédier à cela, les deux démarches montrent une pro-
action à devancer ce risque, voire pour reprendre l’un deux « devancer les autres universités
en transformant notre université pour qu’elle soit experte reconnue dans les TICE ». Nous
notons que les TICE sont citées comme un exemple de projet numérique, faisant levier pour
l’innovation pédagogique. Pour certains d’entre eux, il s’agit alors de positionner leur
université dans un domaine de compétences reconnu du numérique universitaire, afin que, une
fois le cas échéant d’un regroupement réalisé, cette compétence soit gardée. Cette stratégie
permettrait à cette université de prendre le leadership au sein du regroupement
d’établissements, la zone d’incertitude étant ainsi amoindrie.


5.4 Observation 3 : Émergence d’une communauté des[modifier]

référents numériques des établissements de l’ESR
Analyser l’émergence des stratégies du numérique, c’est également contribuer à une
sociologie du fonctionnement du numérique de l’ESR et, plus généralement, des
représentations sociales de ce numérique au sein de l’ESR.
Notre regard porte sur l’observation de la communauté des référents numériques, les VP
numérique, DSI et chargé de mission, qui participe au management de la stratégie numérique
des universités et sur l’association professionnelle des VP numérique de l’ESR (VP-NUM).


5.4.1 Choix du cas[modifier]

La communauté des individus en charge de la stratégie numérique des établissements est
devenue visible dans le système de l’ESR lors du colloque annuel de la Conférence des
Présidents d’Université à Strasbourg, en mars 2015, intitulé « Université 3.0 : nouveaux
enjeux, nouvelles échelles à l’ère numérique ». En effet, un grand nombre de référents
numériques ont été porteurs de la voix de leur université, alors que ces journées de colloque
étaient traditionnellement réservées aux Présidents. Certaines personnes concernées, une
dizaine de vice-présidents en poste, ont décidé de créer une association professionnelle des
VP numérique de leur université. Elle verra le jour en mars 2016 au sein des Rencontres
universités-Entreprises « deux jours dédiés à la transformation numérique dans
l’enseignement supérieur » pour reprendre l’accroche faite alors. La finalité de cette
association s’appuie sur la loi sur l’ESR du 22 juillet 2013, et décline, sur son site web, le plan
d’intervention suivant : « donner une visibilité à cette nouvelle fonction dans l’enseignement
supérieur, créer un réseau d’échanges et de partages, valoriser les missions des VP
numérique, positionner les universités au cœur de l’éco-système numérique sociétale, et à
terme devenir un think-tank. »526

5.4.2 Finalité[modifier]

Trois objets nous intéressent dans l’analyse de cette communauté. Le premier est
l’officialisation d’une communauté existante mais non fédérée au sein de l’ESR. Le deuxième
concerne l’impact de cette création sur la transformation numérique de l’Enseignement
Supérieur et de la Recherche. Enfin le troisième est l’impact de cette nouvelle légitimité
offerte à la gouvernance du numérique des universités pour modifier les organisations
internes.
Figure 68 : Impact de l’association sur la transformation numérique de l’ESR.
La fonction est nouvelle, la nomination actée dans les textes ministériels, et il appartiendrait à
chaque université ou COMUE de mettre en place cette vice-présidence. Trois ans après cette
obligation, nous souhaitons relever la pratique dans plusieurs universités afin de faire ressortir
des caractéristiques liées à cette nouvelle fonction pour l’ESR.


5.4.3 L’association Vp-Num[modifier]

5.4.3.1 Phase de recueil de données[modifier]
Ma participation en tant que co-créateur de cette association m’a permis de collecter tous les
éléments internes au moyen d’entretiens non formels, mais toujours orientés auprès des
acteurs de cette stratégie : président, trésorier, secrétaire et vice-présidents créateurs. Ce
recueil est aussi complété par le site de cette association527. L’analyse se fait aujourd’hui sans
être membre de l’association, posture prise dans cette thèse en 2016-2017, indispensable à la
prise de recul.
526 L’association Vp-Num. (2015). Le blog de l’association Vp-Num. Consulté 25 septembre 2017, à l’adresse
https://vpnum.wordpress.com/about/
527 L’association VpNum. (2015), op. cit.
Domiciliée à la Maison de l’Etudiant à Paris, cette association a été créée lors des Rencontres
universités Entreprises en mars 2016, elle a pour vocation de « créer un réseau d’échanges et
de partage afin d’exercer au mieux les missions qui leurs sont confiées par leurs conseils
d’administration et leurs présidents » ; « organiser des journées de travail thématiques
autour du numérique dans l’enseignement supérieur » ; de « proposer formation et
accompagnement aux nouveaux vice-présidents numérique » ; « valoriser la mission des vice-
p résidents en charge du numérique, dans les écosystèmes des établissements d’enseignement
supérieur » ; de « devenir un laboratoire d’idées » ; et de « mettre l’enseignement supérieur
au cœur de l’écosystème numérique » toujours pour reprendre le site de l’association.
La marraine de l’association est Sophie Pène, Vice-présidente du CNNum nommée par
Mounir Mahjoubi le 22 février 2016, professeur d’Université au Centre de Recherches
Interdisciplinaires de l’Université Paris Descartes. Dans l’article intitulé « Yvonne —
 Marrainer de grands projets »528, elle décrit son intérêt pour ce type d’association qui montre
selon elle, toute l’évolution du numérique dans l’ESR, notamment par le rôle réalisé par cette
nouvelle communauté qui passe « Du Vice président chargé des TICE aux VP
“Transformation numérique” »
Depuis sa création, l’association s’est réunie au moins une fois par an avec ses membres (47
établissements 8 COMUE, 38 universités et 1 institut) et selon l’un de ses membres créateurs
« elle permet à chacun d’entre nous, de donner son avis sur les enjeux du numérique de
l ’ESR, sans que nous parlions au nom de notre Université ».
Lors d’un de ses regroupements, elle fut sollicitée pour travailler avec les services du Ministre
Thierry Mandon pour établir, en collaboration avec le CNNum, un référentiel529 de
transformation numérique de l'ESR.
Une extraction terminologique à partir du corpus des « feuilles de route » de certains VP
numérique des établissements de l’ESR.
Le contrôle de gestion stratégique mis en œuvre dans nos établissements de l’ESR depuis le
passage aux RCE s’appuie pour certaines missions sur le contrôle par gestion des activités530.
Il apparaît judicieux comme première approche de collecter les éléments d’informations fixant
la stratégie du numérique de quelques établissements afin de tenter de les rapprocher.
528 Pène, S. (2016, mars 25). Yvonne — Marrainer de grands projets. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://medium.com/@sophiepene/yvonne-marrainer-de-grands-projets-f583bf9a55e2#.th8q1djva
529 MENSR, & CNNUM. (2016). op. cit.
530 Lorino, P. (1991). Le contrôle de gestion stratégique: la gestion par les activités (Vol. 1). Dunod Paris.
Pour collecter ces informations, nous avons constaté que l’outil de gestion utilisée par
certaines universités ou COMUE s’appuyait sur un outil d’auto-analyse : « les feuilles de
routes » rédigées par l’équipe présidentielle.
Seule ma position privilégiée au sein de cette structure associative (nous avons défini
précédemment comme l’observation ainsi opérée) permet de récolter des informations qui
traditionnellement restent au sein des universités, tels que les feuilles de route des vice-
présidents en poste.
A la création de cette association, nous avons participé à un processus d’échanges de feuilles
de route entre sept Vice-présidents numérique. Certaines informations peuvent être diffusées,
d’autres non, nous respectons toujours l’anonymat des données recueillies.
Nous souhaitons examiner les enseignements que nous pouvons tirer de cet outil d’auto-
analyse afin de faire émerger des tendances permettant de confirmer l’émergence d’une
nouvelle gouvernance du numérique des établissements de l’ESR.
Nous mettons en œuvre une méthode d’extraction terminologique à partir d’un corpus,
comme le conseil son auteure, Vasilica Le Floch : « la méthode décrite peut être transposée à
d’autres domaines et appliquée à d’autres corpus de spécialité »531
La base des documents ou corpus
Le point de départ de cette méthode est la constitution de la base de documents à partir
d’éléments fiables. Nos données sont extraites de sept lettres de missions ou feuille de route
entre février et mars 2016. Cela compose le corpus de données fiables, parce qu’issues des
différents conseils des universités. Chacune d’entre elle étant fournie par le ou la concerné(e),
nous ne remettons pas en cause la fiabilité de cette information. Nous avons demandé l’accord
d’exploiter ses données aux personnes concernées : ils ou elles ont accepté(e)s sous la
condition de confidentialité, ces lettres de missions sont rendues anonymes.
Nous retiendrons dans une prime analyse des documents fournis :
  • Tous les documents numériques au format pdf, doc ou docx.
  • Ils concernent des établissements de l’ESR, uniquement des établissements publics à
caractère scientifique, culturel et professionnel (E.P.S.C.P.) ayant un vice-président
numérique.
531 Le Floch, V. (2013). L’extraction terminologique à partir d’un corpus de textes techniques. Traduire. Revue
française de la traduction , (228), 81-91. https://doi.org/10.4000/traduire.537
  • Ils décrivent toutes des missions réalisées entre 2012 et 2016.
  • Ils sont distincts sur la forme (lettre à en-tête signée par le président de l’organisation,
corps de courrier électronique).
  • Ils se distinguent sur les missions à réaliser.
  • Ils ont tous été diffusés au sein des organisations via les conseils ce qui en fait des
informations publiques au sein des organisations.
  • Ils ont toutes été partagés au sein de l’association Vp-Num.


