Transformation digitale 2.0 David Fayon

De JFCM
Aller à : navigation, rechercher

Transformation digitale 2.0

DAVID FAYON MICHAËL TARTAR
Transformation digitale 2.0
6 leviers pour parer aux disruptions


@fayon remercie en particulier :
  • Géraldine, @(polline + liénor) et leur petit frère @fayonsson.
  • Ses amis, fans, abonnés, contacts, (é)lecteurs, etc.
  • Les dirigeants et les étudiants qu’il forme et qui nourrissent des échanges précieux.
  • Ses collègues de La Poste, ses amis coureurs, vététistes, marathoniens et d’Objectif France.
  • Tout son écosystème numérique ou digital (conservez le mot qui vous sied).
@michaeltartar remercie en particulier :
  • Nathalie et Enzo pour leur soutien et leurs encouragements au quotidien.
  • Ses amis musiciens des Salt & Pépères, qui l’aident à vivre dans le rock une expérience humaine d’une grande richesse.
  • Ses clients, confrontés à de forts enjeux de transformation digitale* , qui lui ont fait confiance et lui ont beaucoup appris.
  • Ses collaborateurs et partenaires avec lesquels il a élaboré des démarches conseil et des méthodologies outillées (en particulier avec ROK) pour accompagner la transformation digitale de ses clients.
Nous remercions Gilles Babinet (@babgi), Digital Champion, pour sa préface.
Nous remercions enfin les personnalités que nous avons interviewées et qui ont apporté des éclairages et des retours d’expérience pertinents qui ont permis de corroborer notre vision :
  • Nicolas Babel (@nicbaboul), co-fondateur et directeur des opérations de l’agence D-Rating (p. 241).
  • Catherine Barba (@cathbarba), présidente du PEPS Lab, fondatrice du WIN Forum NY, auteur de Le Magasin n ’est p as mort ! et business angel (p. 183).
  • Alain Bensoussan (@A_Bensoussan), fondateur du cabinet Alain Bensoussan et du réseau Lexing, réseau international d’avocats spécialisés en droit des technologies numériques (p. 276).
  • Laure Bustin (@laurebustin), déléguée nationale au digital du Centre des jeunes dirigeants d’entreprise (CJD) et dirigeante de l’agence Graffiti.fr (p. 80).
  • Sandrine Decorde (@SandrineDecorde), directrice Stratégie digitale marketing chez Humensis (p. 123).
  • Laurent Deleville (@deleville59), directeur Op en innovation de Safran (p. 237).
  • Yoann Denée (@YoannDenee), chief data officer, data p rotection officer, digital exp ertise director chez Prisma Media (p. 270).
  • Damien Douani (@damiendouani), explorateur digital (p. 229).
  • Bertrand Duperrin (@bduperrin), head of emp loy ee and client exp erience – Emakina (p. 120).
  • Maud Franca (@MaudFranca), directrice adjointe Mandats et investissements d’avenir à la Caisse des dépôts (p. 85).
  • Rémy Gaudic (@RemyGaudic), directeur des systèmes d’information télécoms, expert Microsoft et digital (actuellement DSI de transition pour une filiale du groupe Altice) (p. 246).
  • Yann Gourvennec (@ygourven), président-fondateur de Visionary Marketing (p. 190).
  • Isabelle Hervouet (@ZazHervouet), Europ e director of digital, acquisition & customer engagement chez Unibail-Rodamco-Westfield (p. 186).
  • Franck La Pinta (@flapinta), responsable innovation & digital learning, Société Générale (p. 145).
  • Héloïse Lemeillet (@heloiselem), Sy stems HR, digital & data director, LVMH (p. 153).
  • Stéphane Hugon (@eranosconseil), sociologue, co-fondateur de Eranos (p. 159).
  • Sandrine Mourao (@SandrineMourao), responsable marketing et communication chez GetQuanty (p. 197).
  • Pierre Nougué (@pnougue), co-fondateur Ecosys Group (p. 96).
  • Laurence Paganini (@PAGANINI_lauren), directeur général, Kaporal (p. 115).
  • Nathalie Sanguine (@nath_sng sur Instagram), knit fashion designer (p. 204).
  • Rodrigo Sepúlveda Schulz (@rodrigo), managing p artner, Expon Capital (p. 90).
  • François Stephan (@FrancoisStephan), vice-président Sales & Innovation de Be- Bound (p. 232).
  • Yves Tyrode (@YvesTyrode), directeur général en charge du digital, groupe BPCE (p. 75).
Nous remercions également Éva Dulau (@dulaueva) et Ophélie Clet (@ophelie_clet) pour la réalisation des pictogrammes du modèle.
1Les termes suivis d’un astérisque sont définis dans le glossaire, p. 295.
Des mêmes auteurs / ouvrages en collaboration
ALLOING Camille, FAYON David, Développ er sa p résence sur Internet  : concevoir et dép loy er une stratégie sur les médias sociaux, Dunod, 2012
BALAGUÉ Christine, FAYON David, Facebook, Twitter et les autres …  : quels e réseaux sociaux p our votre entrep rise  ?, Pearson, 2016 (3 éd.)
BALAGUÉ Christine, FAYON David, Réseaux sociaux et entrep rise : les bonnes p ratiques, Pearson, 2011
CORDINA Paul, FAYON David, Community management  : fédérer des communautés sur les médias sociaux, Pearson, 2013
FAYON David, Mesure de la maturité numérique des acteurs du secteur bancaire, dans une p ersp ective de transformation digitale, thèse de doctorat, Télécom ParisTech, Université Paris-Saclay, sous la conduite de Valérie Fernandez,
FAYON David, Made in Silicon Valley  : du numérique en A mérique, Pearson,
FAYON David, Géop olitique d ’Internet  : qui gouverne le monde  ?, Economica,
FAYON David, Web 2.0 et au-delà  : nouveaux internautes, du surfeur à l ’acteur, e Economica, 2010 (2 éd.)
FAYON David, Clés p our Internet, Economica, 2006
FAYON David, L ’Informatique, Vuibert, 1999
FAYON David, TARTAR Michaël, sous la direction de KABLA Hervé, GOURVENNEC Yann, Le Digital exp liqué à mon boss  : p ar ceux qui en font et p our ceux qui aimeraient (mieux) en faire, Éditions Kawa, 2017
TARTAR Michaël, Les Web Services, p ourquoi  ? 10 questions essentielles, Livre blanc BearingPoint, SAP, Sun, 2002
TARTAR Michaël, L ’e-administration au cœur de l ’innovation territoriale, Livre blanc Communautés urbaines de France et Caisse des dépôts, 2008
TARTAR Michaël, Référentiel des usages IT au travail, Étude BearingPoint, Eranos, AddedValue sous l’égide de Microsoft, 2009
TARTAR Michaël, De la boîte à idée à l ’innovation 2.0  : l ’innovation dans tous ses états, Livre blanc BearingPoint, 2010
TARTAR Michaël, sous la direction de KABLA Hervé, GOURVENNEC Yann, Les Médias sociaux exp liqués à mon boss  : p ar ceux qui en font et p our ceux qui aimeraient (mieux) en faire, Éditions Kawa, 2011
TARTAR Michaël, FALQUE Éric, WILLIAMS Sarah-Jayne, Les Paradoxes de la relation client… dans un monde digital, Pearson, 2011
TARTAR Michaël, E-commerce & cross-canal, nouvelle donne p our les enseignes et les centres commerciaux, Étude Bearing-Point pour le CNCC, 2012
TARTAR Michaël, sous la direction de KABLA Hervé, GOURVENNEC Yann, La Communication digitale exp liquée à mon boss, Éditions Kawa, 2013

Sommaire

Préface[modifier]

David Fayon et Michaël Tartar sont, à mon sens, parmi les tout premiers dans notre pays à avoir saisi la nécessité qu’il y avait à créer des méthodologies propres afin de mener la transformation digitale au sein des entreprises traditionnelles. Et je ne compte plus les conférences, séminaires, débats où j ’ai eu l’occasion de me trouver au côté de l’un ou de l’autre pour parler de ces sujets. Souvent nous avons défendu des positions communes, et plus souvent encore nous nous sommes attachés à alerter l’ensemble des parties prenantes – gouvernements, associations professionnelles, chefs d’entreprise… – sur l’enjeu impératif qu’induisait la digitalisation du monde. Ces prises de position étaient suffisamment fréquentes et alignées pour que, lorsqu’ils publièrent dès 2014 le premier ouvrage en langue française traitant de la transformation digitale et d’une méthode associée pour l’évaluation de la maturité numérique de toute organisation, ils me demandèrent d’en rédiger la préface, ce que je fis alors avec le sentiment de participer à une œuvre de salut public.
Cinq ans plus tard, le panorama français a beaucoup évolué  : les pouvoirs publics affichent une volonté forte de faire de notre nation un champion du numérique et la somme d’initiatives apparues dans l’intervalle est impressionnante  : lancement de la Banque publique d’investissement (Bpifrance), le plus grand fonds d’investissement européen  ; réforme approfondie de la fiscalité pour faciliter l’investissement dans le secteur  ; lancement de la FrenchTech – une agence publique de soutien à l’innovation –, de la Grande École du numérique – un organisme de financement et de labélisation –  ; investissement important dans l’infrastructure de fibre optique… Et cela complété par les initiatives privées  : 42, l’école d’informatique d’excellence, et Station F, vanté comme le plus grand incubateur au monde, tous deux financés par le magnat Xavier Niel  ; lancement de VivaTech, promu comme l’un des plus grands événements au monde dans le domaine de la technologie, etc.
Mais si notre nation s’est mise en marche, ce mouvement a eu lieu plus tard qu’en Israël, en Chine, au Royaume-Uni et bien d’autres pays. Qui se souvient de Tony Blair annonçant au tournant du millénaire que le Royaume-Uni allait tout miser sur Internet ? À l’époque, un important plan gouvernemental avait orienté les moyens de la nation vers le numérique, un mouvement que la Chine avait, de son côté, inscrit dans ses plans quinquennaux sous la houlette de Jiang Zemin, secrétaire général du Parti communiste chinois et ancien ministre de l’Électronique. Pour la France, les conséquences de ce réveil tardif se traduisent aujourd’hui dans de multiples indicateurs. Ainsi celui, certes subjectif, du nombre de licornes* (start-up ayant atteint une valorisation supérieure à 1 milliard d’euros) est cruel  : la France en aligne 4, Blablacar, OVH, Doctolib et Deezer, là où le Royaume-Uni en dispose de 17 et l’Allemagne de 8.
En ce qui concerne les entreprises traditionnelles, le baromètre de la transformation digitale eCAC, que je développe chaque année depuis cinq ans avec le quotidien Les Échos, tend à montrer que les efforts restent à soutenir pour parvenir à transformer les grandes entreprises du CAC 40. Il est d’ailleurs intéressant d’observer que la méthodologie d’évaluation que j ’ai développée est en de nombreux points proche de celle qui est elle-même présente dans cet ouvrage. Ainsi les leviers (pour le modèle DIMM* de ce livre  : stratégie, organisation, personnel, offre, technologie et innovation, environnement) et leurs déclinaisons en indicateurs sont tout aussi bien présents dans cet ouvrage que dans mon modèle d’analyse. Celui-ci a été bâti après un voyage aux États-Unis et de multiples rencontres avec des cabinets d’analyse, dont McKinsey. Ce baromètre, comme d’autres, montre donc que la digitalisation n’y est pas nécessairement en avance. Quant aux indicateurs internationaux, tel le digital economy and society index de la Commission européenne, ils placent la France à la dix-huitième position, sur 28 pays européens, ce qui n’est évidemment pas un score réjouissant.
Tout cela n’est bien sûr ni enviable ni rassurant. Il n’en reste pas moins que la vitesse de l’évolution de cette révolution montre que les classements évoluent fortement  ; des acteurs comme l’Estonie dont presque personne ne parlait au début de cette décennie sont devenus des références mondiales, tout au moins en ce qui concerne l’e-administration – autrement appelée e-Gov. Plus loin de nous, le cas du Rwanda est encore plus spectaculaire et l’aéroport de Kigali voit sans cesse passer des observateurs, des startuppers, des chefs d’entreprise venus du monde entier pour chercher à comprendre ce miracle.
Car le sujet est bien celui de la transmission. Loin d’être une somme de techniques très identifiées, l’enjeu de la transformation digitale fait appel tout aussi bien à des compétences technologiques qu’à des «  soft skills  » managériales qu’il convient de maîtriser pour réussir.
C’est pourquoi cet ouvrage, Transformation digitale 2.0, qui analyse aussi les mutations et la disruption* avec en outre une analyse sectorielle, est particulièrement vertueux et à recommander  : il s’attache à expliquer en des termes appropriés tant pour les managers d’entreprises traditionnelles que pour le middle management comment définir la cible d’une mutation digitale accomplie d’une part.
Et de l’autre comment mesurer l’avancement de celle-ci pour évoluer vers l’entreprise 3.0.
La démarche proposée par David Fayon et Michaël Tartar repose à présent sur six leviers (stratégie, organisation, personnel, offre, technologie et innovation, environnement) avec une logique d’enchaînement dans les chapitres 4 à 9. Ceux-ci décrivent précisément le modèle et les exigences à satisfaire pour chacun des niveaux de l’ensemble des 113 indicateurs. Concrètement, la transformation digitale est la conjonction de ces leviers sur lesquels il convient de surperformer par rapport aux concurrents et à soi-même. En outre, la transformation digitale n’est pas seulement numérique avec big data*, cloud*, intelligence artificielle*…, mais aussi organisationnelle avec aplatissement des structures, suppression des silos et place accordée à la collaboration entre les personnes. Elle est également liée à l’offre qui est à proposer de façon omnicanale*, avec l’entreprise qui devient plateforme en développant des APIs* pour capter tout un écosystème, notamment les données baptisées «  or transparent  » comme le mentionnent les auteurs. C’est aussi cette logique d’évolution des organisations vers les plateformes que je décris dans mon livre Transformation digitale : l ’avènement des p lateformes .
L’ouvrage est solidement constitué avec des indicateurs pour chaque levier permettant de mesurer chaque situation. Il est agrémenté d’interviews d’experts qui permettront à chacun de contextualiser ce que font différentes entreprises face à ce sujet. Des outils en ligne le complètent pour ceux qui souhaitent passer à la pratique. Il est pour cela à recommander à toutes celles et ceux qui voudront s’adonner à cet enjeu aussi nécessaire qu’indispensable pour emmener les entreprises européennes vers un modèle technologique et managérial compatible avec les dynamiques du 21e siècle. Et pourquoi pas lutter efficacement face aux acteurs américains et chinois comme le soulignent certaines interviews.
Gilles Babinet (@babgi)
Digital Champ ion, rep résentant de la France aup rès de la Commission europ éenne, vice-p résident du Conseil national du numérique
1Tony Blair, «  The e-Generation Is With Us  », The Guardian, 7 mai 2000, www.theguardian.com.
2Gilles Babinet, Transformation digitale, l ’avènement des p lateformes  : histoires de licornes, de data et de nouveaux barbares…, Le Passeur, 2016.

Avant-propos[modifier]

Avoir un site Internet, être présent sur les médias sociaux, nommer un community manager* ou même un directeur du digital dans votre entreprise ne suffit pas pour décréter que votre entreprise est digitale.
Le numérique change la donne pour les organisations (voir Chapitre 1)  : nouveaux modèles économiques, accélération des changements et disruption. Il devient vital pour les organisations d’opérer leur transformation digitale.
Face à ce nouveau paradigme, cinq approches ou stratégies sont possibles pour rendre son entreprise compatible avec le digital (voir Chapitre 2)  : attentisme, impressionnisme, externalisation, intégration et transformation digitale. C’est cette dernière approche qu’il convient d’appréhender et de mettre en œuvre. En effet, toute organisation, tel un organisme vivant, doit intégrer le digital dans sa stratégie et s’y adapter pour en tirer profit afin de :
  • mieux performer que ses concurrents et mieux satisfaire ses clients, administrés, adhérents, etc. ;
  • développer son chiffre d’affaires ;
  • accroître sa visibilité et sa notoriété tant sur Internet que dans la vie physique ;
  • recruter plus efficacement, attirer des talents, les former et les fidéliser ;
  • innover plus facilement et rapidement grâce au numérique.
Il existe en outre des considérations sectorielles à intégrer dans la démarche de transformation digitale (voir Chapitre 3). Et pour l’opérer, au préalable, il convient de mesurer sa maturité digitale à un instant t. Il s’agit d’un exercice complexe qui ne s’improvise pas et que nous avons voulu faciliter. En nous appuyant sur les concepts des outils notamment de gouvernance du système d’information et de stratégie et du marketing, nous avons bâti un modèle adaptable, collaboratif et évolutif quelle que soit la nature de l’entreprise.
Les dirigeants et les acteurs de la transformation digitale (ou numérique) de l’entreprise trouveront dans notre livre une démarche qui analyse l’opportunité du digital à travers six leviers complémentaires (stratégie, organisation, personnel, offre, technologie et innovation, environnement). Ils constituent le cœur de notre méthode et font l’objet des chapitres 4 à 9.
Le livre est agrémenté de témoignages d’experts du numérique et de dirigeants acteurs du changement occasionné par le digital.
Il s’agit d’une deuxième version d’un modèle pionnier fin 2014. Il a été profondément enrichi des retours d’expériences menées sur le terrain et par les entreprises, des remontées de lecteurs et des retours d’une thèse de doctorat portant sur la transformation digitale des acteurs du secteur bancaire. Tous les nouveaux retours des lecteurs, permettant de profiter de l’intelligence de la multitude, seront pertinents tant pour les spécificités sectorielles qui constituent une richesse que dans le cadre des évolutions de l’outil. Le site www.digitalimpacts.fr l’accompagne. Vous pouvez être acteur et participer à la co-construction permanente de cet outil que nous bâtissons. Rejoignez-nous sur notre site.
Bonne lecture et bonne transformation digitale de votre organisation  !
NB 1  : Le modèle de maturité digitale que nous proposons est sous licence Creative Commons. Il peut être utilisé par des praticiens pour mesurer la maturité numérique d’organisations dans l’optique d’un enrichissement de l’outil, et ce dans une approche ouverte « à la Wikipédia ».
x
Pour plus d’information sur les licences Creative Commons : http://creativecommons.fr/licences/
NB 2  : Lors de la première apparition d’un mot-clé, celui-ci est suivi d’un astérisque* qui renvoie au glossaire, en fin d’ouvrage.
NB 3  : Chaque interview est précédée d’un épitweet (ép igrap he + tweet), phrase issue de l’interview et facilement tweetable.
NB 4  : Dans les tableaux, à la fin des chapitres 4 à 9, pour un niveau donné, lorsque l’on a un intervalle précisé de type 20 à 50  %, le premier chiffre est inclus, pas le second.
Partagez vos impressions sur Twitter au fil de votre lecture avec le hashtag digitalimpacts.

Introduction[modifier]

Numérique vs digital ?[modifier]

Notre société est chaque jour de plus en plus digitale. Le débat entre les termes «  numérique  » et «  digital  » est loin d’être clos. L’Académie française et les Québécois ont opté pour le terme « numérique » (dérivé du latin numerus, nombre), mais dans le même temps, le terme anglais digital (qui provient du latin digitus, doigt – digit désignant un chiffre) est utilisé dans le monde anglophone et l’on peut observer que les langues italienne et espagnole ont également retenu ce terme. Dans les usages, les deux termes sont utilisés, et chacun a ses partisans , «  digital  » étant davantage employé dans le monde du marketing et lorsque l’accent est porté sur les usages, alors que « numérique  » revêt une connotation plus technique, même si son acception évolue lorsqu’on évoque les usages associés au numérique.
Nous avons choisi de ne pas choisir. Au risque de choquer les puristes des deux camps, nous privilégions le consensus et demandons à chacun d’accepter le vocabulaire de l’autre. Après tout, l’important n’est pas de savoir si le terme «  numérique  » ou le terme «  digital  » doit être utilisé en français. L’important est de prendre conscience des enjeux en termes de création de richesse, d’emploi, d’avenir de notre modèle social, que les technologies et usages éclos depuis la fin du 20e siècle ont fait évoluer. Aussi, dans les pages qui suivent, les termes « numérique » et « digital » sont employés indifféremment.

La numérisation de la société en action[modifier]

Numérisation signifie « transformation en données numériques ». Elle recouvre  :
  • la description d’un document physique par un fichier numérique ;
  • la conversion d’un signal électrique analogique en un flux numérique ;
  • l’entreprise de conversion des fonds documentaires datant des époques technologiques précédentes.
Gilles Babinet, dans son livre L ’Ère numérique, un nouvel âge de l ’humanité , estime que la révolution numérique est la nouvelle étape de l’humanité après les révolutions agricole, industrielle et des services. Nous pouvons même y distinguer trois périodes  : celle du matériel informatique (1945-1985), celle du logiciel (1985- 2005), puis celle des données, dans laquelle nous sommes (depuis 2005) et où les Gafam* (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) règnent en maîtres. Gilles Babinet distingue cinq mutations qui vont bouleverser nos vies :
  • la connaissance et les gains d’opportunité (qui augmentent le champ des possibles avec, par exemple, le fait de prévenir d’un changement de réunion via un smartp hone), le succès du partage et du collaboratif illustré notamment par l’encyclopédie libre Wikipédia avec l’intelligence apportée par la multitude, le big data avec la profusion des données disponibles et des capteurs ;
  • l’éducation avec, entre autres, le phénomène des Mooc*, l’enseignement à distance et le nécessaire passage par l’apprentissage, ou le succès de la méthode Montessori qui privilégie l’éveil plutôt que le taux de réussite aux examens ;
  • la santé avec la force d’outils comme Watson d’IBM pour l’aide au diagnostic, le dossier médical personnalisé, le succès du quantified self * corrélé aux évolutions démographiques, l’opportunité que représente Internet pour l’aide aux patients atteints d’une maladie rare ou orpheline ;
  • l’industrialisation et la production avec l’apport des robots, des fablabs* et le passage au Do it with others (Diwo) permis par les échanges sur le réseau ainsi que l’arrivée des imprimantes 3D. Les impacts sont considérables pour le travail, mais aussi pour les lieux de production ;
  • le rôle de l’État amené à être repensé avec l’op en data*, l’e-démocratie et la nécessaire innovation au sein de l’État avec la possibilité d’une transition de la régulation à l’innovation pour ne pas se reposer sur un contexte de rente.
Ces mutations affectent profondément les organisations sachant que le web est dans sa deuxième phase, celle du web 2.0*, qui est un web collaboratif avec une primauté des données où se situe la valeur qu’il convient de traiter, de contextualiser et raffiner pour apporter une valeur ajoutée. Le web 2.0 est concomitant avec la mobilité et le développement des smartp hones et des tablettes qui constituent à présent les moyens de connexion majoritaires à Internet devant les ordinateurs personnels. C’est du reste la conjonction du smartphone et du GPS qui a permis à des acteurs comme Uber, par exemple, d’éclore et de disrupter les taxis. Des évolutions techniques naissent de nouvelles opportunités d’usages et de services. La troisième phase du web en devenir est celle du web 3.0 , conjonction du web sémantique et de l’Internet des objets*.
De la primauté du numérique dans l’économie à la nécessité d’un modèle de maturité des organisations
L’économie digitale (ou numérique) se développe et tire la croissance de l’économie. Déjà, le rapport publié en 2011 par McKinsey estimait qu’un quart de la croissance en France était lié au numérique. Il extrapolait en prévoyant que ce serait la moitié à l’horizon 2030. L’économie digitale offre par conséquent de belles perspectives de croissance et d’emploi aux acteurs nés du digital, mais aussi aux acteurs issus de l’économie traditionnelle qui ont à se réinventer.

Méthodologie du rapport McKinsey[modifier]

Le rapport McKinsey introduit un indice d’intensité web qui prend en compte deux dimensions, le nombre d’outils ou de technologies Internet adoptés par une entreprise (de type site, mél, Intranet, marketing en ligne) et le taux de pénétration de chacun de ces outils (nombre d’employés, de clients ou de fournisseurs ayant accès à ces technologies). L’importance des différents outils est pondérée selon leur poids relatif et évaluée par les entreprises elles-mêmes, pour aboutir à un score compris entre 0 et 100  %. Trois groupes sont constitués  : faible intensité web (indice entre 0 et 20  %), moyenne intensité web (20 à 40  %) et forte intensité web (au-delà de 40  %). Les entreprises à forte intensité web croissent deux fois plus vite que les autres, exportent deux fois plus et sont plus profitables. Et comme l’indique Christian Saint-Étienne, préfacier du rapport, la corrélation en matière de surperformance de ce type d’entreprises s’explique par le fait qu’elles utilisent davantage Internet parce qu’elles sont plus dynamiques et plus orientées vers la croissance.
Ces acteurs de l’économie traditionnelle, dont les modèles économiques sont fondés sur des bases classiques, doivent s’adapter aux nouvelles règles du jeu qu’impose le digital. Cela est d’autant plus important d’effectuer sa transformation digitale pour rester un acteur compétitif que la mortalité moyenne des multinationales n’est que de 40 ans .
La jeunesse de ces nouvelles règles et la rapidité des changements déstabilisent les entreprises qui font appel à un personnel souvent né avant l’émergence du numérique. Dans le même temps, nous avons une foison de benchmarks et quelques guides qui ne couvrent que des parties du problème, ce qui n’aide que partiellement les managers dans leur mission de digitalisation. Les managers ont besoin d’un cadre leur permettant de bien comprendre dans quelle mesure l’entreprise est adaptée au monde digital. Cela est d’autant plus crucial que dans le monde concurrentiel dans lequel nous évoluons, la coopétition*, l’innovation et la disruption, la présence numérique et l’intelligence économique deviennent incontournables du fait du vecteur de transformation qu’est Internet. Ce cadre leur permettra de structurer leur réflexion et de les guider dans les actions qu’ils mènent pour que leur entreprise ou organisation tire profit du digital comme relais de croissance. En outre, et alors même qu’il existe des outils de gouvernance dans le monde informatique et du système d’information (Information Technology Infrastructure Library [Itil*], Control Obj ectives for Information and Related Technology [Cobit*], Cap ability Maturity Model Integration [CMMI*], etc.), peu d’outils existent en matière de numérique. Cela aiderait pourtant les acteurs dans leur démarche d’évaluation du niveau de maturité de leur organisation d’une part, et leur permettrait d’instaurer une démarche d’amélioration permanente d’autre part. Ce processus de perfectionnement en continu est représenté par la roue de Deming (voir Figure I.1) qui illustre la méthode de gestion de la qualité dite PDCA (Plan/Do/ Check/A ct). Et en même temps, l’appréhension proactive du monde numérique préparera aux possibles risques de disruption notamment liés aux évolutions technologiques et d’usages.
Les outils existants en matière de gouvernance du système d’information ne sont pas remis en cause. Il s’agit de construire un nouvel outil pour un champ non encore couvert, car jusqu’alors non stabilisé, mais stratégique pour le développement et la survie de toute organisation. Certains dirigeants ne perçoivent le numérique que comme une simple fonction support parmi d’autres. Il est par ailleurs important de pouvoir se situer par rapport à ses concurrents et mesurer ses forces et faiblesses en matière de numérique. Tel est l’objectif de ce livre, qui propose une méthodologie concrète, adaptative, évolutive et opérationnelle – un site en ligne l’accompagne pour la rendre collaborative et lui permettre d’évoluer. Cette méthodologie a vocation à embrasser l’ensemble du périmètre du digital, tout en tenant compte d’une réalité : le digital se construit chaque jour grâce aux innovateurs ; il continuera d’évoluer à la fois par évolutions successives mais aussi via l’apport de nouvelles technologies disruptives permettant des créations de nouvelles offres ou des changements radicaux. Un modèle figé serait par ailleurs assuré d’une obsolescence rapide, compte tenu de la vitesse d’évolution du digital. Aussi le modèle que nous proposons, qui fera gagner du temps aux décideurs, est un réceptacle des bonnes pratiques mises en œuvre sur le terrain, dans un cadre défini, d’où son caractère collaboratif pour recueillir des suggestions d’améliorations et de mises à jour.
FIGURE I.1 La roue de Deming
Nous avons décidé de refondre le premier modèle établi en 2014.
Voici les principales motivations résumées :
Méthode dans Transformation digitale Méthode DIMM dans Transformation digitale 2.0
5 leviers 6 leviers (ajout du levier Stratégie)
Critères, sous-critères et indicateurs (117) Groupements et indicateurs (113) pour une plus grande facilité de mise en œuvre 28 indicateurs à définir par la Définition de tous les indicateurs en communauté tenant compte des particularités sectorielles
Pondération des indicateurs avec introduction de coefficients (1, 2 ou 3) pour chacun d’eux
Intégration des résultats de la mise en œuvre de la méthode initiale, travaux de recherche, retour des lecteurs
Prise en compte des évolutions technologiques (par exemple blockchain*, développement de l’intelligence artificielle, primauté des données – transverses au modèle)
Plus grande intégration des phénomènes de disruption
Veille permanente permettant d’avoir du recul sur les forces de la méthode et les points perfectibles améliorés
1« Terminologie et néologie », http://www.academie-francaise.fr.
2On pourra noter la création du secrétariat d’État chargé du numérique, le Conseil national du numérique et le Syntec informatique devenu Syntec Numérique.
3Voir l’article « Numérique », http://fr.wikipedia.org.
4Gilles Babinet, L ’Ère numérique, un nouvel âge de l ’humanité  : cinq mutations qui vont bouleverser notre vie, Le Passeur, 2014.
5David Fayon, Made in Silicon Valley : du numérique en A mérique, Pearson, 2017.
6David Fayon, Web 2.0 et au-delà. Nouveaux internautes  : du surfeur à l ’acteur, Economica, 2010 (2e éd.).
7Rapport McKinsey, Imp act d ’Internet sur l ’économie française  : comment Internet transforme notre p ay s, 2011, http://www.ladocumentationfrancaise.fr
8Dan Schatt, Virtual Banking: A Guide to Innovation and Partnering, John Wiley & Sons, 2014.

Chapitre 1[modifier]

La transformation digitale  : contexte, définition et principes

La bascule vers le monde numérique[modifier]

Au milieu des années 1990, Internet a décollé dans les pays occidentaux grâce, entre autres, à la généralisation des navigateurs fournis avec les PC (Internet Explorer en particulier, livré avec Windows de Microsoft, avant que les autres éditeurs de navigateurs, notamment Netscape, ne se plaignent de cet avantage concurrentiel). Les entreprises traditionnelles se sont alors mises progressivement au numérique. Par ailleurs, de nouveaux acteurs sont apparus, positionnés soit exclusivement sur le secteur du numérique, appelés p ure p lay ers, soit sur les créneaux traditionnels. Cette première vague d’Internet en 1994-1995 (Yahoo!, Amazon, eBay) a simultanément généré un processus d’écrémage et de concentration lié à la capacité de croître rapidement et de devenir l’acteur de référence dans le domaine. L’apparition d’Amazon en 1994 et de Google en 1998, suivie de celle de Facebook en 2004 et du virage réussi d’Apple autour du smartphone en 2007, a permis la croissance d’un quatuor américain dominant le monde numérique, bientôt rejoint par le retour en force de Microsoft, que l’on a baptisé les Gafam (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft). Une bascule s’est néanmoins opérée en 2008, selon Nicolas 1 2 Colin et Philippe Lemoine . Les facteurs en ont été la crise, qui a joué un rôle d’accélérateur dans la transformation digitale, mais surtout le développement du smartphone avec les applications et les nouveaux usages permis en mobilité avec le couplage de la géolocalisation (GPS). Les Gafam, rejoints à un degré moindre par les Natu (Netflix, Airbnb, Tesla, Uber) – même si l’avenir de Tesla et d’Uber est incertain –, ont leur pendant en Chine avec les BATX (Baidu, Alibaba, Tencent, Xiaomi). Un combat entre États-Unis et Chine s’opère d’ailleurs pour la suprématie des outils numériques qui sont utilisés ou consommés par un pan grandissant de la société.
Les entreprises traditionnelles se sont lancées progressivement dans une stratégie multicanale avec une interaction avec le client en face-à-face, par téléphone, par correspondance, par SMS, par Internet (site, mél, chat, réseaux sociaux), celles ayant plus d’appétence pour le numérique étant pionnières (retail, télécommunications). En matière de vente par correspondance (VPC), La Redoute a mis en place son site laredoute.fr qui, du fait de la notoriété de la marque, s’est vite imposé. Certaines entreprises se sont vues néanmoins contraintes d’évoluer et de changer de modèle. Le groupe 3 Suisses a, pour sa part, annoncé l’abandon de son catalogue papier en avril 2014, alors que celui-ci générait encore 20  % des ventes totales, car cette activité était devenue non profitable. Souvent, c’est paradoxalement dans une situation de crise que l’entreprise innove, et de façon frugale pour les premières étapes des projets. Ainsi La Poste, qui connaît une décroissance structurelle de son activité courrier du fait de la dématérialisation du courrier de gestion et d’une évolution des usages pour les particuliers, a lancé le projet Facteo, ce qui a permis de doter fin 2015 l’ensemble des facteurs (et des managers) d’un smartphone avec un écosystème d’applications pour leur tournée. Le projet comprend de nouveaux services, créateurs de valeur – et le rôle du facteur est appelé à évoluer  : il n’est plus simplement voué à un rôle de distribution (courrier, colis), mais aussi à celui de collecte d’objets et de données, parfois couplée à un horodatage et une géolocalisation (informations remontées dans les bases de données tels les changements d’indications routières, les dégâts des eaux des particuliers, etc.) qui ont une valeur profitable pour des partenaires (Google Maps ou Mappy pour le premier exemple, des assureurs dans le second). Le paiement via le smartphone du facteur pour des services est également une étape future créatrice de valeur.
L’un des challenges importants que les entreprises traditionnelles ont à résoudre est celui du patrimoine que représentent leurs applications et leurs données avec la possibilité de faire évoluer facilement leur système d’information et de le rendre interopérable* avec leur écosystème (clients, partenaires, fournisseurs). La question est de savoir où les données, qui représentent une valeur considérable, seront stockées  : dans des serveurs internes, chez des partenaires, dans le cloud  ? Il en va de même pour les processus métiers bousculés par le numérique ou le partage des savoirs, où le rôle du manager doit être repensé et évoluer vers le coaching des talents, avec en outre une fonction de connecteur entre les experts au sein de l’organisation et au-delà.
Pour autant, cette bascule vers le numérique ne s’inscrit pas dans un processus suffisamment pensé, méthodique et cohérent, avec l’implication du personnel et, compte tenu de l’organisation, des choix techniques qui peuvent être opérés, de son histoire, son patrimoine, ses forces et faiblesses et du contexte.
Plus globalement, les frontières entre entreprises issues du web et entreprises traditionnelles s’estompent. Chaque entreprise a besoin, dans une logique de complémentarité, d’être présente tant physiquement que virtuellement (phygital*), mais aussi selon une stratégie de prédation qui consiste à élargir son domaine d’activité stratégique initial comme le font par exemple les Gafa. Physique vs virtuel
On oppose monde physique (IRL*) et monde virtuel (sur le web), plutôt que réel et virtuel. En effet, le monde virtuel est bien réel. Et le monde physique est lié aux biens matériels. Les deux mondes, loin d’être cloisonnés, sont complémentaires et s’alimentent mutuellement. Il en est ainsi de la réalité augmentée. On parle d’ailleurs de plus en plus de phygital (physique + digital).
Amazon a poursuivi son expansion jusqu’à devenir un supermarché planétaire et a su développer la plateforme AWS (Amazon Web Services) qui héberge des applications et les usages qui leur sont liés. À terme, le groupe concurrencera Walmart (chaîne de supermarchés aux États-Unis qui emploie plus de 2 millions de personnes), car sa maîtrise de la chaîne logistique comme sa volonté d’être présent sur l’ensemble de l’offre des produits et services lui permettent de livrer des produits frais ou fragiles que les internautes se procurent actuellement en magasin ou via des livraisons de courses à domicile proposées par des enseignes ou filiales de la grande distribution. Ainsi, le rachat des enseignes Whole Foods aux États-Unis en juin 2017 (pour 13,7 milliards de dollars) a été stratégique. Mais Amazon phagocytera aussi des opérateurs postaux pour les livraisons si des synergies ne sont pas développées avec ceux-ci, également dans une logique de dévulnérabilisation face aux conflits sociaux et d’intégration verticale. Toutefois, la mauvaise prise en compte de l’opérateur humain (livraison à la volée des colis où le rendement prime sans se soucier des conditions de travail du salarié) peut être une source de faiblesse de l’entreprise, comme c’est le cas avec Uber. Le sociologue Antonio Casilli évoque même l’émergence de micro-travailleurs induits par le numérique (par exemple travailleurs du clic isolés et peu protégés) et qui sont sous-payés. Google, avec une politique de croissance externe tous azimuts, investit au-delà de son positionnement initial de leader des moteurs de recherche sur Internet : le groupe est présent dans les secteurs du transport, de l’énergie, de la santé et des services. Ceci est vrai pour l’ensemble des Gafa dont la capitalisation boursière est près de deux fois supérieure à celle de l’ensemble des entreprises du CAC 40.

