L’homme n’est-il qu’un singe plus évolué que les autres ?

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Les plus évolués des singes montrent des aptitudes étonnantes, mais cela ne suffit pas à légitimer une conception simplement biologique de l’origine de l’homme. L’évolution de l’homme comporte des énigmes insolubles, et l’homme est plus que ce qu’il peut et pourra jamais savoir de lui-même.


Sommaire


1. L’Homme, restera toujours pour lui-même un mystère, car il ne peut être juge et partie. Sa raison avec laquelle il essaye de percer l’énigme de son origine et de sa destinée, apparaît elle-même bien plus comme un problème que comme une solution. Il applique alors une vielle recette : essayer de comprendre le mystérieux à l’aide de ce que l’on pense déjà connaître. Soit il se compare aux machines qu’il crée, soit il se compare aux animaux et tout spécialement aux singes qu’il connaît de mieux en mieux.

Ramener l’homme à ce qui lui est inférieur relève d’une métaphysique réductrice, d’essence matérialiste[modifier]

Ainsi, l’historien Xavier Martin note que « L’homme des Lumières vomit le thème biblique de l’homme image de Dieu » et montre « sa volonté réductrice de l’homme, ramené à l’organique, à l’animalité, avec un entrain voire une allégresse qu’à vue humaine on s’explique mal » ... du moins si l’on oublie l’anticatholicisme ambiant. Montesquieu affirme platement : «Tous les hommes sont des bêtes ». Hume soutient que « les bêtes sont douées de pensées et de raison aussi bien que les hommes. » (1739) et Diderot, dans un but de pure provocation, envisage l’engendrement d’hybrides mi-homme, mi-bouc « pas bien moraux » et dont « la question de leur baptême... ferait un beau charivari en Sorbonne » ! Actuellement, l’éthologiste Pascal Picq reprend ces aberrations : « Tous ces grands singes ont nos visages. [...] On a des individus, des personnes. [...] Le grand singe est notre égal » (2005). D’autres philosophes des "Lumières", ont considéré que l’homme n’était qu’un automate, une machine dépourvue de liberté. Cette conception, fut théorisée par le médecin La Mettrie qui prétend n’accepter de faire "quelque cas des hommes" que parce qu’il " les croit sérieusement des machines" auxquelles l’on ne peut reprocher leurs défauts (1747) ! Voltaire se servit même de ce concept pour ironiser sur la charité : « Heureuses les machines qui peuvent s’aider mutuellement ! » Ce parti pris de ramener l’homme à moins que lui-même, par exemple à ses pulsions sexuelles, est plus que jamais d’actualité ; c’est l’un des arguments du matérialisme.

L’éminent Darwin, était lui-même tenté par une réduction de l’homme à l’animal[modifier]

Devant un habile cavalier, il s’émerveille « Je n’imaginais pas que les deux animaux pussent s’adapter aussi bien l’un à l’autre. » Ce n’est pas là qu’une boutade, c’est une thèse philosophique « J’ai l’intention de démontrer [...] qu’il n’existe aucune différence fondamentale entre l’homme et les mammifères les plus élevés, du point de vue des facultés intellectuelles. » ("The Descent of Man", 1871). Ce parti-pris le conduit même à proférer des comparaisons erronées : «… le cerveau d’une fourmi est l’une des plus merveilleuses parties de la matière, peut-être même plus que le cerveau de l’homme ». Cette dépréciation "animale" de l’homme, est en fait très ancienne dans son esprit. L’un de ses meilleurs commentateurs précise : « Dans ses carnets secrets, au moment où il élabore sa théorie, à l’âge de 28 ans, il note [en espagnol par discrétion] "Cuidado" [sois prudent !] ; "le tissus entier se déchire et s’effondre". Puis : "mais l’être humain – le merveilleux être humain est une exception" ; et trois lignes plus bas, "non, il n’est pas une exception" » (Pr. J.-Cl. Ameisen, 2008). Enfin, il passe parfois de la similitude à l’égalité en évoquant : « Les animaux, dont nous avons fait nos esclaves [et que] nous ne voulons pas considérer comme nos égaux. » (De l’Origine des Espèces…, 1859).

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2.Le chimpanzé et l’homme présentent des similitudes génétiques nettes, mais sans portée déterminante. Elles sont dues au fait que les préhominiens, d’une part, et les ancêtres des "grands singes" (orang, gorille, chimpanzé, bonobo) d’autre part, se sont séparés et ont pris des directions évolutives différentes, il y a seulement 6 à 10 millions d’années. Ces éléments génétiques ne permettent cependant pas d’élucider le problème de l’hominisation.

La similitude génétique entre le singe et l’homme sert indûment à rabaisser ce dernier[modifier]

Génétiquement, l’homme et le singe sont très semblables à environ 98,8%. Cette similitude sert d’argument aux scientistes : « ... la plupart des penseurs considèrent le chimpanzé comme contrefait, bizarre et sans importance, tandis qu’ils se perçoivent eux-mêmes comme en marche vers le Tout-Puissant. [...] Il ne peut en être ainsi. Il n’existe aucune base objective qui permette de hausser une espèce au dessus d’une autre. » (R. Trivers, Pr univ. Rutgers, 1976). L’un des plus célèbres généticiens (Pr univ. Leipzig) annonçait, dès les débuts de la génomique : « notre place dans la nature va être à la fois une source d’humilité et un coup sérieux porté à l’idée du caractère unique du genre humain [...] Réaliser qu’un ou quelques accidents génétiques ont rendu l’histoire humaine possible nous fournira un ensemble de défis philosophiques à relever.» (2001). Pourtant, il en vint à concéder : « C’est une illusion de penser que la génomique seule nous dira ce que veut dire être humain », avouant finalement : « Le sale petit secret de la génomique, c’est que nous ne savons toujours quasiment pas comment un génome se traduit en spécificités caractérisant un être vivant donné. » (Svante Pääbo: Neandertal Man, 2014)

La génétique peut même être instrumentalisée pour contester indirectement la religion[modifier]

Ainsi, Axel Kahn, médiatique généticien parisien, prétend constater péjorativement : « Nous sommes non seulement d'une grande banalité mais, d'un point de vue génétique, n'avons pas même été particulièrement innovants. » (L’animal de vérité, 2007). Son parti-pris de considérer la genèse de l’humanité d’une façon réductrice, le conduit même à affirmer : « La proximité évolutive, les similitudes comportementales entre le mammifère humain et d’autres animaux, en particulier les grands singes, ont contribué à rendre bien incertaines les frontières classiques de l’humanité et de l’animalité. En bref, la sacralité essentielle de l’Homme, créature irradiée par une étincelle de co-divinité ou prodige ultime de l’évolution, est une position qui n’est plus guère tenable. » [...] « Le recul massif de la religiosité traditionnelle affaiblit toute référence à un humanisme fondé sur la dignité intrinsèque de la créature privilégiée de Dieu, façonnée à son image. [...] l’idée selon laquelle Homo sapiens n’est qu’un avatar de l’évolution, au même titre que l’ensemble des autres êtres vivants, s’impose. » ("La responsabilité, base d'un humanisme sans transcendance", Blog. Musée de l’Homme, 2.10.2009).