5.4.3.2 Exploitation et interprétation des données[modifier]
Le logiciel et les outils utilisés
La deuxième phase passe par la constitution d’un glossaire à partir de logiciels gratuits et
libres de droits, disponibles sur internet. Comme le reconnaît Vasilica Le Floch « Tout
glossaire est le résultat du travail d’extraction de termes à partir d’un corpus donné. L’outil
d’extraction le plus simple et le plus facile à manier est le concordancier. »532.
Notre concordancier est AntConc version 3.4.4 pour Macintosh OS X, disponible en
téléchargement gratuit533. Cet outil nous « permet de faire le tri des mots, d’extraire les
contextes pour chacun des mots et de générer des listes de fréquences ainsi que des index »
selon Le Floch.
Traitement du corpus : listes de fréquences, concordances et tris contextuels
L’importation dans le logiciel nécessite un traitement en amont pour constituer un seul fichier
au format TXT, constitué des sept documents. Nous en profitons pour réaliser un toilettage
des données (anonymisation des noms propres, retrait des éléments non pertinents comme la
date, le lieu, remplacement du nom spécifique de l’université par le terme générique
« université »).
Ce corpus contient 1188 mots, dont 654 différents.
Pour les besoins de cette analyse, nous suivons la méthode et avons retenu les fonctions
Concordance, Collocates, Wordlist et Keyword List.
L’analyse du corpus (wordList) nous permet de disposer rapidement à la liste des mots
contenus dans la base de documents.
532 Le Floch, V. (2013). op. cit.. p83
533 Maniez. (2010). Utilisation du concordancier AntConc. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://perso.univ-lyon2.fr/~maniezf/AntConc.htm
Figure 69 : Liste des 20 premiers mots dans le corpus.
Le logiciel nous renvoie pour chaque mot repéré, sa fréquence, le nombre de répétition, et son
rang, c’est-à-dire son classement en termes de fréquence dans le document global.
En éliminant les mots grammaticaux (de, le, la, un, une, des) qui sont, naturellement, plus
présents et offrent des fréquences plus élevées, nous faisons apparaître la liste 30 premiers
mots à haute fréquence comme suit :
1 40 numérique 11 8 ensemble 21 6 mission
2 32 université 12 8 services 22 6 missions
3 18 établissement 13 8 usages 23 6 pilotage
4 15 information 14 7 formation 24 6 projets
5 13 président 15 7 madame 25 6 pédagogiques
6 13 service 16 7 monsieur 26 6 recherche
7 12 numériques 17 7 systèmes 27 6 tice
8 11 vice 18 6 actions 28 6 travail
9 10 politique 19 6 charge 29 5 directeur
10 9 domaine 20 6 développement 30 5 documentation
Cette liste de fréquences nous donnent une première estimation du vocabulaire employé pour
définir la mission des vice-présidents numérique, et permet une identification rapide de termes
permettant l’élaboration d’un glossaire.
Nous remarquons une totalité de substantifs dans cette liste, dont certains pourraient avoir
deux sens dans notre vocabulaire de l’ESR.
Par exemple, si nous souhaitons savoir si dans les feuilles de route, le mot information est
utilisé seul ou non, comme nous le rappelle, la chercheuse, « le logiciel AntConc permet
d’accéder rapidement à la concordance d’un mot, simplement en cliquant sur celui-ci ». Pour
information, cité 15 fois, la fonction Concordances AntConc dévoile les collocations
suivantes : systèmes d’informations (13 fois) et information seulement (2 fois). De ce constat,
il apparaît ainsi que l’information, notion citée seule, est liée à l’activité numérique des
universités, des bibliothèques universitaires, et qu’elle est peu présente dans le périmètre des
Vice-Présidents numérique rencontrés pour ce travail.
Dans la même logique, et le même outil (Concordances) nous souhaitons analyser si le mot
numérique est employé comme un substantif ou comme un adjectif en complément d’un autre
concept abordé, comme par exemple « stratégie numérique »
« Numérique » est cité 40 fois dans le corpus de donnée. Il est employé en tant que substantif
20 fois, réparti en « du numérique » (17 fois), (Figure 70) « le numérique » (3 fois) (Figure
71).
Figure 70 : Citation "du numérique" dans le corpus.
Figure 71 : Citation "le numérique" dans le corpus.
Autrement dit, pour une utilisation du mot « numérique » sur deux, le mot est employé
comme une notion regroupant des éléments au sein de l’Université. Employé ainsi par les
l’équipe présidentielle de l’Université, au travers de fiche publique, il envoie à la communauté
un sens globalisant.
Pour les 20 autres itérations, nous relevons les termes associés, afin de faire émerger des
catégories de regroupement, d’un point de vue sémantique.
Le tableau suivant propose la synthèse des données recueillies.
Domaine de la stratégie et Domaine des services et Domaine des usages Domaine du
de l’organisation (12 fois) domaines d’application territoire virtuel (1
(2 fois)
fois)
(4 fois)
5 politique numérique 1 Travail numérique 1 Acculturation numérique 1 paysage numérique
2 stratégie numérique 1 Service numérique 1 Culture numérique
1 gouvernance numérique 1 Pédagogie numérique
Non classé :
1 vice-président numérique 1 Patrimoine numérique
1 en matière
2 Université numérique
numérique
1 fonction numérique de
l’Université
Tableau 33 : « numérique » utilisé en tant qu’adjectif dans le corpus.
Pour le premier domaine, nous proposons de regrouper les expressions employées au sein
d’une catégorie que nous nommerons « Domaine de la stratégie et de l’organisation ». Ainsi
regroupé cette notion revient 12 fois dans le corpus.
Le second regroupement se fait sous l’étiquette « Domaine des services et domaines
d’application », il réunit les exemples donnés dans le corpus.
Pour le troisième, ne souhaitant réduire à un domaine de culture numérique, nous proposons
de l’englober dans le « Domaine des usages ».
La quatrième, nous retenons que la notion de cybermonde, monde virtuel, réapparait et nous
proposons « Domaine du territoire virtuel ».
Enfin, une des expressions employées « en matière numérique » apparaît ici, elle nous parait
se rattacher au volet englobant cité dans l’analyse précédente et nous décidons de ne pas la
classer dans cette partie. Nous ne la considérerons pas dans le traitement suivant.
Sans nous hâter vers des conclusions statistiques généralisantes, l’échantillon n’étant pas
représentatifs, nous faisons apparaître une représentation graphique du poids de citation du
mot numérique, considéré tantôt comme un substantif, et tantôt comme un adjectif, réparti en
quatre domaines précités.
La figure suivante représente cette répartition.
Figure 72 : Répartition de "numérique" en catégories à partir du corpus.
Nous retenons que le mot « numérique » est utilisé comme un terme générique et englobant
pour 51% des itérations. Pour le restant, les 49% autre, il est associé en tant qu’adjectif à des
substantifs permettant de le raccrocher au « Domaine des services et domaines d’application »
pour 30%, au « Domaine des services et domaines d’application » pour 10%, au « Domaine
des usages » pour 5% et enfin au « Domaine du territoire virtuel » pour 5% aussi.