Des organisations plutôt inadaptées[modifier]

À de rares exceptions près, les entreprises ne tirent pas pleinement profit du numérique dans leur développement, même s’il faut nuancer ce jugement.
Ainsi, des disparités existent dans les usages et selon la taille des entreprises. Par exemple, globalement, une TPE sur deux en France dispose d’un site Internet et 5  % d’un site marchand  ! La présence sur les réseaux sociaux progresse (23  %) mais reste timide, son utilité (développer son image et communiquer, vendre, recruter à moindre coût, co-créer des produits et services, acheter à plusieurs) n’étant souvent pas perçue. Dans le même temps, 92  % des TPE françaises sont équipées d’un ordinateur (fixe ou portable) et 89 % disposent d’une connexion Internet. La priorité est portée sur l’équipement plutôt que sur son usage. En outre, au sein même des organisations, le niveau de connaissance et d’usage du numérique du personnel est très variable. Et ce sont souvent les générations Y et Z qui ont le plus d’appétence pour le numérique, avec un usage massif des médias sociaux, qui font bouger les lignes. Dans les grosses structures, le niveau d’usage du numérique diffère selon les directions, avec d’une part une utilisation plus importante dans la direction du système d’information, du marketing et de la communication, et d’autre part un plus grand conservatisme dans les directions opérationnelles et celles des ressources humaines, dont peu prévoient une gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC*) pour répondre aux mutations présentes et à venir des métiers, dues à la généralisation du numérique.
L’inadaptation de bon nombre d’entreprises vient également des décisions de dirigeants qui, loin de voir le numérique comme une opportunité, le perçoivent d’abord comme une menace pour leur pouvoir ou pour la productivité même de leur entreprise. Les réticences à l’égard de l’introduction des réseaux sociaux dans l’entreprise sont, à ce titre, révélatrices. Alors que ces derniers annoncent la troisième révolution des télécoms dans l’entreprise , les dirigeants estiment que leur usage sera source de perte de productivité et de distraction. Les arguments avancés sont les mêmes que ceux formulés à l’encontre du téléphone, puis de la messagerie électronique. Et le réflexe naturel est de brider les accès plutôt que de prendre conscience que la porosité des frontières entre la vie professionnelle et la vie personnelle devient la règle, et le fonctionnement des structures sur le principe des trois-huit (huit heures de travail, huit heures de sommeil, huit heures de loisirs et autres), qui remonte à l’après-guerre, l’exception. Cela entraîne un fossé grandissant entre la « culture 0.0 », encore présente dans notre société (« le parapheur et le fax » des dirigeants qui se font encore imprimer leurs méls et griffonnent les réponses que leur assistante devra ressaisir, générant des pertes de temps et de réactivité) et les générations Y et Z qui, avec le bridage de certaines applications ou sites, utilisent leur propre smartphone ou tablette pour rester en contact avec leur communauté au sein de l’entreprise. La logique veut que les entreprises passent d’une obligation de moyens à une obligation de résultats par ailleurs conciliable avec la vie personnelle. Le télétravail, les outils collaboratifs, les difficultés de transport dans les grandes villes accentuées en cas de grèves y participent.
En outre, peu de structures perçoivent encore les enjeux de la multitude  : l’innovation, la création de valeur ne s’effectuent plus exclusivement dans l’entreprise ou l’organisation, mais en dehors de celle-ci, et ce d’autant plus que son produit phare devient une plateforme avec la possibilité de générer un écosystème autour avec des APIs (App lication Programming Interface) ouvertes. Le recours au crowdsourcing * peut être perçu comme une menace par les partenaires sociaux, celui du crowdfunding* comme un ovni. Tant le big data que l’op en data sont des leviers de croissance stratégiques pour permettre à un écosystème d’éclore autour d’une organisation, mais ils donnent aussi le moyen à des TPE de se créer en développant un nouveau service/usage grâce à l’apport des données de l’organisation rendues publiques.

Prélude à la transformation digitale  : automatisation, dématérialisation, désintermédiation[modifier]

Les transformations liées au numérique sont de trois ordres :
  • l’automatisation pour la reproduction mécanique d’une séquence d’actions à l’aide d’un programme ;
  • la dématérialisation pour le remplacement de supports matériels, en particulier des documents papier par des fichiers informatiques. Elle recouvre également la gestion numérique des flux de l’ensemble des données pour la création, la modification, la suppression mais aussi le stockage, l’échange et l’archivage ;
  • la désintermédiation pour la suppression des intermédiaires rendue possible avec le numérique.
Ceci occasionne des gains de temps, une baisse des coûts (pour la dématérialisation, frais d’impression, de photocopie, d’affranchissement et de stockage) – avec par ailleurs des coûts liés à l’informatique –, une plus grande efficacité dans la fluidité de l’information. Cela génère aussi une redistribution des rôles et des responsabilités, une modification de la nature des tâches à effectuer et l’apparition de nouvelles actions induites qui contrebalancent certaines qui sont détruites.
Avant de digitaliser leur marketing, leur vente, leur relation client, leur recrutement, leur ingénierie, etc., les entreprises dématérialisent leurs processus. En s’affranchissant de la contrainte physique, elles libèrent ainsi la circulation de l’information. La capacité de réutilisation de l’information étant infinie, la dématérialisation s’accompagne de sa transformation permanente. Le traitement mécanique, manuel, laborieux, laisse la place à un traitement automatique, reconfigurable à loisir avec en outre l’apport potentiel de l’intelligence artificielle. S’affranchir du matériel, c’est se donner une plus grande liberté de reconfiguration, d’adaptation au changement. C’est un facteur clé de réussite dans un monde en mutation profonde, sous l’influence notamment de la mondialisation, de l’aspiration des peuples à une meilleure qualité de vie dans un environnement aux ressources physiques limitées – alors que les ressources numériques sont quasi infinies.
Les entreprises dématérialisent leurs catalogues produits, les bons de commande client, les bordereaux de livraison des chaînes logistiques, le paiement en point de vente, les feuilles de paie des salariés, les publicités, les processus opérationnels propres à leur métier, etc. Elles s’appuient pour cela sur des systèmes d’information de plus en plus complexes, sur des matériels qu’elles mettent à la disposition de leurs collaborateurs, sur des interfaces d’échanges automatisés avec leurs partenaires industriels. Elles intègrent des dispositifs techniques proposés par des acteurs promettant de libérer la contrainte d’un monde physique vers un monde que certains qualifient de virtuel, dans le cloud.
Une entreprise aux processus dématérialisés est-elle pour autant une entreprise digitale  ? Prenons l’exemple du secteur bancaire. L’usage du coffre-fort décline. L’argent est plus liquide que jamais, dans une économie mondialisée. Les transactions bancaires sont totalement dématérialisées. Les clients des banques utilisent massivement les sites web et les applications depuis leur smartphone pour passer leurs ordres, gérer leurs comptes. Il devient rare de passer au guichet d’une banque aux horaires d’ouverture pour remplir et signer un bordereau de virement bancaire… Il suffit de lancer une application sur son smartphone, d’indiquer le montant du virement, le numéro de compte destinataire et de valider, voire d’utiliser des services proposés par des fintech* (combinaison des termes «  finance  » et «  technologie  ») ou des néobanques, et même de recourir à des crypto-monnaies. Le processus du virement bancaire est totalement dématérialisé.
La banque digitale a non seulement dématérialisé ses processus, mais elle valorise aussi les gisements de données qu’elle consolide au fil du temps. Sa valeur n’est plus seulement dans sa capacité à gérer les fonds de ses clients  : elle provient aussi de sa capacité à valoriser l’information qu’elle collecte et transforme. Elle s’accompagne d’une posture nouvelle, plus transparente, plus intime avec ses clients. Elle revisite la mission d’origine et noble de la banque, à savoir permettre de financer les projets des uns avec les fonds des autres. Elle favorise le développement d’une relation sincère entre ses employés et ses clients, non plus seulement au travers des ouvertures de compte ou de la création de dossiers de crédit, sachant que les clients réalisent de plus en plus d’opérations à distance ou depuis une application sur leur smartphone et utilisent de nouveaux acteurs plus agiles (N26, PayPal, TransferWise) qui viennent concurrencer les banques traditionnelles, car ils n’ont pas hérité d’un système d’information complexe et peu évolutif. L’enjeu de la banque digitale est de remettre de l’humain dans un monde dématérialisé, aseptisé, fait de chiffres qui défilent sans chaleur sur les écrans, et de transformer le rôle des agences en proposant de nouveaux services avec des partenaires. La banque digitale dialogue, innove pour et avec ses clients et favorise le développement d’acteurs tiers qui créent pour ses clients des services à valeur ajoutée. Elle élimine les frictions qui ralentissent la réalisation des projets de ses clients. On est dès lors bien loin de l’image d’une banque froide, dont les cadres soucieux de leur carrière se cachent derrière les tours en verre de leurs sièges sociaux. La banque digitale déverrouille et ne se contente pas d’automatiser, d’informatiser, de dématérialiser dans son seul intérêt, dans une logique de réduction des coûts.
Cette illustration avec le domaine bancaire est transposable à d’autres industries, et bien sûr aussi au secteur public, avec l’e-administration notamment. Dématérialiser pour améliorer les performances de processus existants conduit bien à une amélioration des performances des processus existants  : moins de papier, moins de déplacements, moins de contraintes horaires, moins d’opérations coûteuses car manuelles, moins d’erreurs. La digitalisation va au-delà, dans la recherche de l’augmentation de la valeur  : davantage de clients, de produits vendus, de territoires, davantage de partenaires développant leurs produits et services, davantage de plaisir dans les relations humaines entre les parties prenantes. Pour une entreprise ou une administration, choisir la voie de la digitalisation, c’est donc entamer un cercle vertueux créateur de service et de valeur.
Des concepts du digital (ou du numérique)  : migration numérique, transformation digitale, sublimation numérique
Avant même de parler de transformation digitale, une étape préliminaire peut, pour certains acteurs, être nécessaire  : celle de la migration digitale* où les gros systèmes des années 1970 développés en Cobol, par exemple, et encore fortement ancrés dans le domaine bancaire, doivent évoluer vers des solutions plus agiles et orientées web. C’est la problématique de l’héritage à gérer («  legacy  »). Au fil des années, des évolutions logicielles et des empilements d’outils se sont opérés, tel un millefeuille, rendant les systèmes d’information bancaires complexes, lourds et coûteux à maintenir et moins adaptatifs. Dans le même temps, des solutions web avec des clients légers sont apparues. Aussi, cette étape préliminaire des petits pas peut se présenter pour plusieurs acteurs, à moins de développer des solutions permettant d’aspirer les données dans de nouveaux outils, mais ce changement plus coûteux au niveau des architectures est un chantier de longue haleine. Ce handicap est pointé dans le livre Dirigeants, acteurs de la transformation numérique pour la nécessité de transformation digitale «  qui avance plus vite dans les pays émergents qui sont moins pénalisés par des solutions anciennes à remplacer  », avec également des «  sous-traitants d’aujourd’hui qui seront peut-être des compétiteurs de demain ».
La transformation numérique (ou digitale) est un concept qui touche principalement de grandes organisations non issues d’Internet, avec un marché établi (souvent sur la base de monopoles de faits hérités de l’État ou d’une réglementation exclusive sur un territoire donné), qui doivent adapter leurs modèles économiques pour survivre à la disruption imposée par les nouveaux entrants, qui touche progressivement l’ensemble des secteurs d’activité. Le concept fait l’objet d’un buzz dans la communication externe des entreprises, souvent sans définition, ni délimitation, ni méthode appropriée tenant compte de leur organisation et des éléments de contingence stratégique et managériaux associés (culture, métiers…). Il s’agit de la transformation de ce que produit l’organisation avec deux composantes  : une composante matérielle et une composante informationnelle. Selon le secteur d’activité de l’entreprise, la composante matérielle sera plus ou moins importante au départ  : une entreprise qui produit naturellement des données aura peu ou pas de composante matérielle, alors qu’une entreprise produisant des biens physiques fondera une part importante de sa valeur ajoutée sur cette composante. La valeur globale d’un bien résulte non seulement de la valeur de ce bien (matériel ou non), mais également de la valeur informationnelle autour de celui-ci  : par exemple, pour une entreprise qui produit des œufs, non seulement le produit œuf en lui-même, mais aussi les informations sur les œufs (date de ponte, date limite de consommation, bio ou non, traçabilité alimentaire, etc.). La transformation digitale a pour objectif d’augmenter la valeur de l’information dans les produits et les services  : en ce sens elle est stratégique. Ceci peut passer par une numérisation de toutes les informations produites par l’entreprise et son écosystème avec ses clients, fournisseurs, partenaires et tous ceux qui interagissent avec elle – et les informations archivées de l’entreprise si elle dispose d’un historique, ce qui suppose une numérisation de ces données dans un système d’information pour pouvoir rendre l’information disponible, et ce le plus rapidement possible.
Si la transformation numérique constitue un facteur de valorisation de la communication auprès des administrateurs, investisseurs, clients, partenaires, institutions, la réalité du terrain est loin du mythe de la transformation globale. L’injonction de transformation numérique est la source d’une tension entre conduite du changement et caractéristiques propres aux grands groupes, c’est-à-dire une culture forte, un héritage technologique, une base de clients et une offre connue dont il faut assurer la continuité.
Un état de l’art de la transformation digitale permet de noter des convergences entre les visions des chercheurs et des praticiens. Ainsi le professeur de sciences politiques John Zysman considère trois niveaux de service dans le processus de transformation digitale  : les services irréductibles (délivrés par des humains, créés au même endroit où ils sont livrés), les services hybrides (entre humains et automatisation) et les services automatisés (avec l’apport des technologies numériques). Le potentiel de création de valeur et de gains de productivité est d’autant plus fort que le service est automatisé, même si les auteurs soutiennent que le rôle de l’humain sera toujours nécessaire.
Du fait de la pression financière (moteur et force limitante de la transformation) sur le cœur de métier, les stratégies de transformation numérique devraient faire l’objet d’une réévaluation continue, dans le cadre de laquelle les hypothèses sous- jacentes ainsi que les progrès transformationnels réalisés à ce jour sont évalués. Cela vient confirmer l’idée d’une transformation digitale initiale (ou transitoire) et d’une transformation digitale permanente (ou stationnaire) dans le cadre d’un réexamen par rapport à un contexte évolutif et à un souhait d’amélioration permanente par rapport à la concurrence.
Pour sa part, le Cigref (Club informatique des grandes entreprises françaises)9 propose une démarche de transformation dans laquelle sont recensées sept caractéristiques (voir Figure 1.1) :
FIGURE 1.1 Critères pour la transformation numérique (selon le Cigref)
Selon l’entreprise de conseil Accenture, dans son rapport Performance digitale des entrep rises françaises publié en 201610, la transformation digitale passe par une refonte en profondeur de l’organisation plutôt que par du saupoudrage pour son fonctionnement, son développement et sa culture. Une action d’envergure est à entreprendre dans ce sens. Car une fois la transformation digitale réalisée, la question est de savoir comment continuer à l’adapter – le monde numérique évolue en permanence –, mais aussi comment se préparer à d’éventuels changements structurels – qu’ils soient techniques, environnementaux, etc. Aussi, il paraît intéressant de concevoir la transformation digitale de tout type d’organisation en effectuant une analogie avec sa transformation physique. Celle-ci procède selon deux régimes. D’abord un régime transitoire pour lequel de gros changements sont à opérer sur l’ensemble de ses dimensions, à l’image d’une restructuration forte de l’entreprise. Puis un régime stationnaire où, après un diagnostic récurrent, par exemple chaque année, des orientations stratégiques sont à conduire pour améliorer ses faiblesses tout en renforçant ses points forts et ses avantages concurrentiels. Dans ce processus, l’organisation, sous tension, est à aligner avec la stratégie de l’entreprise. Le régime reste stationnaire tant que de nouveaux éléments disruptifs, principalement liés à des ruptures technologiques, n’apparaissent pas. Ce pourrait être des évolutions significatives en intelligence artificielle, liées à la blockchain ou encore l’ordinateur quantique.
Dan Schatt11, président de Libra Credit, estime que les drivers de l’innovation sont le cloud (mise à jour rapide des logiciels et cohérence des versions), le smartphone (qui permet des services dans le domaine bancaire comme Square, iZettle, PayPal) et le big data. Ceci confirme une convergence des techniques permettant l’innovation que nous retrouvons dans l’ensemble des travaux des auteurs.
Selon le consultant Geoffrey A. Moore12, une innovation disruptive s’impose vraiment quand ce qui est rare et cher devient omniprésent et bon marché. Il dresse pour sa part cinq facteurs de disruption :
  • le cloud, qui rend le coût marginal de l’informatique gratuit. On ajoute simplement de la puissance de calcul bon marché ;
  • les smartphones, qui rendent marginal le coût d’une transaction d’où qu’on se trouve ;
  • les nouveaux acteurs du web et les réseaux sociaux, qui rendent marginal l’ajout d’une ressource partagée dans l’économie collaborative (par exemple, Uber n’a pas de véhicule, ou Airbnb ne possède pas de logement en propre) ;
  • l’exploitation facile des données par les algorithmes plus que par des traitements humains, qui rend le coût de prise de décision dynamique très faible ;
  • l’Internet des objets, qui ne nécessite pas de maintenance sur place. Avec des algorithmes et l’exploitation des données, le coût d’optimisation est marginal.
Notons que ce passage de la détention d’un bien à son usage est une tendance sociétale forte pour les non-utilisateurs réguliers. Elle l’est encore plus pour les générations Y et Z qui sont par ailleurs plus infidèles aux marques, plus « volatiles » que les générations passées (baby-boomers et génération X). Les jeunes ont une fidélité plus sociale avec un rapport fort à l’innovation, notamment au travers des recommandations de leur tribu avec un rôle fort des médias sociaux. Ces nouveaux modes de consommation ont pour conséquence de nouveaux business models avec d’autres modes de facturation (forfait, usage). Internet rend les clients mieux informés et plus exigeants  ! Et les jeunes générations constituent des clients plus zappeurs, connectés, autonomes, mobiles  : ils sont davantage éclectiques, hédonistes, indépendants et tribalistes avec des codes développés. La stratégie Mobile first, d’abord pensée pour des usages mobiles, leur parle.
Pour leur part, Pascal Delorme, directeur exécutif d’Accenture Digital, et Jilani Djellalil13, président de Will Be Group, décrivent une vision de la transformation digitale qui mentionne cinq catégories de ruptures technologiques (la puissance de traitement avec le cloud, l’extension des terminaux avec les objets connectés, les capteurs et les données associées, l’analytique et le prédictif, les nouveaux modes de fabrication – impression 3D, usine 4.0) et cinq tendances majeures (le passage de la propriété à l’usage, l’abonnement, le partage ou l’échange, la gratuité conditionnelle et le collaboratif – le « crowd every thing »).
La sublimation numérique*, qui consiste à passer directement de la révolution agricole à celle du numérique en court-circuitant la révolution industrielle et même celle des services, est une opportunité dans le cadre du co-développement Nord-Sud. En effet, une révolution industrielle qui serait engagée de façon moins respectueuse pour l’environnement en Afrique – pour des raisons de coût et d’utilisation des matières premières, mais aussi de priorités – que celle qu’effectuent désormais les nations du Nord, serait planéticide. Cette sublimation numérique peut concrètement s’appliquer aux pays émergents dans le domaine des services. Elle constitue une opportunité du développement du téléphone mobile en Afrique subsaharienne pour l’e-administration  : simplicité et facilité d’utilisation, croissance massive et rapide, moindres coûts, vérification d’identité, décentralisation. Ces caractéristiques sont également transposables dans le cadre de la banque sur mobile, avec cependant la nécessité de veiller à l’illectronisme*, c’est-à-dire de faire en sorte que tous les utilisateurs puissent être formés pour utiliser pleinement les services. C’est le cas au Kenya avec Safaricom pour les micro-paiements. En se basant sur la plateforme Stellar qui repose sur la blockchain, des services comme le traçage des opérations aurifères au Burkina Faso ou la fourniture de micro-services bancaires pour des adolescents sans abri en Afrique de l’Ouest ont été réalisés lors d’un week-end challenge pour start-up (via l’accélérateur suisse Fusion et l’ONG Terre des hommes) pour montrer les usages possibles de la blockchain pour les pays en voie de développement.

Pourquoi opérer sa transformation digitale ?[modifier]

Avec les nouvelles technologies notamment, les cycles se raccourcissent, notamment la mise sur le marché d’un nouveau produit ou service, et le coût marginal pour les services immatériels tend vers zéro. Ceci représente des possibilités à exploiter par de nouveaux entrants. Les organisations traditionnelles doivent se repenser et se disrupter elles-mêmes (processus, business models, produits et services notamment) pour ne pas se faire « ubériser*  » ou «  kodakiser*  ».
Toutes les entreprises sont concernées, ainsi que leur personnel qui est à former au numérique et aux nouveaux usages, et ceci dans un processus permanent. Néanmoins, en fonction des priorités stratégiques, de la taille et de la culture de l’entreprise, la transformation digitale ne s’opérera pas de la même façon et dans les mêmes délais.
La transformation digitale peut conduire à revoir le business model de l’entreprise, ses APIs cœurs de métier, à l’amener vers une logique omnicanale au service des clients/utilisateurs/salariés/ administrés, etc., sachant que nous devons distinguer dans l’exploitation de l’information produite les trois activités suivantes  : opérationnelle, de support et managériale. La transformation digitale est donc l’adaptation des modèles économiques de ces organisations.
Le but de la transformation digitale est de faire mieux que ses concurrents, mieux satisfaire ses clients et, in fine, ne pas se faire ubériser et assurer la pérennité de l’entreprise même si celle-ci est appelée à élargir ses domaines d’activités stratégiques, voire à en changer. Il s’agit de survivre à la disruption imposée par les nouveaux entrants, dans l’ensemble des secteurs d’activité. Des entreprises comme Nokia, Kodak ou Blockbuster (pour la location de cassettes, DVD et jeux vidéo) n’ont pas su se réinventer et ont décliné. Kodak avait ainsi développé des solutions de photo numérique, mais sans oser les commercialiser de peur de cannibaliser son activité majeure, la photo argentique. Cela aurait introduit également une concurrence interne entre deux business units  : la traditionnelle, déclinante, et la nouvelle, prometteuse. Un arbitrage au plus haut niveau et une vision de la stratégie par le PDG au-delà des guerres potentielles de silos sont donc indispensables. La disruption est par ailleurs induite par la conjonction du mobile, des réseaux sociaux, du cloud et du big data notamment.
La transformation digitale consiste à conduire le changement des business models et de l’écosystème d’une organisation en s’appuyant sur les techniques numériques. Mais elle est aussi liée à une transformation des clients, de leurs usages, de leurs comportements, de leurs habitudes et de leurs attentes. Ce sont ces changements auxquels les entreprises doivent s’adapter. Concrètement, cette évolution doit obliger les entreprises à passer d’un fonctionnement autocentré sur l’interne et son offre (avec embauche de commerciaux pour vendre ce qui est produit) à un fonctionnement piloté par les clients, leurs besoins et leurs attentes.
La transformation digitale de l’entreprise permet de garder un avantage concurrentiel relatif. Comprendre l’évolution des attentes des clients et des prospects, savoir quelles entreprises sont les mieux à même d’y répondre dans le domaine d’activité de l’entreprise ou non, sont en effet des préalables. La transformation digitale ne constitue pas un objectif en soi, mais demeure un moyen de s’adapter aux changements et à l’évolution des mentalités comme des pratiques.
Les ingénieurs Emmanuel Schneider et Marie Scoazec14 ont pu constater que face à la transformation digitale, les dirigeants d’un grand groupe passaient par trois phases, ce qui est une vision simplifiée et adaptée de la courbe du deuil/de résistance au changement15 (voir Figure 1.2) :
1.le déni, en pensant que l’entreprise n’est pas concernée par la transformation digitale, puis le réflexe de se protéger et de demander à l’État de réguler les nouveaux entrants (c’est par exemple le cas des taxis G7 face à Uber, plus simple pour le client) avec des actions de lobbying. Cette phase de déni peut aussi se matérialiser par l’idée, fausse, que seules les générations Y ou Z sont ciblées par les nouveaux services, alors même que les nouvelles technologies essaiment progressivement l’ensemble de la population avec des primo-adopteurs qui peuvent être plus âgés ou issus d’autres catégories socio-professionnelles du fait d’un intérêt d’usage ;
2.la phase d’annonce, avec une volonté d’effectuer la transformation numérique. Celle-ci passe par une communication importante autour du numérique plus que par des changements en profondeur (on peut citer par exemple Engie, et son plan de communication de 1,5 milliard d’euros), avec parfois un écart entre la promesse (digital factory , nomination d’un Chief Digital Officer – CDO* –, etc.) et la réalité du terrain qui ne suit pas ;
3.la phase du renouveau. L’entreprise est à connecter à son écosystème pour rester en phase avec les consommateurs et leurs attentes, mais ceci reste à mettre en œuvre dans l’organisation. C’est là aussi que les changements sont à opérer par rapport à la dette technologique liée aux systèmes d’information, délicats à faire évoluer et rendre agiles, et à la culture du personnel.
FIGURE 1.2 L’attitude des dirigeants face à la transformation digitale : la courbe du deuil
Outils pour le triple défi de la transformation digitale  : être continuellement innovant, avoir de l’avance sur ses concurrents, s’armer face aux risques de disruption
Il est vital que l’organisation s’inscrive dans un processus continuellement innovant face à un monde qui évolue rapidement pour conserver un avantage concurrentiel ou rattraper son retard. Il s’agit d’un processus darwinien d’adaptation et de sélection des espèces  : Charles Darwin n’écrivait-il pas que « dans la longue histoire du genre animal, ce sont ceux qui ont appris à collaborer et à improviser efficacement qui l’ont emporté » ? Cette assertion vaut plus que jamais dans le cadre de l’entreprise et de toute organisation, y compris au niveau des instances étatiques ébranlées par une crise de légitimité. Les outils sont légion, comme les méthodes agiles (Scrum au sein d’une équipe ou SAFe dans le cas d’une transversalité et d’un contexte multi- équipes16), le design thinking (au carrefour désirable du viable et du faisable), les ateliers de créativité, la mise en place dans les organisations d’unités autonomes de production (UAP), un peu comme le fait Google avec des petites équipes projets, ce qui peut être répliqué dans un contexte industriel. Cela passe aussi par l’éclatement des silos et la recherche d’une plus grande collaboration entre les directions et les business units. Mais c’est également l’innovation frugale, qui consiste à faire plus, ou différemment, avec moins de moyens – à l’image de Pablo Picasso qui, en période de pénurie, a réinventé la sculpture dans un contexte de contrainte et de frustration.
Le design thinking est basé sur la visualisation et le prototypage des concepts à travers trois étapes  : l’identification de la problématique et de son environnement, la recherche du concept qui permettra d’y répondre, l’illustration de ce concept sous forme visuelle. La visualisation facilite en effet la compréhension par les différents acteurs ainsi que l’exploration de nouvelles idées où se situe l’innovation.
En raisonnant par analogie, la disruption pourrait entraîner une baisse de 30 % des revenus de base de nombreux secteurs en l’espace de dix ans, si l’on se réfère à l’étude conduite par le groupe Citi17 en 2016, qui note une convergence entre les secteurs de la musique, de la vidéo, des journaux et des voyages pour le marché américain. La figure 1.3 illustre les pertes de revenus au fil des années.
FIGURE 1.3 Évolution des parts de marché de quelques secteurs face à la disruption
Alors que certaines méthodes, comme Six Sigma, visent une amélioration de la qualité et de l’efficacité des processus, certains outils sont de nature disruptive. Ainsi, pour favoriser la recherche d’idées disruptives afin de réinventer des produits et des services, figure la théorie C-K. Celle-ci se base sur l’interaction entre un espace de concepts (C) et un espace de connaissances (K, pour knowledge). Elle permet d’augmenter la capacité d’innovation, notamment dans l’industrie, en facilitant l’innovation collaborative et la disruption, et donc de tracer des pistes à explorer. C désigne le monde de la nouveauté, de l’imaginaire et des idées où l’on va transformer le produit ou le service sur lequel on veut innover. Dans cet espace seront définis des concepts nouveaux. Dans le monde K, on cherchera des connaissances différentes que celles admises jusqu’alors. Ainsi peuvent être intégrées des connaissances extérieures au domaine d’expertise classique de l’entreprise. L’application de ces connaissances au sujet étudié permettra en outre de générer de nouveaux concepts. Des allers-retours entre les espaces C et K permettront d’itérer, d’explorer de nouveaux champs d’innovation jusqu’à la production d’un produit ou d’un service disruptif grâce aux connaissances acquises au fur et à mesure. La théorie C-K a été utilisée par exemple pour l’énergie dans la smart city , l’industrie 4.0 (voir Figure 1.4).
FIGURE 1.4 Exemple d’utilisation de la théorie C-K
Source : www.wearestim.com.

Points clés[modifier]

  • Appréhendez la nouvelle donne avec le numérique, la création de valeur et la complémentarité entre monde physique et numérique.
  • Comprenez les concepts de transformation avec le numérique : automatisation, dématérialisation, désintermédiation et ce qu’est la transformation numérique.
  • Voyez les enjeux de la transformation digitale qui peut s’avérer une opportunité pour votre organisation.
  • Anticipez la transformation digitale de votre entreprise en impliquant le personnel et en tenant compte de son histoire, de son organisation, de ses choix techniques, de ses forces et faiblesses et du contexte.
1Nicolas Colin, La Richesse des nations ap rès la révolution numérique, Terra Nova, 2015, http://tnova.fr.
2Philippe Lemoine, La Nouvelle Grammaire du succès  : la transformation numérique de l ’économie française, novembre 2014, http://www.ladocumentationfrancaise.fr.
3Michel Volle, Prédation et p rédateurs, Economica, 2008.
4Christophe Auffray, «  Les entreprises françaises s’interrogent encore sur les bénéfices du numérique », Zdnet, 3 mars 2014, http://www.zdnet.fr.
5Christine Balagué et David Fayon, Facebook, Twitter et les autres…  : quels réseaux sociaux p our votre entrep rise  ?, Pearson, 2016 (3e éd.).
6La répétition est volontaire (note de l’auteur).
7Louis Naugès et Dominique Mockly, Dirigeants, acteurs de la transformation numérique, 2018.
8John Zysman, Stuart Feldman, Jonathan Murray et al., Services with Every thing: The Digital Transformation of Services From Economic Sinkhole to Productivity , University of California, 2010.
9Cigref, Valeur économique des p roj ets de transformation numérique p our l ’entrep rise, mars 2018, http://www.cigref.fr.
10Consultable sur le site de l’entreprise, http://www.accenture.com.
11Dan Schatt, Virtual banking, op . cit.
12Geoffrey A. Moore, Zone to Win: Organizing to Comp ete in an Age of Disrup tion, Diversion Books, 2015.
13Pascal Delorme et Jilani Djellalil, La Transformation digitale  : saisir les opp ortunités du numérique p our l ’entrep rise, Dunod, 2015.
14Emmanuel Schneider et Marie Scoazec, Transformation numérique des grandes organisations  : du discours à la p ratique, La Gazette de la société et des techniques, n° 99, novembre 2018.
15Selon les travaux de la psychiatre Elisabeth Kübler-Ross. Voir la synthèse proposée par Karine Aubry, «  Courbe du changement et résistance au changement (ou courbe du deuil)  », L’Œil du Kolibri, 25 février 2011, www.kolibricoaching.com.
16www.journaldunet.com/solutions/dsi/ 1419985-comparatif-des-methodes-agiles
17Citi GPS, Digital Disrup tion: How FinTech is Forcing Banking to a Tipp ing Point, mars 2016, http://www.citigroup.com.

Chapitre 2[modifier]

La transformation digitale  : enjeux et outils

Typologie des acteurs face à la transformation digitale[modifier]

Les entreprises optent pour des stratégies de digitalisation de diverses natures. Nous proposons de les regrouper de manière arbitraire (et donc forcément discutable) en cinq grandes catégories, en fonction de leur degré d’engagement croissant dans la digitalisation :
  • les attentistes ;
  • les impressionnistes ;
  • les externalisateurs ;
  • les intégrateurs ;
  • les transformateurs.
Notons qu’une grande entreprise peut aussi, selon ses entités ou business units, se situer dans plusieurs catégories.

Les attentistes[modifier]

Les attentistes de la digitalisation pensent encore que le digital est un effet de mode ou sont dans le déni. Leurs cadres dirigeants ont beau voir le monde changer autour d’eux, ils restent persuadés que les fondamentaux de leurs entreprises sont bons. Pourquoi changer, puisque nous continuons de vendre et d’attirer des talents  ? La question suivante étant  : pour combien de temps encore  ? Car le principal problème que rencontrent les attentistes est d’être confrontés à une rapidité d’action à laquelle ils ne sont pas habitués, dès l’instant qu’ils prennent conscience que l’environnement dans lequel ils opèrent a déjà changé en profondeur. La bascule est si rapide, et leur capacité d’action si lente, qu’une réaction trop tardive conduit au mieux à de grandes difficultés, au pire à l’échec et donc au dépôt de bilan. C’est ainsi qu’en France, une grande entreprise comme La Redoute, bien installée sur son marché, jouissant d’une belle image et dont le légendaire catalogue rythmait la vie de nos campagnes, se retrouve en quelques années la proie d’Amazon qui opère pourtant bien loin de l’Hexagone. Le champion de la vente à distance est mis en grande difficulté par un autre champion qui agit de plus loin encore – et paradoxalement avec une plus grande proximité avec le consommateur. Les syndicats ont beau se battre pour conserver l’emploi, rien n’y fait. En d’autres termes, face au digital, les attentistes sont voués à disparaître  : ce n’est qu’une question de temps.
PSA avait, par exemple, choisi de renouveler sa flotte de 10 000 BlackBerry . Ce choix paraissait étonnant, alors que ce type de smartphone était en perte de vitesse face à l’iPhone et aux modèles équipés d’Android. Cette décision illustre le choix des gestionnaires qui ont simplement renouvelé un contrat, alors qu’il aurait mieux valu que la direction se projette sur l’évolution du marché en adoptant une situation en rupture créatrice de valeur et répondant aux usages à venir des collaborateurs, notamment le BYOD*.

Les impressionnistes[modifier]

Les impressionnistes de la digitalisation procèdent par petites touches. Ici et là, ils créent un site corp orate, lancent une boutique en ligne en catimini de leur réseau de distribution, développent une application iPhone pour «  faire moderne  », créent un espace sur un j ob board pour diffuser leurs offres d’emploi, etc. L’ensemble manque de cohérence, les départements de l’entreprise responsables de ces présences en ligne agissent sans coordination. Et pour cause  : aucune stratégie de digitalisation n’a été rédigée et encore moins expliquée aux collaborateurs, à commencer par les cadres dirigeants. Pourtant, certains impressionnistes de la digitalisation peuvent faire illusion, gagner des parts de marché, remporter des trophées et des prix remis par des cabinets de conseil ou des agences digitales. Sur le long terme, ces approches s’avèrent fragiles. Elles résistent difficilement à une concurrence bien décidée à conquérir et fidéliser les consommateurs et l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise au travers des canaux numériques. Leurs cadres dirigeants campent chacun sur leurs positions, fiers des menus espaces conquis en ligne. Pire, le comité de direction est souvent aveuglé par quelques belles réalisations qui peuvent impressionner, mais restent isolées. Pourtant, ces belles réalisations sont autant de pépites à partir desquelles il est possible de capitaliser. Loin d’un pointillisme abstrait, une démarche réfléchie offre de réelles opportunités de développement. À condition bien sûr, d’identifier et reconnaître ces pépites, de formaliser la vision de l’entreprise digitalisée et de donner à ces pépites un cadre leur assurant un développement au service des intérêts de l’entreprise.
Par exemple, s’agissant du traitement de la marque employeur, Axa innove en faisant de ses collaborateurs des ambassadeurs de la marque (chaque salarié possédant sa page sur les médias sociaux), mais sans pour autant définir de véritable mesure tant qualitative que quantitative. Cette expérimentation louable au service de la communication ne paraît cependant pas s’intégrer dans une stratégie digitale globale.