Cette approche génétique est un argument en trompe l’œil[modifier]

Tout d’abord parce que les avis divergent sur ce qu’il faut considérer comme représentant la complexité efficiente du génome. A fortiori, le nombre de gènes n’est pas pertinent , la quantité d’ADN ne l’est pas plus  ; les mêmes généticiens qui essayent de semer le trouble en insistant sur la similitude génétique singe-homme à 99% environ, se gardent bien de dire qu’elle est du même ordre avec le mouton au point qu’une généticienne Néo-Zélandaise exprime : « En gros les moutons sont "humains", 98% de nos gènes sont les mêmes » (2000). D’autre part, de très primitifs cousins des vertébrés (certaines ascidies) partagent encore, avec nous 80% de leurs gênes, or ce ne sont que de petites "outres à deux goulots", fixées sur les fonds marins et sans tête ni membres ! Ceci s’explique parce que la plupart des gènes codent essentiellement les matériaux de base de la vie, et les enzymes assurant le métabolisme cellulaire, lesquels sont des protéines, identiques ou similaires omniprésentes chez quasiment tous les êtres vivants.

Il n’existe pas de gène(s) spécifique(s) de l’hominisation[modifier]

Divers gènes ont suscités successivement de faux espoirs : "GLUD2", est certes capital pour le métabolisme cérébral, mais il est apparu bien avant la séparation entre les singes et les ancêtres de l’homme. Le gène "FOXP2" lié aux communications sonores a subi deux mutations chez l’homme, il a pu favoriser l’apparition du langage, mais sans en être pour autant une cause suffisante. Ainsi, Michel Morange (Prof., ENS) exprime clairement : « Les gènes ne portent pas de fonctions humaines, ils codent des ARN et des protéines. [...] Il ne peut y avoir de gène du langage c’est une absurdité ! » Nous pouvons donc conclure avec lui que « Les données actuelles chassent l’idée que l’on pourrait expliquer simplement l’évolution humaine par un simple changement de la formule chromosomique [...] Ce type d’explication simpliste ne tient pas. [...] En réalité, les mutations génétiques ont ouvert des possibilités à l’évolution humaine, mais elles ne contenaient pas en germe tout ce qui s’est passé ensuite [...] L’explication de la spécificité humaine ne sera pas dans la caractérisation spécifique des gènes. » (L’homme et le singe, conférence univ. de Tous Les Savoirs, 12.6.2008) https://www.canal-u.tv/video/universite_de_tous_les_savoirs/l_homme_et_le_singe_michel_morange.3800

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3. Les singes et l’homme présentent des similitudes comportementales et cognitives notables, mais des similitudes seulement. Ces ressemblances, nous amusent et nous interpellent, il est légitime et instructif de les approfondir avec autant d’objectivité que possible. Cette tâche est difficile parce qu’elle met en jeu l’image que l’homme se fait de lui-même. Il faut éviter de tomber dans l’un de ces deux extrêmes : vouloir faire du singe quasiment l’équivalent d’un homme (inachevé), ou au contraire, méconnaître les étonnantes aptitudes de ces primates.

L’utilisation spontanée d’outils par le chimpanzé est une réalité peu signifiante[modifier]

Découvert au début des années 60, l’usage de ces outils reste modeste : brindille pour "pêcher" des termites dans un trou, éponge de mousse pour récupérer l’eau dans un creux inaccessible, pierre pour casser des noix, bâtons servant d’armes, de crochets, etc. Il fut cependant présenté d’emblée comme le signe d’une hominisation s’amorçant déjà chez le singe. La " frontière" de l’outil que l’on considérait comme séparant l’homme des singes supérieurs, devenait un passage. Mais l’on dut bientôt reconnaître que cette capacité d’user d’outils n’était aucunement propre aux singes et confinée à la zone frontière les séparant de l’homme. Les sapajous eux aussi cassent des noix avec des pierres - or ils sont six fois plus éloignés de nous que les chimpanzés. D’ailleurs l’usage d’outils est répandu dans le règne animal et cela sans rapport évident avec l’évolution cérébrale : les corbeaux aussi se servent de brindilles pour extraire des insectes de leur cache ; les pies peuvent utiliser le passage des voitures pour casser des noix et certains poissons se servent de rochers comme enclume pour casser des coquillages, etc. Même les insectes se servent d’outil : des fourmis usent de leurs larves sécrétant de la soie, comme d’un tube de colle, des araignées tissent un filet qu’elles jettent sur leurs proies ! L’usage de l’outil par les singes n’en fait pas des "proches", pas plus que le fait que les corbeaux comprennent la montée du niveau du liquide dans un récipient (si l’on y met des cailloux) aussi efficacement que des enfants de 6 ans environ, ne permet de réduire ces derniers à des "corbeaux améliorés" !

Le chimpanzé, le bonobo et l’orang-outan sont capables de se reconnaître dans un miroir[modifier]

En effet, voyant dans une glace que leur front porte une tache de peinture, ils cherchent à se l’enlever. Certains scientifiques ont vu dans cette réaction – que les enfants ne réussissent que vers 18 mois à un an – une preuve de la reconnaissance de soi, ce qui est légitime, voire de la "conscience de soi", ce qui l’est beaucoup moins. En effet, la reconnaissance de sa propre image n’implique pas une véritable conscience de soi ; celle-ci, en effet, présuppose l’existence d’un "soi" qui soit bien plus que l’interface entre des sensations plus ou moins gratifiantes et des réponses plus ou moins stratégiquement sophistiquées en vue d’un intérêt plus ou moins immédiat. Cependant, comme le mot "conscience" comporte en éthologie une dizaine d’acceptions – certaines très limitées – comme le fait d’être averti des caractéristiques de notre environnement immédiat, ou d’y être attentif – on lit couramment que les animaux, et les singes en particulier, ont une "conscience". Celle-ci n’a évidemment rien à voir avec la conscience morale. Cette reconnaissance de l’image de soi n’est pas non plus un signe clair de parenté avec l’homme ; absente chez le gorille, elle est présente chez le macaque "cousin" évolutivement trois fois plus éloigné ; elle se rencontre aussi chez des animaux étrangers à la lignée humaine : éléphant, orque, pigeon etc.