5.4.4 La communauté des référents numériques des universités[modifier]

5.4.4.1 Phase de recueil de données[modifier]
Nous souhaitons vérifier en contexte notre approche du rôle de la gouvernance du numérique
universitaire en interrogeant cette communauté des référents numériques. Nous réalisons pour
cela une enquête en ligne.
Notre population au sens statistique est constituée par 95 personnes de l’Enseignement
Supérieur et de la Recherche en responsabilité de la gouvernance du numérique de leur
établissement, liste constituée en 2016 par le Ministère et contactée directement par courrier
électronique entre j anvier et février 2017.
Notre dispositif de collecte repose sur un questionnaire proposé en ligne. Nous avons choisi
de créer le formulaire en utilisant l’outil Google Forms pour faciliter l’accès aux participants à
partir d’invitations faites en ligne.
Nous avons décidé de collecter les données brutes issues des questions ouvertes, en repérant
les occurrences et d’en proposer une représentation au moyen des nuages de mots. Dans les
nuages de mots, la hiérarchie est celle induite par les différences de taille de mots, les plus
gros apparaissant comme le plus cités : pour nous ce seront les plus importants. C'est le
principe du nuage arboré implémenté dans le logiciel libre TreeCloud2534 qui est retenu. Cet
outil propose deux possibilités pour choisir la taille des mots : un calcul direct à partir des
fréquences, ou l'importation d'une liste de tailles personnalisées. Le recours à la représentation
arborée pour mener à bien cette comparaison devrait permettre « de faire émerger des
hypothèses de travail, d’étayer des intuitions générales, d’affiner, l’analyse en suscitant des
parallèles, des biais, que la simple lecture linéaire ou cursive des text es n’aurait pas suffi à
déceler et articuler »535.
Notre échantillon est de type volontaire, il est bien évidemment exclu de tenter toute
généralisation qui serait le fruit du hasard. Sur la base du sondage proposé en ligne, 31
questionnaires ont été complétés, parmi les 95 personnes contactées. Après une première
534 Gambette, P., & Véronis, J. (2010). Visualising a text with a tree cloud. In Classification as a Tool for
Research (p. 561-569). Springer.
535 Amstutz, D., & Gambette, P. (2010). Utilisation de la visualisation en nuage arboré pour l’analyse littéraire.
In JADT’10: 10th International Conference on statistical analysis of textual data (p. 12).
vérification il apparaît que sept d’entre eux doivent être écartés s’agissant de personnes
n’étant pas en situation de gouvernance du numérique récemment (moins d’un an) ou
actuellement. Nous effectuons notre analyse sur les autres questionnaires validés, soit n=24 ce
qui correspond à l’effectif de notre échantillon volontaire ayant participé à notre enquête.
Parmi ces répondants, à la question « Dans quel type d'organisation ? », l’immense majorité
est issue d’une université (79,2%), le restant se répartissant équitablement entre un
regroupement d'universités, une école, ou un institut.
Notre échantillon (n=24) est constitué majoritairement d’hommes. Sans entrer dans une
analyse prenant en compte le genre qui dépasse largement le cadre de notre étude, nous
constatons une surreprésentation des hommes (79,2%).
En ce qui concerne l’âge des participants, voici la répartition obtenue :
4,20%
4,20%
Figure 73 : Répartition par classe d’âge des répondants.
Si nous notons qu’aucun répondant ayant pris part à l’enquête n’a moins de 26 ans, la majorité
d’entre eux se situe dans la tranche 46-55 ans pour une personne sur deux (50%).
Par ailleurs, le statut des répondants est une information que nous souhaitions mettre en
interrogation, afin de faire apparaître la diversité, peu connue, des statuts des personnes en
charge de la gouvernance du numérique.
4,20%
Figure 74 : Statuts des répondants.
Si nous notons qu’aucun répondant n’est exclusivement chercheur, la majorité d’entre eux
(58,3%) est enseignant(e)/chercheur. Nous relevons aussi que des personnels issus d’autres
corps accèdent à la fonction de gouvernance du numérique universitaire : 20,8%
d’enseignants, 16,7% parmi le personnel administratif et 4,2% pour le personnel des
bibliothèques.
Le pilotage de la gouvernance du numérique universitaire n’est pas réservé à un seul corps des
personnels de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.