Les externalisateurs[modifier]

Les externalisateurs de la digitalisation renoncent a p riori à une transformation en profondeur. Face à une culture d’entreprise résolument orthogonale à la culture digitale, le comité de direction opte pour la création d’une filiale dédiée aux activités en ligne.
Le cas le plus célèbre en France est celui de Voyages-sncf.com . L’activité ainsi filialisée dispose d’un compte de résultat en propre, des accords lui permettent de distribuer les produits de l’entreprise à des tarifs préférentiels, elle peut gérer ses ressources humaines avec plus de souplesse que la maison mère. Tôt ou tard, la question de la greffe se pose. Les consommateurs, clients de la marque au travers de ses canaux traditionnels et de ses canaux digitaux, réclament une continuité de service. Après tout, pour eux, il s’agit de la même entreprise. Les équipes de la filiale digitale réclament plus de réactivité de la maison mère. Des tensions apparaissent au sein des équipes de la maison mère, qui peuvent percevoir les équipes de l’activité digitale comme arrogantes. Le comité de direction, qui aura pu un temps céder aux sirènes du digital, voyant se développer son activité en ligne, se retrouve contraint de choisir entre la séparation des activités et la transformation en profondeur de ses activités traditionnelles. À condition d’avoir maintenu de bonnes relations entre les équipes sœurs, l’activité externalisée peut être un modèle, une source d’inspiration, à qui la mission peut être confiée d’insuffler les bonnes pratiques qu’elle aura mises en œuvre. En revanche, si les liens sont rompus, les réunions de famille s’annoncent houleuses et la séparation inéluctable, à moins qu’un concurrent finisse par s’accaparer les parts de marché si durement acquises.

Les intégrateurs[modifier]

Les intégrateurs de la digitalisation font leur marché en faisant l’acquisition de p ure p lay ers avant qu’ils coûtent trop cher. Constatant leur incapacité à développer des activités digitales par leurs propres moyens, les intégrateurs font l’acquisition d’un savoir-faire dont ils ne connaissent pas grand-chose. La greffe peut prendre, ou pas. La société achetée, jusqu’alors autonome, se retrouve contrainte d’opérer dans un monde qu’elle perçoit comme rigide. Les dirigeants enchaînent les comités de direction, les séminaires, les revues trimestrielles et s’éloignent de leur cœur de métier. Intégrer un p ure p lay er sur un seul plan capitalistique apporte un faible intérêt industriel. Aucune bonne pratique propre au digital ne se retrouve transférée à l’entreprise acquéreuse. Le directeur financier devient le seul juge de la pertinence de l’opération. En revanche, en aménageant des passerelles entre les équipes de l’entreprise acquéreuse et les équipes du p ure p lay er, en identifiant les bonnes pratiques digitales réutilisables au sein de l’entreprise acquéreuse, la transformation digitale peut s’opérer progressivement, par capillarité.
En France, Cdiscount est un p ure p lay er créé en 1998 par trois frères. Le groupe Casino en a fait l’acquisition en février 2000 en augmentant progressivement sa participation pour en détenir 99,6  % depuis janvier 2011. La filiale e-commerce a poursuivi ses activités notamment à l’international, en s’appuyant par exemple sur l’enseigne de sa maison mère pour distribuer ses produits dans des points de distribution adossés au réseau de magasins. Cependant, le groupe Casino semble n’avoir réalisé qu’une opération capitalistique dans cette affaire. On aurait pu s’attendre à une digitalisation de l’enseigne, bénéficiant du savoir-faire de e- commerçant de sa filiale. Pourtant, elle ne se différencie pas de ses concurrents en matière de digital  : les services en ligne proposés au consommateur (vente, drive*) ou dans le magasin (self scan) le sont également par les grands distributeurs concurrents. Des services plus innovants (paiement sans contact, préparation de commande en mobilité, géolocalisation dans le magasin, «  social commerce  », marketing prédictif, etc.) auraient pu bénéficier de l’expertise du e-commerçant, ce qui ne semble pas être le cas.
On pourrait également citer l’intégration de KissKissBankBank par La Banque postale. Mais ce sont surtout les Gafam qui cultivent l’art de réussir l’intégration des entreprises rachetées, à l’instar d’Instagram ou WhatsApp pour Facebook, YouTube ou Waze pour Google entre autres. Dans le cas d’Instagram, les équipes d’Instagram et de Facebook travaillent de concert dans des bâtiments voisins sur le campus de Menlo Park dans la Silicon Valley, ce qui permet de mutualiser des développements et de réaliser des synergies.

Les transformateurs[modifier]

Les transformateurs de la digitalisation ont compris qu’il fallait changer, et qu’ils ne pouvaient changer qu’avec ceux qui sont aux commandes, au sein de l’entreprise. Au plus haut niveau, une vision claire de l’entreprise opérant dans un monde digital est formalisée. Il ne s’agit pas simplement de discours, mais bien d’un document, d’une vidéo pourquoi pas, qui donne aux collaborateurs à percevoir ce que sera le futur de l’entreprise. Dans tous les départements de l’entreprise, les processus opérationnels sont revisités et rendus progressivement plus efficaces et plus efficients avec le digital. La barrière technologique d’accès au digital est progressivement levée, rendant les collaborateurs acteurs de la transformation. Une nouvelle culture véritablement orientée clients, une culture de la transparence dans laquelle transmettre l’information devient plus important que de la garder pour soi, une culture favorisant une plus grande porosité entre les départements de l’entreprise pour toujours plus d’efficacité percole en profondeur. Les capacités d’innovation sont démultipliées, valorisant les idées des collaborateurs, mais aussi des partenaires et des consommateurs eux-mêmes. L’entreprise devient une plateforme à la croisée des initiatives. Peu d’entreprises se sont engagées dans cette voie qui constitue le stade ultime de la digitalisation vers lequel il conviendrait de tendre, passant d’un modèle d’organisation traditionnel adapté à un monde lent et opaque, à un modèle d’organisation s’inspirant des p ure p lay ers. L’exemple type de l’entreprise 2.0 dont il conviendrait de s’inspirer est celui de Google ou de Facebook.
Passage de l’entreprise 1.0 (taylorisme, fordisme, puis toyotisme avec la qualité) à l’entreprise 2.0 (googlisme)
  • Nécessaire course permanente à l’innovation pour ne pas être dépassé et rachat de start-up innovantes.
  • Écosystème autour des applications qui s’empilent tel un couteau suisse (APIs ouvertes) et version bêta permanente.
  • Buzz sur le web qui assure la réputation de l’entreprise.
  • Recrutement des meilleurs après une âpre sélection pour attirer les talents.
  • Petites équipes avec suppression des hiérarchies intermédiaires.
  • Plannings pour les idées directrices du travail collectif et utilisation d’outils collaboratifs (wikis internes).
  • Cadre de travail motivant avec utilisation gratuite d’installations de divertissement et de bien-être (salles de repos, de sport, de massage).
  • Politique du 80-20 : 20 % du temps des salariés (non administratifs) consacré à des créations personnelles (qui peuvent bénéficier à l’entreprise).
  • Évaluation et réputation faite par ses collègues et jugement des idées industrialisables par ses pairs : évaluation à 360° comme on le trouve sur les profils LinkedIn.
  • Plateau projet pour faire travailler des profils différents (concepteurs/développeurs, designers, marketeurs) sur un même lieu et faire émerger des idées de façon transverse et avec un enrichissement mutuel fonction de la diversité des cultures.
Ces transformateurs sont pourtant connus, ils font l’objet d’articles dans les magazines de management. C’est l’exemple d’Apple, fabricant d’ordinateurs qui réalise aujourd’hui la majorité de son chiffre d’affaires dans la vente d’applications ou de contenus développés par d’autres et non dans la seule vente d’ordinateurs et de terminaux. Le modèle économique des applications retenues dans l’AppStore est basé sur la triple dime. Le chiffre d’affaires généré est ainsi ponctionné à hauteur de 30  % par la firme de Cupertino. Les 1,5 milliard d’appareils actifs sous iOS via iTunes par exemple génèrent de précieux revenus.

L’entreprise digitale face à son destin[modifier]

Quelle que soit la stratégie de digitalisation retenue, l’entreprise opérant dans un monde dans lequel le digital est devenu omniprésent doit maîtriser son destin. Bien sûr, le digital ne bouleverse pas de la même manière les entreprises selon les secteurs d’activité. L’industrie du disque, sous l’impulsion, certes illégale, des plateformes de téléchargement, a ainsi dû profondément se refondre. Il ne suffit plus de proposer dans les bacs un artiste, puis de distiller ses titres au compte-gouttes pour soutenir artificiellement les ventes de galettes de toutes formes (45 tours, 33 tours, CD, singles, EP, albums, versions studio, versions concert, etc.). Il n’est plus possible de distribuer localement un produit rendu immédiatement disponible dans le monde entier grâce à Internet. Il n’est de même plus possible d’entretenir la pénurie de disques qui ne sont plus réédités. Désormais, la musique se loue, en masse et à l’unité. Hormis quelques exceptions (par exemple, les disques vinyles dans un esprit de collection), la possession de disques à la maison n’a plus de sens. Il a bien fallu que les grands labels s’adaptent. Plus généralement, nous passons de la société de détention d’un bien à celle d’usage. Cela explique le succès des locations de produits utilisés épisodiquement (perceuse, vélo, voire auto – où l’attachement et la personnalisation sont plus forts, ce qui rend l’opération plus délicate, comme le montre l’échec de l’Autolib ’ à Paris).
Comme dans l’industrie du disque, d’autres industries commencent à ressentir les effets du digital. Le secteur de la santé, au sens large, voit apparaître de nouvelles méthodes thérapeutiques qui bouleversent les chaînes de valeur. Pour un laboratoire pharmaceutique par exemple, la chaîne de valeur simplifiée pouvait jusqu’ici se réduire à un enchaînement de trois grandes opérations  : la conception de molécules, l’obtention d’une autorisation de mise sur le marché auprès de l’autorité compétente, une prospection active auprès des professionnels de santé chargés de prescrire lesdites molécules. Passons sous silence les actions de lobbying qui permettent de conserver pendant de longues années les avantages compétitifs acquis grâce à l’innovation. Que devient cette chaîne de valeur dans un monde où l’explosion des frais de santé conduit à un déremboursement des médicaments et à un recours aux génériques  ? Pire, que devient cette chaîne de valeur quand le modèle concepteur qui la sous-tend n’a plus lieu d’être  ? En effet, que se passera-t-il lorsque le digital permettra d’apporter aux patients une offre de santé hautement personnalisée, tenant compte de leurs caractéristiques propres, qu’ils pourront eux-mêmes appréhender et dont ils pourront partager les données avec tout professionnel de santé et avec d’autres patients (notamment en cas de maladies rares) pour bénéficier de soutien et de compassion, que leurs interlocuteurs soient proches ou à des milliers de kilomètres  ? Pour le laboratoire pharmaceutique, le digital représente à la fois une menace et des opportunités. Une menace en détruisant les marges rendues possibles par la vente de grandes quantités de médicaments, dont beaucoup s’avèrent inadaptés aux patients qui les consomment. Une opportunité de développement d’une nouvelle offre de services faisant du laboratoire pharmaceutique non plus seulement un industriel vendant des boîtes en masse, mais une plateforme réunissant les professionnels de santé.
Comment l’entreprise peut-elle donc maîtriser son destin face au digital  ? Tout d’abord en prenant conscience, au plus haut niveau de l’organisation, que le monde change en permanence. Les dirigeants qui ont mené de brillantes carrières et font aujourd’hui imprimer leurs méls par leur assistante peuvent-ils comprendre que le monde a changé  ? Oui, à condition de garder leur esprit d’entrepreneur, de rester éveillés et à l’écoute de leurs plus proches collaborateurs, et plus généralement de toutes les personnes avec lesquelles ils interagissent. À condition aussi que ces collaborateurs sachent adapter leur discours à ces cadres dirigeants qui peuvent parfois sembler perdre du pouvoir ou leurs repères face à un monde qui se dérobe sous eux. L’acculturation au digital du top management des entreprises est nécessaire, sans pour autant être suffisante. Elle est nécessaire, car seul un sponsoring fort peut imposer un changement, en allouant les budgets requis, en mobilisant les forces, en assouplissant les contradictions, en jouant des politiques internes à l’entreprise, en mettant un coup de projecteur sur des initiatives d’avenir et en soutenant la transformation dans la durée. Une acculturation au digital n’est cependant pas suffisante si elle ne se nourrit pas des transformations qui s’opèrent sur le terrain, si elle ne s’accompagne pas d’une ouverture d’esprit, d’une écoute des initiatives menées dans d’autres industries, dans d’autres pays, d’une veille active sur les nouvelles méthodes de travail, l’évolution des lois, les nouveaux comportements des consommateurs et des collaborateurs. Plus qu’une acculturation,
c’est un changement profond de posture du top management qu’impose le digital. Un changement de posture reconnaissant que le top management ne sait pas tout, et surtout que le digital va beaucoup trop vite, même pour des esprits brillants.

Le top management bouleversé par le digital[modifier]

Comment le top management de l’entreprise peut-il donc prendre conscience que le monde a changé  ? Certaines entreprises choisissent d’emmener leurs cadres dirigeants dans des tournées mondiales, pour leur faire rencontrer des entreprises innovantes (par exemple, une semaine d’immersion dans la Silicon Valley). Lors de ces learning exp editions, les cadres dirigeants voient de leurs yeux des bureaux où il semble que les collaborateurs s’amusent au lieu de travailler, des produits qui leur rappellent Star Wars ou Star Trek qui les émerveillaient tant lorsqu’ils étaient jeunes gens, rencontrent des dirigeants d’à peine 30 ans en jeans-baskets qui pèsent déjà des fortunes, etc. Ils reviennent au pays galvanisés, comme touchés par la grâce. Jusqu’à ce qu’ils atteignent leur bureau, son mobilier d’un autre âge, les papiers qui s’entassent, les réunions qui se succèdent, etc. Pour que l’expédition au pays du digital porte ses fruits, elle doit être conçue pour s’ancrer dans la réalité de l’entreprise, et non comme un simple voyage d’agrément. Il ne suffira pas au cadre dirigeant de raconter son voyage pour donner envie à ses collaborateurs de digitaliser l’entreprise. Au mieux, il leur donnera envie de voyager au pays du digital, alors qu’il faudrait leur donner envie de faire voyager le digital dans l’entreprise.
Le directeur général peut décréter le digital comme objectif prioritaire du comité de direction. À chaque comité, il demandera au directeur marketing, au directeur commercial, au directeur des ressources humaines, au directeur des systèmes d’information, bref, à chacun de ses collaborateurs directs, de faire un point sur l’avancée du sujet  : «  Où en êtes-vous dans la digitalisation de vos équipes  ?  » La question, bien que légitime, n’a pas grand sens. Car au fond, pourquoi digitaliser  ? C’est en répondant en conscience à cette question que les cadres dirigeants peuvent ensuite se demander comment digitaliser  ? Car la digitalisation est un processus de transformation long, profond, permanent, qui touche tous les métiers, tous les processus. Les résistances doivent être traquées, comprises et accompagnées. Un cap doit être indiqué à tous, et il ne suffit pas de décréter que l’entreprise doit travailler comme Google ou Zappos qui avait choisi d’adopter l’holacratie* comme mode de management.

La fonction de directeur du digital (CDO)[modifier]

Alors, s’il ne suffit pas de faire le point en comité de direction, que faut-il faire  ? Aux États-Unis, on a vu apparaître le poste de chief digital officer (CDO), mal traduit en français par «  directeur du digital  ». Aux côtés des directeurs des fonctions traditionnelles de l’entreprise (marketing, commercial, relation clients, ressources humaines, système d’information, finance, juridique, communication, distribution, etc.), le CDO formalise la vision de l’entreprise opérant dans un monde digital, conduit les opérations menées en ligne, et mène la transformation de l’entreprise en profondeur. L’avantage de ce choix d’organisation  ? Une personne concentre le digital au plus haut niveau de l’organisation. L’inconvénient réside dans le fait que cette personne doit se faire une place et peut être perçue comme un concurrent sérieux pour les dirigeants en place. Un concurrent sérieux et qu’il est facile de dénigrer, dans la mesure où le digital n’en est qu’à ses débuts, et qu’il n’est pas en soi apporteur de valeur à l’entreprise. Pourtant, ce catalyseur de la digitalisation est bien utile pour accélérer la transformation et surtout lui donner de la cohérence au-delà des silos organisationnels de l’entreprise.
Deux grands types de profils professionnels exercent ce métier  : des cadres ayant assumé un haut niveau de responsabilité chez des p ure p lay ers, des agences digitales ou des cabinets de conseil ayant une spécialité dans la transformation digitale, ou bien des cadres connaissant bien l’entreprise, sa culture, ses métiers, son organisation, et ayant une appétence pour le digital. Le premier type de profil est légitime sur le domaine du digital et devra s’approprier les codes de l’entreprise avant de la transformer, en s’appuyant bien sûr sur les équipes en place. Le second type de profil connaît très peu de choses dans le digital et s’appuiera pour cela sur des expertises le plus souvent externes, mais il dispose d’une forte légitimité interne à l’entreprise. Quel que soit le profil retenu, le CDO a la lourde tâche d’incarner la transformation digitale, de la rendre tangible, d’expliquer vers quoi l’entreprise se dirige, de rassurer et de montrer le bénéfice des transformations déjà engagées avec succès.
Confier la direction digitale à une personne qui siège au comité de direction est un facteur d’accélération et de cohérence, pourtant insuffisant. Les actions de transformation menées dans tous les départements de l’entreprise ne peuvent être décidées qu’au regard d’une démarche de progression et d’une mesure des progrès. À cet égard, la transformation digitale présente une particularité inhabituelle par rapport aux transformations traditionnelles  : les règles du jeu du digital changent en permanence. Définir une cible à cinq ans est impossible dans la pratique. Plus exactement, il est impossible d’anticiper tous les changements à venir sur un horizon de temps aussi long – ce qui n’interdit nullement de définir les grandes lignes d’une cible à atteindre, tout en acceptant de réviser cette cible régulièrement, a minima une fois par an.
Le directeur des systèmes d’information et le directeur marketing candidats au poste de directeur du digital
Recruter un CDO, nous l’aurons compris, est un acte managérial audacieux, qui peut être perçu par les dirigeants en place comme un aveu d’incompétence. Qui plus est, deux dirigeants peuvent se positionner en chantres de la digitalisation  : le directeur des systèmes d’information (DSI) et le directeur marketing. Chacun n’a plus à douter de sa légitimité aux yeux du directeur général. Est-il en effet envisageable qu’une entreprise fonctionne sans système d’information ou sans marketing  ? L’informatique est désormais partout, même les téléphones sont devenus des outils informatiques, les collaborateurs sont même souvent mieux équipés chez eux qu’au sein de l’entreprise comme on le voit avec le phénomène du BYOD. Le marketing est envahi de données, de supports digitaux pour capter l’attention du consommateur et mettre en avant les produits de l’entreprise. Les dépenses technologiques sont en moyenne davantage le fait des directions marketingplutôt que des DSI  ! Un autre phénomène est celui du « shadow IT » que l’on peut constater au sein des directions commerciales. Elles ont le pouvoir car elles disposent de budgets conséquents, alors que les DSI, fonctions support, souffrent davantage des restrictions budgétaires. Cela peut se traduire par le développement d’applications ad hoc bénéfiques sur le court terme mais qui présentent des risques d’évolution sur le moyen-long terme car peu évolutives ou divergentes avec les socles applicatifs des grosses structures.
Le directeur informatique tient de son socle technologique sa légitimité en tant que directeur du digital. Le digital s’appuyant en effet sur des outils informatiques (ordinateurs, tablettes, smartphones, serveurs, routeurs, réseaux, datacenters, etc.), il semble naturel de lui confier la digitalisation de l’entreprise qui maîtrise ces outils. C’est pourtant rarement le cas. Le cabinet Ernst & Young encourage les DSI dans cette voie , en mettant en avant toutes leurs qualités pour briguer le poste. Il les met aussi en garde contre l’arrivée d’un directeur du digital s’ils n’adoptent pas une attitude résolument business, et pas seulement de techniciens de l’informatique.

La gouvernance du digital en question[modifier]

Au-delà des découpages de périmètres entre le directeur des systèmes d’information, le directeur marketing et le directeur du digital, la profondeur et l’amplitude de la transformation digitale posent un épineux problème de gouvernance. L’absence de gouvernance claire conduit immanquablement à des prises de risques inutiles, des arbitrages soumis au plus haut niveau sans raison valable et surtout un retard préjudiciable impactant directement les résultats de l’entreprise.
La gouvernance du digital est d’autant plus importante dans les entreprises de taille mondiale, opérant sur plusieurs marchés au travers de plusieurs marques. Sans gouvernance, les initiatives locales peuvent en effet entrer en compétition entre elles, ne serait-ce par exemple que par le jeu du référencement naturel ou de l’architecture des médias sociaux. Sans gouvernance, les agences digitales (création de contenus, réalisation de sites ou d’applications, conduite d’opérations de marketing digital, etc.), les plateformes (médias et réseaux sociaux, places de marché, agrégateurs de contenus, etc.) et les éditeurs (CRM, social CRM, data analy tics, content p ublishing, etc.) peuvent facturer leurs services à plusieurs entités de l’entreprise.
La gouvernance du digital apporte donc la centralisation nécessaire à l’efficacité, sans toutefois opposer une rigidité préjudiciable à la prise de décision rapide, facteur déterminant dans ce domaine. Elle offre à l’entreprise des moyens d’action et de négociation consolidés ayant beaucoup plus d’impact auprès de ses partenaires (agences digitales, plateformes, éditeurs). Elle met en valeur les initiatives locales en favorisant leur généralisation à l’ensemble de l’entreprise. Elle favorise l’attractivité de l’entreprise auprès des talents du digital.

Le conseil d’administration se digitalise[modifier]

Quelles que soient l’approche managériale et la gouvernance retenues, le conseil d’administration des plus grandes entreprises est également impacté par l’émergence du digital. Comprendre au plus haut niveau, dans l’intérêt des actionnaires et de l’avenir de l’entreprise, comment les décisions prises par le pouvoir exécutif de l’entreprise impactent à long terme son développement dans un monde digital, nécessite que le conseil d’administration s’adapte.
Des entreprises ont déjà montré la voie, en recrutant en leur sein des administrateurs d’un genre nouveau. Souvent plus jeunes que leurs alter ego, ils ont fait leurs armes chez des p ure p lay ers devenus de grandes marques (Yahoo!, Google, Amazon, etc.), et continuent d’être très impliqués dans le développement d’entreprises innovantes (cloud, intelligence artificielle, quantified self, big data, robotique et objets connectés, etc.). Leur regard critique sur les initiatives menées par l’entreprise pour la rendre soluble dans le monde digital permet de dynamiser la transformation, de l’orienter, de lui donner l’écoute nécessaire à la préparation du futur de l’entreprise, et contribue donc à la valorisation des investissements des actionnaires.
Ces administrateurs «  digitaux  », qui étaient rares au sein des conseils d’administration au prélude de la prise de conscience de la transformation digitale en 2013, se sont multipliés comme le montre la dernière étude du cabinet de chasseurs de têtes Russell Reynolds Associates en 2018  : plus jeunes, ayant déjà œuvré pour la transformation digitale d’une entreprise, et plus féminisés comme en témoigne l’entrée de Catherine Barba en 2017 au conseil d’administration de Renault.
De la transformation digitale à la transformation digitale 2.0  : une maturité dans la transformation elle-même
Dans tout processus de transformation digitale, il est important de prévoir aussi un mode dégradé pour que la continuité de service puisse être garantie et que des données ne soient pas perdues. Par exemple, en cas de panne informatique, de courant, d’absence de couverture réseau, de géolocalisation GPS perdue, il doit être possible de continuer la collecte de données et les ventes, quitte à les intégrer en temps différé dans les systèmes d’information. Cela peut passer par des systèmes de stockage locaux non immédiatement répercutés dans les systèmes d’information centraux, voire des modes papier artisanaux et les moins chronophages possible.
Par ailleurs, la transformation digitale 2.0 peut amener des changements de nature plus disruptive. Aussi le débat entre innovation incrémentale vs innovation de rupture ou disruptive peut-il se poser. Et il peut être utile pour une organisation d’équilibrer son portefeuille d’innovation en menant à la fois trois types de projets d’innovation selon la typologie dressée par IDC France  :
  • une innovation progressive ou incrémentale pour faire mieux, conserver ses clients  ;
  • une innovation adaptative pour étendre son business, s’adapter au marché mouvant  ;
  • une innovation disruptive pour créer un nouveau business, se tourner vers l’extérieur, par exemple vers les marchés émergents.
La disruption redistribue les cartes. Elle constitue une opportunité pour ceux qui sauront s’en saisir, mais aussi une menace pour les autres. Elle permet un changement de paradigme et il s’agit de faire comprendre qu’«  en améliorant la bougie on n’obtiendra pas l’ampoule ». Ceci est illustré dans le tableau 2 .1.
TABLEAU 2.1 Changement incrémental vs changement disruptif
Changement incrémental Changement disruptif
Début et fin identifiés Processus avec une fin non identifiée
Quasi-certitude Incertitude e Monde du digital avec un apprentissage Monde du 20 siècle avec un cadre et des règles dans un champ connu en continu et où les données ont une place prépondérante
Méthodes et outils déterministes Outils reposant sur un apprentissage en marchant par essais et erreurs (test and learn)
Management de la qualité (le producteur Créativité et primauté de l’expérience se donne un objectif) client
Toyotisme Modèle des Gafam, en particulier Google et Amazon
Compliqué : faire toujours mieux la même Complexité (tout est imbriqué, changeant, chose interdépendant) : faire autrement
Améliorer Innover
Management par le « OU » : par exemple, Management par le « ET » : injonction soit améliorer une fonctionnalité, soit paradoxale qui consiste à trouver une augmenter la satisfaction client manière de faire différente pour en même temps faire différemment et mieux deux fonctions différentes
Vision descendante Mix entre vision descendante et vision ascendante
Management d’exécution (verticalité) Management collaboratif avec co- construction
Environnement stable Environnement changeant
Intelligence par des experts Intelligence collective s’appuyant sur des experts et des sachants
Contrôle Lâcher-prise
Intérêt du modèle mis en œuvre  : diagnostic indispensable pour construire sa stratégie et opérer sa transformation digitale
Il existe un écart important entre les intentions et les pratiques des entreprises quant à leur transformation digitale. Ainsi, comme le synthétise le tableau 2.2, le rapport
Performance digitale des entrep rises françaises d’Accenture en 2016 retrace le clivage entre les discours et les actes.
TABLEAU 2.2 Transformation digitale : le clivage entre les discours et les actes
Aspect de la Intentions Mise en pratique transformation digitale
Stratégie de 85 % des entreprises 26 % des entreprises ont transformation incluent le digital dans alloué un budget à la leur stratégie de transformation digitale croissance
Développement et 67 % des entreprises 36 % des entreprises co- production veulent mettre en place créent des solutions avec des initiatives des fournisseurs de d’innovation ouvertes technologie
Expérience client 42 % des entreprises 25 % des entreprises souhaitent harmoniser proposent une expérience l’expérience entre d’achat cross-canal canaux physiques et harmonisée digitaux
Culture et opérations 61 % des entreprises 34 % des entreprises forment leurs employés instaurent des initiatives (les au digital dirigeants invoquent l’opportunité de casser les silos de leur organisation avec le digital)
Pour remédier à cet écart, notre vision est qu’une méthode idoine permet d’aller au- delà de l’intention pour aider au diagnostic. Aussi avions-nous défini en 2014 un guide pour aider à connaître son niveau de maturité numérique .
Hormis quelques initiatives ponctuelles, nous déplorions alors, lors de la première mouture de ce livre, l’existence d’un outil permettant d’appréhender l’ensemble de la problématique des organisations face au numérique pour disposer d’une vision globale. Nous regrettions également l’absence de modèles de maturité de certains sujets (communication digitale, gouvernance digitale, ressources humaines digitales, etc.). Il devenait donc nécessaire de bâtir un outil générique et évolutif capable de constituer une aide précieuse pour tout dirigeant dans sa stratégie numérique. Nous partions du principe que les modèles de maturité permettent à la fois de dresser un bilan de la situation d’une organisation, de l’évaluer sur l’échelle de maturité (notamment par rapport à ses concurrents) et de la projeter vers un plan d’amélioration.
Face à l’absence de modèle permettant d’appréhender la maturité numérique sur le plan du marketing numérique ou d’une équipe digitale (de la même manière qu’il existe des outils comme Itil, CMMI ou CobiT pour le système d’information), nous avions choisi d’innover. Notre propos n’était pas de remettre en cause les modèles de gouvernance existants ou de les remplacer, mais de bâtir un outil complémentaire et propre au numérique.
Les modèles développés n’embrassaient en effet pas la problématique globale du numérique et de la transformation digitale, même si de nombreuses études ont été faites notamment depuis 2012 :
  • Altimeter en 2012 pour le niveau de maturité d’intégration des médias sociaux dans une organisation ;
  • AT Internet en 2012 avec un modèle de maturité marketing des médias sociaux avec quatre phases – exploration, colonisation, urbanisation et civilisation ;
  • Web Index pour le niveau web d’un pays avec une logique de décomposition en indicateurs et sous-indicateurs ;
  • index d’e-friction du BCG ;
  • networked readiness index (NRI) en 2016 par l’Institut européen d’administration des affaires (Insead) – index permettant un classement des pays en matière de rôle des technologies numériques dans la conduite de l’innovation ;
  • d’autres par Capgemini, IDC, etc.
Nous nous étions inspirés de concepts pertinents de ces outils en les adaptant au contexte des organisations.
Nous partions du constat que les innovations de modèles économiques, d’organisations, de technologies, de savoir-faire, de produits, de services ou encore de réglementation, étaient dans l’ensemble connues mais que la grande majorité des entreprises peinait à les appliquer à grande échelle. Celles-ci étaient à la recherche d’un guide leur permettant d’orienter leurs efforts. Certaines doutaient encore de la réalité de l’impact du digital sur leur métier. Car ce n’est pas le fait « d’avoir un site web et une page Facebook » qui est le garant d’une transformation digitale réussie  ! Le premier guide développé dans la précédente édition de Transformation digitale leur permettait de prendre conscience des atouts du digital dans tous les compartiments du jeu, de percevoir à quel point ils sont effectivement à l’état de l’art à un instant donné. Il s’agissait aussi de mesurer les progrès de l’entreprise dans son effort de digitalisation, alors que précisément ce qui est vrai aujourd’hui dans le digital ne le sera plus (ou plus de la même manière) dans un an. C’est un peu le propre du baromètre eCAC40 mis en place par Gilles Babinet et Les Échos Executives. Dans un registre plus macro-économique, il permet de mesurer l’évolution du niveau de maturité numérique des entreprises du CAC 40. Dans celui- ci, celles qui ne progressent pas plus que la concurrence reculent comme en Formule 1 où tout est relatif.
Pour capitaliser sur les atouts de notre premier guide et sachant que cinq ans se sont écoulés, nous l’avons redéfini dans ce livre en le transformant en une méthode baptisée DIMM, Digital Internet Maturity Model. L’objectif de l’outil générique que nous avions développé était de permettre à toute organisation d’avoir des clés pour une stratégie de développement de son chiffre d’affaires, de sa visibilité et de sa notoriété, mais aussi de recruter plus efficacement et de former ses collaborateurs ainsi que d’innover grâce au numérique.
Nous avons pu recueillir les résultats de l’application du premier guide dans plusieurs organisations, compte tenu de l’évolution du monde numérique et des travaux de recherche menés dans le cadre d’une thèse portant sur la transformation digitale du secteur bancaire.
Aussi, nous proposons désormais un modèle de maturité digitale évolutif, dont l’architecture s’appuie à présent sur six leviers fondamentaux. Nous avions expliqué la construction de ce modèle dans l’annexe de Transformation digitale et des trois premiers leviers nécessaires à intégrer pour la réussite de tout projet numérique :
  • Organisation ;
  • Technologie et innovation ;
  • Personnel.
À ceux-là, nous avions ajouté deux autres leviers :
  • Offre (Produits et Services) ;
  • Environnement.
Le levier Produits et Services a été rebaptisé «  Offre  » dans la présente version de DIMM. Ce terme est plus générique. En effet, quelle que soit l’organisation, nous pouvons avoir un client, un abonné, un administré, et l’offre ne sera pas uniquement ou forcément marchande.
Enfin un sixième levier a été adjoint. Cet ajout s’est traduit par un redécoupage avec certains indicateurs qui figuraient dans le levier Organisation en vue d’une plus grande cohérence :
  • Stratégie.
Ce levier intègre la vision de la stratégie numérique sachant qu’un mix entre une vision descendante (depuis le top management) et ascendante depuis la base et le middle management où des idées naissent et sont remontées est à rechercher. Il repose sur les études des modèles de design organisationnel.
Les six chapitres qui suivent sont dédiés à la description de ce modèle, avec pour chaque levier :
  • la présentation générale du levier ;
  • les groupements au sein du levier et pour chaque groupement  : le périmètre qu’il couvre, ce qui est caractéristique d’une organisation digitalisée au regard de ce groupement, ce que le groupement ne couvre pas ou n’impose pas ;
  • les indicateurs, découpages des groupements, permettant de mesurer la maturité digitale selon cinq niveaux, du moins mature (1) au plus mature (5).
Les leviers (S  : Stratégie  ; OR  : Organisation  ; P  : Personnel  ; OF  : Offre  ; TI  : Technologie et innovation  ; E  : Environnement), groupements et indicateurs sont codifiés de façon à faciliter le repérage et l’utilisation opérationnelle. Par exemple, PF4. désigne l’indicateur numéro 4 du groupement Formation pour le levier Personnel.
L’ordre choisi pour les chapitres 4 à 9 est le suivant  : une stratégie est définie par une organisation, laquelle a du personnel qui bâtit une offre. Celle-ci repose sur des technologies et de l’innovation, et elle interagit dans un environnement.
Avant de décrire le modèle, un zoom sectoriel est réalisé dans le chapitre suivant.

Points clés[modifier]

  • Comprenez comment vous digitalisez déjà votre organisation : êtes-vous attentiste, impressionniste, externalisateur, intégrateur ou transformateur ?
  • Prenez conscience du profond changement que connaît le monde du fait de l’omniprésence du digital.
  • Sensibilisez le top management et formez l’ensemble de vos collaborateurs au digital.
  • Adoptez une gouvernance du digital animée par un directeur du digital chargé de définir la vision, conduire les opérations en ligne et transformer l’entreprise.
  • Disposez d’un outil générique pour mesurer la maturité numérique de votre entreprise dans tous les domaines : stratégie, organisation, personnel, offre, technologie et innovation, environnement.
1Olivier Chicheportiche, « BlackBerry  : 10 000 collaborateurs de PSA équipés de Z10 et BES10 en renfort », ZDNet, 18 décembre 2013, http://www.zdnet.fr.
2«  Nicolas Moreau, PDG d’Axa France  : “Tous nos agents auront leur propre page sur les réseaux sociaux” », Petit Web, 14 avril 2014, https://www.petitweb.fr.
3Devenu OUI.sncf depuis le 7 décembre 2017.
4Ernst & Young, Born To Be Digital: How Leading CIOs A re Prep aring For A Digital Transformation, 2014, https://www.ey.com.
5https://www.russellreynolds.com.
6Présentés lors de la conférence Innovation Tech d’IDC France à Paris le 5 février 2019.
7Accenture, Performance digitale des entrep rises françaises  : encore p arcellaire, la transformation digitale p eine à créer de la valeur, 2016, https://www.accenture.com.
8David Fayon et Michaël Tartar, Transformation digitale  : 5 leviers p our l ’entrep rise, Pearson, 2014.
9«  eCAC40  : le classement 2018 des champions de la transformation numérique  », Les Échos Executive, 9 octobre 2018, https://business.lesechos.fr.