Les "grands singes" présentent des capacités langagières surprenantes[modifier]

Dans la nature les chimpanzés emploient une trentaine de vocalisations différentes, pour se saluer, exprimer différents états affectifs où signaler la présence de nourriture ou de différents prédateurs. Plus intéressantes sont diverses expériences réalisées en captivité. Les essais d’apprentissage de la prononciation de quelques mots, fut un échec à causse de la morphologie de leurs larynx. Les chercheurs se tournèrent alors vers l’apprentissage de mots représentés par des gestes (le langage des sourds-muets), des formes (manipulables) ou signes abstraits (présentés sur un clavier). Les résultats obtenus par les individus les plus doués sont spectaculaires. Ils peuvent apprendre plus de 500 mots et autant de combinaisons de mots. Ils peuvent alors exprimer des désirs ("toi - moi - dehors – jouer"), des protestations ("pas - lait - dans - machine"), l’agressivité ("sale - Roger" !), de l’empathie ("pleurer"). On peut même voir apparaître des néologismes ("tigre - blanc", pour évoquer un zèbre) etc. Cependant il faut bien voir que ces comportements étonnants, apparaissent uniquement du fait d’un apprentissage laborieux au contact direct de l’humain. Laissées seuls dans leur milieu, originel les singes n’auraient jamais manifesté rien de semblable, même dans des millions d’années. En définitive, c’est l’homme qui a appris au singe, à se servir de son cerveau, d’une façon nouvelle impliquant le langage ! Ces singes ont été « promus à un stade supérieur » (selon D. & A.J. Premack, Pr, univ. Pennsylvanie) grâce à un enseignement donné par un être leur étant supérieur. Il reste toutefois étonnant que le singe possède de telles capacités latentes n’ayant jusqu’alors procuré aucun avantage évident et n’ayant pu donner une prise tangible à la sélection naturelle.

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4. Les mythes nouveaux de la "culture" et de la "morale" simiesque ont été récemment promus à l’aide d’analogies grossières, dans le but de flouter l’opposition nature/culture et d’estomper la césure séparant l’humanité des singes, et aussi de promouvoir les bases d’une "morale" naturaliste issue de la pure biologie et ne devant rien à la spiritualité, pas plus qu’à la religion, et a fortiori à une quelconque Révélation.

La vie sociale des chimpanzés et des bonobos est très développée, mais qualifier certaines habitudes collectives de "culture" relève d’un abus de langage[modifier]

Les singes choisissent leurs "amis" préférés en fonctions de traits de caractères rappelant les nôtres. Mais des relations privilégiées se rencontrent aussi dans des espèces plus primitives. L’imitation joue évidemment un rôle important dans ces sociétés, il n’est donc pas étonnant que les quelques protocoles ou techniques qui s’y rencontrent soient transmis de générations en générations, d’autant que les mères apprennent activement certains gestes à leur progéniture. Or, certains éthologistes considèrent comme des "cultures" différentes le fait que, par exemple, certains groupes de singes cassent les noix avec des fragments de grosses branches et non avec des cailloux, mangent certaines feuilles avec le produit de leur chasse, où trempent les tubercules dans la mer avant de les manger ! Dominique Lestel (ENS) affirme ainsi : « La culture provient réellement des animaux et n’est pas spécifique de l’humain [...] Ce paradoxe apparent remet en question notre propre identité... » (2008). Mais, ici encore, ces "cultures" transmises ne caractérisent pas les singes supérieurs, certaines mangoustes ont des "programmes d’enseignement" de difficultés croissantes pour des jeunes de plus en plus âgés ; les cacatoès transmettent des manipulations complexes de bâtonnet, et les sauterelles apprennent la peur des araignées à leurs descendants alors qu’ils sont encore dans l’œuf ! On peut regretter que ces éthologistes aient confondus les "cultures" allant des sauterelles aux singes casseurs de noix, avec celle allant de Lascaux à Internet en passant par les cathédrales.

On peut aussi altérer la morale chrétienne en la coupant de toute transcendance, en prétendant qu’elle est d’origine purement biologique[modifier]

Ainsi, pour la sociobiologie, l’affection des proches dépendrait de la proportion de gènes communs, ce qui aboutit à des propositions dérisoires : « personne n’est prêt à sacrifier sa vie pour n’importe qui, mais chacun la sacrifierait pour au minimum : 2 frères ou sœurs, ou bien pour 4 demi-frères, ou encore pour 8 cousins directs. [etc.] » (W.D. Hamilton, Pr à Oxford). La psychologie évolutionniste pris le relais en prétendant, plus généralement, que la morale ne serait que le fruit naturel de l’évolution. Ainsi l’altruisme et le pardon auraient émergé des sociétés animales parce qu’ils confèrent cohésion et résilience au groupe, de ce fait plus à même de prospérer : « L’émergence progressive de la morale apparaît donc comme un phénomène indissociable de l’évolution, et c’est là une suite normale du matérialisme de Darwin, et de l’inévitable extension de la théorie de la sélection naturelle à l’explication du devenir des sociétés humaines... » (Dictionnaire du Darwinisme, PUF 1996). Il en résulte des propositions très réductrices : « Le comportement héroïque néfaste pour l’individu, a été sélectionné au cours de l’évolution parce qu’il protège l’ensemble du groupe. » (S. Bowles, Pr univ. Mass., 2008). Ce que ces éthologistes omettent de dire c’est que cet altruisme, plus ou moins observé, à l’intérieur du groupe se paient toujours (y compris chez l’homme "à l’état de nature") d’une forte agressivité à l’égard des autres groupes ! D’autres hypothèses, connexes, de la psychologie évolutionniste sont tout aussi délétères. Par exemple, nous serions naturellement bons, tout simplement parce que cela nous procurerait une euphorie favorable à la santé... Nous sommes ici fort loin de la Bienheureuse Mère Teresa disant : « Il est important de réaliser que l’amour, pour être vrai, doit faire mal ». De toute façon, "l’amour des ennemis" prôné par le Christ, outrepasse ces pauvres fables utilitaristes !