5.4.4.2 Exploitation et interprétation des données[modifier]
Transformation numérique des organisations
A la question « Votre organisation est-elle en transformation numérique ? », 95,8% déclarent
que c’est bien le cas, contre seulement 4,2% qui pensent que non. Ce dernier résultat nous
montre la capacité à identifier la transformation numérique comme un concept au sein de
l’organisation de la part des répondants.
En nous intéressant à identifier qui avait en charge la mission de cette transformation, les
réponses (multiples) se répartissent ainsi :
Au sein de votre organisation, la transformation Fréquence de Fréquence de Fréquence de
numérique est-elle pour vous, dans la mission réponse « oui, réponse « Oui, un réponse « non»
de …? bien sûr » peu »
Mon rôle de responsable de la gouvernance du 91,6% 4,2% 4,2%
numérique
La gouvernance de l’organisation 75% 25% 0%
La Direction des Systèmes d'Information (DSI) 70,8% 25% 4,2%
Chacun des membres de l’organisation 45,8% 37,5% 20,8%
La mission du ministère de tutelle 41,6% 37,5% 20,8%
La mission de la COMUE 41,6% 20,8% 37,5%
Tableau 34 : Acteurs en responsabilité de la transformation selon les participants.
Ce résultat confirme la tendance relevée dans l’état de l’art présenté précédemment, à savoir
la (re)prise en main du pilotage stratégique de la transformation numérique par un vice-
président alors qu’elle n’aurait été, il y a seulement quelques années, dévolue uniquement à la
DSI. C’est pour nous un effet visible de la loi de 2013.
Les domaines d'intervention de la mission de responsable de la gouvernance du
numérique
Nous souhaitions mettre en avant les domaines d’intervention de la mission des référents
numériques, en proposant une liste de domaine d’activités de l’Université sur lesquelles ils ou
elles avaient une intervention en termes de stratégie d’établissement (pédagogie,
infrastructures, SI, communication, PSSI, pilotage/gestion, relation avec la filière numérique
et la recherche). Nous avons proposé aussi une échelle de valeur en regard des domaines
d’activités allant de « oui, bien sûr » à « non, pas du tout », en passant par « oui un peu » et
« Non pas vraiment »
La totalité des répondants ont évalué l’implication de leur intervention dans les domaines de
la pédagogie, des infrastructures, du système d’informations, de la communication, de la
politique de sécurité, le pilotage et la gestion, la liaison avec les entreprises de la filière
numérique et la recherche à l’Université.
Nous décidons, pour simplifier les commentaires, de nous intéresser aux réponses extrêmes,
les « Oui, bien sûr » (en bleu sur la figure suivante) et les « non, pas du tout » (en vert sur la
figure suivante) : l’analyse propose ainsi deux catégories. Nous ferons appel aux réponses
intermédiaires ( « oui, un peu » et « non, pas vraiment ») selon les besoins de notre
raisonnement.
Figure 75 : Domaines d’intervention de la stratégie numérique.
Le domaine d’intervention le plus cité en « Oui, bien sûr » est le système d’information
(83%), puis les infrastructures (79%), le pilotage et la gestion (67%), la politique de sécurité
(62%), la pédagogie (50%), la liaison avec les entreprises de la filière numérique (33%), la
communication (16%) puis la recherche (12%).
Nous trouvons ainsi en tête les quatre domaines où, pour nous, le référent ne partage pas sa
mission avec un autre représentant de la Présidence : il s’agit pour nous des domaines
d’activités « historiques » des TIC.
Si nous associons les « oui » ensemble, ce qui veut dire pour nous que la stratégie ne dépend
pas uniquement de ce référent mais aussi d’un autre vice-président, nous nous retrouvons avec
un autre type de classement. Le référent numérique devient en appui de la politique de
formation de l’établissement (100% pour la pédagogie), le celle de la recherche (83%), la
liaison avec la filière numérique (67%), et parfois mais à une échelle moindre de la
communication (58%).
Nous voyons ici un signe de transversalité de la mission de stratégie numérique .
La gouvernance du numérique vue par ceux qui la pilotent stratégiquement
Nous avons demandé à chaque répondant de caractériser, au delà du fonctionnel, ce
qu’apporte la gouvernance du numérique à leur établissement. Pour cela, et pour simplifier le
traitement, nous demandons de donner trois mots clés. Le résultat est une liste de 67 mots,
dont 48 sont communs.
Comme précédemment, nous mettons en œuvre les outils apportés par le concordancier pour
analyser les listes de mots. Wordlist Antconc nous renvoie pour chaque mot repéré, sa
fréquence, le nombre de répétitions, et son rang, c’est-à-dire son classement en termes de
fréquence dans la liste des réponses libres.
Fréq. Mot Fréq. Mot Fréq. Mot
5 visibilité 1 concertation 1 outil de coordination
4 cohérence 1 consolidation 1 planification des
4 innovation 1 coopération actions
4 transversalité 1 coordination 1 projet
3 transformation 1 crédibilité 1 projets
2 efficience 1 du poids 1 structuration
2 mutualisation 1 efficacité du pilotage 1 sécurité
2 stratégie 1 financement 1 un autre regard
2 vision 1 global 1 une action visible
1 agilité 1 innovation 1 une valeur ajoutée
1 aide au pilotage pédagogique 1 visibilité de la
1 amélioration des 1 leadership stratégie
pratiques 1 lien socio 1 vision politique
administratives 1 lisibilité 1 échange avec les
1 anticipation 1 mutualisation des principaux acteurs
1 changement ressources
1 cohésion humaine 1 numérique 1 économique
1 communication 1 optimisation 1 écosystème
1 compréhension 1 évolution pédagogique
En analysant le vocabulaire employé, nous relevons que les effets sur l’Université sont de
l’ordre d’une meilleure visibilité (5 répondants), de la cohérence, de l’innovation et de la
transversalité (4 répondants), la transformation (3 répondants) et enfin la mutualisation, la
stratégie, la vision (2 répondants).
Nous remarquons qu’aucun des mots cités parmi les 67 ne touche le volet informatique du
numérique universitaire, mais bien le volet organisationnel, voire le management de cette
transformation numérique.
Dans un deuxième temps, nous procédons à quelques regroupements (réunion des singuliers-
pluriels, synonymes regroupés) afin d’obtenir une liste plus réduite de l’apport de la stratégie
numérique perçue par ceux qui la pilotent, et faire émerger des grandes catégories dans cette
perception de leur stratégie (Tableau 35).
VISION RECHERCHE DE TRANSFORMATION MODALITÉ DE MISE
PROGRAMMATIQUE L’AMÉLIORATION NUMÉRIQUE EN PLACE
DE L’EXISTANT
19 fois 13 fois 11 Fois 9 fois
visibilité/vision/ vision
politique/ visibilité de la cohérence/ efficience/ innovation/ transversalité/
stratégie / stratégie / une amélioration des transformation / concertation/
action visible/ aide au pratiques administratives/ évolution pédagogique / compréhension/
pilotage / anticipation/ mutualisation/ efficacité innovation pédagogique / coopération/ cohésion
lisibilité / planification du pilotage/ agilité / structuration / humaine
des actions / projet / mutualisation des changement / communication / lien
projets / vision global ressources/ consolidation/ socio / échange avec les
coordination / crédibilité / principaux acteurs
optimisation / outil de
coordination
Tableau 35 : Regroupement en catégories.
Nous faisons apparaître quatre catégories qui peuvent nous permettre de mieux appréhender le
rôle de chacun d’entre eux/elles dans leur organisation.
La première concerne ce que nous nommerons la « vision programmatique », définie au
travers de mots communs liés à une meilleure vision, utilisé ici autant comme la meilleure
compréhension de l’Université (« vision », « lisibilité », « global »…) que le sens visionnaire
(« anticipation », « planification », « projet »…), de l’Université. Nous remarquons aussi que
les répondants considèrent leur action comme « visible » par les personnes concernées.
La deuxième catégorie que nous proposons est la « recherche de l’amélioration de l’existant ».
Elle nous apparaît autour des mots liés à l’« efficacité » de l’organisation, d’« optimisation »
voire l’« efficience ». Nous notons la volonté d’« améliorer », de « mutualiser », de
« coordonner » autant de verbes d’actions qui nous montrent une véritable finalité d’efficience
à l’action stratégique menée.
Cette stratégie conduirait pour les répondants à une nouvelle Université que nous avons
regroupé au sein de la catégorie « transformation numérique ». Cette transition stratégique
aboutirait sur une organisation « innovante », « agile », en « évolution » dans le domaine de la
pédagogie par exemple dans un souci de « structuration ».
Enfin, la quatrième et dernière catégorie concerne la « modalité de mise en place », et nous
relevons une attention particulière apportée à l’humain (« concertation », « lien socio »,
« cohésion humaine », « échanges entre les acteurs ») dans une organisation que se voudrait
« transversale ».
Le mode de régulation de cette gouvernance
Nous souhaitons aborder les principes de régulation, en interrogeant sur la commande initiale,
la politique du numérique de l’Université, et les dispositifs qui permettent, à la fois d’en
mesurer la réalisation, mais aussi d’établir une rétroaction de la part des usagers.
Les « universités possèdent toutes un schéma stratégique du numérique » (Mocquet, 2014),
mais les réponses à cette enquête nous montrent que seulement 66,7% des répondants ont un
schéma directeur pour le mandat en cours. Ceci pourrait s’expliquer dans le cadre d’une
équipe élue dans la continuité de la précédente.
Figure 76 : Schéma directeur rédigé pour le mandat en cours.
Concernant la rétroaction, la remontée d’informations entre les usagers et ceux qui pilotent,
nous avons proposé un choix parmi six (les enquêtes en ligne, les réseaux socionumériques,
un seul comité d'usagers pour l'organisation, plusieurs comités d'usagers pour l'organisation,
par les formateurs des étudiants, les interventions des techniciens informatiques).
Les dispositifs de recueil d’information le plus dominant (au sens des réponses oui
regroupées) sont les enquêtes en ligne (100%), plusieurs comités d'usagers pour l'organisation
(70,8%), les formateurs des étudiants (70,8%), les interventions des techniciens informatiques
(62,5%), les réseaux socionumériques (54,1%), un seul comité d'usagers pour l'organisation
(41,7%).
En continuant cette analyse, nous constatons que deux dispositifs offrent une possibilité
directe aux usagers de faire une remontée à l’équipe présidentielle via une enquête ou réseaux
socionumériques. Cette modalité, impulsée par l’usage que nous avons des TIC, montre une
caractéristique de cette gouvernance : la capacité à interroger directement les usagers pour en
connaître leur degré de satisfaction, et les faire participer.


5.4.5 Discussions pouvant contribuer à une piste de généralisation[modifier]

Cette étude de cas au plus proche de ceux qui pilotent la stratégie numérique des universités
montre bien une nouvelle organisation et mise en œuvre de cette stratégie, et une
amélioration, de l’image de marque d’une université.
Codification des hypothèses H11 : Approche organisationnelle H32 : amélioration de l’image de
descendante et ascendante marque d’une Université.
Observation 3 : Une enquête
qualitative auprès de vice-présidents en
charge du numérique d’universités X X
concernant l’émergence d’une nouvelle
gouvernance
Tableau 36 : L’observation teste les hypothèses H11 et H32.