Chapitre 3[modifier]

Transformation digitale des secteurs et modèle générique

Les facteurs clés de succès des secteurs d’activité[modifier]

Comme nous l’avons expliqué plus haut, les structures organisationnelles classiques doivent se réinventer en permanence de peur de décliner, voire de disparaître. Il existe de nombreuses constantes entre les organisations, quel que soit leur secteur d’activité  : en premier lieu la vision de la transformation digitale à opérer, portée par les dirigeants  ; ensuite, et pour l’ensemble des leviers, certaines constantes importantes, qui sont modélisées dans les chapitres 4 à 9 à travers l’outil que nous proposons.
L’innovation dans l’organisation implique d’avoir un promoteur ou sponsor haut placé hiérarchiquement. Les synergies entre grandes organisations et start-up sont à rechercher. Pour une start-up, une des clés du succès est le passage à l’échelle sans perdre son âme ou son ADN tout en sachant pivoter le cas échéant. Pour les grandes organisations, il s’agit de pouvoir s’appuyer sur des services ou des outils développés par des start-up et de les intégrer dans leur offre globale, voire de réaliser des prises de participation ou des acquisitions si elles n’ont pas développé ces savoir-faire ou si ceux-ci n’appartiennent pas à leur cœur de métier. Les enjeux sont notamment d’améliorer leurs offres et processus, d’accélérer l’innovation, et même de développer des services en dehors de leurs domaines d’activités stratégiques. Un baromètre a été établi par la French Tech pour la collaboration entre start-up et grands groupes. Des entreprises comme La Poste ont développé des programmes d’innovation ouverte comme Time To Test, Platform58 ou French IoT. Après avoir lancé le programme Innov&Connect et le Lab Open Innovation, BNP Paribas a constitué un pôle innovation dédié aux fintech et organise des hackathons*.
Une autre caractéristique d’une organisation innovante est sa capacité à tester rapidement une nouvelle technologie prometteuse ou un nouveau service, parfois en liaison avec une start-up partenaire dans le cadre d’un PoC*. Les PoC doivent être gagnant-gagnant, tant pour l’organisation que pour la start-up partenaire, et engageants. Par exemple, si une liste de critères est atteinte, on s’engage à industrialiser la solution. En termes de méthode, d’adhérence, de contractualisation, il est essentiel de développer une approche qui permette aux projets exploratoires de passer à l’échelle et de créer de la valeur.
À cet effet, il est important de pouvoir s’affranchir de processus internes complexes, d’obstacles légaux ou juridiques. En effet, un assouplissement est nécessaire dans une logique de go/no go rapide et, le cas échéant, pour répondre à la promesse de la start-up de réaliser un prototype rapide, car le cycle temporel de la grande entreprise n’est pas celui de la jeune start-up, potentiellement fragile. Aussi un support au plus haut niveau est-il nécessaire, mais celui-ci est à compléter par une action de lobbying interne. Romain Lalanne, directeur Innovation SNCF Digital, estime que pour les sujets nouveaux, il est important de réaliser un accompagnement et une vulgarisation tout en étant transparent vis-à-vis du personnel qui sera impacté par l’introduction de la nouvelle technologie. C’est également le cas pour le programme d’innovation ouverte Time To Test à La Poste réalisé conjointement entre les métiers, les clients internes et les start-up ou PME innovantes. En tout état de cause, lorsque l’on a un besoin nouveau, la question est de savoir si l’organisation a les moyens de le satisfaire en interne, s’il convient au contraire de s’appuyer sur des start-up, des entreprises partenaires, ou encore si le savoir-faire est à internaliser, etc. En exposant des cas d’usage, il est préférable alors de trouver des briques d’innovation, ou du moins de privilégier des solutions sur étagère, plutôt que de tout recréer si l’on veut accélérer le temps de développement et la commercialisation du nouveau service ou l’enrichissement/amélioration d’un service existant. Il peut être pertinent de s’appuyer sur l’ensemble de l’écosystème de l’innovation et d’interagir avec les pôles de compétitivité (on en recensait 56 en rance en janvier 2019 ).
Les nouveaux entrants, plus agiles et maîtrisant souvent mieux les technologies, sont susceptibles d’avoir un avantage concurrentiel sur les acteurs historiques. Ces derniers peuvent « résister » avec le levier Environnement en menant des actions de lobbying afin d’instaurer des barrières financières, réglementaires ou un maillage territorial dans certains domaines. Pour autant, il s’agit d’une stratégie défensive qui doit être couplée avec d’autres actions, sachant que la peur de se transformer induit deux attitudes :
1.le rachat de start-up, souvent effectué pour empêcher des concurrents de s’en emparer plutôt qu’en réponse à une stratégie de complémentarité et de co-création de valeur. Cependant, dans le lot de rachats, il peut y avoir quelques bonnes pioches  ;
2.les tentatives de développement de technologies en interne, en travaillant en op en innovation et en réinternalisant des compétences confiées à des sous-traitants, notamment au sein des directions des systèmes d’information.
Ces chantiers concerneront en priorité l’offre (avec des techniques comme le design thinking), le modèle économique (transformer une chaîne de valeur linéaire en une plateforme ou un écosystème avec des APIs ouvertes) et la culture (dans laquelle la formation est clé, avec en particulier l’acculturation au numérique et aux nouvelles technologies, notamment pour le personnel impacté ou non rompu avec ces nouveaux outils/nouvelles pratiques).
Michel Dessagne, innovation officer chez Framatome, indique qu’il est important de diffuser en interne les informations pertinentes que l’on récolte sur les salons. C’est un moyen de faire prendre conscience au management de l’entreprise qu’il existe de bonnes choses à l’extérieur. Cela permet aussi de se rendre compte que des technologies qui n’étaient pas matures le deviennent peu à peu (par exemple, la réalité augmentée, qui n’était pas au point voici trois ans, devient désormais applicable et industrialisable  ; de même pour les drones). Il est donc possible d’opérer une veille sur un sujet et de déterminer à quel moment il devient mature. Cela consiste à identifier un cas d’usage, puis à trouver un partenaire pour développer le service (une autre entreprise avec laquelle on peut s’associer, une start-up). Une autre approche est de suivre des entreprises/start-up sur des domaines pointus, et de trouver ensuite un cas d’usage pour l’entreprise ou l’organisation.
Le fait d’être en avance de phase, de développer une veille technologique et une intelligence économique au sein de l’organisation permet de prendre des parts de marché ou de phagocyter d’éventuels nouveaux entrants. Pour une administration ou une association, il peut s’agir de benchmarker les bonnes pratiques existantes ailleurs. Claude Imauven, directeur général exécutif de Saint-Gobain, estime que «  l’ubérisation part toujours d’une inefficience dans laquelle peuvent s’engouffrer de nouveaux acteurs  ». Dans cette optique, Outiz, une start-up interne lancée par Saint-Gobain en 2014 qui a fermé en janvier 2019, devait anticiper la menace d’un Amazon des parpaings, perceuses et outils professionnels. Le site renvoie à présent vers les partenaires (Point.P, Cedeo, Brossette ou CDL Elec). Face aux géants du numérique, des stratégies de niche avec une connaissance très fine des attentes peuvent ainsi s’avérer intéressantes.
Par ailleurs, les domaines d’activités stratégiques des entreprises ne sont plus clairement délimités comme auparavant, et il devient intéressant pour une entreprise d’aller braconner sur de nouvelles terres afin d’avoir des relais de croissance par rapport à une activité traditionnelle en déclin. Ainsi EDF, qui a longtemps été en situation de monopole avant la libéralisation du secteur de l’énergie, doit se réinventer et n’est pas indétrônable. De nouveaux concurrents arrivent sur ce secteur, y compris le géant de la pétrochimie Total, doté d’une force de frappe plus importante que Engie, Direct Énergie, etc. En tout cas, les Gafa ou BATX n’ont pas d’état d’âme à venir concurrencer des acteurs bien établis, quel que soit leur secteur d’activité. Il existe au sein des organisations, selon l’expression de Jean-Pascal Derumier, spécialiste de l’innovation, des actifs dormants qui, par définition, sont peu ou pas utilisés. Un actif dormant peut selon lui se définir comme «  un actif matériel ou immatériel dont l’usage pourrait être mieux valorisé  », parmi lesquels figurent les locaux, les personnes, les savoir-faire et connaissances, les déchets (économie circulaire), les brevets, les compétences, le matériel et les véhicules. Une logique de partage au-delà de ce qui est initialement prévu doit prévaloir  : une «  machine à mutualiser  », sachant que plus une organisation possède d’actifs, plus les potentialités de partage sont fortes. Cette logique est à repenser au niveau du territoire pour les entreprises et les organisations. Les territoires tendent aujourd’hui à se muer en des smart cities où les entreprises pérennisent leur action en offrant de nouveaux services créateurs de valeur, ce qui peut se traduire par un élargissement de leur activité d’origine. Au-delà du produit ou du service, il convient de se pencher sur les partenariats à construire avec l’écosystème en territoire et ses acteurs dans une logique de co-construction avec des interactions et le politique. Par exemple, la ville d’Issy-les-Moulineaux, attractive pour les entreprises, mène des opérations tous azimuts sur ce point – éco-quartier, smart grid, etc.
Une autre constante des organisations est relative au budget, mais c’est une constante qu’il convient de nuancer, car les marges de manœuvre diffèrent selon la taille et la santé économique des entreprises, qui pour beaucoup ne font que reconduire les budgets d’une année sur l’autre sans tenir compte de facteurs de changement. Ainsi Vincent Ducrey et Emmanuel Vivier évoquent la règle des 70/20/ 10 issue du monde de la formation et adaptée au management  : 70  % des budgets sont alloués au développement et à l’optimisation de ce qui est déjà maîtrisé par l’organisation, 20  % ont vocation à tester ce qui marche déjà ailleurs et 10  % à expérimenter ce qui n’a jamais été fait. Des entreprises comme Coca-Cola ont adopté ce ratio. Ceci vient alimenter l’innovation frugale qui consiste souvent à être disruptif avec de maigres moyens, les 10  % restants voire moins. Cette règle vient en écho aux trois types d’innovation (incrémentale, adaptative, disruptive) qu’IDC France distingue (voir Chapitre 2).
La symétrie des attentions dans la transformation digitale est également un point important. Si le client est au cœur et au centre des attentions comme chez Amazon, il est important que le personnel soit également bien traité. Ceci permet de lutter contre la démotivation, l’absentéisme, le turnover des talents et les pertes de compétences.
Enfin, les organisations qui opèrent leur transformation digitale ont toutes en commun de donner à leur personnel la question du sens de ce qui est mené et le pourquoi. Un autre enjeu est celui de l’attraction et du développement des talents alors que les générations Y et Z sont moins fidèles aux marques et zappent davantage.

Des stratégies différenciées selon les secteurs[modifier]

Selon les secteurs, la transformation digitale à opérer ne sera pas identique et n’impliquera pas les mêmes ruptures technologiques, organisationnelles, managériales, etc. Par exemple, dans l’industrie, les besoins en impression 3D, optimisation de l’utilisation des machines ou détection de pannes à l’aide de capteurs (par exemple via l’Internet des objets) seront dans l’ensemble forts, alors que pour la santé, l’imagerie (médicale) et le très haut débit seront importants.

Industrie[modifier]

Dans l’industrie, selon Serge Catherineau, directeur marketing Industrie du futur de Schneider Electric France, le numérique vient comme support de l’entreprise. Il va transformer la méthodologie, permettre d’optimiser les flux, les opérations, la supp ly chain et les matières premières. La transformation digitale de ce secteur où l’on parle d’industrie 4.0 est d’abord celle des modèles opérationnels avant d’être technologique  : la capacité à produire. Par exemple, à l’usine Renault de Flins, la supp ly chain, plus complexe, rend possible la production sur une même chaîne de montage d’une Nissan Micra ou d’une Renault Clio. La maintenance prédictive et préventive avec l’apport de l’analyse des données permet de réduire les incidents de production. Les piliers dans ce secteur sont les biens (assets), les méthodes et les hommes, où l’on voit émerger la «  cobotique  » – ou cohabitation de l’homme et du robot. Par exemple, l’exosquelette est un équipement articulé et motorisé sur plusieurs membres du corps humain soit pour redonner une mobilité, soit pour augmenter ses capacités. Les leviers pour améliorer la compétitivité de l’industrie sont :
1.la fiabilité et la disponibilité (pour que l’outil ait un taux d’utilisation qui se rapproche de 100 % tous les jours – ceci reste un rêve…) ;
2.la performance et l’efficacité (en moyenne, 60  % du temps d’une usine n’est pas productif, pour de multiples raisons, alors que ce temps s’élève seulement à 20-25 % dans les PME/PMI. Il est plus intéressant d’optimiser l’utilisation des matériels existants plutôt que d’investir dans des matériels additionnels) ;
3.la sécurité et la sûreté (il s’agit d’une contrainte et d’un levier sur lequel on ne peut pas agir) ;
4.la capacité à produire (elle revêt moins d’intérêt car, avec de nouvelles machines qui vont plus vite, des dysfonctionnements et des goulots d’étranglement dans l’usine sont possibles  ; les industriels ne vont pas consentir à des investissements massifs) ;
5.l’agilité et les opérateurs (redonner du pouvoir à ceux qui savent, aux opérateurs pour qu’ils conduisent à l’amélioration et pour lancer des ordres de fabrication  ; depuis le lean management avec Toyota, on parle de guide opérateur, d’opérateur augmenté – les intérimaires deviennent des investissements à fonds perdu du fait de coûts de formation sur lesquels l’entreprise ne capitalise pas) ;
6.la durabilité (qui réduit la capacité énergétique à produire).
Dans l’industrie, c’est également l’impact des technologies disruptives tant sur la force de travail que sur l’environnement de travail. Il convient d’optimiser le temps machine.
Dans le secteur de l’aviation, Alice de Casanove, innovation culture lead chez Airbus, indique que de nombreuses initiatives ont été lancées chez Airbus depuis 2016 (création du digital transformation officer [DTO], identification des nouvelles technologies différenciantes, examen de leur intégration à la partie production).
Typiquement, un outil de réalité virtuelle peut permettre la formation de techniciens à des gestes techniques, l’utilisation de documentations numérisées à distance. Par exemple, des tronçons arrivent précâblés sur le site de Toulouse pour le montage d’avions. Jusqu’alors, si un technicien constatait qu’un câble était manquant, il effectuait une demande d’approvisionnement avec un processus de traitement lourd et long. Désormais, avec un casque de réalité virtuelle, il peut consulter le plan de la maquette numérique à un instant donné, visualiser les parties manquantes et le notifier grâce à une tablette accrochée à son bras.
Les transformations se situent à de multiples niveaux (expérimentation de «  cobots  » pour l’assemblage de satellites, le déplacement de pièces lourdes avec éventuellement des exosquelettes, l’accompagnement du geste du technicien  ; tags RFID sur des pièces pour accélérer l’inventaire et la localisation des différentes pièces  ; start-up interne pour la dématérialisation des contrats pour la partie juridique  ; accélérateur interne de start-up, BizLab  ; investissement dans des start- up prometteuses pour l’écosystème d’Airbus avec Airbus Ventures car, même si l’entreprise est européenne, son développement passe par les États-Unis avec en outre des lignes de montage en Chine et aux États-Unis, etc.). Le travail s’effectue avec les personnels concernés pour mesurer le bénéfice en les mettant en situation et pour valoriser leur contribution et leurs retours. Il s’agit là d’une démarche d’innovation participative.
Tout salarié peut choisir ses formations en étant acteur de son plan de développement avec l’aide de son manager et des ressources humaines. Il existe des formateurs internes pour des savoir-faire propres qu’on ne trouve pas à l’extérieur et, avec une webcam, il est possible d’enregistrer un savoir-faire pour enrichir le catalogue de formations pour le bien de l’entreprise dans son ensemble.
Des projets sont menés pour travailler sur la disruption de l’aviation, les tendances en termes d’autonomie (énergie, décision), la conduite autonome s’appuyant sur du machine learning, les drones en tant que nouveaux moyens de livraison, de transport de personnes et le contrôle aérien associé. Ainsi a été lancé le projet de taxis volants Vahana au centre de recherche A3 d’Airbus avec un premier vol le 31 janvier 2018.

Transport[modifier]

Dans le secteur du transport, une technologie qui a un impact fort dans la transformation digitale est celle de l’impression 3D. Une part significative du fret aérien et maritime (40  % selon Jonathan Thibout-Curtinha, senior manager Audit chez PwC) serait menacée. Il devient dès lors plus économique de produire avec l’impression 3D certaines marchandises près du client final et d’économiser ainsi les coûts de transport.

Banque[modifier]

Orange a lancé Orange Bank (Orange étant entré à 65  % au capital de Groupama Banque, 35  % étant conservés par Groupama) en s’appuyant sur son réseau d’agences (140 dans les centres commerciaux et centres-villes) très fréquenté, contrairement aux banques qui souffrent d’une désaffection en agence. L’ambition d’Orange était de construire une banque qui dispose d’une large palette de produits (tenue de compte, moyens de paiement, crédit, épargne, etc.), qui soit mobile first et délivre une expérience client beaucoup plus fluide et simple que les banques traditionnelles. L’idée était aussi de capitaliser sur la force du réseau de boutiques Orange, et donc de mettre en place un modèle « phygital » : l’ouverture d’un compte peut se faire soit dans une agence, soit depuis son téléphone mobile entièrement à distance comme le font aussi N26 et Revolut via une App. Orange Bank offre donc à ses clients la simplicité de modèles comme ceux de N26 et Revolut (ouverture de compte sur mobile, temps réel) tout en ouvrant des perspectives plus larges en termes d’offre produit et de réseau de distribution. L’ouverture de comptes dans les boutiques Orange est très simple quand on est client Orange du fait de la détention par le groupe d’un justificatif de domicile et de l’existence d’un contrôle visuel de la carte d’identité par le conseiller Orange, lui-même formé à la banque. Le paiement mobile est aussi la grande force de l’offre d’Orange Bank  : sa mise en place rapide a été rendue possible par la préexistence au sein d’Orange d’une solution basée sur un porte-monnaie (Orange Cash), qu’il a simplement fallu articuler avec le compte bancaire. Démonstration est ainsi faite qu’on peut combiner l’agilité d’une start-up avec la force d’un grand groupe qui apporte son réseau de distribution et des solutions prêtes à l’emploi  !

Agriculture[modifier]

Dans l’agriculture, il s’agit d’optimiser les investissements en machines agricoles (optimisation du fonctionnement des moissonneuses-batteuses par exemple), de réduire la consommation d’intrants (engrais, énergie, produits divers) et de fertiliser les sols en anticipant les prévisions météo avec des capteurs et l’usage de l’Internet des objets. Des start-up peuvent améliorer la relation entre producteurs et consommateurs (par exemple, La ruche qui dit oui, pour un achat direct aux producteurs locaux) ou entre producteurs et vendeurs ou acteurs tiers (Alkemics qui collecte des données de produits pour les diffuser à l’ensemble des distributeurs, des applications consommateurs, etc.). L’analyse des données et leur exploitation avec le big data et l’intelligence artificielle sont fondamentales pour les grosses exploitations agricoles. On peut même penser à l’usage de drones pour des photos de parcelles de terrain. Ce peut être aussi la traçabilité alimentaire pour le label bio ou des robots désherbeurs à la place de pesticides. Et la traçabilité couplée à la géolocalisation peut être source de valorisation. Ainsi Hervé Pillaud, auteur du livre AgroNumericus, est en France un agriculteur pionnier de l’utilisation du numérique pour l’agriculture.

Administration[modifier]

S’agissant de l’administration, la transformation digitale pourrait passer par une remise à plat du millefeuille administratif pour opérer un véritable «  choc de simplification  » au-delà des mots. Comme le dit clairement Jean-Michel Billaut, personnalité de l’Internet en France, il conviendrait de passer par une déconstruction et une reconstruction en mode 2.0 pour offrir une suppression des doublons, une simplification des procédures, une plus grande fluidité dans les services proposés aux administrés. En s’inspirant de l’exemple de l’Estonie et des propositions du think tank French-Road, les services pourraient être bâtis autour d’une identité numérique à forte valeur probante. Ceci permettrait d’effectuer les démarches en ligne depuis un smartphone ou d’enrichir les tâches faites par les agents de l’administration.
Les armées pour leur part sont confrontées à un défi  : faire plus et différemment avec moins de moyens et un contexte très changeant. Nous vivons par exemple les évolutions des menaces asymétriques comme le terrorisme, avec des attaquants qui adaptent rapidement leurs stratégies d’attaque. Aussi les méthodes agiles de type Scrum, les fablabs et plus globalement l’innovation sont clés dans ce processus de changement. Les organisations évoluent également dans le cadre d’une transformation plus transverse et opérationnelle, ce qui brouille les rôles et responsabilités, jadis clairement définis et cloisonnés.

Recherche[modifier]

Bernard Quinio, maître de conférences à l’université Paris-Nanterre, travaille sur un projet d’archéologie pour la période de 700 000 à 400 000 avant notre ère. La transformation digitale intervient à trois niveaux s’agissant de la technologie et de l’innovation :
  • la visualisation 3D sur écran  : elle permet de restituer sur écran ce que les scientifiques imaginent, ce qui éveille leurs hypothèses ; d’autre part, des disciplines différentes (neuf disciplines précisément, parmi lesquelles des paléontologues et des palynologues) observent la même chose, ce qui génère des discussions intéressantes  ;
  • la réalité virtuelle, qui avec un casque et une immersion permet des prises de conscience (dans une grotte où sont posés les objets, les chercheurs deviennent acteurs et entrent en contact avec l’objet d’étude sur lequel ils travaillent depuis de longues années). Cela suscite des étonnements (peu d’objets ici, trop d’os de rennes dans ce coin par exemple) ;
  • l’apport de l’intelligence artificielle pour expliciter ou tester des hypothèses scientifiques en utilisant une multitude de données qu’il convient au préalable de nettoyer, de qualifier et d’associer à des ontologies.
Ces changements liés au numérique ont démultiplié le travail collectif dans le laboratoire d’archéologie, ce qui nourrit la recherche alors que les scientifiques étaient jusqu’alors davantage en mode silo ou disciplinaire. Un cercle vertueux pour les découvertes scientifiques avec l’environnement est en passe d’être instauré (musée et région), ce qui permet de valoriser la recherche. Les résultats de la recherche sont publiés en ligne, ce qui participe à la crédibilité institutionnelle. Pour aller plus loin, il faudrait augmenter la puissance de calcul pour fluidifier la représentation 3D et les dispositifs d’immersion et améliorer les outils utilisés. Nous avons la même problématique de taille mémoire, de débit et de puissance de calcul dans la télémédecine pour la visualisation.

Les TPE ? Également concernées  ![modifier]

Romain Paulhac, gérant de la société Boucharenc, souligne que la transformation digitale est également possible pour une TPE. Son entreprise, située en Lozère, fabrique des chaussures thérapeutiques sur mesure et des chaussures pour la course à pied. Avec le numérique, la manière de prendre les mesures évolue. Avant, il convenait d’élaborer un cahier des charges papier. Concrètement, les podo- orthésistes «  commerciaux  » sont à distance dans les hôpitaux. Le développement d’un logiciel sur iPad permet à présent d’établir en direct le cahier des charges. Cette application, élaborée à partir d’un logiciel de gestion de bases de données, FileMaker, auquel a été ensuite intégré la gestion de production pour disposer de l’information en temps réel dans l’entreprise, comprend des données hébergées sur serveur (plan d’appareillage pour des semelles ou des chaussures), lesquelles sont accessibles en direct pour débuter le cycle de fabrication, réduire les délais et les erreurs. Il est donc désormais impossible d’oublier une information primordiale, car la fiche n’est pas validable si les champs ne sont pas renseignés. Les modifications sont visualisables dans l’application, dans laquelle on peut naviguer facilement, ce qui permet également de dialoguer en temps réel avec le patient et de lui donner les informations requises. En outre, l’apport de la visualisation en 3D permet de livrer plus facilement qu’avec l’utilisation d’un plâtre des explications aux podo- orthésistes débutants. Le passage de moulages en plâtre à l’imagerie en 3D modifie la façon de fabriquer.
Si l’appétence pour les technologies et l’innovation diffère selon les secteurs, puisqu’elle est liée aux usages qui en découlent, les principes de la transformation digitale restent toutefois les mêmes.
Le Tableau 3.1 recense 18 secteurs génériques et 13 technologies. L’intérêt de chacune des technologies pour les secteurs est évalué de 1 à 4.

Pourquoi un modèle générique ?[modifier]

Quel que soit le type d’organisation, il existe des invariants pour les indicateurs constitutifs des six leviers déterminés dans notre modèle. En revanche, le niveau d’exigence pour atteindre un même niveau pour un indicateur donné pourra varier selon les secteurs. Un investissement de 3  % du chiffre d’affaires en recherche- développement n’aura pas la même signification dans l’automobile ou dans la grande distribution par exemple. Dans un cas, un niveau de maturité N pour l’indicateur sera atteint, dans l’autre ce pourrait être N+2.
Parmi les invariants, les organisations tendent à adopter de plus en plus d’outils numériques pour le management afin de gagner en efficacité, proposer du travail en mobilité avec des réseaux sociaux d’entreprise ou des outils comme Microsoft Teams (qui fédère Skype, la suite bureautique Office, l’agenda, etc.). Les organisations se simplifient avec moins de niveaux hiérarchiques, même si une approche matricielle demeure pour les projets. On tend vers plus d’approches bottom-up où le top management lance des challenges et encourage les personnels qui proposent des innovations. Certaines entreprises vont jusqu’à rémunérer les collaborateurs en fonction des économies réalisées par l’entreprise (c’est le cas en Allemagne).
TABLEAU 3.1 Besoin en technologie selon les secteurs en moyenne
La tendance à la réduction du nombre de niveaux hiérarchiques se vérifie pour les entreprises qui sont transformatrices selon notre typologie. Ainsi la biscuiterie
Poult a supprimé deux niveaux hiérarchiques afin de donner plus d’autonomie et de responsabilité dans la gestion sur le terrain. Ceci a généré une période transitoire accompagnée, car les repères changent. Et les dirigeants ont introduit les remontées des opérationnels dans l’évolution de l’offre.
L’intrapreneuriat à la SNCF a donné lieu à un projet de maintenance des trains par les drones. Le fait d’allouer des moyens et d’avoir un soutien du management peut faire naître des projets porteurs de valeur. Une des tendances observées est la montée en puissance du bottom-up , des idées sur le terrain, pour peu que les experts soient reconnus et dotés d’outils de partage, ce qui permet de valoriser leur savoir- faire et de le répliquer le cas échéant vers d’autres équipes. La problématique est néanmoins complexe, car la hiérarchie et les ressources humaines doivent être associées pour éviter que l’intrapreneur soit vu comme atypique. Aussi des outils développés par les ressources humaines qui prendraient en compte les soft skills ou les compétences qu’un collaborateur a pu développer en dehors de l’organisation permettraient de ne pas sous-utiliser des talents internes laissés en jachère.
Notre analyse s’est appuyée sur six leviers. Ceux-ci structurent toute organisation comme un organisme vivant au sens de Michel Crozier , que ce soit une entreprise, une administration ou une association :
  • sa stratégie ;
  • son organisation ;
  • son personnel ;
  • son offre ;
  • les technologies et les innovations mises en œuvre ;
  • son environnement.
Une analogie entre le passage du web 1.0 au web 3.0, en schématisant les principales caractéristiques de l’évolution d’une organisation ou d’une entreprise en fonction de sa maturité croissante sur chacun des leviers, conduit au Tableau 3.2. Ces principes généraux sont déclinés à travers les groupements et indicateurs des chapitres 4 à 9.
TABLEAU 3.2 Principes généraux du passage de l’entreprise 1.0 à l’entreprise 3.0
Comme évoqué au chapitre 2, pour chacun des indicateurs, un niveau est mesuré sur une échelle de 1 à 5. Le niveau atteint répond au principe suivant  : pour un critère donné, un niveau N ne peut être atteint que si les exigences du niveau N-1 ont été satisfaites ainsi que les nouvelles exigences du niveau N. Le niveau 0 est également possible dans l’hypothèse où les exigences du niveau 1 ne seraient que partiellement ou non satisfaites. Ceci est schématisé par la Figure 3.1.
Afin d’être le plus précis possible dans la mesure de la maturité, nous avons opté pour cinq niveaux pour chacun des indicateurs. Nous avons repris le modèle de notation de CMMI qui constitue un apport des méthodologies du système d’information. Celui-ci est également emprunté par IDC dans son étude sur la maturité numérique des dirigeants. Nous retenons l’appellation du modèle IDC avec en complément le niveau 0 de CMMI lorsqu’un indicateur est absent ou très embryonnaire (voir Tableau 3.3).
Le modèle développé ne pose pas la question des modalités de la transformation digitale. Il livre des indicateurs pour appréhender les éléments de transformation digitale dont pourront se saisir les dirigeants et les consultants afin de bâtir leur plan d’action.
FIGURE 3.1 Exigences croissantes à satisfaire pour les différents niveaux de chaque indicateur
TABLEAU 3.3 Les cinq niveaux de notation
NiveauMaturité
Initial
Opportuniste
Renouvelable
Maîtrisé
Optimal

Existence d’un modèle dédié au secteur bancaire, BIMM[modifier]

Un modèle, BIMM* (Bank Internet Maturity Model), a été développé dans le cadre d’une thèse de doctorat disponible en ligne et peut être librement utilisé pour mesurer le niveau de maturité atteint par tout acteur du secteur bancaire (banque, fintech, néobanque, acteur d’Internet de type Gafa proposant des solutions en la matière). Il permet d’estimer le niveau de maturité numérique de tout indicateur, groupement et levier, ainsi que de façon globale. Des coefficients (1/2/3, pour modéré/fort/très fort) ont été introduits pour la pondération des indicateurs jugés plus impactants dans la transformation digitale.
Un outil associé a été développé pour faciliter la saisie, la restitution et l’export des notes obtenues. Il est hébergé sur le site www.digitalimpacts.fr et librement accessible dans un répertoire spécifique (http://bimm.digitalimpacts.fr). Le préalable est la création d’un compte avec renseignement de quelques champs, puis identification/ authentification.
FIGURE 3.2 Outil de saisie pour les niveaux de maturité atteints par les différents critères du modèle
L’établissement de ce modèle spécifique aux acteurs bancaires, BIMM, a permis de challenger le modèle générique, DIMM, et de le faire évoluer. Par ailleurs, des indicateurs sont spécifiques au domaine bancaire et des similitudes existent entre les deux modèles.
Ainsi, les banques traditionnelles ont un back office complexe avec un système d’information historique (hérité des années 1970 et 1980 avec des données qui sont en silo, des traitements manuels, des processus «  papier  » ou déconnectés). Ces lourdeurs impliquent des coûts élevés (coûts d’évolutions fonctionnelles et techniques qui se chiffrent en milliards de jours-hommes, coûts de maintenance des infrastructures, coûts de correction d’erreurs et de bugs), une faible agilité (temps de commercialisation des produits/services longs) handicapante par rapport à de nouveaux entrants, une faible satisfaction client (délai de réponse, manque d’expérience client et difficulté à collecter des informations à harmoniser dans le système d’information en provenance de différents canaux). A contrario, les fintech et les néobanques ont des systèmes d’information nouveaux et agiles, des traitements en temps réel et sont dépourvus d’agences physiques, lesquelles sont à repenser par les acteurs traditionnels.

Points clés[modifier]

  • Soyez conscient que la transformation digitale et la disruption concernent tous les secteurs d’activité.
  • Comprenez les facteurs clés de succès de la transformation digitale qui restent des constantes en dépit d’un environnement incertain.
  • Prenez conscience des technologies les plus impactantes pour votre organisation.
  • Appréhendez les principes des modèles proposés DIMM etBIMM dans l’optique de les utiliser pour votre organisation.
1«  Baromètre French Tech de la collaboration entre start-up et grands groupes  », novembre 2017, http://startups-grandsgroupes.lafrenchtech.com.
2« Les 56 pôles », https://competitivite.gouv.fr.
3Sylvain Arnulf, «  “L’ubérisation part toujours d’un point d’inefficience dont bénéficient de nouveaux acteurs”, selon Claude Imauven de Saint-Gobain  », L’Usine digitale, 17 mai 2016, https://www.usine-digitale.fr.
4Voir http://www.airbus-bizlab.com.
5Voir https://www.airbus-sv.com.
6Voir «  Management collaboratif chez Poult  : la biscuiterie libérée  !  », 25 décembre 2015, https://www.youtube.com.
7Michel Crozier, Erhard Friedberg, L ’A cteur et le Sy stème : les contraintes de l ’action collective, Éditions du Seuil, 1977.
8Baromètre Syntec numérique, IDC France, La maturité numérique des dirigeants français, e octobre 2013 (2 éd.).
9David Fayon, Mesure de la maturité numérique des banques et transformation digitale, op . cit., http://davidfayon.fr.

Chapitre 4[modifier]

Levier: stratégie

Positionnement du levier et objectifs[modifier]

Être acteur du numérique ou en tirer parti ne s’improvise pas et nécessite une vision du top management avec des remontées du middle management ainsi que de nombreux investissements en matériel, logiciel et infrastructure.
Il en découle une stratégie de développement de l’organisation fondamentalement différente des stratégies classiques, valorisant des structures de revenus et de coûts permises par les infrastructures numériques. La vision à long terme de l’entreprise est fréquemment revisitée, dans la mesure où, dans un monde digital, sur le long terme (c’est-à-dire trois ans et au-delà), trop de changements profonds et imprévisibles peuvent se produire (nouvelles technologies en rupture, nouveaux usages, nouveaux comportements, nouvelle réglementation fiscale, etc.).
L’entreprise traditionnelle souhaitant développer son activité en ligne doit donc adapter son organisation en s’inspirant de ces nouveaux modèles, investir dans des entreprises innovantes pour trouver des complémentarités  : vendre sur de nouveaux canaux, s’appuyer sur les technologies numériques pour optimiser son organisation interne et sa performance commerciale, etc.
La valeur ajoutée se situe par ailleurs davantage dans l’«  or transparent  », les données, qui une fois raffinées et contextualisées sont un gisement important de valeur pour toute organisation. Celles-ci sont à exploiter dans le cadre de sa veille et des services proposés.