La thèse de la "morale simiesque" remplace le mythe du "bon sauvage" par celui du "bon animal"[modifier]

Elle dévalue aussi les notions de Bien et de mal ainsi que la religion. Pascal Picq, (qui en bon athée militant affirme "L’homme ne descend pas du singe, l’homme fait partie des singes") précise ainsi que les chimpanzés « ont des notions de bien et de mal. » (Vidéo "Le propre de l’homme", 2010). Or, ils n’ont évidemment aucune notion de valeur, et connaissent simplement les codes sociaux du groupe. Le spécialiste mondial des bonobos, Frans de Waal (Pr univ. Emory) expose clairement ses intentions métaphysique et antireligieuses dans une conférence intitulée emblématiquement : ("Moral behavior in animals - morality without religion", TED Talk, 11. 2011), il déclare : « Nous travaillons donc sur ces questions pour voir si nous pouvons créer une moralité de bas en haut, pour ainsi dire, sans que Dieu ou la religion soient concernés, et pour voir comment on peut arriver à une moralité fruit de l’évolution ». Précisons que cette volonté de fonder une morale sociale sur la pure naturalité biologique, étrangère à la religion, n’est pas nouvelle. Ces idées furent développées au début du XXe siècle par l’idéologue anarchiste Kropotkine, fondateur du communisme libertaire. En contrepoint, la veuve de Darwin avait demandé à son fils, éditeur de l’autobiographie de son père, de la censurer : «... parce que l’opinion de votre père, comme quoi toute moralité ne s’est développée que par l’Évolution, m’est pénible... » ; Darwin s’y permettait en effet de douteuses analogies : pour les hommes "conditionnés" par une éducation religieuse, « il serait aussi difficile de se débarrasser de leur croyance en Dieu, que pour un singe de se débarrasser de sa peur instinctive et de la haine des serpents » !

Le mythe du bon animal est scientifiquement infirmé[modifier]

Notons d’abord que certaines vidéos populaires où l’on voit un félin adopter une petite antilope ou un bébé singe ne doivent pas faire illusion. Ces félins sont des femelles temporairement rassasiées mais instinctivement en quête de "petits", dès qu’elles ont faim le petit protégé devient "appétissant" et, comme le conclut (P. Jouventin, éthologiste, 2015) « l’affaire est vite réglée... Là où nous avons tendance à discerner de l’amour et de la tendresse, il n’y a rien d’autre qu’un mécanisme éthologique… Et nous projetons ce que nous voulons y voir ! » Les singes sont capables de collaborer, mais de façon intéressée. Une spécialiste de ces questions précise : « le partenaire est perçu d’avantage comme un concurrent que comme un collaborateur » ; le dominant utilise l’autre chimpanzé pour atteindre son propre but. (Vidéo "Homme versus singe", Fr. 5, 2007). Enfin l’on entend souvent dire que l’homme a inventé la guerre, en fait c’est le chimpanzé. Dès les années 70 Jane Goodall avait observé, entre deux bandes rivales, une guerre de quatre années avec de véritables raids organisés, des scènes de cruauté, infanticide, achèvement des blessés et cannibalisme. Il fallu 50 ans d’observations pour convaincre des éthologistes et pour que l’on accepte enfin de reconnaître que l’homme n’y était absolument pour rien ("Nature", v. 513, p.414, 2014). Après le mythe du bon sauvage, celui du bon animal, se révèle n’être qu’une chimère.

Le bonobo, surnommé le "primate kamasoutra" représente un "grand espoir" déçu[modifier]

Ce singe (le moins éloigné de l’homme, et dont la démarche est souvent bipède) est toujours prêt à se réconcilier par l’usage extensif de pratiques bisexuelles et intergénérationnelles variées. Bien qu’ils soient moins doués que les chimpanzés pour utiliser des outils dans la nature, pour nombre d’éthologistes (dont leur spécialiste et thuriféraire, F. de Waal), ils pourraient être un modèle idéal pour les humains Cependant leur réputation de "princes de la paix" – attribuée à leur hypersexualité, et aussi au matriarcat caractéristique de leur société – s’étiola lorsqu’ on les étudia ailleurs que dans des zoos paysagers adaptés où ils n’étaient pas en compétition pour la nourriture. Des chercheurs ont finit par remarquer que, dans la nature, la moitié des individus avaient des phalanges manquantes…du fait de morsures de congénères. Mais le pire a été découvert par G. Hohmann (primatologue de l’Institut Max Planck.), les "doux" bonobos sont aussi des prédateurs impitoyables, partiellement carnivores et on put les observer attaquant de jeunes chimpanzés et commencer à dévorer leurs victimes avant même qu’elles ne soient mortes. Le magazine "Life", revenu du "zoologiquement correct" se voyait contraint de titrer ainsi sa déception : " Free-love bonobos are vicious hunters" (15.10.2008).

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5. L’adulation du monde simiesque fait partie d’un fléau plus large, la zoolâtrie. L’homme doit être le gestionnaire digne et responsable de la Création, tout particulièrement en traitant le mieux possible les animaux doués d’une sensibilité semblable à la sienne. Avec certains il peut partager de réels attachements. Mais l’animal n’est ni un enfant ni un alter ego ; au delà d’une affection légitime, l’idolâtrer c’est finalement renouer avec le paganisme surtout si cette vénération de l’animal s’accompagne d’une dévaluation de l’être humain et du christianisme.

La zoolâtrie confine à une sorte de paganisme par une considération exagérée des l’animaux en transformant ceux-ci en quasi idoles[modifier]

Il est légitime d’avoir de l’affection pour les animaux, mais le CEC précise (au n°2418) : « On peut aimer les animaux ; on ne saurait détourner vers eux l'affection due aux seules personnes ».
Une dimension juridique du phénomène est avancée : « Les animaux non humains méritent [qu’on leur applique] les droits de l’homme. » (P. Cavalieri, philosophe, "avocate" des grands singes, 2003). La sollicitude s’étend jusqu’aux animaux inférieurs et nuisibles (termes honnis comme fruits de l’inique subjectivité humaine par J-C Nouet, Prof. Pitié-S.), ainsi R. Misslin (Prof., univ. Strasbourg) s’inquiète des "affres de l’agonie" chez "un cafard asphyxié par des aérosols toxiques" (2008). Lorsque l’on voit sur un site de protection des animaux (AHIMSHA) cette repentance typique de nos sociétés déchristianisées: « Nous devrions tous courber la tête devant tous les animaux, les mains jointes sur le cœur et leur toucher les pattes par respect » on peut se rappeler la "prophétie" du saint Curé d’Ars : « Laissez une paroisse vingt ans sans prêtre : on y adorera les bêtes. »

La zoolâtrie est presque toujours un moyen de déprécier et de rabaisser l’homme[modifier]

Le magistrat Suzanne Antoine, remettant en 2005, un rapport au gouvernement (soucieux de protéger les animaux), y précisait « L’animal s’est déréifié et humanisé. [...] L’inverse étant tout aussi vrai » ; elle admettait donc que l’Homme, en un mouvement symétrique, avait été chosifié et déshumanisé.