5.4.5.1 Sous-hypothèse H11 : Approche organisationnelle descendante et[modifier]
ascendante
L’enquête fait apparaître le souhait de posséder une « vision programmatique » de la
« transformation numérique » de la part des répondants. Nous voyons ici le signe d’une
approche organisationnelle descendante.
Concernant l’approche ascendante, toutes les feuilles de route nous font part de l’existence
d’un comité, que nous nommerons comité du numérique de l’Université, une constitution
paritaire en amont des Conseils, et devant lequel la direction de l’établissement présente les
choix envisagés. Ce comité est complété par des enquêtes d’usagers, directement ou
indirectement. Nous retrouvons aussi cette approche qui s’appuie sur l’humain dans le cadre
de l’enquête.
Dans les mots employés, les répondants ont une tendance à confondre la gouvernance avec
ceux qui pilotent la stratégie de l’Université : cette ambiguïté est parfois entretenue par une
communication souhaitant valoriser l’action stratégique de l‘équipe présidentielle en ne
mettant en valeur que l’approche organisationnelle descendante.
En synthétisant l’ensemble des réponses à cette enquête, nous estimons que la gouvernance du
numérique universitaire, telle qu’elle est décrite par ceux qui l’organisent, correspond à l’idée
de ce que nous nous faisons d’une gouvernance.
En effet, nous avons pour cela décomposé la définition de la gouvernance numérique, en trois
sous domaines et nous avons répondu en nous appuyant sur les résultats de cette enquête.
Définition donnée Résultats de l’enquête
Des schémas directeurs existent, ils sont actuels ou
Un ensemble des règles et des processus
dépendants du mandat précédent.
collectifs
Les acteurs participent au travers de leurs usages à
Les acteurs concernés participent à la décision et
des dispositifs de régulation. Des dispositifs
à la mise en œuvre des actions publiques
d’analyse d’usage existent, et permettent de
connaître l’action de l’ Université dans le domaine du
numérique.
Certains dispositifs, notamment les comités,
Négociation constante entre les multiples acteurs
permettent cette négociation. Nous relevons peu
impliqués ? Partage de la responsabilité entre
d’usage des réseaux socionumériques pour le
l’ensemble des acteurs impliqués
feedback
Figure 77 : Comparaison des données avec la définition de la gouvernance.
L’enquête montre un désir de la part de ceux qui pilotent la transformation numérique des
universités de construire une nouvelle gouvernance du numérique.


5.4.5.2 Sous-hypothèse H32 : amélioration de l’image de marque d’une université[modifier]
Il s’agit ici d’une conséquence indirecte de la mise en place de cette association, qui a permis
à des représentants d’Université d’avoir une écoute de la part du ministère, notamment lors de
la création du référentiel de transformation numérique de l’ESR.
Le bénéfice en termes d’image de marque pour l’Université nous paraît au niveau de la
symbolique sous la forme de visites du Ministre Thierry Mandon, réalisées entre 2016 et
2017, dans certaines universités, notamment de province, dont les VP du numérique ont été
acteurs dans la création de cette association (Angers536, Caen537, Perpignan538). Nous nous
doutons que ce n’est surement pas la seule raison, mais nous relevons ici le constat, estimant
que cela y contribue au moins an partie.
536 Paquereau. (2017, mars 8). L’UA, l’innovation « en grand » [Text]. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.univ-angers.fr/fr/universite/actualites/visite-de-thierry-mandon.html
537 UNICAEN. (2017) Université de Caen Normandie - Visite de Thierry Mandon  : la COMUE, le CURB et la
MRSH. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse http://www.unicaen.fr/actualites/vie-de-l-institution/visite-
de-thierry-mandon-la-comue-le-curb-et-la-mrsh-596235.kjsp
538 Made In Perpignan. (2017, février 22). Université  : Avancées du campus Mailly et visite du Ministre Thierry
Mandon. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse https://madeinperpignan.com/universite-avancees-du-
campus-mailly-et-visite-du-ministre-thierry-mandon/

5.5 Observation 4 : Usage d’un réseau socionumérique[modifier]

par les membres de l’ESR
Analyser un des outils utilisés par les membres de l’Université peut contribuer à mieux
comprendre les usages du numérique et à mieux piloter les transformations futures, c’est pour
cette raison que nous portons notre attention sur ce terrain. Nous ajoutons que ce travail a
trouvé écho au sein d’Educpros lors de la lors de la conférence du 17 mars 2016 sur "Les
innovations pédagogiques : quels retours sur investissement ?" et dans un article paru en ligne
« Twitter, comment gazouille l’Enseignement supérieur »539

5.5.1 Choix du cas[modifier]

Le dispositif observé est le micro-blogging Twitter et son usage dans l’enseignement
supérieur et la recherche par les employés de l’ESR : les enseignants et les personnels non-
enseignants.
Twitter540 est l'un des nombreux réseaux sociaux développés au cours de la dernière décennie,
en 2006 plus exactement.
Ce service gratuit, utilisé par 320 millions d’utilisateurs actifs en juin 2016, permet la
diffusion de court message (de 140 caractères), au nombre limité de caractères, au contenu
personnel ou informatif, qui est publié ou transmis instantanément par l'auteur. Il permet aussi
la présentation en masse de messages, images et des liens appelés «tweets» ou « twits ».
Notons, que le vocabulaire associé à ce réseau socionumérique entre en 2013 dans le Larousse
illustré 541sous la forme de « termes neutres micromessage, microbillet et microtexte »542.
Ces messages sont estampillés de métadonnées au moment de l’affichage comme l’heure et la
date de création, et la localisation géographique de l'utilisateur, si cette fonctionnalité n’est
pas restreinte.
539 Mocquet, B. (2016). Twitter  : comment gazouille l’enseignement supérieur. Consulté 25 septembre 2017, à
l’adresse http://www.letudiant.fr/educpros/actualite/Twitter-au-service-de-la-mediation-scientifique.html
540 Twitter. (2016). Entreprise | About. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
https://about.Twitter.com/fr/company
541 Petit Larousse illustré 2013, les «twitteurs» et les «twitteuses». (2012). Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://next.liberation.fr/livres/2012/06/22/petit-larousse-illustre-2013-les-twitteurs-et-les-
twitteuses_828380
542 Oqif. (2016.). Le grand dictionnaire terminologique. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://gdt.oqlf.gouv.qc.ca/ficheOqlf.aspx?Id_Fiche=26502418
Les utilisateurs peuvent être « suivis », ce qui signifie que leurs «tweets» ou micromessages
seront livrés automatiquement à tous leurs «suiveurs». Les suiveurs ou abonnés peuvent
approuver les «tweets» par catégorisation en favoris, sous la forme d’une appréciation
positive (un cœur) ou par diffusion («Retweeter») à leurs propres abonnés. Il existe aussi un
système de messagerie direct entre suiveurs, dont le contenu est invisible publiquement.


5.5.2 Finalité[modifier]

Notre enquête s’intéresse au processus de professionnalisation dans le réseau socionumérique
Twitter des acteurs employés ou membres de l’ESR. Il s’agit aussi d’identifier la nature de ce
processus individuel. Nous souhaitons savoir si une séparation compte personnel/compte-
professionnel existe, et s’il suit un processus commun : d’usage personnel avant usage
professionnel ou l’inverse.
Ce terrain aborde la globalité du système, tel que nous l’avons schématisé au paragraphe
2.6.6. et sur la figure ci-dessous.[modifier]
Figure 78 : L’observation 4 agit sur tout le système.
La communication réalisée sur le réseau socionumérique est aussi analysée. D’un point de vue
fond et forme, mais aussi contexte, sens et avec quels récepteurs.
Enfin, dés lors qu’il s’agit d’un usage « acquis par la rue »543 entrant dans la pratique
professionnelle d’un acteur de l’Université, et qu’il implique « des comportements de création
et de consommateur » sur l’objet numérique544, nous sommes tentés de le considérer comme
un dispositif en consocréation comme « une tentative de co-création initiée par le
consommateur. » .


5.5.3 Phase de recueil de données[modifier]

Le recueil de données se fait par l’intermédiaire d’une enquête puis par des entretiens
succincts de certains volontaires afin de mieux comprendre les différentes réponses dans le
dispositif numérique de collecte.