Groupements[modifier]

Nous proposons de caractériser la stratégie de transformation d’une organisation digitale suivant trois groupements répondant aux questions structurelles de ce type d’entreprises :
  • Plan stratégique : comment l’entreprise bâtit-elle son plan stratégique pour créer de la valeur avec le numérique dans une logique de vision descendante et de remontées du terrain  ? Comment l’entreprise développe-t-elle de nouvelles sources de revenus ou services en coopérant avec des start-up et les grands acteurs du numérique ?
  • Veille  : quelle est l’organisation mise en œuvre en termes de veille, d’intelligence économique et de suivi de sa réputation ?
  • Excellence économique  : quel est le niveau d’investissements consentis dans le numérique  ? Comment évolue et se diversifie l’organisation grâce au numérique en vendant davantage grâce au digital ? Comment améliore-t-elle la distribution de son offre ?
NB  : Les indicateurs n’ont pas vocation à apprécier la stratégie digitale mise en œuvre à proprement parler. Celle-ci, en soutien de la stratégie de l’entreprise, est en effet trop spécifique selon le secteur d’activité et la taille de l’entreprise pour qu’on puisse en évaluer la maturité.
Pour certains indicateurs, l’analyse et les retours d’expérience permettent de définir des valeurs types pour des secteurs d’activité tels que catégorisés dans le chapitre 3. Il existe toutefois un biais, un écart type au sein même d’un secteur d’activité lié au sous-secteur d’activité, à la taille de l’organisation, à son éventuelle internationalisation, à son histoire et sa culture, etc. Toutefois, il s’agit pour l’organisation de pouvoir se situer pour les indicateurs donnés en matière de maturité numérique.
Yves Tyrode (@YvesTyrode), directeur général en charge du digital, groupe BPCE
«  Le principal enjeu des patrons du digital est de devenir des patrons de la data dès lors que la première étape de la transformation digitale est réussie. »
À présent directeur général en charge du digital du groupe BPCE, après avoir travaillé chez France Télécom (programmes de mobilité et Wi-Fi, Livebox, création puis direction du technocentre, etc.) puis à la SNCF (directeur général du groupe Voyages SNCF puis directeur du digital de la SNCF), pourriez-vous nous retracer votre parcours et les transformations numériques que vous avez opérées  ?
Chez France Télécom, devenu Orange, j’ai eu la chance de vivre les aventures du lancement du GSM, du mobile data, du haut débit fixe et de la fibre. Ma première partie de carrière a été axée sur les réseaux de télécoms, qui sont en fait les fondations du digital pour le grand public comme pour les entreprises et les grands comptes.
L’enjeu stratégique de cette époque était celui de la création de valeur en vendant des services au-dessus des couches réseaux, au-delà des offres de débit  : par exemple, en vendant des services multimédias, TV, musique, jeux, des services de paiement avec Orange Money, voire de la sécurité (Business Every where pour le marché des entreprises pour les accès nomades) ou encore des services de téléconférence.
C’est là que j’ai compris l’importance de ces services au-delà de l’accès et de la puissance des nouveaux acteurs d’Internet (que nous appelions les over the top et qui sont aujourd’hui, entre autres, les Gafa), qui ne se focalisaient que sur les couches applicatives sans être positionnés sur les couches d’accès.
Ensuite, j’ai voulu devenir un acteur des services en me spécialisant sur les offres au- dessus de l’accès et j’ai eu la chance de pouvoir rejoindre Voyages SNCF, alors acteur majeur du e-commerce français. J’ai travaillé à l’industrialisation du site, au passage au mobile et à l’international. C’était un groupe avec plusieurs actionnaires  : la SNCF, les Chemins de fer fédéraux suisses pour la partie internationale, et Expedia pour la partie agence de voyage. Être adossé à un acteur majeur du e-travel était une source d’émulation et de motivation, les alliances avec les pure players étaient très pertinentes.
Dans cette entreprise, j’ai appris le management avec une population de jeunes salariés, la génération Y, qui étaient des digital native. C’était, d’un point de vue managérial, l’occasion de réinventer mes codes de management  : ce fut formidable, et j’en garde un souvenir ému.
En 2014, j’ai rejoint le Comex du groupe SNCF en tant que directeur général avec comme mission la transformation digitale du groupe ainsi que la communication. Assez vite, je me suis focalisé sur le digital et, en particulier, sur la partie industrielle. On avait réalisé la transformation digitale de la partie vente, et il fallait désormais inventer la transformation digitale culturelle de l’ensemble du personnel ainsi que de l’outil de production industrielle qui incluait les trains, le matériel, les infrastructures et les gares. Mais il fallait aussi entamer la transformation digitale des métiers, tels que les contrôleurs, les conducteurs, les personnels de maintenance. On en a profité pour mettre en place de nombreux éléments d’infrastructure avec les opérateurs mobiles – en particulier le chantier de la couverture 4G des voies ferrées, condition nécessaire au plan digital de la SNCF – mais aussi pour proposer du Wi-Fi dans les trains pour les clients. On a lancé les premières initiatives d’Internet des objets et les premiers cas d’usage du big data dans le domaine industriel.
Et fin 2016, j’ai souhaité me lancer dans un nouveau défi, celui du digital au sein du secteur bancaire que j’avais déjà préalablement exploré chez Orange avec Orange Money et que je souhaitais approfondir.
En quoi l’innovation numérique diffère-t-elle dans ces trois secteurs, télécoms, transport, banque ?

Ces secteurs sont très différents, et en même temps il existe des similitudes très fortes.[modifier]

Dans le retail, le client est le même et il attend une expérience utilisateur qui soit similaire entre l’achat d’un billet de train, l’achat d’une vidéo à la demande ou la consultation de ses comptes. L’ergonomie dans les trois secteurs se doit d’être intuitive et simple. Les méthodes de développement sont très similaires sur les App et les sites web ainsi que les technologies et les mesures de satisfaction. Il convient de suivre les codes du web et leur évolution à la bonne vitesse. Cela amène à refondre régulièrement l’application mobile et les sites web. Partout sont appliquées les mêmes règles  : interface et expérience utilisateur, taguage, parcours client, marketing digital.
Ensuite, il existe des spécificités. Dans le secteur bancaire, on ne gère que des données. Le côté physique est peu présent, exception faite des agences et des conseillers. La banque est par essence très numérisée, c’est un business de stock. L’outil de production est le système d’information. Dans la banque, on engage les clients sur des durées très longues et les produits sont très différents.
Dans le secteur du transport, le chiffre d’affaires est réalisé à l’usage avec du pur transactionnel, le business est réalisé chaque jour contrairement à la banque où les clients sont engagés sur une durée. Il existe une infrastructure physique industrielle forte (gares, équipements, matériel roulant).
Enfin, le secteur des télécoms se situe à mi-chemin entre les deux. Il est constitué d’une infrastructure technologique avec des révolutions. Son business model repose sur un engagement d’une durée plus courte que dans le secteur bancaire et sur une offre de produits moins étoffée, une complexité moindre sur le plan technique mais avec de très gros volumes. Le secteur est très industriel, avec une qualité de service qui doit être irréprochable pour le client.
Dans la transformation digitale, pour ces trois industries, il faut être agile mais également capable de passer immédiatement à l’échelle. Enfin, la focalisation sur la qualité d’exécution est très importante dans ces trois mondes.
Y a-t-il dans la banque une spécificité dans la transformation digitale  ? Quelle est la deuxième étape de cette transformation ?
La grande différence que j’ai notée dans la banque est l’importance du conseiller dans la vente. Autant pour la banque au quotidien (virements, pilotage de la carte bancaire, état des comptes), le client souhaite être autonome et le faire vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept avec un accès sécurisé et simple. Autant pour la souscription de services bancaires plus complexes, le client souhaite être guidé par un conseiller, par exemple pour un crédit immobilier avec un engagement sur une très longue durée et des subtilités pour l’assurance, ou encore pour la préparation d’une épargne retraite, pour le financement des études de ses enfants … Cela explique que l’essentiel des revenus des banques soit réalisé avec un conseiller. En revanche, le conseiller souhaite être allégé des tâches administratives qui peuvent être effectuées par le client  : pièces justificatives à saisir depuis un site web ou une App mobile plutôt que d’avoir des échanges par mél ou en se rendant dans une agence. Une autre considération est de pouvoir s’affranchir des courriers papier et de généraliser la signature électronique.
La transformation digitale des entreprises a vraiment commencé avec l’arrivée du haut débit au début des années 2000. En 2019, le digital pour les clients et les collaborateurs est quelque chose de mûr  : technologies maîtrisées, usages développés massivement. Il reste certes beaucoup de choses à faire, en permanence, mais on est dans un univers connu. Nous ne sommes plus dans la phase d’invention d’un nouveau monde. Une deuxième étape est en train d’arriver, la data et l’intelligence artificielle qui constituent une rupture. Dans le monde de la banque, cette rupture est importante car les banquiers gèrent de la data depuis toujours, mais ils vont le faire différemment avec des outils plus puissants. Cela va changer profondément leurs métiers. Cela demandera du temps, sera progressif et nécessitera l’adoption des technologies par les directions informatiques et les utilisateurs eux-mêmes ainsi que l’adaptation des processus et des métiers avec, en particulier, l’intelligence artificielle. Il est dans l’ADN d’une banque de protéger les données de ses clients, car nous sommes un tiers de confiance. La manière dont les données des clients vont être utilisées doit être encore plus respectueuse des libertés individuelles et des réglementations en vigueur (bancaire ou juridique).

Quelles sont les caractéristiques du directeur du digital et son évolution ?[modifier]

Ce sont des business de transformation. Le patron du digital a réussi quand le digital est générateur de valeur pour l’entreprise et intègre les métiers de la vente, de la production et des ressources humaines. On a réussi quand les collaborateurs se sont approprié le digital. Un patron du digital doit maîtriser les expertises et être en mode «  passeur ».
Désormais, l’arrivée de la data génère de nouvelles méthodes (en particulier les données comportementales) qui sont très importantes dans le monde de l’intelligence artificielle que l’on est en train d’inventer. Le principal enjeu des patrons du digital est de devenir des patrons de la data dès lors que la première étape de la transformation digitale est réussie. Il s’agit d’un poste stratégique pour la réussite de l’entreprise. Il me semble plus pertinent qu’il soit naturellement rattaché au patron de l’entreprise, condition de succès pour le digital maintenant – et demain pour la data et l’intelligence artificielle.
Quelles sont les structures numériques pour générer des innovations  ? Allez- vous développer chez BPCE une bank as a service avec une plateforme ? Il ne s’agit pas d’une spécificité de la banque. Il est très difficile d’innover en rupture en interne, d’où l’importance de s’intégrer dans un écosystème ouvert innovant.
Pour le groupe BPCE, nous avons défini un dispositif très précis. Nous avons des fonds d’investissement pour des participations dans des start-up innovantes et disruptives – nous le faisons toujours en partenariat avec un fonds, la recherche et développement est externalisée. Il est ensuite important de s’arrimer aux grandes écoles et aux universités (nous avons des chaires avec Télécom ParisTech – «  Data engineering et intelligence artificielle pour la banque et l’assurance » inaugurée en mai 2018 – et avec HEC et Polytechnique  : «  Business analy tics for future banking  » avec un premier challenge en janvier 2019). Le troisième point est l’ouverture pour faire du business. Elle s’effectue de deux façons :
  • ouvrir nos APIs conformément à la directive européenne sur les services de paiement e 2 version (DSP2). Elles sont ouvertes pour l’heure à des tests ;
  • ouvrir d’autres APIs de services qui viendront du groupe BPCE et de Natixis. Nous avons également été précurseurs en ouvrant une centaine de jeux de données publiques en open data en provenance de l’ensemble des établissements du groupe. En particulier dans la partie data, nous voulons progressivement aller dans le monde de l’open source avec des publications (partage d’algorithmes  : Scikit-learn, la bibliothèque libre Python destinée à l’apprentissage automatique, est développée avec des acteurs académiques dans le monde entier dont, pour la France, l’Institut national de recherche en sciences du numérique [Inria] et Télécom ParisTech).
Toutes les initiatives de transformation digitale et de prise de conscience de la data, dans toutes les industries françaises et européennes, sont encourageantes. C’est un aspect extrêmement positif, car il peut permettre de proposer une juste alternative à l’hégémonie digitale des grands acteurs américains et chinois. Notre rêve à tous est que des géants digitaux européens puissent émerger, lesquels pourraient être de nouveaux acteurs mais aussi des acteurs existants qui se seront transformés avec succès.
* * *
Laure Bustin (@laurebustin), déléguée nationale au digital du Centre des jeunes dirigeants d’entreprise (CJD) et dirigeante de l’agence Graffiti.fr
«  Il faut préparer l’avenir et enseigner le code, notamment aux filles, dès le plus jeune âge  ! »
La transformation digitale des entreprises fait l’actualité depuis plusieurs années. Celle des grands groupes est l’obj et d’une communication foisonnante. Quel est votre regard sur celle des PME et ETI ?
Les écarts sont considérables entre les PME qui ont entamé leur transformation digitale et celles qui se demandent encore s’il sera utile de transformer leur entreprise. Car oui, cela existe  ! Les entreprises qui aujourd’hui tournent bien n’en voient pas l’utilité. «  Mon entreprise fait de la croissance régulièrement, alors pourquoi investir dans une transformation digitale dont on ne connaît pas le retour sur investissement  ?  » ai-je pu entendre au cours de ces quatre dernières années. Nous en sommes encore là.
Les niveaux de digitalisation sont très disparates. Certains ont changé de business model, se sont réinventés. D’autres veulent engager une transformation digitale mais cherchent encore la méthode, enchaînant les missions de «  consultant en transformation digitale  »  : doués pour la théorie mais balbutiants quant à la mise en pratique.
À mon sens, nous devrions avancer beaucoup plus vite pour suivre l’accélération d’un monde digital. Les questions deviennent rapidement obsolètes.
Les entrepreneurs les plus efficaces sont ceux qui ont «  attaqué  » la transformation digitale pan par pan (commercial, logistique, ressources humaines …), ne reculant ni devant l’ampleur de la tâche, ni devant les investissements.
Dans une PME ou une TPE, le vœu de « casser les silos » est partagé et parfois même déjà en œuvre dans les entreprises membres du Centre des jeunes dirigeants d’entreprise. En effet, les adhérents du mouvement cultivent depuis de nombreuses années l’entreprise agile et pratiquent l’intelligence collective pour faire grandir les hommes et les entreprises. Toutefois, je ne connais pas d’entreprises qui, aujourd’hui, se soient emparées de la transformation digitale de manière globale, en tout cas pour les entreprises traditionnelles qui ont muté. Les retours d’expériences sont les suivants  : une idée de transformation d’un service naît d’abord, comme la digitalisation du service commercial ou des ressources humaines, puis la transformation digitale se diffuse dans le reste de l’entreprise pas à pas. Ceux qui l’ont fait ne le regrettent pas. Toute transformation permet de faire bouger les lignes et remet en question les faits établis .
Vous avez raison de signaler que la communication des grands groupes est foisonnante et je regrette que ce ne soit pas le cas des PME/TPE. De nombreux exemples existent, et je crois fermement aux vertus des bonnes pratiques échangées entre chefs d’entreprise.
La communication sur les expériences digitales est à mon sens anormalement absente des PME, que je connais mieux que les ETI. Pourtant, certaines ont largement entrepris leur transformation. Les projecteurs ne sont pas suffisamment tournés vers les dirigeants de ces PME, à tort  : les entrepreneurs rivalisent d’ingéniosité pour transformer leur boîte, certains allant jusqu’à hacker leur propre business model pour l’éprouver et se réinventer.
Au sein du Centre des j eunes dirigeants d’entreprises, vous avez mené un groupe de travail destiné à sensibiliser au digital. Le suj et vous semble-t-il appréhendé avec l’attention qu’il mérite  ? Que faudrait-il insuffler aux j eunes dirigeants pour que le numérique soit pleinement intégré dans la vision stratégique de leur entreprise ?
Un parcours d’apprentissage a été construit en partant de simples actions de sensibilisation pour terminer sur des actions de formation complètes. En trois ans, 120 animateurs ont été formés. Ils ont ainsi pu animer en section des groupes de dirigeants allant de 5 à 13 personnes. Ces petits groupes appelés «  commissions digitales  » se réunissent une fois par mois pendant deux à trois heures sur dix mois. Au cours de leurs séances, ils abordent le digital de différentes manières pour :
1.s’inspirer des bonnes pratiques en découvrant des entreprises transformées digitalement, de rencontres d’experts et de lectures d’ouvrages pratiques ou théoriques  ;
2.s’évaluer avec un diagnostic de maturité digitale en ligne (sur la plateforme Impulsions digitales, https://impulsionsdigitales.net/login) ;
3.s’informer et se former avec une plateforme de ressources en ligne (via la plateforme Impulsions digitales) ;
4.mettre en œuvre un plan d’actions annuel avec des objectifs Smart (Spécifique, Mesurable, Atteignable, Réaliste et limité dans le Temps).
Ce format permet au dirigeant de prendre de la hauteur et d’agir en chef d’entreprise capable de définir une vision et de mettre en place un plan d’actions incluant le digital.
Des contenus de formation ont été créés : des vidéos pédagogiques sur le management du changement, la philosophie appliquée à l’entreprise avec des philosophes (Laura Lange, https://lauralange.fr) ou experts en management du changement dans le secteur industriel (cabinet FP Consultants, http://blog.fp-consultants.fr/).
Des réunions plénières sont également organisées, sur un format de une à deux heures pour une section complète, soit entre 40 et 100 jeunes dirigeants réunis pour sensibiliser sur le sujet.
Cette année, une learning expedition est organisée à Tallinn en Estonie pour découvrir les bonnes pratiques dans la capitale européenne du numérique, déclarée également première société digitale au monde par le magazine Wired en 2017. Des live et un livre blanc seront produits à cette occasion à l’attention de membres du CJD.
Enfin, le CJD national a embauché un chef de projet digital pour renforcer son équipe de permanents en charge du mouvement. Cette personne coordonne les actions de transformation digitale du mouvement et les actions en faveur des adhérents entrepreneurs.
Pour que le numérique soit totalement présent dans la stratégie des jeunes dirigeants, nous devons travailler à l’inclusion du digital dès les premières étapes du parcours d’entrée dans le mouvement.
Au travers des rencontres que vous avez organisées au fil des années, quels facteurs clés de succès de la transformation digitale au sein d’une petite entreprise avez-vous identifiés ? Comment en favoriser l’émergence ?
Le « faire et apprendre » est l’une des meilleures solutions. Mieux vaut commencer par des petits chantiers, apprendre de ses erreurs, corriger, recommencer et avancer, plutôt que de tenter d’élaborer de grandes stratégies couchées sur des rapports de consultants qui ne quitteront jamais le placard du dirigeant !
L’outil est secondaire, le leadership et la posture du manager constituent des facteurs clés de succès. Sa capacité à manager le changement contribuera aussi à la réussite de la transformation digitale. Il doit apprendre à travailler avec les personnes qui sont convaincues de l’intérêt de cette transformation, et arrêter de perdre du temps avec les sceptiques.
Les témoignages d’entrepreneurs sont de formidables catalyseurs de la transformation digitale, comme les rencontres, les voyages d’études et de découvertes d’entreprises. La transformation digitale se fait pour et par l’humain.
Aux dirigeants de petites entreprises, quels indicateurs de maturité numérique conseillez-vous de surveiller attentivement ?
La maturité digitale d’une entreprise est très relative. Il n’existe pas à mon avis de standard  ! J’engage cependant les patrons de PME et de TPE à opérer a minima une veille de leurs concurrents et leaders de leurs marchés sur les efforts et les investissements réalisés en matière de digital. Sont-ils à distance ou dans le peloton  ? Quid des secteurs d’activités connexes  ? Quid des entreprises similaires dans d’autres pays plus avancés sur le digital (Estonie, Israël, États-Unis/ Californie …)  ? Quid de la présence en ligne et de la digitalisation de la prospection ? des ressources humaines ? Comment ces entreprises recrutent-elles et fidélisent-elles leurs talents ? Si tout va bien aujourd’hui, en sera-t-il de même demain ?
Je les encourage donc à s’interroger  : et si vous étiez le consommateur de votre entreprise, que penseriez-vous de votre présence en ligne ? Googlisez-vous  ! Sollicitez vos enfants, neveux ou petits-cousins, invitez-les à vous trouver sur Internet et à surfer sur votre site. Effet d’étonnement garanti.
Je crois également beaucoup aux vertus de la jeunesse  : les jeunes sont nos mentors, en tant que dirigeants. Apprenons à écouter les digital natives et à organiser le transfert des compétences. Ces ressources peuvent être mobilisées facilement en entreprise.
Les indicateurs doivent être en phase avec les objectifs de l’entreprise. Toutefois, chaque petite entreprise doit veiller aux indicateurs suivants :
  • son organisation (via des outils de travail collaboratif ou des plateformes métier pour digitaliser la comptabilité, les achats, la production) ;
  • la digitalisation de sa marque employeur pour attirer des talents digitaux (image de marque, reflet fidèle en ligne et sur LinkedIn) ;
  • son approche client (l’image de marque de la digitalisation du marketing et du service commercial).
Sur le plan national, qu’attendez-vous des pouvoirs publics pour développer le digital dans notre pays ?
Je pourrais répondre des aides financières, mais l’outil n’étant qu’une partie de la transformation digitale, ce ne serait pas suffisant. Peutêtre un comportement exemplaire, pour commencer, en matière de digitalisation de l’administration française, à l’instar de l’Estonie !
Ensuite, il faut préparer l’avenir et enseigner le code, notamment aux filles, dès le plus jeune âge  ! Car la transformation digitale étant davantage un fait culturel que technologique, il faut transformer notre société en profondeur et durablement.
En outre, il me semble indispensable de mettre en place un espace d’information public pour communiquer sur les succès et les réussites, pour aider et accompagner d’autres entrepreneurs, valoriser les expériences positives, des pépites d’entrepreneurs. Pourquoi ne pas créer une minute digitale après le journal sur France TV ?
Nous pourrions aussi imaginer un crédit d’impôt digital sur trois ans après un certain montant d’investissement.
Les pouvoirs publics ont pour mission de donner à la transformation digitale sa juste place. C’est-à-dire ni une solution à tous les maux de la décroissance, ni une exclusivité réservée aux initiés (startuppers …).
* * *
Maud Franca (@MaudFranca), directrice adjointe Mandats et investissements d’avenir à la Caisse des dépôts
«  Créer des “start-up d’État”, c’est l’incarnation de la «  “start-up nation” et d’une vieille nation capable de s’adapter au digital. »
Vous pilotez le programme d’investissements d’avenir de la Caisse des dépôts. Quelle est la contribution de ce programme, pour les aspects concernés, à la transformation digitale de la France ?
Le programme des investissements d’avenir, qui est piloté par le Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) dont le groupe Caisse des dépôts est l’un des principaux opérateurs, est un acteur majeur de la transformation digitale du pays depuis 2010 et sa création. Il agit à différents niveaux, et de manière globale, en finançant en premier lieu le développement des infrastructures haut et très haut débit, fixes et mobiles, qui sont la première condition pour le développement des nouveaux usages numériques et d’une projection de notre pays dans l’ère digitale. Ainsi, le programme des investissements d’avenir contribue pour près d’1 milliard d’euros au plan France Très Haut Débit financé à hauteur de 3,3 milliards d’euros par l’État . Lancé en février 2013, ce plan vise à couvrir l’intégralité du territoire en très haut débit d’ici 2022, c’est-à-dire à proposer un accès à Internet performant à l’ensemble des logements, donc des foyers et citoyens français, des entreprises et des administrations. Le programme des investissements d’avenir investit tout autant dans le développement des nouveaux usages numériques, que ce soit dans les secteurs de l’administration, de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche, mais plus généralement dans tous les secteurs de notre économie nationale qui doivent opérer leur transformation digitale. Il contribue par ailleurs au développement des écosystèmes digitaux avec le financement notamment de la French Tech et des start-up en France, qui sont les outils de la disruption et de la transformation digitale. Il finance également largement la filière des entreprises du numérique, par le biais de Bpifrance, filiale du groupe Caisse des dépôts, de l’amorçage jusqu’au capital développement, avec l’objectif de faire émerger les futurs tech champions français dans les secteurs plus traditionnels que d’avenir (intelligence artificielle, deep tech). Enfin, il est aussi un acteur majeur du développement des compétences digitales en France en finançant par exemple de nombreux programmes de formation à la programmation informatique (code).
Depuis 2017, avec le PIA 3, le programme des investissements d’avenir adopte une dimension davantage territoriale de ses investissements, notamment dans le numérique, afin d’agir sur la transformation numérique des territoires qui se doit d’être inclusive et totale pour leurs habitants, leurs entreprises et leurs administrations.
La French Tech est désormais un label reconnu. Comment a-t-elle participé à la dynamique de transformation des entreprises/création de start-up de notre pays ?
Le programme gouvernemental French Tech, qui a été lancé en novembre 2013 à la suite du rapport Quartiers numériques rédigé par la Caisse des dépôts, dont je suis co- auteur avec Philippe Dewost, a défini une stratégie nationale de développement des start-up en France et de leur attractivité à l’international. L’un de ses principaux objectifs depuis le début est de multiplier le nombre de tech champions français, ce qui est la condition pour nous faire peser un tant soit peu dans l’économie digitale au niveau mondial, alors que celle-ci est largement dominée par les États-Unis et de plus en plus par la Chine. C’est notre souveraineté économique nationale, voire européenne, qui en dépend, dès lors que le digital se déploie dans tous les secteurs économiques, qu’il permet de revoir la manière de produire, consommer, distribuer les biens et les services et qu’il fait donc entrer de nouveaux acteurs disruptifs capables de s’imposer sur de nombreux marchés, à une vitesse extrême et à l’échelle mondiale. Ça a été le cas par exemple d’Airbnb ou d’Amazon qui, en moins d’une décennie, ont révolutionné les secteurs du tourisme et de la logistique (et au-delà).
Le développement des start-up en France a largement été structuré et accéléré grâce au programme French Tech. Ceci est passé notamment par la structuration d’écosystèmes nationaux de start-up de taille suffisamment critique dans les principales grandes métropoles françaises pour créer les conditions favorables de leur développement, réduire leur taux de mortalité et de résilience grâce à des pôles de compétences – qu’elles soient techniques ou financières – concentrés localement, capables par ailleurs de soutenir leur croissance. Le fonds French Tech Accélération du programme d’investissement d’avenir, doté de 200 millions d’euros et géré par la Caisse des dépôts puis Bpifrance, a permis de faire émerger de nouveaux acteurs comme les «  accélérateurs de start-up  », les «  start-up studios  », qui ont industrialisé d’une certaine manière le déploiement des start-up en France, comme cela était le cas dans la plupart des écosystèmes mondiaux de start-up les plus performants.
Les résultats du programme French Tech en seulement cinq ans d’existence sont importants  : il a permis de créer une véritable culture des start-up en France. Celles-ci étaient vues auparavant comme de simples entreprises «  gadgets  » pour une minorité de geeks. Elles sont aujourd’hui reconnues dans notre économie avec un modèle d’hypercroissance qui les distingue des autres formes d’entreprises, avec cette capacité de disrupter les marchés, de passer à l’échelle à une vitesse sans précédent. Elles sont aujourd’hui des outils de notre transformation.
D’un point de vue financier, les levées de fonds ont été multipliées par trois. De nouveaux tech champions ont émergé (Criteo, Sigfox, BlaBlaCar, etc.). Et plus globalement, la French Tech s’est dotée dès le début d’une forte stratégie à l’international, grâce au support actif entre autres de Business France et du ministère des Affaires étrangères, qui nous a fait avoir la reconnaissance d’être une «  start-up nation  » au niveau mondial. La présence remarquée des start-up françaises au Consumer Electronics Show (CES) de Las Vegas depuis 2014, mais aussi dans les plus grands salons de la tech, a sensiblement contribué à nous rendre plus visibles, plus attractifs pour les talents de la tech mondiale qui voit aujourd’hui la France comme une possible destination de carrière. C’est capital.
Dans quelles mesures le secrétariat d’État chargé du Numérique, Etalab, le Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique (SGMAP), Bpifrance ou encore d’autres structures publiques vous semblent-ils suffisantes pour adapter la France en profondeur au monde digital dans lequel nous vivons  ? Que manque-t-il hormis la capacité d’investissement de l’écosystème de la Silicon Valley ou de la Chine ?
Évidemment, il est difficile de faire des comparaisons entre la France, les États-Unis et la Chine, déjà par la taille de nos marchés domestiques qui ne sont pas les mêmes, ainsi que, de fait, par nos capacités de financement et d’investissement qui sont sans commune mesure. Il serait plus logique d’aborder ces sujets à une échelle européenne.
Pour répondre plus précisément à votre question, je dirais que les services publics en France jouent un rôle capital dans la transformation digitale de notre économie. D’une part parce qu’ils touchent et concernent tous les citoyens français dans leurs usages au quotidien. C’est donc par la transformation digitale des services publics que passera en grande partie et de manière globale et inclusive l’adoption du digital par la population. La dématérialisation des impôts a été dans ce sens un levier formidable pour que les Français découvrent puis se frottent concrètement au digital.
D’autre part, que ce soit au niveau national ou territorial, les acteurs publics sont ceux qui créent les conditions de l’innovation et de la transformation en France. L’existence de Bpifrance a joué un rôle décisif pour soutenir la croissance des entreprises du digital  ; elle a créé un effet de levier important sur les financements privés, permettant ainsi de multiplier nos capacités à investir sur ces marchés.
Si parfois les services publics ont été dits à la traîne par rapport aux services privés dans leur développement digital, ils ont été parfois extrêmement audacieux et novateurs. Etalab a été dans ce sens à l’initiative d’une révolution culturelle au sein de l’administration. Même si l’impact n’est pas global, l’État a su par là démontrer qu’il était capable de se disrupter de l’intérieur et d’insuffler l’esprit start-up au sein même de ses services. Créer des «  start-up d’État  », c’est l’incarnation de la «  start-up nation  » et d’une vieille nation capable de s’adapter au digital. La France n’a donc pas à rougir dans la compétition mondiale, à son échelle ; elle a d’importants atouts, justement grâce et par un service public très présent qui a su investir depuis l’enseignement, la recherche, jusqu’aux marchés. Nous avons de très bons ingénieurs et chercheurs.
Maintenant, il est vrai qu’il manque en France la culture d’entreprendre comme aux États-Unis. Encore insuffisamment d’étudiants sortant des grandes écoles souhaitent créer leur propre entreprise ou rejoindre une start-up. Cela progresse toutefois avec les nouvelles générations et par les performances des entreprises de la French Tech, qui proposent aussi de plus en plus d’opportunités de carrière attractives et stimulantes.
Quant au marché des start-up en France, nous n’arrivons pas encore à créer un marché vertueux de l’exit. Bpifrance stimule les grands groupes français à investir dans les start-up françaises, voire à les racheter, pour que nos savoir-faire et nos investissements ne soient pas récupérés ailleurs, mais les stratégies start-up/grands groupes sont encore insuffisantes dans ce sens. Traiter ces sujets à l’échelle européenne est nécessaire.
Le politique, du niveau local au sommet de l’État, a-t-il pris la mesure de l’importance de transformer la France pour qu’elle tire parti du numérique et devienne un leader dans le monde de demain face au duopole États-Unis-Chine ?
Les politiques publiques ont bien conscience aujourd’hui des enjeux liés à la transformation digitale. C’est peut-être là aussi un des apports de la French Tech d’avoir sensibilisé nos acteurs publics, nationaux et territoriaux, à l’importance de faire émerger et multiplier nos tech champions, pour pouvoir peser dans l’économie mondiale de demain qui sera en grande majorité digitale. Mais aussi d’être en capacité d’innover pour trouver de nouveaux modèles de croissance. Une des limites à notre transformation va vite se porter sur le manque de compétences. Nos entreprises du digital ont du mal encore localement à recruter et à trouver leurs futurs collaborateurs. Il est donc impératif de former beaucoup plus aux métiers du digital, que ce soit en formation initiale mais aussi en continu tout le long de la vie.
Vous rencontrez de nombreuses start-up que vous avez vu émerger, grandir et parfois échouer. Quels indicateurs vous permettent d’apprécier leur capacité à réussir ?
Un des indicateurs de réussite est la capacité de la start-up à pivoter au bon moment, à savoir adapter son modèle, ses produits, sa trajectoire en fonction des réponses du marché, de ses résultats, mais aussi face à des opportunités.
* * *
Rodrigo Sepúlveda Schulz (@rodrigo), managing partner,
Expon Capital
«  En Europe, il faudrait moins de projets, mais de meilleure qualité, et avec une ambition démesurée. »
En lançant Expon Capital, vous mettez l’accent sur le MTP (Massively Transformative Purpose) des entreprises que vous financez. En quoi cela consiste-t-il et quelles sont vos sources d’inspiration ?
J’ai eu la chance d’être invité par un vieil ami, Salim Ismail, à passer deux jours en juillet 2009 au sein de la nouvellement créée Singularity University (SU) dans la Silicon Valley, et à échanger avec les étudiants de la première promotion.
L’idée originelle lancée par les trois fondateurs (Peter Diamandis, Ray Kurzweil et Salim Ismail) était d’offrir un cadre académique pour étudier les technologies et les marchés à croissance exponentielle, c’est-à-dire ceux qui suivent la fameuse loi de Moore, qui dit que la puissance de calcul des microprocesseurs double tous les dix-huit mois. Un nombre limité de technologies ont été identifiées et étudiées en détail  : les énergies «  propres  », le séquençage ADN, la cybersécurité, les nanotechnologies, l’intelligence artificielle, la robotique, etc. À l’été 2015, j’ai même suivi l’Executive Program de la
Singularity University , ce qui a m’a permis d’affiner la stratégie de notre fonds.
En octobre 2014, Salim a publié un livre, Exponential Organisations , qui a été un best- seller dans les livres business. Il y présentait ses conclusions après avoir étudié la croissance des 100 premières licornes dans le monde de la technologie. Il en a conclu que toutes ces sociétés avaient en commun dix critères d’organisation interne, outre un MTP obligatoire. Toute société de technologie dotée d’au moins quatre de ces dix critères et ce fameux MTP avait le potentiel d’une croissance exponentielle. Nous avons adapté ces critères au monde des start-up avec Salim, qui a rejoint notre advisory board, et les appliquons rigoureusement dans notre processus de sélection. De quoi s’agit-t-il ? Pour la Singularity University, les étudiants doivent travailler sur un problème qui impactera au moins 1 milliard de personnes. Un de ces projets est par exemple la société Getaround, qui fait de l’auto-partage. Cette société, issue de la première promotion, vient de lever 300 millions de dollars avec notamment SoftBank en 2018. J’y ai quant à moi investi à titre privé dès 2011. C’est le fameux Massively . Pour nous, cela signifie qu’une start-up vise au moins 500 millions d’utilisateurs cibles, soit en Europe, soit en Amérique du Nord, ou dans le monde entier (nous ne ciblons pas encore l’Amérique latine, l’Afrique ou l’Asie avec notre premier fonds). Nous avons par exemple investi dans Spire Global, une société de nanosatellites qui a développé le meilleur modèle de prédiction météo au monde. Et qui cible par défaut toute la planète.
Transformative implique pour nous que la société a développé une technologie en propre, qui change la donne avec au moins un ordre de grandeur. Les satellites géostationnaires passent au même endroit une fois par jour. Les nanosatellites Spire en basse orbite le font toutes les vingt minutes environ, ce qui génère au bas mot soixante- dix fois plus de données.
Enfin, Purpose parle pour nous de la mission sociale de l’entreprise. Nous regardons de près si chaque projet permet de faire avancer l’un des dix-sept objectifs de développement durable définis par les Nations-Unies . Nous nous focalisons donc sur l’éducation, la prospérité, l’infrastructure, la qualité de la nourriture et de l’eau, etc.
Au regard des autres régions du monde, l’Europe et en particulier la France vous semble-t-elles suffisamment équipées pour financer les innovations ?
Je crois qu’il faut totalement arrêter de nous comparer aux autres régions du monde, car c’est un débat qui perdure depuis vingt ans et qui a pour prémisse que nous partons perdants. Inventons notre propre modèle et avançons  ! Les États-Unis ont un historique de plus de quarante ans de financement de l’innovation  : ils en ont créé les conditions propices auprès des universités où de jeunes étudiants ont accès à du capital, à d’autres talents, à de l’émulation, et démontrent une ambition globale. Depuis cinq ou six ans, la Chine a fait un bond de géant et est devenue la deuxième puissance mondiale en termes d’innovation. Alibaba a été la plus grosse introduction en bourse7 (aux États-Unis) par exemple, inventant un nouveau modèle de développement sur la base de logiciels chinois  : WeChat, qui est devenu le système d’exploitation de ce pays, n’est pas une copie d’un modèle occidental. Je recommande la lecture du dernier livre de Kai-Fu Lee , qui analyse la course en intelligence artificielle entre les États-Unis et la Chine. D’après lui, il n’y a même plus de place pour un troisième acteur mondial.
Maintenant, historiquement, depuis la création de TechCrunch et d’autres plateformes de blogs (Gigaom, The Next Web), depuis le lancement de conférences telles que Le Web, Web Summit ou Slush, ou encore de la vidéo en ligne, toute information qui émanait des États-Unis est immédiatement disponible partout dans le monde. Plus besoin de voyager en Californie pour trouver de l’inspiration ou avoir accès à l’information  : nous avons en Europe assez de talents – mathématiciens, ingénieurs, développeurs – pour créer autant de projets qu’ailleurs. Il y a aussi beaucoup de capital disponible dans les grandes métropoles, ainsi que des entrepreneurs, investisseurs, collaborateurs expérimentés à présent pour faire aussi bien qu’ailleurs.
Le vrai problème est que nous manquons d’ambition. Les entrepreneurs européens ont tendance à créer un produit pour un marché local (le plus grand marché européen est l’Allemagne, avec moins de 90 millions d’habitants), avant d’envisager un marché voisin et ensuite, peut-être, les États-Unis … Les Américains partent d’un projet pour 330 millions d’habitants, et regardent ensuite le reste du monde. Pour répondre à votre question, il y a en France énormément de solutions pour se financer  : pléthore d’incubateurs (sans doute trop, d’ailleurs), pléthore de business angels (malheureusement peu sophistiqués, qui s’emballent pour des solutions qui cherchent encore un problème …), mais aussi beaucoup de fonds de capital-risque, Bpifrance et ses prêts, etc. Ce n’est donc pas le capital qui manque  : c’est plutôt la qualité des projets qui est en défaut, noyée dans le mythe que n’importe quelle idée va être financée et a un potentiel mondial. Il faudrait moins de projets, mais de meilleure qualité, et avec une ambition démesurée.