Cette primauté de l’animal s’étendrait jusque dans le domaine médical[modifier]

« Même si la recherche sur l’animal permettait de trouver un remède contre le sida, j’y serai opposée. Pourquoi? Parce que la race humaine s’est étendue comme un cancer, nous sommes le plus grand problème de la terre » (I. Newkirk, Pdte de "People for the Ethical Treatment of Animals". La même activiste exhibe son mépris de la famille : « Si mon père fait un accident cardiaque, je ne lui donnerai pas de médicament car je sais que ce produit à d’abord été essayé sur le chien. » (1983). Le théoricien de la zoolâtrie (Peter Singer, Pr de bioéthique, Princeton) affirme: « La doctrine du caractère sacré de la vie humaine n’est plus défendable. » (La Recherche, 10.2000). Le handicapé mental est souvent instrumentalisé par les zoolâtres ; dans un ouvrage intitulé "The Third Chimp" (le 2e étant le bonobo et le 3e l’humain !) J. Diadmond (Prof. UCLA) commence par apparemment s’apitoyer sur les handicapés mentaux pour conclure glacialement : « Quelle est donc la logique qui interdit les expérimentations médicales sur ces gens, mais pas sur les grands singes? » Ces idéologues utilitaristes sont souvent cyniques; Tom Regan (Pr. Philo. morale, Univ.N. Carolina) répond ainsi à la question " Étant sur un radeau qui chavire, avec un bébé et un chien également en péril, lequel sauveriez-vous? " : « Si l’enfant était handicapé mentalement et le chien intelligent, je sauverais le chien. » (Nl Obs. 23.12.2004).

La zoolâtrie, oubliant St François d’Assise, est généralement un moyen de contester la Religion chrétienne.[modifier]

On peut le faire discrètement comme J.- M. Schaeffer (Philo., CNRS) affirmant qu’ « Il faut en finir avec cette "Thèse" de l’exception humaine » (2007), un de ses commentateur précisant que « "la Thèse", c’est le principe théologique selon lequel Dieu a fait l’homme à son image, le rendant ainsi différent de toutes les autres créatures »... ou plus directement : « C’est finalement le christianisme du Moyen Age qui a engendré, sur le plan de la pensée, la principale régression morale à l’égard de l’animal. » (G. Chapoutier, CNRS, 1990). Pascal Picq précise : « L'homme n'est pas le seul animal à penser, mais il est le seul à penser qu'il n'est pas un animal [...] Il est grand temps, de nous affranchir de plusieurs millénaires d'une pensée judéo-chrétienne focalisée sur l'homme. » ("La plus belle histoire des animaux", 2000, écrit avec B. Cyrulnik). Ce dernier s’insurge ailleurs, contre le fait de devoir « Choisir entre l’homme et l’animal, entre celui qui a une âme et celui qui n’en possède pas, celui qu’on peut baptiser et celui que l’on peut cuisiner » (2000). Enfin, Jeangène-Vilmer (ENS, Sc. Po., etc.) enfonce le clou : « Depuis 2000 ans, la pensée occidentale sur l'animal est dominée par cette conviction chrétienne qu'il y a, entre l'homme et l'animal, une irréductible différence de nature, puisque le premier a été créé à l'image de Dieu, et le second, pour l'usage de l'homme. [...] la sécularisation des sociétés, permet de remettre en cause, aujourd'hui beaucoup plus facilement qu'hier, ce dogme de la différence de nature entre l'homme et l'animal. » (Le Devoir, 14.6.2009). On constate ici, une fois de plus, que le rejet du christianisme abîme l’image de l’homme.

La zoolâtrie peut même aller jusqu'à banaliser les pires souffrances humaines en les égalant à la souffrance animale[modifier]

Dès 1979, P. Singer avait écrit : « Une souffrance physique infligée à l’homme ne doit pas peser moralement plus que la même souffrance infligée au babouin » ; ceci représente déjà une énormité, mais iI est scandaleux que des zoolâtres aient osé banaliser la Shoah. Le prix Nobel Isaac Singer, évoquant les animaux de boucherie, exprime en effet : « Pour ces créatures, tous les humains sont des nazis : pour les animaux c’est un éternel Treblinka. » (2004) ; Helmut F. Kaplan, philosophe, surenchérit : « Tout ce que les nazis ont fait aux Juifs nous le faisons aux animaux. Nos enfants nous demanderons un jour, où étiez-vous pendant cet Holocauste-là ? Qu’avez-vous fait contre ces crimes horribles ? » (2008). Charles Patterson (Pr univ. Paris), en généralisant, montre la faiblesse de son argumentaire : « Le principe commun, c’est la capacité de faire tout ce qu’on veut aux plus faibles, qu’ils soient des animaux, des Juifs, des femmes, des esclaves…» (Fr. Culture, Logique de l’Abattoir, 2008). Mais justement, c’est la disparition de la césure séparant "l’homme image sacrée de Dieu" du monde animal, qui a permis à certains d’assimiler aux animaux les humains qu’ils détestaient. Corollairement, on peut rappeler que la première loi pour la protection animale fut le fait des nazis (Tierschutzgesetz, 24.11.1933). Cela ne signifie pas que tout désir de protéger légalement les animaux soit superflu, mais confirme que les plus enclins à le faire sont rarement des philanthropes. En résumé la pensée prêtée au philosophe Th. Adorno : " Auschwitz commence lorsque quelqu'un regarde un abattoir et se dit : ce ne sont que des animaux ", est fallacieuse ; en réalité, Auschwitz commence lorsque l’on affirme que : "les hommes ne sont que des animaux".

Ces attitudes zoolâtriques sont en totale opposition avec "l’éthique" mortifère infligée aux humains[modifier]

Il faut bien voir que les partisans de la "déconstruction" de la nature humaine le font en se basant sur une "continuité" animaux-hommes comportant bien des ombres et s’étendant sur des millions d’années ; qu’importe, la continuité fait loi. Mais lorsqu’il s’agit de la continuité bien réelle qui en quelques années va du fœtus humain à l’homme achevé, cette fois, la loi de continuité assurant une égalité de dignité est déclarée caduque. L’avortement est vu comme une banalité, mais tuer un crapaud commun est un crime punit par la loi. Pire, lorsque la continuité est invoquée, c’est pour dire qu’ « il n’y a pas de distinction nette entre le fœtus et le nouveau né » afin de le dévaluer pour légitimer l’infanticide ! P. Singer (théoricien de l’éthique, athée militant!) déclare : « Les bébés humains ne naissent pas avec une conscience de soi, ni avec la capacité de comprendre qu’ils existent dans le temps. Ce ne sont donc pas des personnes. C’est pourquoi, la vie d’un nouveau-né a moins de valeur que celle d’un cochon... » ; « [Nous] avons proposé de laissez passer un délai de 28 jours après la naissance avant d’accepter qu’un enfant ait les mêmes droits de vivre que d’autres. » (Cité in "Christianity today", 17.03.2009). Ce type d’infanticide a des partisans en France... pour l’instant on se contente d’y enseigner, à l’université de Strasbourg, depuis la rentrée 2015, le "droit animal" évidemment en parallèle avec le droit à l’avortement...