5.5.3.1 Protocole et description de l’enquête par questionnaire[modifier]
Nous avons réalisé une enquête par questionnaire en ligne auprès des usagers de Twitter ayant
un intérêt pour les thématiques de l’enseignement supérieur, et s’affichant en tant que tels sur
ce réseau social sur la description du profil de leur compte.
Cette enquête a été réalisée entre le 22 décembre 2015 et le 24 j anvier 2016, diffusée en deux
vagues sur Twitter (Tableau suivant) : les messages de diffusion ont été visibles sur 15446
comptes, avec un engagement mesuré de 169 clics vers l’enquête. Au total, il s’agit de 182
répondants pour la période d’ouverture de l’enquête.
543 Vidal, G., & Collectif. (2012). op. cit. p66
544 Gobert, T. (2014). Consocréation: la quête de l’originalité comme illusion de compétence créatrice. Création
et consommation.
545 Perchat. (2015). Créons ensemble de nouvelles richesses  =: Conso-création. Consulté le 25 septembre 2017, à
l’adresse http://boris.typepad.fr/chasseur_de_futurs/la_consocration/
Message du diffusion Impressions (« Le nombre d’impressions
correspond au nombre de fois où un tweet a été
placé dans la timeline de l’utilisateur alors que
Date
celui-ci le consultait. » )
23 décembre Impressions 14 950
2015 Engagements totaux 576
Engagements avec le média
nombre de clics sur votre média comptés parmi 195
les vidéos, Vines, fichiers GIF et images
Clics du lien 167
Ouvertures des détails 72
Retweets 69
Clics sur le profil 40
J'aime 23
Réponses 9
Suit 1
10 janvier Impressions 496
2016
Engagements totaux 7
Retweets 2
Clics du lien 2
Ouvertures des détails 2
Engagements avec le média 1
Tableau 37 : Calendrier et impacts de diffusion.
Le support technologique de l’enquête s’appuie sur un formulaire Google, choisi pour sa
facilité de diffusion et de traitement automatique des données collectées.
Notre échantillon est de type volontaire, il est bien évidemment exclu de tenter toute
généralisation qui serait bien évidemment l’œuvre du hasard. Sur la base du sondage proposé
en ligne, 182 questionnaires ont été complétés.
546 Chambard, J. (2014, octobre 7). Twitter Analytics. Consulté le 25 septembre 2017, à l’adresse
http://www.dictionnaireduweb.com/Twitter-analytics/

5.5.1 Exploitation et interprétation des données[modifier]

L’enquête est réalisée en cinq sections indépendantes. Nous les traiterons en suivant ce plan
d’enquête.
Section 1 Appartenance à un type d’acteurs interne à l’enseignement supérieur et la recherche
Section 2 Vous et le nombre de comptes sur Twitter
Section 3 Twitter comme dispositif de consommation dans votre profession
Section 4 Twitter comme dispositif de création dans votre profession
Section 5 Concernant le répondant
Tableau 38 : Les sections de cette enquête.


5.5.1.1 Appartenance à un type d’acteurs internes à l’enseignement supérieur et la[modifier]
recherche
Nous constatons que toutes les catégories ciblées, les acteurs internes à l’enseignement
supérieur et la recherche (Figure suivante), ont répondu à cette enquête.
Nous remarquons que :
  • 11,5% ne travaillent pas dans l’enseignement supérieur et la recherche, ils ne seront
pas concernés par la suite de l’enquête,
  • la catégorie ayant le plus répondu est « Enseignant(e)/Chercheur » 31,3%,
  • la catégorie ayant le moins répondu est « Enseignants vacataires » 6%
Figure 79 : Répartition des répondants par catégorie dans l’ESR.


5.5.1.2 Vous et le nombre de comptes sur Twitter[modifier]
Cette section se décompose en deux sous-sections : la possession d’un seul compte Twitter,
la possession d’au moins deux comptes Twitter (figure suivante).
Figure 80 : Nombre de compte(s) utilisé(s).
Ce choix est la condition pour interroger sur la nature (personnelle ou professionnelle) des
informations postées avec un compte (Figure 81), avec au moins deux comptes (Figure 82).
Si la majorité des répondants (57,1%) possède un seul compte, nous remarquons qu’ils sont
42,1% à déclarer avoir deux comptes ou plus.
Vous avez un compte de micro-blogging .
Parmi les 92 répondants qui ont un seul compte, un peu plus de la majorité (48,9%), l’utilise
pour un usage double : personnel et professionnel. Un peu plus d’un tiers d’entre eux (33,7%)
le limite à un usage professionnel tandis que les autres (17,4%) se restreignent à un usage
personnel de ce réseau social.
Au niveau de la nature des informations postées, la minorité (8,7%) ne diffuse que dans le
cadre d’informations professionnelles, 44,6% des informations professionnelles et la majorité
(48,7%) des informations tantôt personnelles tantôt professionnelles.
Figure 81 : Un seul compte personnel ou professionnel.
Figure 82 : Un seul compte, types d’informations postées.
Vous avez au moins deux comptes de micro-blogging
Parmi les 68 répondants, la moitié possède plusieurs comptes professionnels (Figure 83).
36,8% d’entre eux expriment la raison pour laquelle ils utilisent au moins deux comptes,
comme étant est due à la volonté de séparation de la vie personnelle de la vie professionnelle.
4,4% ont plusieurs comptes personnels, et 8,8% ont une raison autre, qui concerne des
données privées au sens de la CNIL (religion, partie politique) ou vie associative. La nature
des informations publiées est majoritairement (54,4%) un mélange entre informations
personnelles et professionnelles (Figure 84), et 45,6% publient uniquement des informations
professionnelles.
Figure 83 : Deux comptes au moins - Les raisons.
Figure 84 : Deux comptes au moins - Personnel ou Professionnel.
Nous constatons en comparant les deux figures précédentes, que les répondants utilisant au
moins deux comptes ne publient pas d’informations personnelles exclusivement contrairement
à ceux qui ont un seul compte.


5.5.1.3 Twitter comme dispositif de consommation dans votre profession[modifier]
Quatre usages professionnels ont été choisis et proposés aux répondants pour connaître leur
fréquence (Figure suivante) en termes de consommation de ce réseau social.
Figure 85 : Types d'usages réalisés.
L’activité la plus fréquente est la republication de messages d’une autre personne, « le
Retweet », suivi de la valorisation d’un article web, « le partage d’articles web ». Les activités
de publication de twitt spécifique, sans lien, ou de contact par message direct, « DM » sont
parfois voire jamais utilisés.
Les usages professionnels les plus souvent utilisés (Figure suivante) sont les échanges entre
pairs, et avec des personnes extérieures à l’enseignement supérieur.
Figure 86 : Avec qui entretenez-vous des interactions ?
5.5.1.4 Twitter comme dispositif de création dans votre profession[modifier]
Parmi les 160 répondants, la majorité (56,3%) est entré dans une logique de création avec
Twitter dans son métier (Figure suivante).
Figure 87 : Processus de création professionnelle avec le micro-blogging ?
Cette création concerne très souvent des nouvelles relations professionnelles, une médiation
de leur recherche (Figure suivante), tandis que « des nouvelles relations avec vos étudiants »
n’est jamais cité.
vos étudiants
Figure 88 : Type d'usages créatifs.
Figure 89 : Domaine concerné par la création faite.
Les domaines de création concernent pour la catégorie « très souvent » en premier lieu la
recherche, puis la médiation de la recherche et le service. Pour les catégories « parfois » et
« jamais », nous constatons que la pédagogie est peu utilisée comme un domaine de création.


5.5.1.5 Comparaison des différents usages de création[modifier]
Nous souhaitons comparer les différents usages de création : celui de la pédagogie (Figure
90), celui de la recherche (Figure 91) et celui des services (Figure 92). Nous constatons que
les trois profils sont distincts : il y a bien une création singulière qui apparaît en fonction de la
finalité du répondant.
Pour la création concernant « votre pédagogie » ou « la médiation de votre pédagogie », la
réponse dominante est pour « provoquer des échanges avec la communauté » (36 répondants)
et en deuxième lieu pour « informer la communauté externe à l’Université » ( 19 répondants).
Informer la
communauté
externe à
l'université
40 Informer la
Valoriser
30 communauté
votre
établissement 20 interne à Votre Pédagogie
l'université
0
La médiation de
Provoquer
Valoriser
votre des votre pédagogie
échanges
travail
avec votre
Vous
valoriser
Figure 90 : Quelle création sur Twitter pour la pédagogie ?
Pour la création concernant la recherche, la réponse dominante concerne « informer la
communauté externe à l’Université » (45 répondants) suivi de « Provoquer des échanges avec
votre communauté » (29 répondants) et « valoriser votre travail » (22 répondants)
Informer la
communauté
externe à
l'université
40 Informer la
Valoriser
30 communauté
votre
établissement 20 interne à Votre recherche
l'université
0
Provoquer La médiation de
Valoriser des votre recherche
votre échanges
travail avec votre
communauté
Vous
valoriser
Figure 91 : Quelle création sur Twitter pour la recherche ?
Enfin pour « valoriser votre service », « provoquer les échanges avec la communauté » est en
tête (28), suivi de « informer la communauté externe à l’Université » (23 répondants) et
« valoriser votre établissement » (23 répondants)
Informer la
communauté
externe à
l'université
40 Informer la
Valoriser
30 communauté
votre
établissement 20 interne à Votre service
l'université
0
Provoquer La médiation de
Valoriser des
votre service
votre échanges
travail avec votre
communauté
Vous
valoriser
Figure 92 : Quelle création sur Twitter pour les services ?
Ces trois graphes font apparaître des stratégies de communication professionnelle distinctes.
Pour la médiation considérée ici comme « Instance qui assure, dans la communication et la
vie sociale, l’articulation du sujet et de sa singularité et la dimension collective de la
sociabilité et du lien social. »547, elle se superpose avec l’objet en lui-même : peut-être que ce
réseau social est perçu par ses usagers comme un dispositif de médiation.
Les trois graphes nous montrent aussi que « se valoriser » est très peu cité, ce qui serait un
élément contradictoire avec une vision stéréotype qui serait que les professionnels sur Twitter
l’utilisent surtout pour se valoriser.