Quels sont les atouts des entrepreneurs français pour faire émerger les géants de demain ?[modifier]

Tout le monde le dit, les Français ont une formation scientifique hors pair qui devrait leur donner un avantage énorme pour être compétitifs à un niveau mondial. Mais ils évoluent pour la plupart en s’isolant de ce qui se passe dans le reste du monde. Peu voyagent pour constater l’énergie et la motivation énorme des entrepreneurs indiens ou chinois par exemple. Comme le souligne Kai-Fu Lee, les entrepreneurs chinois travaillant en 9-9-6 (9 heures-21 heures, six jours sur sept) se font battre facilement par les 9-9-7. Avec nos trente-cinq heures, nous ne sommes pas du tout au diapason du monde.
Les aides (crédit d’impôt recherche, jeune entreprise innovante), les prêts de Bpifrance sont des atouts incroyables pour payer beaucoup moins de charges qu’ailleurs. En outre, nous pouvons faire la même chose avec probablement un tiers du capital nécessaire en Californie  : nos salaires sont plus bas, nous n’avons pas besoin de payer des infrastructures folles avec des restaurants d’entreprise gratuits par exemple pour avoir une meilleure fidélité des ingénieurs.
En outre, même si c’est une complication énorme, nous savons a priori travailler plus facilement avec des cultures diverses, et prendre en compte les différences entre les pays européens. Nous devrions à ce titre être capables de nous déployer à l’international beaucoup plus rapidement que nos amis américains ou chinois.
Enfin, un autre problème est lié au capital développement. Nous avons très peu de méga-fonds en Europe (Atomico, EQT Ventures, Accel, etc.) avec plus de 500 millions d’euros sous gestion. Or, cet argent est nécessaire aujourd’hui pour développer des géants mondiaux et participer à des tours de table de plus de 100 millions de dollars. À l’extrême, nous sommes totalement ridicules face aux capacités de SoftBank et de son Vision Fund de plus de 98 milliards de dollars. Ce qui veut dire que tôt ou tard, dans le cadre de notre développement, nos sociétés européennes passeront sous pavillon étranger américain ou asiatique.
À l’inverse, quels sont les freins de la France en terme de financement des entreprises de croissance, mais aussi en termes de fiscalité, de procédures ou de réglementation ?
Comme disait un jour mon professeur de golf  : «  Tout est dans la tête.  » Si nous voulions vraiment être compétitifs, nous élaborerions une fiscalité adaptée à nos entreprises. Un rapport du cabinet McKinsey en 2015 évaluait la contribution du digital dans les pays de l’OCDE à 12 % en moyenne. Le Royaume-Uni était en tête à plus de 17 %. Et la France dans le fond du peloton, à moins de 8 %. Le digital est le plus grand moteur de croissance de l’économie mondiale. Freiner cette croissance est stupide. Certes, le président Macron a fait un pas avec sa flat tax de 30  % (+ 4  % de contributions) … Mais ceux qui savent se font domicilier en Belgique, par exemple, où la plus-value est taxée à 0  %. C’est complètement idiot de laisser partir des gens qui créent de l’emploi. Il faudrait vraiment utiliser cette idée anglaise de ne taxer les plus- values qu’à partir d’un plafond de 10 millions d’euros par exemple. Ainsi tout le monde aurait envie de créer de la valeur ajoutée, et de ne payer des impôts qu’à partir du moment où le surplus est évident.
Pour le reste, je suis assez social-libéral  : peu de réglementation, sauf en ce qui concerne les biens publics, et partage au-delà d’un seuil, car c’est le devoir de chacun.
Vous observez dans le monde entier des entreprises à la croissance vertigineuse. Quels sont les indicateurs clés qui vous permettent de les identifier avant qu’elles ne décollent ?
Chez Expon Capital, nous appliquons deux grilles de lecture successives pour chaque investissement. La première grille est une synthèse des critères habituels chez les capitaux-risqueurs. J’en ai fait la synthèse en douze points :
1.trois en marketing :
1.taille et croissance du marché adressable, problème identifié, clients ciblés ;
2.produit ou service pour résoudre ce problème, idéalement avec un facteur différenciant de × 10 ;
3.concurrence et par conséquent avantage concurrentiel.
2.trois en finances :
1.construction de la marge unitaire ;
2.projections de cash-flow et analyse de sensibilité ;
3.analyse de risques et atténuation de ceux-ci ;
3.trois en opérations :
1.équipe pour exécuter ;
2.stratégie d’entrée sur le marché ;
3.technologie et processus innovants.
4.trois sur l’opportunité d’investissement :
1.liste de tout ce qui a été fait à ce jour (preuve du concept) ;
2.proposition d’investissement (instrument, valorisation, termes, etc.) ;
3.pourquoi maintenant.
La seconde grille est celle liée aux entreprises à croissance exponentielle dont j’ai parlé ci-dessus, inspirée des travaux de Salim Ismail dans son livre, et dont nous ne communiquons pas les détails.
* * *
Pierre Nougué (@pnougue), co-fondateur d’Ecosys Group
«  Une nouvelle génération d’intelligence artificielle doit émerger, plus éthique, plus explicable, plus certifiable. »
En fondant Ecosys Group, vous avez créé les conditions d’émergence d’écosystèmes d’innovation et de croissance de vos grands clients qui s’appuient notamment sur des start-up et PME innovantes. Quelles sont les caractéristiques de ces écosystèmes ?
Tout vient d’une réflexion sur les sciences du vivant. Pour caractériser les écosystèmes d’innovation et de croissance appliqués aux entreprises, nous sommes partis du fondement écologique d’un écosystème qui, selon Wikipédia, est d’être «  un ensemble formé par une communauté d’êtres vivants ». Forts de ce postulat, nous avons dégagé trois notions caractéristiques des écosystèmes d’innovation et de croissance appliqués aux entreprises : ils sont vivants, multiples et puissants.
Les écosystèmes sont vivants, ils bougent, ils sont non statiques, ils se transforment. À l’intérieur d’un écosystème écologique, au sens biomimétique du terme, l’humain n’est qu’une partie du vivant. Bien comprendre cette notion, c’est appréhender d’une toute autre manière les systèmes d’information qui relient les humains avec le reste des autres systèmes vivants qui composent la planète – l’eau, l’air, le vent, les forêts … Il nous a fallu développer des méthodologies, des approches scientifiques et des technologies qui permettent d’appréhender le vivant. Et nous sommes loin d’être arrivés au bout du chemin !
Ensuite, les écosystèmes sont multiples par essence. Il s’agit d’un ensemble d’associations, de communautés qui se forment et se déforment, s’enrichissent, se nourrissent, se développent, et peuvent être appréhendées via de multiples thématiques (sectorielles, actorielles, géographiques, technologiques, fonctionnelles, etc.). Les combinaisons sont infinies, comme le vivant. Il nous faut accepter par essence ce caractère multiple.
Enfin, les écosystèmes sont puissants parce que, sachant qu’ils se connectent et interagissent de manière permanente, en les étudiant sous une forme scientifique on découvre le quantique, à savoir l’infiniment grand, lié à l’infiniment petit.
La capacité à repenser les systèmes informatiques, les systèmes décisionnels sous cet angle, est clé.
Les dirigeants que vous rencontrez, certains membres de Comex, sont confrontés à de forts enj eux de transformation des entreprises qu’ils dirigent. Comment les aidez-vous à s’adapter, voire à se préparer à rivaliser ou à être en coopétition avec les Gafa, Natu et autres BATX ?
L’un de nos savoir-faire métier, c’est la conception et la production pour nos clients de solutions/plateformes décisionnelles en environnement complexe. Mais il ne s’agit là que de moyens. Notre objectif central est d’améliorer la Valeur, la Volumétrie et la Vitesse des décisions prises par les Comex ou pour toute entité qui a besoin de prendre des décisions. Ces trois V – principes du big data – sont toujours au centre de nos réflexions et de nos actions.
Nous coopérons avec les Gafa, Natu et BATX, car nous visons les synapses et les interopérabilités des architectures développées par les grands de la donnée pour les connecter avec de très nombreuses autres solutions ou interfaces. Un système vivant évoluant en permanence, l’agilité des grands groupes internationaux ne leur permet pas de tout couvrir, quelle que soit la puissance développée. Notre stratégie est de nous appuyer sur les grands, de travailler avec eux, mais aussi avec des ETI et des PME, et d’offrir en permanence des possibilités de connexions et d’interactions qui permettent de renforcer la performance de nos trois V.
Comme le système est dynamique, il ne peut pas être exhaustif. Il y a donc de la place pour un nombre incroyable de synapses, de nouvelles applications, de nouvelles interfaces.
Une nouvelle génération d’intelligence artificielle doit émerger, qui devienne progressivement plus éthique, plus explicable, plus certifiable. Les outils, les solutions décisionnelles que nous utilisons pour mieux gérer un pays, une entreprise, des communautés, doivent partir d’un fondement qui est celui du sens. Qu’est-ce que nous faisons  ? Pourquoi le faisons-nous  ? Pour qui le faisons-nous  ? Quels impacts sur la valeur, la volumétrie et la vitesse de nos prises de décisions ?
Ecosys est né à partir de cette vision organique et systémique. La création des synapses et l’interaction des communautés cassent les silos traditionnels et les positions de monopoles, offrant à de nouveaux entrants la possibilité de remporter des marchés. Tous ces nouveaux entrants travaillent dans une vision d’ensemble à la fois organique et systémique. C’est le cas de toute une série de nouveaux éditeurs, comme ROK Solution qui a été conçu autour de cette vision, mais aussi sur la même base de pensée pour les Linkurious, Toucan Toco, Proxem, OpenDataSoft, Earthcube … Ils se développent souvent plus vite que ceux qui se limitent à une vision plus réduite, par exemple verticale ou pyramidale. Nous co-construisons ainsi avec nos clients des passerelles, des synapses, en réfléchissant avec eux à la valeur, la volumétrie et la vitesse. La question clé étant celle du sens de ce que l’on fait.
La France (ou l’Europe) vous semble-t-elle suffisamment armée pour développer l’attractivité sur son territoire et faire émerger les futurs géants du monde numérique dans lequel nous vivons désormais ?
La réflexion ne porte pas simplement sur la vitesse et la volumétrie, mais aussi et surtout sur la valeur des données. L’Europe a un pan entier à faire valoir au niveau du sens et de l’éthique. La capacité à expliquer et à certifier pourrait être l’une des forces clés de l’Europe. Mieux vaut parfois faire les choses lentement et bien, plutôt qu’aller vite sans s’apercevoir des conséquences. Les leaders industriels européens doivent incarner cette nouvelle approche, mettant à contribution également les académies des sciences et des sciences humaines, les philosophes.
L’Europe a une énorme responsabilité. Est-elle en retard d’une réforme ou d’une révolution ? Dans tous les cas, elle doit être en avance d’une vision, d’un idéal  : celui de chercher à créer chaque jour une société plus inspirante, plus inclusive et plus durable. Car dans une société inspirante, les gens ont moins peur les uns des autres, ils sont davantage en confiance, et donc plus ouverts et plus dynamiques. Dans une société inclusive, le modèle s’efforce de prendre soin de 66 millions de Français, de 450 millions d’Européens et de près de 8 milliards d’êtres humains. Enfin, dans une société durable, l’ambition est de gérer des équilibres sociaux, économiques et environnementaux beaucoup plus vertueux pour le bien commun de tous. Ces trois caractéristiques de la société que nous voulons bâtir en Europe sont des marqueurs importants de nos points de différence avec les modèles chinois, russes ou encore américains. Il faut qu’il en soit de même pour l’intelligence artificielle d’origine européenne.
À défaut d’avoir déjà les bons algorithmes, il nous faut la détermination et la vision. Nos algorithmes seront la conséquence de nos valeurs. Nous avons certainement perdu les premières batailles de l’intelligence artificielle faible, j’espère que nous gagnerons celle de l’intelligence artificielle éthique, explicable et certifiable au service des humains et non l’inverse.
L’intelligence artificielle, la donnée, les sciences du vivant, font apparaître un futur dans lequel l’information circule de manière pléthorique, mettant les décideurs face à des difficultés pour capter l’information pertinente et de qualité. Quelles solutions technologiques vous permettent d’aider vos clients à garder le cap ?
Nous abordons l’intelligence artificielle d’abord par les réseaux, les corrélations, les ontologies. On explique à nos clients qu’avant de faire du deep learning qui calcule des milliards de données, il faut souvent commencer par la value data. Et le micro n’empêche pas le macro. Bien au contraire, l’un se renforce de l’autre. Regarder le micro, c’est regarder la traçabilité, l’explicabilité de ce qu’on fait, la raison pour laquelle on le fait, et cela pose souvent la question du sens. Les technologies qui vont se développer permettront d’expliquer, de certifier, de rendre compte – tout le contraire d’une boîte noire sans visibilité, sans personne responsable. Nous travaillons d’abord sur les architectures décisionnelles, sur la responsabilité de ces architectures, sur les ontologies, sur les modèles conceptuels de données, et ensuite nous poussons sur une dimension plus importante.
On peut faire une analogie avec le jeu vidéo, où les Français notamment ont d’excellents résultats. Pour réussir dans ce secteur, il faut pouvoir produire 24 images par seconde, décrire et expliquer chaque sous-partie avec une multitude de précisions et détails. Comme dans les neurosciences et la biologie, il faut être capable de voir l’infiniment petit, de l’expliquer et de le comprendre. Si nous détruisons tout sans être capables de nous rendre compte des phénomènes en cascade, nous ne serons pas à la hauteur de nos responsabilités. Garder le cap, c’est savoir ce qui fait sens, avant de savoir ce qui fait technologie. C’est la raison pour laquelle nous sommes obligés de passer par les sciences du vivant, la biologie, l’écologie, la climatologie. Passer par cette notion quantique du vivant nous aide à comprendre et anticiper nos systèmes de demain, systèmes de défense, systèmes de cybersécurité.
Dans un monde devenu totalement digitalisé ou en passe de l’être, quels indicateurs vous permettent-ils de mesurer la maturité du Comex d’une entreprise à tirer profit du digital  ? Comment concevriez-vous le phygital, ou meilleur du monde physique et numérique ?
La question des indicateurs de maturité des Comex face au digital est directement liée à leur capacité à comprendre et appréhender à moyen terme les conséquences de la quatrième révolution industrielle décrite en 2017 par les spécialistes de Davos. Cette quatrième révolution industrielle, c’est la fusion du biologique, du physique et du numérique  : une révolution qui va changer tous nos repères traditionnels, un changement de paradigme total. Qui nous oblige en outre à repenser l’ensemble de nos indicateurs et nos valeurs de biens communs, en cherchant ce qui fait convergence plutôt que ce qui fait divergence. La notion d’hyper-humanisme apparaît aux côtés des autres chemins proposés, transhumanisme ou libertarisme. L’hyper-humanisme, c’est la prise de conscience de nos humanités communes dans un monde en totale mutation.
On ne peut pas faire de transformation digitale sans se poser la question des transformations humaines en cours et des risques associés. Les indicateurs de bien- être humain et d’épanouissement au travail deviennent essentiels. Ce sont aussi les indicateurs qui touchent le sens qui apparaissent dans tous les sujets d’économie durable. Ils mobilisent les directions des ressources humaines mais aussi les Comex, les directions de la stratégie, de l’innovation et de la transformation. C’est ainsi que l’on a vu apparaître dans les entreprises les politiques de CSR (corporate social responsability) ainsi que les labélisations de toutes natures dont les B Corp. Danone est l’une des premières multinationales à avoir candidaté pour cette certification B Corp. C’est un label de confiance  : la promesse qu’une entreprise opère en respectant des standards rigoureux de performance sociale et environnementale, de transparence et de responsabilité.
Tout ceci est lié à un changement de paradigme et à une révolution puissante autour du sens. Cette révolution se retrouve dans l’hyper-humanisme. Prendre conscience que nous sommes près de 8 milliards et bientôt 10 sur cette Terre. Que nous devons repenser la répartition de nos richesses et nous concentrer beaucoup plus sur ce qui nous unit plutôt que sur ce qui nous désunit. C’est parce que nous sommes aujourd’hui dotés d’outils d’information et de communication planétaires, que nous disposons grâce à la révolution digitale notamment d’une vision plus holistique du bien commun qu’est la Terre.
Il y a certes encore beaucoup de chemin à faire pour que nos consciences collectives évoluent, mais les faits le démontrent  : à travers les siècles nous nous améliorons. Les faits, corroborés par les données issues du digital, nous amènent à revoir nos façons de penser et c’est une excellente chose. Pour l’avènement d’un monde plus humain. Nous l’espérons tous !
Indicateurs et mesure de la maturité numérique associée

Stratégie[modifier]

Plan stratégique[modifier]

SP1. Construction du plan stratégique de l’organisation par le top management
Cet indicateur mesure la qualité des éléments permettant de guider l’organisation dans la définition de sa stratégie, qui passe par la prise en compte de la considération numérique.
Connaissance du besoin de stratégie digitale par le management. Les activités digitales sont considérées a minima comme tactiques, le plus souvent dans un mode défensif en réponse à la concurrence identifiée.
La stratégie digitale à trois ans (cible, budgets, roadmap , organisation, etc.) est définie et partagée avec l’ensemble des directions fonctionnelles + respect du cadre défini dans les décisions de lancement de projets digitaux.
La stratégie digitale à trois ans, qui est une composante essentielle intégrée dans la stratégie de l’organisation, est connue par l’ensemble du personnel. Elle est discutée en comité de direction de l’entreprise pour ajustement tous les trois mois.
Le management est capable de surveiller le processus d’élaboration de la stratégie digitale à trois ans et de prendre des décisions se basant sur lui.
La stratégie digitale à trois ans est définie de manière collaborative avec intégration de réflexions issues des collaborateurs, de partenaires extérieurs et de consultants.
SP2. Contribution au plan stratégique par le middle management et les remontées terrain
Cet indicateur mesure la qualité des éléments issus du management intermédiaire et de la base permettant à l’organisation d’affiner ses orientations dans la définition de sa stratégie, qui passe par la prise en compte de la considération numérique.
Le management intermédiaire et la base ont la possibilité de remonter des idées pour la stratégie numérique de l’organisation.
Idem + le top management sollicite le middle management pour élaborer sa stratégie digitale à trois ans (cible, budgets, roadmap , organisation, etc.)
La stratégie digitale à trois ans peut être alimentée via les outils de l’organisation mis à disposition (réseau social d’entreprise, intranet) par l’ensemble de ses collaborateurs.
Une interaction entre l’ensemble des collaborateurs est proposée pour penser plus largement de façon transverse.
Des événements out of the box et des séminaires spécifiques pour la stratégie digitale de l’organisation sont réalisés avec des comptes rendus qui remontent au top management. Des personnes extérieures (consultants, clients, partenaires, autres) peuvent être invitées pour brasser de nouvelles idées créatrices de valeur.
SP3. Programme de rachats/participations, de relations avec les start-up et les Gafa
Toute organisation a intérêt à coopérer avec d’autres acteurs (start-up, Gafa) pour pouvoir adresser des services plus performants et toucher des ensembles de niches importantes pour son développement ou sa survie.
Existence d’un programme et/ou d’une structure dédiée dans l’organisation pour les relations avec l’écosystème de l’organisation (pour faire des PoC et financer des projets qui pourraient présenter des relais de croissance intéressants, une amélioration de l’offre existante ou encore une simplification des procédures ou du parcours/expérience client).
Idem + un budget est alloué pour des investissements dans des start-up et des partenariats. Une veille sur les entreprises qui présentent un intérêt de coopération est effectuée.
Des services développés par les start-up sont intégrés dans l’offre de l’organisation. Au moins x % du chiffre d’affaires est consacré aux rachats et participations dans les start-up et PME innovantes :
  • x = 1 % pour les secteurs S4, S11, S13, S16, S18 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 0,8 % pour les secteurs S3, S5, S9, S10, S12, S14, S15, S17 ;
  • x = 0,5 % pour les secteurs S1, S2, S6, S7, S8.
Un mix entre recherche et développement interne et acquisitions est recherché dans une logique opportuniste d’amélioration du time to market. Une stratégie de coopération avec les start-up est instaurée au plus haut niveau. Elle fait l’objet d’une procédure d’examen et de mise à jour du portefeuille d’entreprises suivies, laquelle est a minima bimensuelle.
Au moins x % du chiffre d’affaires est consacré aux rachats et participations dans les start-up. Les entreprises rachetées font l’objet de synergies fortes ou de filialisation en moins de six mois avec l’organisation qui les rachète :
  • x = 3 % pour les secteurs S4, S11, S13, S16, S18 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 2 % pour les secteurs S3, S5, S9, S10, S12, S14, S15, S17 ;
  • x = 1,5 % pour les secteurs S1, S2, S6, S7, S8.

Veille[modifier]

SV1. Processus de veille et d’intelligence économique
L’intérêt d’un processus de veille et d’intelligence économique est de pouvoir détecter plus rapidement des signaux faibles pouvant avoir un impact sur l’activité de l’organisation pour scruter ce que des concurrents potentiels proposent et anticiper des besoins en liaison avec le marketing et l’élaboration des offres.
Veille manuelle assurée par quelques collaborateurs identifiés.
Veille automatisée au moyen d’outils embryonnaires (par exemple Google Alerts, Twitter) avec des mots-clés sur les thématiques de veille.
Veille collaborative mobilisant un réseau de collaborateurs (sur l’intranet et le réseau social d’entreprise le cas échéant), reportings hebdomadaires diffusés aux directions fonctionnelles intéressées (stratégie, marketing) et quelques acteurs opérationnels clés.
Veille proactive s’appuyant sur une communauté de veilleurs internes et externes à l’entreprise et réalisation de newsletters pour des décideurs identifiés dans l’entreprise. Utilisation d’outils d’automatisation de sa veille (par exemple, Digimind, Ami Software, Sindup) pour la production de newsletters, la recherche multilingue, etc.
Veille proactive avec diffusion automatique d’alertes aux collaborateurs concernés et suivi des actions qui en découlent. Utilisation d’un outil de big data prédictif pour capter des tendances.
SV2. Organisation de l’e-réputation et prévention
La gestion de l’e-réputation d’une entreprise du secteur de l’organisation est sensible, car tout bad buzz* peut altérer durablement l’image de l’institution. De nombreuses informations peuvent être communiquées sur les réseaux sociaux et sont relatives à l’entreprise, ses cadres dirigeants et ses collaborateurs. La communication n’étant plus descendante, elle est difficile à maîtriser et des bad buzz qui affectent l’image de marque de l’organisation sont possibles (par exemple, Volkswagen et le trucage des niveaux de pollution de ses voitures diesel). Du fait de la liberté de parole des parties prenantes (tout en tombant sous le coup de la loi dans le cas de dénigrement ou de diffamation par exemple), il est important de développer une communauté de personnes capables d’agir spontanément pour défendre les intérêts de l’organisation et jouant le rôle d’ambassadeurs de la marque.
Surveillance manuelle d’espaces communautaires sélectionnés.
Mise en place d’un dispositif d’écoute d’Internet et des réseaux sociaux (notamment les 5 majeurs : Facebook, Twitter, LinkedIn, YouTube et Instagram), automatisé, impliquant une ressource interne clairement identifiée.
Intervention au nom de l’entreprise lorsque nécessaire par le community manager (et son équipe) sur des conversations et des thématiques ciblées remontées par le processus de veille.
Définition d’une stratégie de gestion de l’e-réputation, impliquant l’ensemble des directions de l’entreprise. Des outils permettent de mesurer la tonalité des messages postés (positif, négatif, neutre) citant la marque et ses produits, notamment de type Hootsuite, par rapport aux conversations faites sur les réseaux sociaux pour réagir le cas échéant. Des relais opérationnels sont nommés.
Intervention rapide de la communauté (interne et externe) et sans directive pour protéger la réputation de l’entreprise ou de la marque.
SV3. Veille sur les comportements et les usages
Cet indicateur permet de mesurer la capacité de l’entreprise à identifier les nouveaux comportements et usages des consommateurs de façon à faire évoluer son offre, son marketing, sa politique et ses axes stratégiques.
Participation de quelques collaborateurs à une veille sur les nouveaux comportements et usages au travers de lectures (études, livres, publications diverses), d’informations glanées sur le web et de conférences.
Partage des nouveaux comportements identifiés au sein d’une communauté de collaborateurs identifiés. Exploitation de sources de veille professionnelles, d’outils d’information sur les entreprises de type Kompass, de revues sur le marketing.
Réalisation d’enquêtes terrain, en propre ou en co-investissement avec des partenaires, chaque année, sur les zones de chalandise ciblées. Lien avec la digital factory (si elle existe).
Réalisation et publication d’études d’impacts des nouveaux comportements sur les produits, les services, la distribution de l’entreprise. Participation à des forums et à des conférences de ses cadres qui représentent l’organisation.
Dispositif de collecte des nouveautés soumises par les clients, la communauté signalant les nouveaux comportements que l’entreprise doit prendre en compte. Utilisation d’un outil de big data prédictif pour capter des signaux faibles afin d’anticiper les nouveaux comportements et les tendances à venir.

Excellence économique[modifier]

SE1. Part des investissements réalisés dans le numérique
Cet indicateur mesure le poids que représentent les dépenses consacrées au numérique (matériel, logiciels, infrastructure télécoms et frais associés, formations spécifiques, etc.) tant en coût initial qu’en exploitation par rapport à l’ensemble des dépenses d’investissement de l’entreprise et en intégrant à la fois les immobilisations et les charges. Les dépenses en investissement couvrent aussi le marketing, les ventes, la relation client (après-vente). Elles peuvent contribuer à l’apport de clientèle tant sur les canaux traditionnels que sur les canaux numériques. Aussi, dans les dépenses du numérique sont à inclure les outils et les formations spécifiques aux outils numériques utilisés par les autres fonctions de l’entreprise, comme le marketing et le commercial. En outre est prise en compte la dépense totale des investissements ramenée au chiffre d’affaires de l’organisation. Selon les secteurs, la propension à investir dans le numérique sera différente selon la chaîne de valeur et la nature des autres investissements, qui peuvent être importants dans le domaine industriel ou de la défense par exemple, mais aussi de la capacité à investir par rapport au chiffre d’affaires réalisé.
Ratio des investissements dans le numérique sur l’ensemble des investissements supérieur à y % + investissements totaux supérieurs à x % du chiffre d’affaires annuel :
  • x = 8 % pour les secteurs S4, S13, S16 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 6 % pour les secteurs S1, S5, S7, S8, S9, S10, S11, S12, S14, S15, S17, S18 ;
  • x = 4 % pour les secteurs S2, S3, S6 ;
  • y = 60 % pour les secteurs S1, S4, S5, S8, S10, S12, S13, S14, S15, S16, S17, S18  ;
  • y = 30 % pour les secteurs S2, S3, S9 ;
  • y = 20 % pour les secteurs S6, S7, S11.
Idem pour y . Investissements totaux supérieurs à x % du chiffre d’affaires annuel :
  • x = 11 % pour les secteurs S4, S13, S16 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 9 % pour les secteurs S1, S5, S7, S8, S9, S10, S11, S12, S14, S15, S17, S18 ;
  • x = 7 % pour les secteurs S2, S3, S6.
Idem pour y . Investissements totaux supérieurs à x % du chiffre d’affaires annuel :
  • x = 14 % pour les secteurs S4, S13, S16 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 11 % pour les secteurs S1, S5, S7, S8, S9, S10, S11, S12, S14, S15, S17, S18 ;
  • x = 9 % pour les secteurs S2, S3, S6.
Ratio des investissements dans le numérique sur l’ensemble des investissements supérieur à y % + investissements totaux supérieurs à x % du chiffre d’affaires annuel :
  • x = 18 % pour les secteurs S4, S13, S16 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 13 % pour les secteurs S1, S5, S7, S8, S9, S10, S11, S12, S14, S15, S17, S18 ;
  • x = 11 % pour les secteurs S2, S3, S6 ;
  • y = 80 % pour les secteurs S1, S4, S5, S8, S10, S12, S13, S14, S15, S16, S17, S18  ;
  • y = 45 % pour les secteurs S2, S3, S9 ;
  • y = 30 % pour les secteurs S6, S7, S11.
Idem pour y . Investissements totaux supérieurs à x % du chiffre d’affaires annuel :
  • x = 21 % pour les secteurs S4, S13, S16 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 16 % pour les secteurs S1, S5, S7, S8, S9, S10, S11, S12, S14, S15, S17, S18 ;
  • x = 13 % pour les secteurs S2, S3, S6.
SE2. Chiffre d’affaires réalisé sur les canaux numériques
Plus l’entreprise sera mature dans le digital ou sera un nouvel entrant de type start- up, plus le pourcentage de ses ventes réalisées au travers des canaux numériques sera important. Ces chiffres sont donnés pour 2019. En effet, du fait de la numérisation croissante des organisations, les exigences proposées seront plus faciles à atteindre au fil des ans. Ainsi, une organisation qui ne voit pas sa part de chiffre d’affaires réalisée au travers des canaux numériques progresser peut reculer en maturité relative par rapport à ses concurrents.
De 0,1 % à x % du chiffre d’affaires est réalisé via des canaux numériques :
  • x = 10 % pour les secteurs S5, S12, S13, S15, S16, S17 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 3 % pour les secteurs S9, S10, S11, S14, S18 ;
  • x = 1 % pour les secteurs S2, S3, S4, S6.
Plus de x % du chiffre d’affaires est réalisé via des canaux numériques : valeur de x idem qu’au niveau 1.
Plus de x % du chiffre d’affaires est réalisé via des canaux numériques :
  • x = 20 % pour les secteurs S5, S12, S13, S15, S16, S17 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 5 % pour les secteurs S9, S10, S11, S14, S18 ;
  • x = 3 % pour les secteurs S2, S3, S4, S6.
Plus de x % du chiffre d’affaires est réalisé via des canaux numériques :
  • x = 60 % pour les secteurs S5, S12, S13, S15, S16, S17 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 30 % pour les secteurs S9, S10, S11, S14, S18 ;
  • x = 10 % pour les secteurs S2, S3, S4, S6.
Plus de x % du chiffre d’affaires est réalisé via des canaux numériques :
  • x = 90 % pour les secteurs S5, S12, S13, S15, S16, S17 (voir Tableau 3.1) ;
  • x = 50 % pour les secteurs S9, S10, S11, S14, S18 ;
  • x = 30 % pour les secteurs S2, S3, S4, S6.
SE3. Chiffre d’affaires réalisé avec des monnaies virtuelles et crypto- monnaies
Les monnaies virtuelles et les monnaies locales, en particulier les crypto-monnaies dont la plupart sont basées sur la technologie blockchain, vont avoir des usages grandissants pour le paiement et le transfert d’argent entre les personnes.
Il s’agit d’évaluer le pourcentage du chiffre d’affaires réalisé par l’organisation avec de la monnaie virtuelle afin d’estimer sa capacité à générer un chiffre d’affaires sur les mondes parallèles (de type Bitcoin, Ethereum) et d’ainsi avoir des relais de croissance pour capter une clientèle demandeuse.
Utilisation d’au moins une crypto-monnaie par l’organisation.
Utilisation de plusieurs crypto-monnaies par l’organisation et chiffre d’affaires supérieur à 0,05 %.
Chiffre d’affaires supérieur à 0,3 % pour l’ensemble des secteurs, sauf S2, S3, S6, S11, S14, S18 où il est supérieur à 0,1 %.
Chiffre d’affaires supérieur à 0,8 % pour l’ensemble des secteurs, sauf S2, S3, S6, S11, S14, S18 où il est supérieur à 0,3 %.
Chiffre d’affaires supérieur à 2 % pour l’ensemble des secteurs, sauf S2, S3, S6, S11, S14, S18 où il est supérieur à 0,6 %.
SE4. Part des nouveaux services non-cœur de métier et relais de croissance
La diversification de l’offre et le développement de nouveaux domaines d’activité stratégiques peuvent participer à la dévulnérabilisation de l’organisation, à condition que ces relais de croissance soient stratégiques et rentables sur le long terme. Aussi, un mix entre services traditionnels et nouveaux services peut-il être cherché.
Cet indicateur vise à mesurer la part des nouveaux services dans le chiffre d’affaires de l’organisation et la dynamique de croissance associée.
Outre la part des nouveaux services dans le total du chiffre d’affaires de l’organisation, la progression du chiffre d’affaires des nouveaux services d’une année sur l’autre est prise en compte.
Une structure identifiée (au niveau stratégie et marketing) travaille sur les nouveaux business models pour l’organisation et les caractéristiques de son secteur d’activité : facturation à l’usage, à la demande, abonnement à de nouveaux services, évolution vers une plateforme, impact de la réglementation pour le développement de nouveaux services, monnaie locale, etc.).
Le chiffre d’affaires réalisé par les nouveaux services est d’au moins 0,5 %. Il progresse d’au moins 30 % par rapport à l’année précédente.
Le chiffre d’affaires réalisé par les nouveaux services est d’au moins 1 %. Il progresse d’au moins 20 % par rapport à l’année précédente.
Le chiffre d’affaires réalisé par les nouveaux services est d’au moins 3 %. Il progresse d’au moins 15 % par rapport à l’année précédente.
Le chiffre d’affaires réalisé par les nouveaux services est d’au moins 8 %. Il progresse d’au moins 8 % par rapport à l’année précédente.
SE5. Part de marché des canaux numériques
Cet indicateur mesure l’activité de vente et de relations client (et fournisseurs, partenaires) réalisée au travers des canaux digitaux. Les start-up auront tendance à réaliser une grande partie de leur chiffre d’affaires sur les canaux numériques alors que les acteurs traditionnels qui disposent de magasins auront des résultats plus nuancés, avec néanmoins une complémentarité nécessaire des canaux.
Cet indicateur est la moyenne arithmétique de 5 éléments, ce qui permet de déterminer la part de marché des canaux numériques :
  • part de chiffre d’affaires (valeur des ventes réalisées via les canaux numériques rapportée à l’ensemble du chiffre d’affaires de l’organisation) ;
  • part de contrats clients en volume (nombre de contrats réalisés via les canaux numériques rapporté au nombre total de contrats signés avec les clients de l’organisation) ;
  • part de contrats clients en valeur (valeur des contrats réalisés via les canaux numériques rapportée à la valeur totale des contrats reçus par l’organisation) ;
  • part de contrats partenaires et fournisseurs en volume (nombre de contrats réalisés via les canaux numériques rapporté au nombre total de contrats signés avec les partenaires et les fournisseurs de l’organisation) ;
  • part d’actes de gestion de la relation clients (nombre d’actes réalisés via les canaux numériques rapporté au nombre total d’actes de relation clients).
Cet indicateur est applicable partiellement pour certains secteurs, comme S2 (agriculture), S1 (administration) ou S8 (éducation), pour lesquels la partie chiffre d’affaires ne s’applique pas, à l’exception d’entités comme des écoles avec des frais d’inscription qui génèrent un chiffre d’affaires. Dans ce cas, la moyenne porte sur une partie des 5 éléments.
Au moins 30 %.
De 40 à 60 %.
De 60 à 85 %.
De 85 à 98 %.
Plus de 98 %.
SE6. Ratio du coût de distribution sur le chiffre d’affaires
Le coût de distribution via le numérique est, par hypothèse, inférieur à celui du coût de distribution via le canal physique (exemple du livre ou de la presse, d’un produit imprimé via imprimante 3D comparativement au transport d’un produit équivalent fabriqué en usine et ensuite transporté). On raisonne sur l’ensemble des coûts pour l’ensemble des produits et services via le canal numérique comparativement au canal physique. Cet indicateur intègre le coût de la transaction (utilisation des moyens de paiement numériques) pour raisonner sur un coût complet et comparable de transaction.
Une entreprise ayant fortement digitalisé sa distribution a, par hypothèse, un moindre coût de distribution rapporté à son chiffre d’affaires. Cet indicateur est fortement dépendant du secteur industriel et de la nature des produits (certains étant déjà dématérialisés).