Cette réduction de l’homme à l’animal et cette zoolâtrie rejoignent la "culture de mort"[modifier]

Cette approche permet de dévitaliser la morale en la ramenant à l’éthologie, voire en proposant l’animal comme référentiel comme le fait M. Godelier (EHESS) qui pour légitimer le mariage homosexuel en appelait au comportement des bonobos. Mais la zoolâtrie idéologique – en collusion avec une forme d’écolâtrie – veut en plus, que l’homme cède la place à la nature animale et même végétale. Alors qu’ils traitent les handicapés profonds ou les comateux de "plantes vertes", certains ramènent l’homme au niveau du végétal. Dans un article intitulé "Les plantes à l’égal de l’homme" (Pour la Sc., 2012), F. Hallé (Pr univ. Montpellier) se réjouit du fait que « L’homme descend marche après marche, de son piédestal et retrouve une place plus modeste parmi les autres vivants ». A ces "Autres vivants" l’Homme devrait céder la place, voire sa vie ! Dans le "Rapport Lugano" destinés aux "maîtres du monde" (2000), Suzanne George, altermondialiste, y exprime : la nécessité de réduire la population mondiale de deux milliards d’habitants en se justifiant ainsi : « Choix qui peut paraître dur, mais qui est dicté à la fois par la raison et la compassion. ». Puis elle donne la raison de cette amputation : « L’épanouissement de la vie non humaine exige que se produise une telle diminution » ! La vie humaine doit donc céder, par compassion, devant celle qui ne l’est pas !

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6. Il n’est pas évident de rendre compte, par les mécanismes connus de l’évolution biologique, de toutes nos différences par rapports à nos "cousins" simiesques. Même en dehors de toute approche teintée de spiritualisme, nombre de scientifiques physicalistes reconnaissent que bien des d’énigmes demeurent.

Bien que des différences biologiques nous distinguent nettement des singes, elles ne suffisent pas à rendre compte de nos spécificités psychiques.[modifier]

Alain Prochiantz (Pr de morphogenèse, Coll. de France), bien que matérialiste, est loin de succomber à la tentation de réduire l’homme au singe : « Nous sommes le résultat d’une suite d’accidents génétiques, une sorte de monstre, il faut bien le dire... Nous ne sommes pas des êtres naturels, c'est-à-dire que nous ne sommes pas du tout dans le schéma normal des singes normaux. » (Conf. ENS, 2002). Il est entre-autre frappé par le développement extraordinairement rapide du cerveau ; désormais, avec l’apparition de l’homme : « il y a du cerveau en trop [...] pour nous, notre cerveau "en trop", c’est quand même 900cm3 sur 1300cm3 ... et qui sont venus, je le répète, avec une rapidité déconcertante. » (UTLS, 2006). Au demeurant le volume cérébral n’explique pas tout, pas plus que l’architecture du néocortex ; ainsi J. Eccles (Nobel de médecine) n’a pu y mettre en évidence « aucune structure particulière, ni aucune propriété physiologique par laquelle le cerveau humain se distinguerait nettement du cerveau d’un singe anthropoïde. » et de conclure : « L’homme est plus que son cerveau. » (1992). D’autre part, l’acquisition de certaines spécificités humaines cadre mal avec ce que l’on croit connaître des mécanismes de l’évolution. Stanislas Dehaene (Pr cognition, Coll. de Fr.) s’étonne de la rapidité avec laquelle l’humanité à pu acquérir la lecture : « ni l’hypothèse d’un créateur intelligent [matérialisme oblige !], ni celle d’une évolution par sélection naturelle ne paraissent l’expliquer. Le temps a tout simplement manqué pour que l’Évolution conçoive des circuits spécialisés pour la lecture. » (2007). La question est encore plus cruciale pour l’arithmétique qui est un processus pluriel (X. Séron). Quant au langage, à la suite de Chomsky (Pr de linguistique, MIT), M. Piattelli-Palmarini (Pr Sc. cognitives, univ. Arizona) affirme que : « La structure même du langage présente des particularismes qui ne peuvent pas avoir été mis en forme par la sélection naturelle en tant que sous-produits de la communication. [...] En tout cas, il n’y a pas place dans ce programme [de maîtrise du langage] pour quelque explication, adaptationniste, gradualiste, néodarwinienne, que ce soit » (2008).

La sélection naturelle n’a, en fait, pas joué le rôle attendu dans l’évolution humaine.[modifier]

En effet, pour obtenir la complexité corrélative des prouesses humaines, à partir de mutations aléatoires, on doit supposer un énorme travail de la sélection naturelle. C’est ce qu’exprimait en 1965 Ernst Mayr (Pr Harvard), alors le "pontife" de l’évolution : « La lignée Homo sapiens varia sous une gigantesque pression de sélection ». Mais, les recherches n’ont pas conforté cette attente. L’évolution génétique humaine semble au contraire jouir d’une sélection naturelle "débonnaire", tolérant des mutations dangereuses mais bénéfiques pour l’hominisation. Si la sélection a peu joué, c’est donc la spécificité des mutations (aléatoires) qui est essentiellement à l’origine de l’évolution humaine. Certains généticiens éminents estiment que le rôle de la sélection naturelle est surestimé. M. Nei (Pr univ. Pensylvanie) affirme : « c’est la mutation qui créé les différents types de variation. La sélection naturelle est secondaire » (2014). Cela semble être le cas pour l’évolution humaine. Ainsi, A. Fernandez (Pr univ. Chicago, 2009) remarque : « si la sélection darwinienne était impitoyablement efficace dans le genre humain, alors le niveau de complexité qui est le nôtre ne pourrait pas exister » ; ceci recoupe les découvertes sur le génome humain de J. Berglund (univ. Uppsala) : « nombre de modifications dans les gènes ayant évolués le plus rapidement, ne sont pas le résultat de la sélection naturelle, mais au contraire le résultat de mutations biaisées. Ceci conduit à formuler l’hypothèse provocante suivant laquelle nombre de changements génétiques induisant des caractères spécifiquement humains peuvent avoir été provoquées par la fixation de mutations délétères. » (PLOS biology, v.7, 27.1.2009).