5.5.1.6 Concernant les répondants[modifier]
Cette dernière section permet de mieux qualifier les répondants en termes d’auto-
positionnement de leurs usages du numérique (Figure suivante). 80 répondants sont entrés en
premier lieu dans un usage personnel avant un usage professionnel, 35 ont eu un processus
inverse. Plus de 100 répondants se considèrent comme des personnes innovantes et possédant
un bon usage du numérique.
547 Lamizet, B., & Silem, A. (1997). Dictionnaire encyclopédique des sciences de l’information et de la
communication. Ellipses Marketing.
J'ai essayé les réseaux
sociaux personnellement
avant de les utiliser dans
mon travail
J'ai essayé les réseaux
sociaux
professionnellement avant
de les utiliser dans ma vie
personnelle
Je suis intéressé par ce qui
est innovant
J'ai un bon usage du
numérique
Rien de tout ceci
Figure 93 : Comment vous positionnez-vous ?
Enfin, sur le genre des répondants, 68,1% des répondants sont des hommes, et 31,3% sont des
femmes, cette statistique n’est pas comparable (pas de méthode des quotas pour cette enquête)
avec une des dernières enquêtes548 qui placerait un usage de 55% pour les hommes et 45%
pour les femmes.
Figure 94 : Genre.
548 Sourenian, D. (2014). Twitter : Etude des usages et attitudes en France. Consulté le 25 septembre 2017 à
l’adresse http://fr.slideshare.net/sabrinaxenofontos/Twitter-etude-des-usages-et-attitudes-en-france-38682820
Figure 95 : Classe d'âge.
Enfin l’âge des répondants a été demandé, nous constatons que toutes les catégories sont
représentées hormis les 66 ans et plus.


5.5.2 Discussions pouvant contribuer à une piste de généralisation[modifier]

L’enquête montre qu’il n’y a pas de séparation compte personnel/compte-professionnel chez
le plus grand nombre des répondants, la grande majorité l’utilisant dans le cadre de leur vie
personnelle ou professionnelle. Il est à noter que dès qu’au moins un deuxième compte est
créé, la finalité est de bien séparer les informations personnelles des informations
professionnelles.
Nous souhaitions mettre à l‘épreuve des sous-hypothèses au travers de cette observation
Codification des hypothèses H11 : Approche H2 : des dispositifs H32 : amélioration de
organisationnelle différenciés pour l’image de marque d’une
descendante et développer les usages Université.
ascendante
Observation 4 : Une enquête
quantitative sur un dispositif d’usage
du numérique X X X
spécifique : « l’usage de Twitter dans
l’ESR »
Tableau 39 : L’observation 4 teste les hypothèses H11 et H2.


5.5.2.1 Sous-hypothèse H11 : Approche organisationnelle descendante et[modifier]
ascendante
Concernant notre corps d’hypothèses, nous estimons qu’analyser un dispositif spécifique
utilisé par les membres de l’Université, permet de faire remonter des informations d’usages au
pilotage de la stratégie (Approche organisationnelle ascendante), et offre une opportunité
d’ajuster la stratégie numérique autour de cet usage pour les gouvernants (Approche
organisationnelle descendante).
Ce travail d’observation enrichit la connaissance des usages avérés des membres de
l’Université et permet d’adapter la stratégie numérique des futurs dispositifs TIC (par
exemple, formation adaptée grâce à cette connaissance).


5.5.2.2 Sous-hypothèse H2 : des dispositifs différenciés pour développer les usages[modifier]
Pour l’usage de ce réseau social, le processus est clairement dans un premier temps un usage
personnel puis un usage professionnel avec pour chacun, une consommation de l’outil puis un
désir de création voire de contournement pour l’utiliser dans son travail. Cette
« consommation » de Twitter se résume à des activités de partages plus que de production de
contenus : étant donné la limite des 140 caractères, les répondants souhaitent peu diffuser du
contenu universitaire. Pour ce qui est des raisons de « la création » des profils, des situations
très distinctes apparaissent en fonction de l’objet de communication : tout d’abord nous avons
la recherche qui est le domaine prédominant, suivi de la pédagogie puis la valorisation de son
service.
Le type de communication retenu est plus généralement à destination de la communauté à
l’extérieur de l’Université, finalement peu avec les étudiants, et avec les collègues en interne.
Le mode de création est surtout un mode de médiation de son activité, et dans le cadre de la
typologie des répondants essentiellement pour la recherche.


5.5.2.1 Sous-hypothèse H32 : amélioration de l’image de marque d’une université.[modifier]
La communication des universités à travers les usages des réseaux socionumériques se fait
dorénavant en considérant que chacun des acteurs peut y contribuer spontanément. Cela
interroge la communication traditionnelle des instituts publics, qui s’opère le plus
généralement autour de la personnalité de son dirigeant ou à travers les actions réalisées par
ceux qui dirigent l’établissement. En s’appuyant sur tous les acteurs, qui valorisent leur travail
au sein d’une université, nous pouvons multiplier les traces sur les réseaux socionumériques
et impacter sur l’image de l’établissement.


5.6 Observation 5 : Etude de cas sur les habitudes de[modifier]

connexion aux TIC dans l’ESR

5.6.1 Choix du cas[modifier]

Nous canalisons notre observation sur le niveau d’usages du numérique au regard des
modalités et des raisons de connexion/déconnexion des outils des TIC sur un groupe
d’individus que nous souhaitons le plus représentatif possible des métiers des membres de
l’ESR. C’est aussi l’occasion de questionner un échantillon d’individus sur leurs conditions
d’usages. Pour nous, cette étude de cas est emblématique de la position de chercheur que nous
souhaitons à terme développer davantage, la recherche intervention549. Ce type de recherche
s’articule autour d’un processus qui pourrait être : (1) un phénomène extérieur à l’Université
s’impose aux membres et usagers, (2)une observation est faite sur l’effet de ce phénomène sur
les usages du numérique de tous les membres, (3) une problématique est mise en valeur avec
les acteurs, (4) des propositions de pistes sont envisagées pour la nouvelle gouvernance du
numérique.