Les ratios portent sur les secteurs avec biens physiques transportés.[modifier]

Ratio inférieur à 10 % pour le secteur S9.
Ratio inférieur à 20 % pour les secteurs S3, S5 et S10 pour biens physiques, S11, S18.
Ratio inférieur à 30 % pour les secteurs S2, S6 (hors immobilier).
Ratio inférieur à 7 % pour le secteur S9.
Ratio inférieur à 15 % pour les secteurs S3, S5 et S10 pour biens physiques, S11, S18.
Ratio inférieur à 20 % pour les secteurs S2, S6 (hors immobilier).
Ratio inférieur à 4 % pour le secteur S9.
Ratio inférieur à 10 % pour les secteurs S3, S5 et S10 pour biens physiques, S11, S18.
Ratio inférieur à 13 % pour les secteurs S2, S6 (hors immobilier).
Ratio inférieur à 2 % pour le secteur S9.
Ratio inférieur à 7 % pour les secteurs S3, S5 et S10 pour biens physiques, S11, S18.
Ratio inférieur à 10 % pour les secteurs S2, S6 (hors immobilier).
Ratio inférieur à 1 % pour le secteur S9.
Ratio inférieur à 5 % pour les secteurs S3, S5 et S10 pour biens physiques, S11, S18.
Ratio inférieur à 7 % pour les secteurs S2, S6 (hors immobilier).
SE7. Coût du réseau d’agences ou de sites ramené au chiffre d’affaires
Le coût d’une organisation virtuelle qui ne dispose pas d’agences, de sites ou de magasins est inférieur à celui d’un acteur disposant d’un réseau, lequel doit supporter des coûts de structure. Néanmoins, le fait de disposer d’un maillage territorial et d’avoir un réseau de vendeurs est souvent apprécié par les clients. De plus, un acteur qui se trouve dans une logique phygitale, à la fois physique et en ligne, a une propension à adresser une cible plus large. La question est de mesurer ce coût et le chiffre d’affaires généré, sachant que des retombées dans le monde virtuel existent. Il convient par ailleurs d’avoir la propension à se comparer à d’autres acteurs également dotés de magasins pour voir si sa gestion délivre de meilleurs résultats.
Coût de structure d’agences ou de sites inférieur à 30 % du chiffre d’affaires.
Coût de structure d’agences ou de sites inférieur à 22 % du chiffre d’affaires.
Coût de structure d’agences ou de sites inférieur à 18 % du chiffre d’affaires.
Coût de structure d’agences ou de sites inférieur à 15 % du chiffre d’affaires.
Coût de structure d’agences ou de sites inférieur à 12 % du chiffre d’affaires.

Synthèse des indicateurs selon le type d’organisation[modifier]

Une croix dans une case du tableau signifie que l’indicateur est applicable pour la catégorie d’organisation considérée.

Points clés[modifier]

  • Définissez une stratégie numérique et déclinez-la au sein de l’organisation.
  • Adaptez l’organisation de votre entreprise en vous inspirant des nouveaux modèles.
  • Comprenez les nouvelles règles du jeu et travaillez sur vos fondamentaux pour les adapter au digital.
  • Allouez les investissements nécessaires à la transformation de votre organisation, car contrairement aux idées reçues, le digital coûte cher (et rapporte beaucoup).
  • Mesurez vos progrès dans la transformation digitale de votre organisation selon trois aspects : plan stratégique, veille, excellence économique.
1Voir la série de vidéos du CJD en ligne sur YouTube, Pitch y our digital Story (capacité d’innovation, management, outils et data, stratégie et consulting) aux adresses suivantes  : https://www.youtube.com/watch?v=XnZnMnm_pbg; https://www.youtube.com/watch? v=JOUQfuce9z8  ; https://www.youtube.com/watch?v=SnRIucGiUAw  ; https://www.youtube.com/watch?v=Comr1kB4Qz4  ; https://www.youtube.com/watch? v=7UtAve2Wt2w ; https://www.youtube.com/watch?v=DC7WcKKVv5Y.
2Le plan France Très Haut Débit mobilise au total 20 milliards d’euros d’investissement.
3Voir le site de Singularity University, https://su.org.
4Salim Ismail, Michael S. Malone, Youri van Geest et al., Exp onential Organizations: Why New Organizations A re Ten Times Better, Faster, and Cheap er Than Yours (and What to Do A bout It) , Diversion Books, 2014.
5Terme utilisé pour la première fois en novembre 2013 par Aileen Lee. Voir Aileen Lee, «  Welcome to the Unicorn Club: Learning From Billion-Dollars Startups  », TechCrunch, 2 novembre 2013, https://techcrunch.com.
6Organisation des Nations-Unies, « Sustainable Development Goals », https://www.un.org.
7Ryan Mac, «  Alibaba Claims Title For Largest Global IPO Ever With Extra Share Sales  », Forbes, 22 septembre 2014, https://www.forbes.com.
8Kai-Fu Lee, AI Sup erp owers: China, Silicon Valley , A nd the New World Order, Houghton Mifflin Harcourt, 2018.
9Soit deux lois de Moore.

Chapitre 5[modifier]

Levier  : organisation

Positionnement du levier et objectifs[modifier]

Les structures organisationnelles classiques, adaptées à un monde évoluant lentement et peu personnalisées, ne sont pas appropriées au monde digital  : elles créent des frictions et une rigidité empêchant l’entreprise d’évoluer au rythme rapide du monde digital. La capacité d’une entreprise à opérer dans un monde digital suppose donc l’adoption de structures organisationnelles spécifiques, plus « agiles », avec moins de niveaux hiérarchiques et surtout beaucoup plus réactives. Ces structures nouvelles ont été largement expérimentées par les acteurs d’Internet. Elles ont fait leurs preuves, tant pour des start-up de quelques salariés que pour des multinationales de plusieurs milliers de collaborateurs. Elles ont permis à ces entreprises d’investir des marchés existants (par exemple, la vente à distance), de disrupter des marchés traditionnels (les taxis avec Uber, l’hôtellerie avec Airbnb, la restauration avec Uber Eats par exemple, l’automobile avec Tesla, la vidéo à la demande avec Netflix), de conquérir des territoires (le social coup oning, créé aux États-Unis et aujourd’hui largement répandu en Europe). Elles ont démontré leur efficacité pour faire prospérer une entreprise dans un monde en changement permanent et extrêmement rapide (l’adoption massive du smartphone en quelques années et les usages liés, certains reposant sur la géolocalisation).
Quelles sont les caractéristiques structurelles de ces nouveaux modèles organisationnels  ? Tout d’abord, ils sont pensés pour permettre à l’entreprise d’agir au travers des canaux digitaux  : concevoir, vendre et distribuer ses produits et services, supporter ses clients, recruter ses collaborateurs, interagir avec l’ensemble des parties prenantes de manière extrêmement réactive.
L’entreprise traditionnelle doit donc modifier son organisation et son management en s’inspirant de ces nouveaux modèles. Sa gouvernance doit être adaptée pour tirer pleinement profit du digital. Ses activités digitales doivent agir à leur rythme et en cohérence avec ses activités traditionnelles. Ceci suppose de décloisonner les directions des grandes organisations et de leur donner davantage de porosité et d’ouverture sur l’extérieur, en particulier les écosystèmes d’innovation, l’étape ultime étant l’évolution de la structure vers l’organization as a service en devenant une plateforme, développant des APIs et captant ainsi l’intelligence de la multitude, à l’image de ce que font les Gafa.

Groupements[modifier]

Nous proposons de caractériser l’organisation d’une entreprise engagée sur le digital suivant trois groupements répondant aux questions structurelles de ce type d’entreprises :
  • Gouvernance  : quelles instances animent et pilotent les activités digitales  ? Comment les rôles et responsabilités sont-ils distribués dans l’organisation pour opérer ces activités  ? Une charte d’usage des outils digitaux est-elle définie, partagée, appliquée, évolutive ? Les outils numériques sont-ils effectivement utilisés  ?
  • Management  : l’organisation est-elle collaborative, agile  ? Les managers sont-ils rompus aux techniques de management digitales et collaboratives  ? Comment sont pilotées et internalisées les compétences digitales stratégiques pour l’organisation ?
  • Structures numériques  : des liens avec les écosystèmes innovants et l’organisation sont-ils établis avec les structures et les personnes adéquates  ? Des investissements et des partenariats avec des start-up sont-ils instaurés pour co-développer de nouvelles offres et avoir des relais de croissance ou, mieux, satisfaire clients, administrés, adhérents, etc.  ? L’organisation évolue-t-elle vers une plateforme avec des APIs ouvertes ?
NB  : Les indicateurs p rop osés ne proposent pas d’évaluer la gouvernance digitale en figeant un modèle de gouvernance générique. La culture managériale propre à l’entreprise importe en effet. De même, les caractéristiques inhérentes aux managers, leur parcours de carrière, les responsabilités qui leur sont confiées ne sont pas mesurés. Ces points sont compatibles avec une culture managériale adaptée à un monde digital et sont déjà pris en compte par les modèles d’évaluation des organisations utilisés par les ressources humaines.
Laurence Paganini (@PAGANINI_lauren), directeur général, Kaporal
«  Dans un monde où l’innovation s’accélère, ce qui me tient à cœur c’est de transformer plutôt que de révolutionner et de préparer l’entreprise à l’accueil de la disruption. »
Nous vivons une transformation de société, un nouveau paradigme qui impacte tout, transversalement, sans limites.
Le digital a tout changé et il constitue un défi continu pour notre entreprise. Nous en avons fait une force pour nous transformer et donner un nouvel élan à la marque.

Le digital pour changer notre business model[modifier]

Il y a encore cinq ans, Kaporal distribuait principalement ses produits en B2B, via des distributeurs wholesalers et des commerçants indépendants. Si le développement de nouveaux canaux de distribution était déjà entamé, nous avons apporté en 2013 un point d’inflexion stratégique majeur, à travers sa digitalisation (voir Figures 5.2 et 5.3). Ainsi, les canaux de distribution digitaux (e-commerce et marketplaces) se sont largement développés, pour représenter aujourd’hui plus de 20  % des ventes du groupe. Le site e-commerce www.kaporal.com a beaucoup évolué jusqu’à devenir un flagship digital. Il a enregistré en 2018 une croissance de plus de 18  % par rapport à 2017.
FIGURE 5.2 Cycle de transformation digitale de Kaporal
FIGURE 5.3 Stratégie et cycles de transformation digitale de Kaporal
À cela s’ajoute la digitalisation des canaux de distribution physiques. Kaporal a développé un site e-commerce B2B pour faciliter les réassorts des clients multimarques et a «  profité » du développement de son réseau de magasins pour y mettre en œuvre, dès le début, une stratégie cross-canal (web-to-store, store-to-web, vendeurs assistés via la digitalisation des points de vente, collections capsules ou, plus récemment, ship- from-store). Digitaliser pour mieux innover
Pour Kaporal, le digital est source d’innovation grâce aux partenariats
Kaporal est toujours à l’écoute des dernières innovations digitales et nous n’hésitons pas à nouer des partenariats pour nous accompagner dans cette transformation. Il peut s’agir d’acteurs majeurs, comme Microsoft qui va favoriser l’arrivée de l’intelligence artificielle dans notre groupe, ou plus régulièrement de start-up qui viennent nous voir pour proposer leurs solutions. Réciproquement, nous allons souvent voir les start-up pitcher. C’est un processus continu.
La prise de décision est agile et toute l’équipe est en veille pour l’innovation.
Jeans connectés avec Buzcard, jeans personnalisables avec Jeanuine … la marque co- innove avec de jeunes pousses françaises. Nous avons, par exemple, été la première marque en France à mettre en place à grande échelle le ship-from-store avec OneStock, solution qui donne une vision unifiée des stocks dans les entrepôts et les magasins. Cela a permis de booster de 20 % le chiffre d’affaires incrémental durant les soldes d’hiver 2018 et a eu un retour sur investissement en trois mois en réduisant les invendus et le taux d’indisponibilité des produits sur le site e-commerce.
Le digital pour renforcer le lien avec notre communauté de clients
Il est une source de visibilité et de fidélisation pour la marque
Kaporal a totalement revu sa stratégie de communication, longtemps dirigée vers les médias de masse. Aujourd’hui, 62 % des investissements marketing sont liés au digital pour recruter sur les réseaux sociaux, lieu de prédilection pour toucher notre cible. Nous avons noué 60 partenariats avec des influenceurs en 2018, via Instagram essentiellement, qui est LE réseau social de la mode  : cela permet de faire entrer nos produits dans le quotidien en utilisant l’image avec émotion, comme une preuve et comme une expression de la marque, mais aussi de ses clients à travers les vraies photos postées.
Nous comptons désormais plus de 400 000 abonnés, mais aussi plus de 500 000 «  Klubbers », notre communauté de fidèles qui appartiennent à « Kaporal Le Klub », notre programme relationnel.
En nous appuyant sur l’influence sociale et le média digital, nous avons contribué à faire bouger les lignes de la marque – notamment sur des cibles et marchés de conquête, comme celui des millennials. Le digital nous a permis d’introduire plus de proximité avec le consommateur-internaute, en créant du lien, en s’inscrivant davantage dans la durée afin de fidéliser le consommateur et de bâtir une relation de confiance avec lui.
Le digital nous permet également de diffuser plus largement notre story telling méditerranéen, notre ADN du Sud. Il est devenu essentiel de poursuivre notre combat de marque, de faire bouger les lignes de la mode et du denim et de s’engager sur notre territoire. Nous avons lancé notre première collection made in France baptisée «  Jean de Nîmes », ville qui a donné son nom au denim.

Le digital pour nous développer à l’international[modifier]

D’après L’Express, « les marketplaces (…) représentent aujourd’hui une vente sur deux du e-commerce mondial (…). Les Chinois Taobao, Tmall (tous deux propriétés du groupe Alibaba) et JD.com, les Américains Amazon et eBay … ces cinq géants captent une grande partie du business  ».
Nous avons choisi récemment d’intégrer les grandes marketplaces et de commencer par l’Europe (par exemple Amazon, Zalando, Otto, El Corte Inglés) pour tester des marchés étrangers plus rapidement et en complément de nos filiales.
Les avantages sont nombreux :
  • bénéficier d’un trafic important sur le pays ciblé ;
  • augmenter ainsi notre visibilité sur le Net à l’international ;
  • bénéficier de services et programmes d’assistance pour les clients locaux (service après-vente …).
Nous avons fait appel à certains gestionnaires de flux, par exemple en Allemagne pour centraliser les tâches (diffuser l’information sur les produits et récupérer les commandes) sur une seule interface.
C’est un nouveau métier à intégrer  ; en mode agile, nous apprenons beaucoup afin de pouvoir continuer notre conquête du monde sur d’autres marketplaces, et sur d’autres continents !
Le digital pour transformer l’entreprise et embarquer les collaborateurs
Trois facteurs clés liés à l’humain sont déterminants dans notre réussite.
1.Chez Kaporal, la transformation est « incarnée ».
Le digital et les réseaux sociaux notamment ont transformé la relation entre les individus, les femmes et les hommes dans l’entreprise et nos rapports avec l’écosystème.
J’incarne personnellement – et je le revendique modestement, c’est un fait, c’est comme cela … – la transformation digitale. J’ai toujours eu, depuis très jeune, le goût pour l’innovation, la technologie et les contacts, c’est dans mon ADN. Un de mes engagements est de transmettre et de donner à mon équipe et à toutes les parties prenantes les moyens de comprendre ce numérique.
Par exemple, je gère personnellement mes comptes sur les réseaux sociaux et je prends la parole moi-même. Je me sers de ma posture d’« influenceuse » (par exemple sur LinkedIn où je suis classée depuis trois ans parmi le top 10 des influenceurs en France) pour montrer l’exemple, pour guider, pour informer et sensibiliser sur tous les sujets liés à la transformation digitale. C’est un nouveau mode de communication envers ma communauté de lecteurs, mais aussi et surtout envers mes collaborateurs. J’espère ainsi éveiller leur curiosité avec transparence, authenticité et proximité.
Nous sommes maintenant plus nombreux au comité de direction à faire de même, et cela renforce l’engagement.
J’ai en outre le plaisir de voir que le phénomène se propage aux collaborateurs au sens large, qui peuvent devenir de véritables ambassadeurs de la marque … Il n’est pas rare que je communique directement, notamment le week-end, avec des responsables de magasins ou des collaborateurs qui ont envie de partager de belles expériences … Et cela m’arrive aussi avec des clients Kaporal !
2.Le mode collaboratif et la communication interne en continu auprès des collaborateurs permettent de les embarquer et d’en faire des ambassadeurs de la transformation.
Les millennials (notre entreprise est jeune  !) sont le meilleur atout de l’entreprise pour pousser les frontières et faire tomber les murs. Ainsi, la co-construction, les projets collaboratifs, les remontées terrain font partie intégrante de l’aventure digitale de l’entreprise, tout comme la possibilité du télétravail.
Les métiers changent fondamentalement et il est primordial de former, acculturer tous nos collaborateurs aux nouveaux outils pour booster leur niveau d’employabilité.
3.La culture du «  premier jour  »  : savoir rester agile et avoir un esprit «  startupper  ». Cela permet de rester dynamique malgré des moyens limités au regard de certains concurrents. La culture test and learn, très présente chez Kaporal, permet à la marque de saisir chaque opportunité tout en maîtrisant les risques, au service de la satisfaction de ses clients.

En conclusion[modifier]

Le numérique est un formidable levier de croissance pour l’entreprise et de transformation pour les hommes et les femmes qui la composent. Dans un monde où l’innovation s’accélère, ce qui me tient à cœur c’est de transformer plutôt que de révolutionner et de préparer l’entreprise à l’accueil de la disruption.
* * *
Bertrand Duperrin (@bduperrin), head of employee and client experience, Emakina
«  Les métiers se transforment radicalement parce que la manière dont les entreprises créent de la valeur pour le client change. Et si elles ne prennent pas le virage, c’est là qu’une brèche s’ouvre qui permet l’arrivée de nouveaux acteurs. »
Comment voyez-vous la transformation digitale des grandes entreprises et des ETI, l’évolution de l’organisation et des process ?
La transformation digitale  ? Elle est tout sauf digitale  ! Toutes les entreprises qui ont commencé par la technologie ont vu le mur de près dans le meilleur des cas, mais le plus souvent elles l’ont percuté !
Le digital et la technologie apportent deux choses à une entreprise  : aller plus vite et à plus grande échelle. Et que se passe-t-il quand les process et l’organisation sont dysfonctionnels  ? L’entreprise dysfonctionne plus vite et à plus grande échelle  ! Elle produit plus d’erreurs, d’approximations et d’échecs qu’elle en générait auparavant.
La transformation digitale n’est donc pas une logique d’accélération d’un modèle dont on sait qu’il est en totale déconnexion avec le monde dans lequel on vit aujourd’hui. C’est une logique de transformation. La technologie viendra toujours en appui, mais ne sera jamais l’objectif.
Quid de l’évolution des business models et des modes opératoires dans le processus de transformation digitale ? Il s’agit d’abord de l’évolution du business model. Jeff Immelt, ancien CEO de General Electric, le résume ainsi  : «  Vous vous couchez comme une entreprise industrielle et vous vous réveillez en entreprise de logiciel et de données.  » Le résultat est là  : avant, un des métiers de General Electric – là où l’entreprise gagnait de l’argent – était la vente de moteurs à des fabricants d’avions. Aujourd’hui, la valeur vient de l’utilisation des données fournies par les moteurs pour, par exemple, faire de la maintenance prédictive et minimiser les temps d’indisponibilité d’un appareil dus aux pannes et phases d’entretien. De manière générale, on ne peut raisonnablement se lancer dans un tel chantier sans se demander quelle est la nature du métier de l’entreprise, son secteur d’activité, et pas à l’aune du passé mais du monde tel qu’il se dessine aujourd’hui. Aujourd’hui, bien sûr, Renault continue à faire des voitures, Axa est toujours assureur… mais le métier même d’assureur ou de constructeur automobile se transforme radicalement parce que la manière dont ces entreprises créent de la valeur pour le client change. Et si elles ne prennent pas le virage, c’est là qu’une brèche s’ouvre qui permet l’arrivée de nouveaux acteurs. En 2015, une étude de PWC montrait que 54  % des entreprises disaient être entrées dans un nouveau secteur d’activité les années précédentes et que 32  % d’entre elles pensaient que leurs futurs concurrents viendraient de secteurs différents du leur. Tout était dit.
Ensuite, la transformation c’est un changement radical des modes opératoires, qui nécessite souvent de revoir en profondeur les organisations, les modes de décision, le management et, de manière générale, la manière dont on travaille et pilote les choses. Il n’est pas un jour sans qu’on nous vante les mérites d’un logiciel qui va rendre l’entreprise plus agile, collaborative, efficace, productive, améliorer la manière dont on décide ou agit. Leur implémentation est en général un flop retentissant et la raison est connue  : un outil quel qu’il soit ne produit de la valeur que s’il est utilisé conformément à la manière dont il a été pensé. On a connu le flop des outils collaboratifs qui n’ont fonctionné que dans des entreprises qui avaient déjà fait le choix de la transparence et des modes de management adaptés. Aujourd’hui, ce sont les données qui remettent en cause le mythe du manager omniscient qui prend la majorité de ses décisions seul et à l’intuition.
Enfin, outre les impacts organisationnels, quelles sont les conséquences de la transformation digitale sur les équipes ?
La transformation digitale, c’est aussi travailler comme les équipes … digitales. Quand on fait chaque jour l’apologie de l’agilité mise en œuvre dans les équipes IT, parfois dans les équipes produit, mais qu’il suffit de remonter de deux niveaux dans la hiérarchie pour retrouver un fonctionnement à l’ancienne, on a une partie de l’entreprise qui vit à la semaine et l’autre, celle qui doit lui apporter des réponses et la supporter dans son travail, qui vit au mois, voire au trimestre : ça ne peut pas fonctionner.
Travailler comme les équipes digitales, c’est aussi remettre le design au cœur des process de conception  : conception des produits, mais aussi des process et services internes. C’est partir de la finalité de ce qu’on conçoit, de la valeur pour l’entreprise et l’utilisateur, pas du process. Et enfin, la transformation digitale c’est tirer les conséquences des deux seuls points communs qu’ont tous les « leaders » du digital, les
Uber, Airbnb et consorts. Le premier, c’est qu’ils ne font rien qui ne résolve pas un problème réel pour l’utilisateur et le collaborateur. Le second, c’est qu’ils ne cessent de simplifier les choses à l’extrême  : interface, process, jamais rien en trop, jamais une friction inutile. Il n’y aura pas de transformation digitale sans une simplification des organisations et des modes opératoires.
La technologie peut aider à donner du corps, une réalité, à motoriser tout cela. Mais elle ne transformera jamais une entreprise qui n’aura pas fait le choix de se transformer elle- même : on ne règle pas des problèmes, qui sont au départ humains, avec des outils.
* * *
Sandrine Decorde (@SandrineDecorde), directrice Stratégie digitale marketing, Humensis
«  La transformation digitale de l’édition passe par la connaissance du lecteur final, jusqu’à présent intermédié par les distributeurs. »
Le marché du livre est en ébullition, avec l’entrée ces dernières années de Google ou encore d’Amazon, et plus généralement des Gafa en matière d’édition ou de formation. Comment Humensis s’est-elle adaptée à cette nouvelle donne numérique pour éviter l’ubérisation ?
Humensis a très vite pris le pas de la transformation. Transformation du marketing d’abord, des canaux de vente ensuite pour mettre sur le marché nos services numériques mais aussi collecter la donnée du lecteur, notamment avec l’ouverture de sites e-commerce par marque permettant de mettre la main sur la donnée transactionnelle : celle qui a le plus de valeur.
Au-delà du développement de la relation digitale avec le lecteur final, par les réseaux sociaux (plus de 4 millions d’abonnés toutes marques et réseaux sociaux confondus), par l’e-mailing éditorialisé, la vidéo d’auteur, les Gafa diffusent nos produits  : Amazon est notre premier client, Google est en train d’ouvrir en Europe sa marketplace, Apple diffuse nos livres numériques et Facebook génère un trafic de qualité sur nos sites. Nous sommes agnostiques à l’égard de nos distributeurs. Nos titres doivent être disponibles « any time, any where, any device ».
Depuis Amazon, il n’y a pas eu d’« ubérisation » sur le métier d’éditeur qui consiste, au- delà de l’accompagnement de l’auteur dans son processus créatif, à gérer les droits d’auteur, le marketing, la communication et la distribution du livre.
Peut-être que la blockchain appliquée aux droits d’auteur est le prochain risque qui pèse sur les éditeurs … Mais il faudra encore quelques années pour appliquer les développements de la blockchain à l’édition.
En mars 2016, vous avez lancé La Librairie des Puf, une librairie d’un genre nouveau, avec impression sur place des ouvrages. Quels enseignements tirez- vous, trois ans après ce lancement ?
La librairie, si elle devient un lieu d’innovation, de rencontre et d’échange, a un avenir pérenne. Deux librairies similaires ont été ouvertes en 2012 à la New York Public Library et à Brooklyn. En 2016, nous sommes allés encore plus loin dans le concept  : la librairie sans stock avec 3 millions de titres disponibles à la demande, permettant la personnalisation du livre (l’impression d’une dédicace), connectée avec le site e- commerce www.puf.com en click and collect, et accueillant des conférences diffusées en live sur les réseaux sociaux. Cette librairie est un modèle d’innovation retail mixant impression à la demande, personnalisation, stock, références illimitées, livraison en click and collect et lieu de rencontre et d’échange avec nos auteurs.
C’est un bel exemple du retail du futur, mêlant expérience client digitalisée et disponibilité infinie de produits.
Quelle est votre perception de l’évolution du marché de l’édition du livre  ? Quid des nouveaux modèles économiques, des versions numériques qui cohabitent avec les livres, des livres augmentés avec le numérique et des supports matériels qui permettent des expériences immersives par exemple ?
Parmi tous les biens culturels (livre, vidéo, musique, jeux vidéo), la filière du livre est la plus importante en valeur. Le marché du livre reste relativement stable depuis plusieurs années, contrairement aux autres biens culturels, dont les modes de consommation se sont transformés radicalement et en quelques années seulement.
Une première grande disruption s’est faite voici plus de dix ans avec l’arrivée d’Amazon dans la distribution. Aujourd’hui, le e-commerce représente 35 à 40  % du chiffre d’affaires des éditeurs  ; il est stable et ne prend presque plus de part de marché au retail. La transformation de la diffusion du livre est arrivée à maturité.
Dans le livre, le support papier représente encore 95  % du marché, en volume comme en valeur. Le livre numérique est certes un marché dynamique, mais il ne représente que 5 % du marché. Sa croissance se tasse, d’ailleurs  : elle n’était que de 6 % en 2018 contre 9 % en 2017. Le format numérique du livre, malgré tous les espoirs qu’il a portés depuis une décennie, ne va pas transformer l’industrie du livre. Le livre numérique génère un revenu complémentaire au livre papier, au même titre que le livre en format poche. Les coûts de production d’un livre numérique, à partir d’une édition papier, sont très bas, mais le marché est étroit et, même aux États-Unis, la croissance se réduit.
Étonnamment, le livre audio et son modèle d’abonnement est en plein démarrage. Inventé dans les années 1950 pour répondre aux besoins des malvoyants et des jeunes, cette innovation a été tuée dans l’œuf dans les années 1960 par l’explosion des médias audiovisuels et de la radio, qui ont absorbé l’attention disponible et le temps libre.
En ramenant à la courbe de diffusion de l’innovation de Rogers (voir Figure 5.1), je dirais que le livre audio en France se diffuse auprès des « early adopters »  : le marché en est à ses balbutiements, mais la croissance aux États-Unis atteint les 30  % par an depuis près de cinq ans. Le phénomène des livres audio a précédé celui des podcasts. La distribution du livre audio est déjà organisée, avec la montée en puissance d’Audible, filiale d’Amazon, à renfort d’importantes campagnes de communication et celle de Google Play Books. L’essor des enceintes connectées et la croissance de nos usages « audio à la demande » laissent espérer un bel avenir au livre audio.
La prochaine révolution digitale sera celle de l’usage audio. Et l’édition a déjà le format de contenu adapté. « Content is King », disait Bill Gates en 1996, ce qui est encore plus vrai aujourd’hui.
Le numérique s’invite de plus en plus en profondeur dans les organisations. Quelles évolutions avez-vous pu constater chez Humensis et comment les avez- vous accompagnées ?
FIGURE 5.1 La courbe de diffusion de l’innovation de Rogers
Humensis est un groupe de 200 collaborateurs à dimension humaine. Le numérique et les transformations qu’il implique sont vecteur de changement et d’innovation, ce qui motive la plupart de nos collaborateurs. Dans tout le groupe, de petites équipes portent l’innovation, au plus près des marques. L’accompagnement s’est fait par la collaboration et le partage des compétences. «  Faire avec » en transmettant le savoir-faire digital, les méthodes agiles telles le design thinking et la co-création nous ont beaucoup aidés pour mettre œuvre l’innovation rapidement.
Dans le cadre de la fusion des Presses universitaires de France (PUF) et de Belin pour créer le groupe Humensis, quelle part a j oué le digital  ? Quels indicateurs suivez-vous au plus haut niveau de l’entreprise pour la transformation avec le numérique ?
Lors de la création du groupe Humensis, le digital a été fédérateur, car par nature transverse. Les collaborateurs sont encore très enthousiastes pour développer leurs compétences digitales et embrasser les changements qu’il implique. L’enthousiasme et l’appétence sont la clé d’une transformation réussie.
La mutualisation des investissements digitaux nous a permis de nous doter de technologies de pointe, dont l’usage est décentralisé, dans chaque business unit. Le partage et la collaboration ont donné lieu à une fédération de compétences sur les outils déployés dans le groupe. Les quatre indicateurs clés, simples et compréhensibles, sont applicables à toutes nos activités :
  • trafic sur les sites et durée de navigation des internautes ;
  • taux de transformation, propre à chaque business model  : par exemple, part des visiteurs qui laissent leurs coordonnées pour être directement contactés par la marque, achat ferme, demande de devis en ligne ;
  • Arpu (chiffre d’affaires généré par client et par an) ;
  • coût d’acquisition digital d’un nouveau prospect et client.
Ces indicateurs concernent les «  clients  » captés par les canaux digitaux. La transformation digitale passe par la connaissance du lecteur final, jusqu’à présent intermédié par les distributeurs. L’enjeu du digital dans l’édition est bien la maîtrise de cette relation, quels que soient le canal d’achat et le format du livre.

Indicateurs et mesure de la maturité numérique associée[modifier]

Organisation[modifier]

Gouvernance
OG1. Instances dédiées au numérique et ambassadeurs du numérique dans les business units
Pour que le numérique puisse essaimer dans l’ensemble de l’organisation, il est important d’établir la cohérence des instances de gouvernance dédiées au numérique, de les doter d’un pouvoir (personnes en charge, moyens d’action, budget) et de les rendre lisibles. L’objectif est d’assurer une cohésion des équipes permettant une plus grande transversalité avec le numérique et une efficacité des activités digitales. Un membre du Comex, typiquement le chief digital officer (CDO), peut assurer ce rôle avec des ambassadeurs/correspondants dans chaque business unit.
Un comité de pilotage des activités digitales réunit un représentant de chaque direction fonctionnelle de l’organisation.
Les sites opérationnels (dans le cas des grandes entreprises et organisations de type étatique) ont un correspondant numérique qui remonte les problèmes rencontrés et effectue le lien avec l’équipe digitale au siège.
Toutes les décisions structurantes touchant les actifs digitaux sont validées dans des instances de gouvernance (niveaux stratégique, tactique, opérationnel).
Les participants aux instances de gouvernance du digital ont un réel pouvoir de décision qui impacte les business units en leur apportant une valeur ajoutée ; leur implication dans les réunions (physiques ou à distance) est visible de tous les collaborateurs.
Le planning de réunion des instances est disponible sur l’intranet. Les décisions sont publiées sur l’intranet sous vingt-quatre heures et propagées au travers d’un réseau social d’entreprise permettant de mesurer leur bonne prise en compte par les collaborateurs concernés.
OG2. Taux de cadres dirigeants impliqués dans les instances numériques
Pour assurer la transformation digitale de l’entreprise, il est important d’impliquer l’ensemble du top management qui a une mission d’exemplarité pour fédérer le personnel dans les changements de posture et l’appétence pour les usages numériques. Il convient d’aller au-delà des sphères marketing et système d’information, qui sont aux premières loges de la transformation digitale. Dans l’entreprise digitale, les frontières organisationnelles et fonctionnelles classiques sont estompées, conduisant chaque cadre dirigeant à être impliqué dans au moins une instance de gouvernance du digital. Cet indicateur est le rapport entre le nombre de dirigeants participant de manière significative aux instances de gouvernance de transformation digitale, divisé par le nombre total de dirigeants.
De 5 à 25 %.
De 25 à 40 %.
De 40 à 60 %.
De 60 à 90 %.
Plus de 90 %.
OG3. Pilotage des instances numériques et impact
La digitalisation de l’organisation a un lien avec une participation active du personnel concerné aux instances de gouvernance du digital qu’elle a créées.
Il est important de savoir si ces instances créent de la valeur (PoC, articles publiés, etc.) avec une émulation pour les personnes de l’organisation. Au préalable sont à mesurer la participation, les comptes rendus effectifs avec plan d’action, le suivi des décisions prises, etc.
En outre, il s’agit de mesurer les impacts des décisions prises par rapport aux moyens consentis (équipe, matériels, logiciels, exploitation des données, etc.) dans le cadre de développement d’usages notamment avec ces instances.
Taux d’absentéisme aux instances inférieur à 50 %.
Taux d’absentéisme aux instances inférieur à 25 % et compte rendu systématique.
Suivi des décisions prises dans les comptes rendus avec un RACI* (Responsible, Accountable, Consulted, Informed).
Comptes rendus disponibles sur les outils collaboratifs internes. Remontée à une entité dédiée à l’innovation numérique pour la production de PoC, de maquettes, de vidéos de démonstration et d’idées pour de nouveaux produits/usages en lien avec le numérique. Budget alloué pour les idées générées par ces instances numériques.
Remontée à une entité dédiée à l’innovation numérique avec suivi des PoC générés quantitativement et qualitativement ainsi que pour les maquettes, les vidéos de démonstration, les articles scientifiques et les soumissions de brevets.
OG4. Taux de lecture des comptes rendus par le public visé
L’entreprise digitalisée met à disposition de ses collaborateurs la bonne information au bon moment et sur le bon support, par analogie avec ce qui est mis en place pour toucher le client au travers du marketing digital. L’application en interne de cette approche augmente la prise de conscience collective d’une information et rend l’organisation plus synchrone.
Document envoyé.
Mél envoyé + accusé de réception automatique.
Mél envoyé (ou messagerie interne, par exemple via un réseau social d’entreprise) + accusé de réception manuel + plus de 50 % de lecture en vingt- quatre heures. En cas de congés, notification de l’absence.
Document disponible + notification automatique + statistiques de mesure + 80 % de lecture en vingt-quatre heures. En cas de congés, notification de l’absence et communication à la personne effectuant l’intérim.
Document disponible + notification automatique sur meilleur support + contrôle de prise de connaissance + statistiques de mesure + 100 % de lecture en vingt-quatre heures
OG5. RACI des activités numériques
La description des rôles et responsabilités des acteurs du numérique, qu’ils soient collaborateurs ou externes à l’entreprise, est essentielle. Elle permet d’avoir une vision claire des responsabilités opérationnelles de chacun à un instant donné. Lors du départ d’un collaborateur, son remplacement éventuel est ainsi facilité, car des fonctions nouvelles sont créées, d’autres supprimées car caduques, d’autres encore évoluent. L’identification du recours systématique à des expertises extérieures est facilitée. Les entreprises les plus avancées sur le plan digital mettent à jour leur RACI de manière collaborative, au fil de l’eau.
Existence d’un RACI sur quelques activités du digital (par exemple, un processus de mise en ligne d’une offre, un processus de gestion d’incidents) avec un processus de revue du RACI digital, lancé de manière épisodique (par exemple, sur demande inopinée du comité de direction).
Existence d’un RACI couvrant les activités critiques du digital avec un processus de revue annuel.
Existence d’un RACI couvrant toutes les activités du digital avec un processus de revue lancé chaque trimestre, les écarts avec la réalité étant notifiés sans forcément être intégrés.
Existence d’un RACI couvrant toutes les activités du digital, mis à jour au plus tard dans la semaine qui suit la revue trimestrielle. Le RACI est consultable en ligne via les outils collaboratifs.
Existence d’un RACI couvrant toutes les activités du digital, maintenu de manière collaborative par l’ensemble des parties prenantes avec une remontée des changements au fil de l’eau. Les changements sont intégrés pour être quasi synchrones avec la réalité grâce aux outils utilisés (par exemple, dans le cloud).
OG6. Charte d’usage du numérique
Une charte des usages du numérique interne à l’organisation aide les collaborateurs à utiliser le numérique au profit de l’institution. La charte recouvre les usages au sens large (matériel allant du PC au téléphone en passant par l’Internet des objets, logiciels, données, besoin d’en connaître) tout en intégrant une déontologie quant à la confidentialité des données personnelles relatives aux clients et prospects de l’organisation ou des administrés, abonnés, adhérents qui peuvent être de nature sensible et faire par ailleurs l’objet d’une déclaration à la Cnil en cas de traitement automatisé d’informations nominatives ou avoir des impacts RGPD.
Existence d’une charte numérique, communiquée aux collaborateurs lors de sa publication.
Communication systématique de la charte numérique lors de l’embauche de tout nouveau collaborateur.
Existence d’un processus de contrôle de l’application de la charte numérique, lancé de manière épisodique, par exemple sur demande inopinée du membre responsable au sein du comité de direction.
Existence d’un dispositif de détection de non-respect de la charte numérique et d’accompagnement des managers de proximité pour la faire respecter.
Rédaction collaborative de la charte numérique associant l’ensemble des collaborateurs, des partenaires sociaux et partage de celle-ci sur les outils collaboratifs de l’organisation.
OG7. Taux d’appropriation de la charte par les collaborateurs
Au-delà de l’existence d’une charte des usages du numérique, sa maîtrise par l’ensemble des collaborateurs est importante et constitue un vecteur de promotion de la culture digitale dans l’entreprise.
Le taux d’appropriation de la charte mesure le nombre de collaborateurs répondant correctement à toutes les questions sur la charte, rapporté au nombre total de collaborateurs. Pour les grosses organisations et les grandes entreprises, le calcul est effectué selon un échantillon représentatif des fonctions de l’entreprise.
De 3 à 10 %.
De 10 à 25 %.
De 25 à 50 %.
De 50 à 80 %.
Plus de 80 %.
OG8. Taux d’utilisation des outils numériques
Les outils numériques mis à disposition du personnel des organisations sont à maîtriser par l’ensemble des collaborateurs qui en ont l’usage. Il convient également de détecter les personnes en marge qui risquent de se retrouver exclues de la vie de l’entreprise alors que l’information circule exclusivement au travers du numérique.
Le taux d’utilisation des outils numériques peut se définir comme le rapport entre le temps de travail avec les outils numériques et le temps ouvré. Cependant, certains métiers (comme les commerciaux) nécessitent aussi un contact avec le client pendant lequel l’outil peut être en fonction mais oisif, car le contact humain est privilégié (session en veille sur un PC, smartphone non utilisé). Il semble plus important de considérer le recours aux outils numériques mis à disposition par l’entreprise pour réaliser les tâches opérationnelles. La définition proposée pour le taux d’utilisation des outils numériques est le rapport entre le nombre de tâches réalisées au travers de ces outils et le nombre total de tâches réalisables au travers de ces outils, sur une semaine. Avec cette définition, l’acteur déployant de nombreux outils numériques qui resteraient peu utilisés sera de faible maturité digitale sur cet indicateur. L’acteur déployant peu d’outils numériques (alors qu’il en existe) serait également considéré comme peu mature sur le plan digital, même si ces outils sont utilisés quotidiennement par ses collaborateurs.
De 3 à 30 %.
De 30 à 50 %.
De 50 à 80 %.
De 80 à 90 %.
Plus de 90 %.
OG9. Intrapreneuriat et projets générés
Le dynamisme interne au sein de l’entreprise avec une organisation qui permet de générer des idées et des projets est un indicateur permettant de mesurer l’appétence à la prise d’initiative par les salariés qui peuvent lancer des idées de nouveaux services avec un appui de la direction, des ressources humaines et de la hiérarchie.
Le modèle de Google pour certaines catégories de personnes qui consiste à consacrer 20 % du temps à des projets personnels qui peuvent rejaillir sur l’entreprise via des services nouveaux développés est une source d’inspiration intéressante.
Événements de type conférences, colloques proposés au personnel de nature à favoriser l’intrapreneuriat.
Existence d’une plateforme interne dédiée à l’innovation ouverte avec création de profils des intrapreneurs et possibilité de proposer des sujets.
Existence de concours et d’appels à projets internes avec une ambition portée par la direction générale et des moyens financiers pour accompagner les projets avec sélection des projets accompagnés.
Accompagnement spécifique des intrapreneurs pour les projets : temps alloué, budget, conseil juridique et économique.
Les projets menés peuvent faire l’objet de la création d’une start-up ou d’une business unit avec un lien avec l’organisation et un statut particulier de l’intrapreneur (par exemple, disponibilité avec possibilité de retour dans la maison mère au bout d’une durée définie).
OG10. Fréquence des audits des actifs digitaux de l’organisation
Des audits des actifs digitaux (matériels, logiciels, données) peuvent être programmés et d’autres réalisés de façon inopinée pour maintenir l’organisation et son personnel sous tension.
Dernier audit partiel réalisé il y a plus de deux ans, certains actifs jamais audités.
Dernier audit partiel réalisé il y a plus de deux ans, tous les actifs audités au moins une fois depuis leur lancement.
Dernier audit complet réalisé il y a plus de deux ans. Plan d’action établi et suivi pour la correction des anomalies principales relevées.
Dernier audit complet réalisé entre un et deux ans. Plan d’action établi et suivi pour la correction des anomalies relevées.
Dernier audit complet réalisé il y a moins d’un an. Plan d’action établi et suivi pour la correction des anomalies relevées. Résultats accessibles sur les outils en ligne de l’entreprise pour les personnes habilitées.