Des mutations aléatoires, fort bienvenues, pourraient être à l’origine de l’hominisation[modifier]

Le philosophe Hans Jonas remarque pertinemment à propos des mécanismes de l’évolution :
« ils ne rendent compte que de la disparition et non pas de l’émergence de formes [nouvelles] – ils suppriment mais ne créent pas... Cela signifie que le rôle positif, l'apparition de formes, échoit totalement au jeu de hasard des aberrations – survenant à partir du modèle de référence – qui, par elles-mêmes, sont des bizarreries variées » (2001). Mais alors, si pour construire l’humain (qui est plus qu’une bizarrerie !) la sélection naturelle est peu opératoire et la durée d’évolution assez courte ( moins de 10 millions d’années) il faut que nous ayons tirés, au jeu de hasard des mutations, plusieurs fois de très improbables "gros lots". Une telle situation (qui intéresse tous les vertébrés) à été démontrée pour la formation de certains récepteurs hormonaux (capitaux dans la gestion du stress). Non seulement ce récepteur vital est apparu avant les hormones qui l'impliqueront, mais de plus, l'équipe de J. Thornton (Pr génétique humaine, univ. Chicago) a pu reconstituer l’histoire du gène impliqué, depuis 450 millions d’ années « Dans une bibliothèque de milliers de variantes de la protéine ancestrale, nous avons repéré les substitutions historiques le permettant, mais aucun génotype alternatif l’autorisant. » (Nature, v. 512, p.203, 2014) Autrement dit : « Parmi le grand nombre d'histoires possibles alternatives, il n'y a aucune autre mutation [initiale] permissive qui aurait pu ouvrir un chemin évolutif conduisant au récepteur moderne des glucocorticoïdes. » De plus, lorsque ces mutations initiales se produisirent « elles n’eurent n'eurent alors aucun effet sur la fonction de la protéine » et ne purent donner prise à la sélection naturelle.
On doit donc reconnaître que l’on est loin de tout comprendre des conditions ayant permis l’évolution humaine.

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7. Quelle est finalement, parmi toutes les spécificités humaines, celle qui est essentielle ? Répondre de façon exhaustive à cette question, implique de pouvoir nous regarder d’au-dessus de nous même. Cela, ni les neurosciences, ni l’éthologie, ni la psychologie, pas même la philosophie, ne peuvent l’accomplir, bien qu’elles apportent quelque lumière. Seule la spiritualité permet de nous considérer dans une perspective édifiante et décisive.

La prétention matérialiste de vouloir réduire l’homme au singe est dérisoire[modifier]

Surtout lorsqu’elle se veut totalitaire jusqu’à nous donner le nom de "3ème chimpanzé" (J. Diadmond, Pr UCLA 1992), ou nous appliquer le "Label bête" (Muséum de Lyon, Exposition 2006) ! On ne peut certes nier qu’il y ait des similitudes comportementales, cognitives et sociales entre les singes et nous, mais la différence de leurs niveaux d’accomplissement est tellement grande qu’il y a là beaucoup plus qu’une inégalité de "degré". Ceux qui le prétendent étant généralement imprégnés de matérialisme on s’étonne qu’ils ne se souviennent pas d’un de ses théoriciens, F. Engels, qui remarquait en effet qu’à partir d’un certain degré de changement quantitatif peut se produire une "conversion qualitative" ; par ailleurs, son compère Karl Marx ajoutait : « C’est le cerveau de l’homme qui explique celui du singe, non l’inverse ! » On peut effectivement attendre longtemps que les chimpanzés se penchent sur la question de l’intelligence humaine ! En réalité, l’étude objective des animaux, d’une part, et des humains, d’autre part, permet d’éviter les comparaisons réductrices car « Celui qui connaît vraiment les animaux est par là même capable de comprendre pleinement le caractère unique de l'homme » déclarait K. Lorenz, éthologiste, prix Nobel ; ce trop rare discernement s’explique parce que Lorentz avait, lui, compris que : « c'est dans le domaine du vivant que le réductionnisme ontologique devient véritablement dangereux » (1978). Plus récemment, Yves Coppens, objectif, bien qu’athée, rappelait ainsi à l’ordre l’un de ses collègues du Collège de France : « La "chimpanzéïté" n’est pas l’humanité ! » Finalement, dès l’époque des Lumières où naquit cette fable de la grande proximité de l’homme et du singe, Buffon résumait pertinemment l’affaire en affirmant avec humour : « Les singes sont tout au plus des gens de talent que nous prenons pour des gens d’esprit ! » (1749)

Le langage est l’un des plus éminents traits humains[modifier]

C’est un moyen de communiquer avec autrui, mais aussi, par le langage intérieur, de multiplier, d’affiner et de catégoriser nos idées et sentiments qui resteraient autrement, évanescents et incontrôlables. Le langage permet aussi de se situer dans le temps, grâce aux différents temps de la grammaire. Celle-ci permet d’ouvrir l’éventail des situations et de nos attitudes corrélatives : révolues, possibles, attendues, etc. Elles se constituent alors en réseau spatio-temporel représentant le cadre où peuvent s’inscrire les questions du regret, de l’attente, du projet, et finalement de la liberté. L’ensemble de ces capacités est corrélatif du développement d’une conscience réfléchie ayant vocation à la responsabilité. Cependant, absolutisant l’importance du langage, certains voudraient réduire le propre de l’homme, à son unique développement (quoique passer de 30 "mots" chez le singe, à des dizaines de milliers chez l’homme, ne soit pas évident). Cette thèse oublie qu’il existe une pensée proprement humaine, sans langage, étudiée par D. Laplane (Pr neurologie, Salpêtrière, "La pensée d'outre- mots", 1998) et dont on témoigné des aphasiques guéris qui ont pu expliquer que, privés de l’usage et de la compréhension du langage, ils avaient pu néanmoins continuer à penser. Similairement des savants (cf. A. Einstein ou F. Galton) ont expliqué que les racines de leur pensée créative se situaient en deçà du langage. On peut donc dire avec les linguistes cognitivistes ce qu’affirmait Bergson dès 1888 : « la pensée demeure incommensurable avec le langage », en tout cas il ne saurait l’épuiser. cCeci rejoint ce qu’exprimait Schumann sur la source intime de son inspiration musicale : « L’homme intérieur... est muet ». Le philosophe Milan Kundera ajoute « La musique c’est l’anti-mot ! », or la musique, langage sans paroles, est l’un des fleurons de la créativité et de l’expression humaine.