5.6.2 Finalité[modifier]

À travers l’effet de la déconnexion au numérique dans un contexte professionnel, notre travail
de recherche souhaite mettre en avant les modalités d’usages du numérique des membres de
l’ESR.
Nous constatons que les membres de l’ESR se connectent sur leur appareils personnels
(Smartphone, tablettes ou ordinateur) pour relever leur messagerie professionnelle, et cela
tous les jours de la semaine, à n’importe quelle heure, qu’ils soient en congés ou non.
L’obligation de se connecter n’est pas imposée par l’établissement, puisqu’elle se passe sur
des appareils personnels, et c’est en toute autonomie que cette connexion se déroule. Nous
considérons qu’il n’est plus personnel dans le cas où certaines universités mettent à
disposition cet appareil à certains membres sous conditions de fonction : Smartphone pour
postes de direction, ordinateur ou tablette pour les enseignants chercheurs par exemple.
Nous faisons l’hypothèse que la déconnexion se déroule non pas par rejet au TIC mais bien
par volonté d’améliorer le bien-être au travail : le sentiment majoritaire des membres de
549 Savall, H., & Zardet, V. (1996). La dimension cognitive de la recherche-intervention: la production de
connaissances par interactivité cognitive. Revue internationale de systémique , 10, 157-189.
l’ESR qui se déconnecte selon leur propre volonté serait positif et il provoquerait un
isolement positif propice à une meilleure qualité de vie personnelle et professionnelle.
Figure 96 : Observation du système lorsqu’un nouvel évènement extérieur intervient.
Plus globalement, il s’agit de vérifier les hypothèses qui concernent la nouvelle gouvernance,
au travers de dispositifs utilisés par la communauté universitaire. Puis étant donné que les
conditions de travail pourraient s’améliorer en maitrisant la connexion/déconnexion, estimer
le bénéfice pour l’Université en termes d’image de marque.


5.6.3 Phase de recueil de données[modifier]

5.6.3.1 Dispositifs de collecte de données[modifier]
Notre dispositif de collecte repose sur un questionnaire proposé en ligne. Nous avons choisi
de créer le formulaire en utilisant l’outil Google Forms pour faciliter l’accès aux participants à
partir d’invitations faites en ligne. En ce qui concerne l’analyse des résultats de l’enquête,
nous avons opté pour le traitement des données par un logiciel tableur, et un générateur
graphiques de mots clés.
Notre population au sens statistique est constituée par 100 personnes de l’ESR, réparties dans
23 établissements en France, choisies selon plusieurs critères :
  • Une répartition par statut des personnels, en respectant le taux national (Tableau 40)
Panel testé Taux national (*)
BIATSS 37 37% 56000 38%
Enseignant 25 25% 34000 23%
Enseignant/Chercheur 38 38% 56000 38%
100 146 000
(*) Source http://data.enseignementsup-recherche.gouv.fr
Tableau 40 : Panel des personnels interrogés.
  • Une répartition sur tout le territoire de la France métropole (Figure suivante),
Bas-Rhin 6
Bouches-du-Rhône 4
Charente-Maritime 5
Gironde 4
Haute-Garonne 5
Hérault 4
Loire-Atlantique 5
Loiret 5
Maine et loire 5
Marne 5
Paris 12
Puy-de-Dôme 10
Pyrénées-Atlantiques 4
Pyrénées-Orientales 5
Réunion 4
Rhône 4
Val d’Oise 4
Val de marne 5
Var 4
Total 100
Figure 97 : Répartition géographique des questionnés.
  • Leur e-mail était présent sur le site de l’université ou laboratoire, conditions
indispensables nous prouvant que le contact était possible par messagerie électronique.
Ils ou elles ont été contactés directement par courrier électronique entre le 11 avril et le 4 mai
2017.


5.6.4 Exploitation et interprétation des données[modifier]

Nous avons décidé de collecter les données brutes issues des questions ouvertes, en repérant
les occurrences et en proposant une représentation au moyen de nuages de mots.
En ce qui concerne l’analyse de certains résultats de l’enquête, nous avons opté pour le
tableur avec recours aux tableaux croisés dynamiques. En effet, l’analyse des questions
fermées, à l’aide de ce logiciel utilisé pour nos traitements550, permet de croiser des variables
(tris croisés) ou encore d’appliquer des filtres afin de travailler sur des strates plus
particulières de notre population statistique (sous-échantillons construits à partir de critères
particuliers).


5.6.4.1 Questionnaire et variables[modifier]
Le questionnaire, avec une durée de passation d’environ dix minutes, comporte 18 questions
très majoritairement de type fermées et admettant selon les cas une seule ou plusieurs
réponses. Il est organisé en plusieurs sections :

1. Les usages du numérique déclarés par le répondant.[modifier]

2. L’usage du courrier électronique attribué par l’employeur.[modifier]

3. Les modalités de connexions/déconnexions au TIC.[modifier]

4. Des informations générales concernant le participant à l’enquête.[modifier]

5. Les effets de la déconnexion (effective ou envisagée).[modifier]

Au sein des quatre premières sections, les principales variables étudiées se répartissent autour
de la mesure du niveau d’usage du numérique à travers une série d’outils, et plus
particulièrement les modalités concernant le courrier électronique ainsi que quelques variables
de type sociodémographique (genre, âge). La dernière section est conditionnelle : elle n’est
ouverte que pour les répondants ayant déclarés envisager ou avoir mis en œuvre une
organisation personnelle de leur déconnexion.


5.6.4.2 Population et échantillon[modifier]
Notre échantillon est de type volontaire, il est bien évidemment exclu de tenter toute
généralisation, fruit du hasard. Sur la base du sondage proposé en ligne, 36 questionnaires ont
550 Tremblay, J.-M. (2000). Guide d’initiation au traitement informatique de données de recherche avec le
chiffrier Microsoft Excel. Consulté le 25 septembre 2017 à l’adresse http://e-
sdeir.uqac.ca/173/1/11893149T1.pdf
été complétés. Après une première vérification, il apparaît que l’un d’entre eux doit être écarté
s’agissant d’une personnes n’étant plus salariée de l’Enseignement Supérieur et de la
Recherche, mais retraité. Nous effectuons notre analyse sur les autres questionnaires validés,
soit n=35 ce qui correspond à l’effectif de notre échantillon volontaire de salariés de
l’Université qui ont participés à notre enquête.
Notre échantillon (n=35) est constitué majoritairement d’hommes. Sans entrer dans une
analyse prenant en compte le genre qui dépasse largement le cadre de notre étude, nous
constatons une représentation des hommes à hauteur de 62,9%.
En ce qui concerne l’âge des participants (Figure suivante), si aucun répondant n’a entre 18-
25 ans ou 66 ans et plus, nous pouvons constater que les répondants ont tous et toutes entre 26
et 66 ans, ce qui correspond à l’âge de la classe socioprofessionnelle active dans l’ESR.
Figure 98 : Classe d'âge des 35 répondants.
Concernant le statut des répondants, et pour reprendre la méthodologie annoncée, la
répartition des répondants n’est pas tout à fait en accord avec la répartition initiale : les
enseignants/chercheurs ont plus répondu aux questionnaires que les enseignants, les BIATSS
ont répondu conformément aux taux national (Tableau 41).
Panel des répondants
BIATSS 12 34%
Enseignant 4 11%
Enseignant/Chercheur 19 54%
Tableau 41 : Statuts des répondants.
Notre échantillon paraît ainsi surreprésenté par des répondants enseignants/chercheurs, nous
en tiendrons compte dans les discussions autour de certains points de l’enquête. Nous ne
pourrons que dresser des tendances à partir de ces données.


5.6.4.3 Les outils utilisés dans l’ESR[modifier]
La totalité des répondants (Figure suivante) déclarent utiliser le courrier électronique dans le
cadre de leur travail, 83% utilisent l’agenda numérique, alors que l’usage des réseaux
socionumériques n’est pas développé pour 31% d’entre eux.
Figure 99 : Usage des outils TIC dans le cadre de votre travail.
Il semble que les participants à notre enquête déclarent n’avoir qu’un usage modéré des
réseaux socionumériques dans leur pratique professionnelle. C’est ainsi que nous canaliserons
le questionnement sur l’usage au courrier électronique pour le reste de l’enquête.
Cet courrier électronique est utilisé sans distinction comme contact personnel et contact
professionnel par 31,4% d’entre eux. 68,6% des répondants ont installé la connexion à leur e-
mail sur un appareil personnel (ordinateur, portable, téléphone portable, tablette...) dans un
souci de fonctionnement professionnel « plus pratique » « d’immédiateté » notamment en
phase de « mobilité professionnelle », nous comprenons en mission en dehors de l’Université.
Ceux qui n’ont pas installé leur e-mail sur un appareil personnel (31,4%) déclarent leur
souhait de « séparer le travail et la vie privée » même si pour l’un d’entre eux « une
étanchéité entre les deux parait impossible ».
L’enquête révèle ce que nous supposions, la connexion est bien effective chez les répondants
et le courrier électronique semble bien adopté par eux.


5.6.4.4 Les moments de connexion[modifier