Du dépassement des sens à la recherche du Sens[modifier]

Comme l’exprime Albert Camus : « La question du sens de la vie est la plus pressante des questions. L’homme seul se la pose ». L’anthropologue F. Buytendijk (1958) observe qu’au contraire : « L’animal est presque totalement livré à la situation qu’est pour lui son corps. » Du fait de ce confinement, il ne peut accéder à la moindre signification objective du monde. Le philosophe Von Uexküll conclut : « aucun animal ne joue jamais un rôle d’observateur ». L’homme, lui seul, à la capacité de prendre du recul par rapport aux situations de l’ "ici et maintenant", et de les méditer ultérieurement. Même si cela est difficile, nous pouvons en particulier éviter de nous figer dans « l’indigente instantanéité du jouir » (suivant la formule du philosophe G. Marcel). Cette recherche d’un "au-delà du principe du plaisir" (selon les termes de Freud) nous donne une véritable liberté par rapport au monde du "ressenti", et des contraintes charnelles, en particulier. Nous pouvons alors apprendre à reconnaître la signification des tribulations et de la souffrance, ainsi que l’ont fait des penseurs d’horizons opposés, d’Anatole France, l’athée virulent : « La souffrance ! Quelle divine méconnue ! Nous lui devons tout ce qu’il y a de bon en nous », jusqu’au fervent Léon Bloy : « Il y a des endroits de notre cœur qui n’existent pas encore, il faut que la souffrance y pénètre pour qu’ils soient ». La convergence de toutes ces attitudes peut seule nous permettre de saisir qu’il n’y a pas que le gratifiant à court terme qui vaille la peine d’être vécu etde nous introduire au monde du sacré, du Sens et tout spécialement aux significations spirituelles.

La vie humaine, porteuse de valeurs, est appelée à se muer en destinée signifiante[modifier]

Le langage est encore ici capital. Par le récit, et la gestion des souvenirs, il est en effet le moteur d’une mémoire collective perpétuellement revisitée. Ainsi naquirent les allégories fondatrices des civilisations, car ce n’est qu’en cultivant nos racines que nous pouvons envisager des moissons futures. Cette vénération des histoires de nos pères – d’ailleurs plus ou moins analogues et rejouables de façon cyclique – se transforma en glorification du "sens de l’histoire" avec la révolution des "Lumières" et le mythe du progrès. Mais bien avant – et avec une profondeur sans égal – la Révélation Chrétienne nous avait déjà donné de nous percevoir comme des voyageurs appelés à s’engager dans une trajectoire ascendante, et à y cheminer laborieusement, en communion avec nos semblables, non pas poussés par un destin prométhéen, mais appelés par un même Père. Nous ne pouvons trouver un sens à notre vie que si elle a une direction clairement dessinée capable de converger avec celle de nos frères humains. Une trajectoire signifiante remplace alors le chaos généré par nos appétits qui ne savent que tenter de saisir les aubaines de ce monde. Mais l’appel venu d’"en haut", éclairant nos déceptions, nous fait vite comprendre pourquoi « Il n’est pas nécessaire d’épuiser le monde pour sentir qu’on ne s’y désaltère pas », comme le signifie Maurice Blondel. Wittgenstein, qui savait bien que la question du sens ne peut se résoudre qu’en regardant vers le haut, affirmait fort pertinemment : « Croire en Dieu veut dire comprendre la question du sens de la vie ». Finalement, pour ce qui est du sens de nos vies, toute la philosophie et les valeurs laïques ne nous permettent pas d’étancher notre soif, seules les valeurs religieuses porteuses de Vérité – par leur sacralité qui n’est pas décrétée, mais donnée et reçue – peuvent nous satisfaire ; malgré son athéisme, Luc Ferry le reconnaît : « La question du sens et du sacré sont inséparables. » (1996). Alors, enfin, la vie de toute personne peut devenir « une histoire sacrée » (Jean Vannier).

La spécificité de l’Homme n’est pas de l’ordre de l’inventoriable, c’est une inflorescence spirituelle à laquelle on ne peut fixer aucune limite[modifier]

L’homme reste un mystère à ses propres yeux. Non seulement « L’être humain est plus que sa psyché » (V. Frankl) , mais un autre philosophe et psychiatre affirme : « L’homme est plus que ce qu’il peut savoir de lui-même (K. Jaspers), et le fondateur du SAMU social, Xavier Emmanuelli renchérit : « L’homme n’est pas la mesure de l’homme » (2000) ; en fait, dans cet ouvrage, ce qu’il veut surtout nous dire, c’est que le rationalisme dévalue l’homme qui a essentiellement besoin, et de transcendance et de fraternité. Pour ce qui est de la transcendance, J.F. Lambert (Pr Psychophysiologie, univ. Paris VIII) confirme que « Ce qui fait l’homme humain, n’est pas humain », tandis que Pascal affirme que « L’homme est un problème dont la solution ne se trouve qu’en Dieu. » ; en ce qui concerne la fraternité, G. Marcel précise fort justement : « C’est de l’autre, et de lui seul, qu’en fin de compte le moi le plus centré sur lui-même attend son investiture » ; ainsi le beau nom d’ Homme peut se décliner, au masculin comme au féminin, mais jamais au singulier... Alors ? La spécificité humaine est-elle à chercher du côté de l’autre ou bien du côté de la transcendance ? Autrement dit, dans le rapport au "prochain" ou dans le rapport à Dieu ? Depuis deux mille an le Christ nous à appris que ces deux questions n’en font qu’une. Comme les deux bras de la Croix les chemins vers nos semblables et le chemin vers Dieu font plus que se croiser, ils sont insérés l’un dans l’autre. Quant à la porte qui nous ouvre ces chemins, elle est située au cœur du cœur de l’homme, dans son intériorité. Chaque intériorité humaine est un sanctuaire ; il n’est pas d’autre lieu où l’on puisse se trouver et rencontrer les autres, parce que c’est là que le Dieu d’Amour nous attend. Et si nous répondons à ses attentes, Lui-seul sait jusqu’où Il pourra nous mener, car l’intériorité sanctifiée n’est pas un enfermement c’est un monde ouvert à l’action de Dieu, et pour peu qu’on Le laisse agir, Il y opère des prodiges ineffables. En définitive, la spécificité humaine véritable, n’est pas quelque trait éminent ou qualité que l’on posséderait, elle est de pouvoir accepter de nous ouvrir à la Parole de Béatitude éternelle que le Christ nous propose.