Management[modifier]

OM1. Structures agiles et degré de niveaux hiérarchiques
La tendance est de s’inspirer de l’agilité des start-up, des méthodes agiles de type Scrum ou SAFe, dont la conséquence est un aplatissement des structures avec un nombre de niveaux hiérarchiques réduit et moins de silos.
Un calcul de type logarithmique entre le nombre de niveaux hiérarchiques et le nombre d’employés sur l’ensemble des sites est proposé. L’idée est d’avoir un nombre de niveaux hiérarchiques faibles entre le PDG et les opérationnels en agence, et entre ce même PDG et le cadre supérieur débutant (typiquement le bac + 5 issu d’une école de commerce, d’ingénieurs ou d’une université).
Deux calculs sont proposés en partant :
  • du nombre de niveaux hiérarchiques entre le PDG et le directeur d’une entité de plus bas niveau, par exemple une agence dans le domaine bancaire ou un magasin dans le cas de la grande distribution (pour le cas d’une organisation avec des sites) : N1 ;
  • du nombre de niveaux hiérarchiques entre le PDG et le cadre supérieur débutant au siège : N2.
R1 = effectif/N14
R2 = effectif/N26
Start-up, TPE, PME Autre Organisation avec un ou association organisation personnel ≥ 20 000 avec un personnel < 20
N2 > 3 R2 < 0,25 et R1 < 5 R2 < 0,5 et R1 < 30
N2 = 3 (et N2 = 4 si 0.25 ≤ R2 < 1 et 5 ≤ 0.5 ≤ R2 < 2 et 30 ≤ R1 < 80 et effectif de l’organisation R1 < 10 et structures matricielles pour les sans sites dépendants structures projets > 500) matricielles pour les projets
N2 = 3 et utilisation 1 ≤ R2 < 5 et 10 ≤ 2 ≤ R2 < 5 et 80 ≤ R1 < 150 et de méthodes agiles R1 < 20 et utilisation de méthodes agiles dans dans l’ensemble de utilisation de les business units Utilisation l’organisation (et N2 = 4 méthodes agiles conjointe de plusieurs outils pour si effectif de dans les business l’agilité (par exemple Scrum ou l’organisation sans units SAFe et Kanban pour la résolution sites dépendants > d’anomalies) 500) Utilisation conjointe de plusieurs outils pour l’agilité (par exemple Scrum ou SAFe et Kanban pour la résolution d’anomalies)
N2 = 2 (et N2 = 3 si 5 ≤ R2 < 20 et 20 ≤ 5 ≤ R2 < 10 et 150 ≤ R1 < 250 et effectif de l’organisation R1 < 40 et utilisation de méthodes agiles sans sites dépendants utilisation de partout dans l’organisation > 500) méthodes agiles (business units et sites partout dans dépendants) l’organisation (business units et sites dépendants)
N2 ≤ 2 (et N2 = 2 si R2 ≥ 20 et R1 ≥ 40 R2 ≥ 10 et R1 ≥ 250 effectif de l’organisation sans sites dépendants > 500)
OM2. Accompagnement des managers en mode 2.0
Il s’agit d’accompagner l’évolution du rôle des managers. Chaque manager devient davantage un coach : il aide ses collaborateurs dans leur développement, les connecte avec d’autres sachants au-delà des silos et de l’organisation classique pour faire émerger une intelligence collective dans les projets, adopte une posture de médiateur en cas de conflit et donne du sens aux actions réalisées par rapport à la stratégie menée. Une évaluation par les pairs à 360° inspirée du management de Google – et que l’on retrouve d’une façon officieuse dans les recommandations faites par des contacts sur LinkedIn – est également intéressante pour la vision des compétences développées par une personne de l’organisation.
Prise en compte de l’identité de l’organisation, de ses valeurs et de son histoire par les managers avec des interactions et une recherche de la transversalité avec les autres équipes impulsées par la direction générale et déclinées dans les business units de façon informelle.
Idem, mais avec un cadre défini par les ressources humaines et la direction générale et partagé au sein des équipes.
Idem, avec le cadre de l’évolution managériale qui est disponible en ligne sur le réseau social d’entreprise et/ou l’intranet.
Des objectifs qualitatifs et quantitatifs élaborés par la direction des ressources humaines pour les managers 2.0 sont repris pour les entretiens d’objectifs et d’évaluation de la performance pour que ceux-ci aient au moins 50 % de leurs objectifs liés à leur nouveau rôle.
Idem + des espaces de co-working sont proposés avec un écosystème de partenaires au sein des sites opérationnels de l’organisation et un rôle de proximité à assurer avec les managers locaux.
OM3. Développement d’une culture collaborative et numérique au sein des équipes
L’entreprise digitale est une entreprise apprenante, l’acquisition collective du savoir étant privilégiée.
Le département de veille (au niveau stratégie, marketing ou autre) de l’organisation assure une veille centralisée sur les innovations digitales.
Le management reconnaît qu’une veille collaborative est nécessaire.
Un dispositif de veille collaborative interne est mis en place, chaque département nomme au moins un correspondant, contributeur à ce dispositif.
Les nouveautés identifiées par les collaborateurs sont partagées et discutées au travers du réseau social d’entreprise, au moins 40 % des collaborateurs y sont actifs.
Au moins 60 % des collaborateurs sont actifs sur le réseau social d’entreprise pour partager et discuter des nouveautés. La curiosité devient la norme, des sessions de partage sont organisées chaque mois (digital day) avec des webinaires, et les vidéos et échanges (questions posées par texte, interactions) sont disponibles et archivées sur le réseau social d’entreprise. Le management holacratique établi dans l’ensemble de l’entreprise, avec des rôles clairement définis et des actions transparentes, est combiné à une utilisation optimale des outils comprenant l’accompagnement de leur usage, de leur utilisation en mobilité pour la réalisation des missions.
OM4. Pilotage de la transformation digitale de l’organisation et revue des plans d’actions
Une personne au sein de la direction générale (typiquement le CDO) coordonne le plan de transformation digitale de l’organisation. Celui-ci résulte d’une vision des dirigeants et du Comex et fait l’objet de revues pour mesurer la progression de la transformation digitale de l’organisation.
Existence d’un plan de transformation digitale de l’organisation et d’un responsable pour mener cette mission. Ce plan est établi ex nihilo ou via l’aide de consultants.
Idem, mais le plan de transformation digitale de l’organisation fait l’objet d’une réflexion préalable avec en particulier un audit du niveau de maturité numérique de l’acteur en question (DIMM peut par exemple être utilisé dans ce cadre). Le plan de transformation digitale intègre la vision du top management et des remontées terrain.
Une revue du plan de transformation digitale de l’organisation est effectuée périodiquement avec mesure de l’avancement.
Idem, avec intégration des plans d’actions pour mesurer les écarts et effectuer des actions correctives pour permettre l’avancement de la transformation digitale de l’organisation.
Le plan de transformation digitale est un processus itératif qui comprend au démarrage la transformation digitale initiale, puis la transformation digitale permanente, pour des plans de transformation digitale qui suivent dans l’optique d’un processus d’amélioration continue afin de rendre l’organisation encore plus numérique et anticiper les changements, voire les ruptures technologiques.
OM5. Sous-traitance et pilotage des compétences extérieures
Le recours à la sous-traitance est naturel dans le digital, tant les expertises se font et se défont rapidement. En revanche, afin de garantir la pérennité des investissements, le contrôle fin du recours à la sous-traitance est nécessaire. L’objectif étant de sensibiliser la direction des ressources humaines à la nécessité de former et recruter des profils spécifiques dont le recours devient récurrent. Le taux de sous-traitance est déterminé en rapportant le nombre d’équivalent temps plein (ETP) de sous-traitants sur l’année écoulée, au nombre d’ETP total des activités digitales.
Par ailleurs, l’entreprise digitale recourt à des savoir-faire extérieurs, puis les incorpore lorsqu’ils deviennent stratégiques.
Plus de 50 % de sous-traitance dans les activités digitales de l’organisation. Les savoir-faire extérieurs à l’entreprise sont mal compris par la direction des ressources humaines.
De 30 à 50 % de sous-traitance dans les activités digitales de l’organisation. La direction des ressources humaines référence les savoir-faire innovants auxquels l’entreprise fait appel au travers de ses sous-traitants et partenaires.
De 20 à 30 % de sous-traitance dans les activités digitales de l’organisation. Les savoir-faire innovants récurrents sont identifiés pour mettre à jour la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) du numérique.
De 10 à 20 % de sous-traitance dans les activités digitales de l’organisation. La dépendance aux savoir-faire innovants extérieurs est considérée comme un risque, suivi comme tel au plus haut niveau de l’entreprise.
Moins de 10 % de sous-traitance dans les activités digitales de l’organisation. Les savoir-faire innovants sont référencés et suivis, alimentant des décisions de formation et de mise à jour du référentiel associé et de recrutement.

Structures numériques[modifier]

OS1. Digital factory
L’organisation réunit les effectifs dédiés au numérique sur un campus numérique (de type fablab, centre d’innovation ou de recherche et développement, plateau projet dédié). Les organisations les plus matures mettent en place une digital factory prenant en charge tous les projets digitaux de l’organisation.
Existence d’un département digital dans chaque silo organisationnel de l’entreprise, sans mutualisation de moyens.
Existence d’un département digital mutualisant une partie des moyens en support des départements digitaux des silos organisationnels.
Existence d’une digital factory responsable du développement des nouveaux projets, mais n’ayant pas la responsabilité opérationnelle des dispositifs existant avant sa création.
Existence d’une digital factory par business unit (par exemple, par pays ou par branche de clientèle).
Existence d’une digital factory unique pour toute l’entreprise, ayant la responsabilité de fabriquer les actifs digitaux et d’en mutualiser au maximum la gestion opérationnelle avec des relais dans les business units. Elle impulse l’organisation d’espaces de co-working conjointement avec les directions impliquées, les hackathons, assure les relations avec les start-up et expérimente les projets digitaux de la feuille de route de la transformation digitale de l’organisation.
OS2. Digital university
L’organisation numérique forme ses collaborateurs en permanence. La formation peut être décidée par l’entreprise dans le cadre d’un plan. L’organisation peut aussi favoriser l’auto-apprentissage. Une digital university interne à l’entreprise est un lieu (physique et en ligne) central d’apprentissage du digital, offrant aux collaborateurs tous les cours utiles à leur métier et à l’amélioration de leur employabilité.
Existence d’un catalogue de formations au digital couvrant une partie des besoins.
Existence d’un catalogue de formations au digital couvrant tous les besoins et mis à jour chaque année.
Existence d’une digital university disposant d’un espace en ligne (intranet ou réseau social d’entreprise) clairement identifié par les collaborateurs et d’un catalogue de formations couvrant l’ensemble des besoins de formation, pouvant être enrichi par les collaborateurs.
Existence d’une digital university disposant d’un lieu (physique et en ligne) unique, d’un réseau de formateurs relais au sein de l’entreprise et d’une communauté d’apprenants active.
Existence d’une digital university proposant un catalogue couvrant l’ensemble des besoins de formation au digital des collaborateurs, et disposant d’une force de frappe pour distribuer cette formation, notamment au travers du e-learning, et ayant déjà formé tous les collaborateurs sur au moins une formation.
OS3. Think tank et do tank pour générer des expérimentations
Il s’agit d’évaluer l’effort dédié par l’organisation à l’innovation numérique, en allouant une équipe, des matériels, des logiciels et tous les moyens nécessaires à l’expérimentation de nouveautés au profit de l’entreprise. Ce peut être aussi les actifs de l’entreprise (ses bâtiments, ses véhicules, etc.) pour lesquels des développements sont possibles autour de la smart city par exemple. L’intérêt de ce type de dispositif est surtout de pouvoir expérimenter le futur de l’entreprise, d’imaginer comment de nouvelles technologies et usages peuvent impacter jusqu’à son modèle économique.
Existence d’une équipe dédiée à l’innovation numérique, chargée de centraliser les initiatives menées dans les différents départements de l’entreprise.
Existence d’un embryon d’entité dédiée à l’innovation numérique, produisant des PoC, des maquettes ou des vidéos de démonstration sur des sujets transverses par nature (par exemple, réseau social d’entreprise).
Existence de plusieurs entités dédiées à l’innovation numérique, produisant des PoC utiles, des maquettes ou des vidéos de démonstration pour chaque silo organisationnel, pouvant être en compétition.
Existence d’une unique entité dédiée à l’innovation numérique, produisant des PoC, des maquettes ou des vidéos de démonstration pour toute fonction de l’entreprise, disposant d’un lieu d’exposition (showroom, qui peut être en liaison avec la digital factory) et d’une communication externe.
Existence d’une entité dédiée à l’innovation numérique, produisant des
PoC, des maquettes ou des vidéos de démonstration, publiant des articles scientifiques, soumettant les brevets publiés par l’organisation, portant sur des produits numériques.
OS4. Accélérateurs, incubateurs et investissement dans les start-up
L’organisation, tout en consacrant une part notable en matière d’investissement à sa propre recherche et développement, peut allouer un budget dédié ou décider d’acquérir des start-up (edtech dans le cadre de l’éducation, foodtech pour l’alimentation ou la grande distribution, medtech ou biotech dans le domaine de la santé, médical ou pharmaceutique, fintech dans le monde bancaire, etc.) ou prendre des participations dans celles-ci dans le cadre d’un caractère stratégique, d’une complémentarité ou d’une diversification de son offre pour disposer à terme de relais de croissance. L’écosystème mis en place participe à cette réussite. Une partie de son résultat net dégagé peut ainsi être affectée à l’investissement dans les start-up.
Investissement existant mais inférieur à 0,4 % du chiffre d’affaires annuel de l’organisation.
Investissement compris entre 0,4 et 0,8 % du chiffre d’affaires annuel et existence d’une structure d’accélération et d’incubation des start-up partenaires avec prise de participation contre aide au développement, conseil et accès à certains marchés de l’organisation.
Investissement compris entre 0,8 et 1,2 % du chiffre d’affaires annuel et stratégie portée au niveau du Comex dans l’acquisition des start-up et prises de participation majoritaire.
Investissement compris entre 1,2 et 2 % du chiffre d’affaires annuel.
Investissement supérieur à 2 % du chiffre d’affaires annuel.
OS5. Dispositif de remontées des idées innovantes et réseau interne d’innovateurs
Il s’agit d’apprécier l’innovation collaborative mise en place par l’organisation, le postulat étant qu’une organisation digitale valorise la capacité d’innovation de ses collaborateurs.
Des idées d’innovations existent, mais ne sont pas collectées.
Des campagnes de collecte d’idées innovantes sont organisées ponctuellement.
Une plateforme d’innovation collaborative est mise en place pour collecter les idées d’innovation en permanence et en assurer le suivi. Un retour est effectué au collaborateur pour lui indiquer la suite donnée.
Des concours internes sont organisés et des budgets alloués pour réaliser quelques idées innovantes proposées par les collaborateurs.
Les idées sont collectées, valorisées, certaines font l’objet de prototypes. Les collaborateurs sont récompensés (prime, reconnaissance via les médias internes de l’organisation).
OS6. Dynamique de gestion d’une plateforme avec des tiers pour les APIs développées
L’organisation qui parvient à créer une plateforme à la manière des Gafa et à fédérer un système créateur de valeur avec des développements supportés par des tiers a un avantage par rapport à ses concurrents. Le fait d’avoir des APIs ouvertes et d’interagir avec son écosystème en offrant plus de possibilités fonctionnelles est un pas vers une organization as a service (OaaS).
Développement d’un site qui comporte quelques données ouvertes (open data) de l’organisation (par exemple, géolocalisation et horaires d’ouverture des agences ou des sites).
Le site comprend également quelques APIs ouvertes. Une communication est faite autour du site pour attirer des développeurs d’applications.
Le site comprend l’ensemble des données ouvertes identifiées et présentant un intérêt pour un écosystème autour, ainsi que les APIs ouvertes possibles identifiées à date.
Un plan d’actions autour du modèle économique du site est mis en place avec un événement annuel réunissant les développeurs d’application (il peut être lancé dans le cadre de la digital factory si elle existe).
Un processus dynamique pour les interactions avec les développements effectués par les tiers autour du site devenu plateforme est mis en place pour pouvoir aller plus loin dans l’intégration par exemple de développements tiers stratégiques pour l’organisation, en particulier pour les APIs qui concernent le cœur de métier de l’organisation.

Synthèse des indicateurs selon le type d’organisation[modifier]

Une croix dans une case du tableau signifie que l’indicateur est applicable pour la catégorie d’organisation considérée.

Points clés[modifier]

  • Définissez une organisation collaborative, agile et une charte d’usage des outils digitaux.
  • Adaptez l’organisation de votre entreprise en vous inspirant des nouveaux modèles.
  • Faites évoluer votre organisation vers un management 2.0 et faites-la coopérer avec les écosystèmes d’innovation (start-up, accélérateurs, etc.).
  • Mesurez vos progrès dans la transformation digitale de votre organisation selon trois aspects : gouvernance, management, structures numériques.
1Adrien Guilleminot, «  E-commerce  : comment faire son trou sur une marketplace  ?  », L ’Exp ress, 12 juin 2018, http://lexpansion.lexpress.fr.

Chapitre 6[modifier]

Levier  : personnel

Positionnement du levier et objectifs[modifier]

L’entreprise digitale s’appuie largement sur les technologies et suppose que les collaborateurs les maîtrisent. En effet, sans maîtrise par l’ensemble des collaborateurs, les technologies constituent des freins à l’exercice du métier de tout un chacun et la promesse d’une entreprise plus fluide devient intenable. Il ne s’agit pas seulement d’envoyer les collaborateurs en formation de temps en temps pour qu’ils apprennent à se servir d’un Intranet ou des fonctionnalités du smartphone mis à leur disposition par l’employeur, mais bien d’insuffler une culture de l’apprentissage permanent, en fonction des besoins dans l’exercice des missions confiées. Il convient aussi d’anticiper les formations en juste-à-temps, d’optimiser leur coût, ce qui peut passer par un mix entre présentiel et distanciel, et d’éviter l’obsolescence des savoirs dans un monde davantage concurrentiel. Bref, il s’agit d’une culture qui rend le collaborateur acteur de sa formation permanente, de son apprentissage des technologies et des usages qui facilitent son quotidien, de sa curiosité à en découvrir de nouveaux susceptibles de l’aider dans l’exercice de son métier, de sa volonté de les partager avec ses collègues. Autant de qualités favorisées par un management responsabilisant, sans dédouaner l’entreprise de son devoir de mettre à disposition des collaborateurs les supports nécessaires.
L’entreprise digitale est aussi éminemment collaborative. L’état d’esprit qui y règne favorise le partage entre tous  : partage des informations pour permettre à chacun d’agir au plus vite, partage des savoir-faire pour améliorer l’efficacité opérationnelle de tous. L’approche collaborative, qui contribue à la porosité entre les départements de l’entreprise, facilite aussi la continuité de l’activité – d’autant plus critique pour une entreprise «  ouverte 24 heures sur 24, 7 jours sur 7  » – en permettant par exemple le remplacement inopiné d’un collaborateur.
L’entreprise digitale est également tournée vers l’extérieur  ; d’abord vers ses clients bien sûr, et plus généralement vers l’ensemble de ses parties prenantes. Les collaborateurs ne sont pas seulement recrutés pour leur expertise ou leur savoir-faire métier  : ils sont aussi considérés comme des ambassadeurs de l’entreprise, un rôle que l’organisation peut encourager, valoriser et bien sûr encadrer. Dans le respect de la charte édictée par l’entreprise, et bien sûr de leur contrat de travail, les collaborateurs de l’entreprise digitale se sentent ainsi libres d’interagir au travers des médias sociaux avec l’ensemble des parties prenantes.
Enfin, l’entreprise se doit d’attirer les talents, les motiver et les fidéliser, tout en leur permettant d’évoluer en matière de compétences nécessaires dans les années à venir.

Groupements[modifier]

Nous proposons de caractériser le personnel d’une entreprise engagée sur le digital suivant trois groupements répondant aux questions structurelles de ce type d’entreprise :
  • Formation  : comment les collaborateurs maîtrisent-ils les outils du numérique  ? Quel effort de formation consacrent-ils à l’apprentissage de ces outils  ? Quelle est leur volonté d’être acteurs de leur auto-apprentissage  ? Comment mettent-ils en œuvre au quotidien les outils numériques auxquels ils ont été formés ?
  • Intelligence collective  : quelle est la propension à acquérir des connaissances et à publier sur les espaces collaboratifs les données produites par les collaborateurs  ? Quelle confiance les collaborateurs ont-ils dans les espaces collaboratifs  ? Quel est le niveau de contribution des collaborateurs tant en interne qu’en externe en étant ambassadeurs de la marque ? Comment sont déployés et utilisés les nouveaux outils  ? Quelle est la mixité des profils de nature à favoriser l’intelligence collective ?
  • Exp ertise  : comment l’entreprise attire-t-elle les talents et les fidé-lise-t-elle  ? Comment prépare-t-elle sa transformation pour les savoirs qui lui seront indispensables compte tenu de l’évolution des métiers ? Comment interagit-elle avec les grandes écoles et universités dispensant des formations de haut niveau ?
NB  : Ces groupements ne portent pas sur le contenu du catalogue de formation aux technologies, ou encore sur le portefeuille d’outils mis à la disposition des collaborateurs. On s’intéresse bien au personnel et à son appropriation des technologies utiles à son métier et au fonctionnement optimal de l’entreprise digitale.
On ne s’intéresse pas ici à ce qui est partagé (la qualité des contenus), mais bien à la propension au partage. La nature même des informations partagées n’est pas non plus étudiée au travers de ce critère, dans la mesure où cette nature dépend fortement du type d’activité de l’entreprise.
On ne présage pas de la qualité des contributions des collaborateurs ou de leur impact sur l’image de l’entreprise. On ne fait pas non plus l’hypothèse que tous les collaborateurs doivent communiquer au nom de l’entreprise au travers des médias sociaux, mais bien que ceux dont le métier n’est pas de communiquer sont des acteurs de la communication de l’entreprise au travers du digital.
Franck La Pinta (@flapinta), responsable Innovation et digital learning, Société Générale
«  L’entreprise doit mettre en place une “voiture-balai” pour qu’il n’y ait pas de laissés-pour-compte du numérique au sein du groupe. La transition numérique ne peut pas être la future fracture au sein des entreprises. »
Pour la formation du personnel au numérique des organisations – qui est un processus permanent –, que recommandez-vous  ? Quels critères sont pertinents à mesurer et à suivre, et pourquoi ?
Je pense qu’il faut distinguer un aspect formation et un aspect sensibilisation, qui tous deux doivent contribuer à améliorer la maturité et la culture digitales des collaborateurs.
Le premier, la formation, s’effectue plutôt de façon descendante : elle est conçue par les équipes de formation et séquencée dans le temps avec des rendez-vous fixés à l’avance. Le contenu de ces formations varie peu d’un collaborateur à un autre, à travers un parcours ou une session sur des sujets et des populations définis à l’avance. La logique est celle du plan de formation fixé en début d’année par le manager et/ ou les ressources humaines, le plus souvent à l’initiative de l’entreprise. Le second aspect, la sensibilisation, est plutôt à l’initiative du collaborateur qui va décider ou non de «  consommer  » cette information délivrée par l’entreprise, ou disponible à l’extérieur de l’entreprise. Elle consiste à diffuser une information plutôt au fil de l’eau pendant l’année, et vise surtout à convaincre les collaborateurs d’entretenir eux-mêmes ce flux en allant chercher régulièrement de l’information, par exemple sur Internet, pour entretenir leurs connaissances. Cet enjeu est d’autant plus important que l’environnement de l’entreprise, les techniques, la concurrence, les usages des clients évoluent rapidement.
En tout état de cause, un module de formation de type «  Découvrir le digital  » au sein de l’entreprise ne sera pas suffisant, même s’il est indispensable, car il n’est que ponctuel.
En outre, on peut considérer deux dimensions :
  • le socle commun – ce que l’on veut donner comme base minimale à l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise en matière de numérique – avec, dans ce cadre, des liens avec la vision et la stratégie de l’entreprise  : où va-t-elle  ? comment est-elle impactée par le digital ? etc. ;
  • un second niveau, davantage lié à des activités ou des métiers particuliers, par exemple les équipes de marketing, les conseillers en agence bancaire, les plateformes téléphoniques au service après-vente que l’on doit former. Il ne s’agit plus de partager un socle commun de connaissances, mais de se focaliser sur l’impact du digital sur les métiers et sur leur façon de l’intégrer en particulier. Dans le cas des fonctions « support  », pour les ressources humaines par exemple, l’enjeu du digital est double car cela va impacter la façon de travailler, mais aussi la façon de servir les clients internes. Premier exemple  : les équipes de recrutement vont devoir modifier leurs techniques d’approche des candidats pour s’adapter à leurs nouveaux usages et, dans le même temps, comprendre quelles sont les compétences nouvelles liées au digital que l’entreprise va avoir besoin de recruter. Autre exemple, celui de la formation  : introduire des Mooc modifie la manière de délivrer des formations, donc de faire son métier. Développer des modules de formations sur le digital servira en revanche à accompagner la transformation du groupe.
S’agissant des critères pour évaluer ces actions, on pourrait envisager de monitorer le pourcentage de collaborateurs ayant suivi la formation de base au numérique. Un autre critère pourrait être le baromètre de l’appétence au digital des collaborateurs (avec des modules où l’on pose des questions sur le mobile, le digital, les données personnelles, la sécurité, etc.) et où l’on évalue le niveau de connaissance de sujets particuliers, la sécurité sur Internet, le changement des comportements clients. Et on reconduit le baromètre en l’adaptant d’une année sur l’autre.
Quelles sont les données de partage les plus pertinentes dans une organisation collaborative et apprenante et non plus en silos  ? Quel pourcentage de temps accorder pour la formation entre le formel, le social learning et la mise en pratique ? Quid de l’apport des réseaux sociaux d’entreprise ?
Lorsque l’on parle formation, il est important de garder à l’esprit que l’on cherche à développer certaines compétences précises – hard skills ou soft skills –, que l’on a estimées nécessaires à la contribution à la stratégie et à la création de valeur. Il existe une théorie, celle du 70/20/10, qui postule que le développement des compétences se fait à 70  % en application et mise en pratique, 20  % via le social learning, l’échange entre pairs, et seulement 10  % en formation formelle, présentielle ou distancielle. Or, force est de constater que, dans la plupart des entreprises, le domaine d’intervention des départements formation se concentre sur les 10  %. Il existe donc un champ immense et inexploité que les départements formation doivent investir, en revoyant l’allocation de leur budget, de leurs ressources pour moins de conception de contenus et davantage d’animation.
Plus concrètement, le développement du e-learning a fait évoluer le marché et le métier de la formation  : on achète moins une formation bien définie, conçue sur mesure, avec une durée de réalisation qui peut prendre plusieurs semaines, mais dont l’obsolescence s’accélère. Le développement de l’offre de plateformes d’e-learning, de Mooc, de rapid learning amène les départements formation à contractualiser des accès pour leurs collaborateurs, dont le modèle peut être celui de l’illimité. On voit bien que le métier change  : il s’agit de concevoir des parcours de formation multimodalités, en architecturant des contenus achetés sur étagère.
Ces modalités de formations digitales présentent un bénéfice certain, celui de permettre le recueil de données très riches  : thèmes de formation les plus populaires, modalités préférées, durée de connexion, période de connexion, profil du collaborateur en termes de métier, d’ancienneté … pour n’en citer que quelques-unes. Encore faut-il être en mesure de les agréger et de savoir les exploiter.
S’agissant du social learning, les départements formation voient aussi leur métier évoluer. Au client traditionnel de la formation – le collaborateur apprenant – vient s’ajouter un nouveau client  : le formateur occasionnel ou le transmetteur. C’est cet expert qui, au sein de l’entreprise, dispose d’une expertise, de compétences qui représentent une valeur pour l’entreprise, à condition d’être en mesure de faire partager ce savoir. Nous découvrons ici encore un nouveau champ pour la formation  : identifier ces experts, les convaincre de partager leurs savoirs, éventuellement les accompagner, les former à la pédagogie (un expert ne fait pas nécessairement un bon manager, comme il ne fait pas nécessairement un bon formateur).
Les réseaux sociaux, qui dans de nombreuses entreprises n’ont pas apporté toujours la preuve de leur contribution à la création de valeur, représentent le vivier naturel de ces experts, qui sont souvent des contributeurs actifs et réguliers, et se regroupent au sein de communautés. Les départements formation ont donc tout intérêt à identifier ces communautés et ces experts qui sont autant de moyens «  gratuits  » de développer les compétences, et qui peuvent s’intégrer à un parcours de formation.
Comment, s’agissant des ambassadeurs de la marque, tendre vers une «  brand as a platform  » dans le partage des informations en impliquant l’ensemble de l’écosystème de la marque ?
On peut avoir deux grandes familles d’ambassadeurs :
  • des ambassadeurs officiels  : dans ce cadre-là, ils sont officiellement mandatés, formés ou du moins outillés, et on a l’assurance que le discours cadre avec le discours officiel de l’entreprise. Mais à l’inverse, ces personnes peuvent être considérées par les internautes comme moins crédibles, car elles portent la parole officielle  ; on se contente ici de disposer d’autres « speakers officiels » mais qui présentent l’avantage de relayer fidèlement le discours de la marque en lui donnant une plus grande visibilité ;
  • à l’opposé, des ambassadeurs libres de dire ce qu’ils pensent de l’entreprise – la limite étant un devoir de réserve vis-à-vis de leur employeur si c’est le cas. Tant qu’il n’y a pas de dénigrement, ils peuvent s’exprimer librement, et c’est ce que vont rechercher les candidats. Ces ambassadeurs libres, même s’ils sont parfois «  outillés  » par les entreprises, garderont la liberté de porter ou pas un discours.
Chacune de ces deux options présente ses avantages et ses inconvénients. Il est possible pour l’entreprise de naviguer entre les deux. Pour autant, laisser la parole à des collaborateurs n’équivaut pas à en faire des ambassadeurs. Il convient d’expliquer, d’outiller ce qu’est l’entreprise, son activité, sa stratégie. Libre à eux de reprendre ces éléments en partie ou non. Sinon, il ne s’agit pas d’ambassadeurs mais de personnes qui s’expriment.
L’entreprise peut également identifier des collaborateurs présents sur les réseaux sociaux puisqu’ils ont de facto une appétence pour le numérique. Elle peut les solliciter pour la promotion de l’entreprise de façon plus active à l’extérieur. Elle doit également surveiller et contrôler ce qui est dit par les collaborateurs qui, en s’exprimant librement sur les médias sociaux, peuvent dépasser ce devoir de réserve. Il est dans tous les cas préférable de prévenir ce genre d’incidents. Ainsi, nous avons développé une série de mini-films diffusés en interne qui mettent l’accent sur certains risques liés aux médias sociaux, et qui adoptent un ton pédagogique pour donner des conseils qui servent dans la vie de tous les jours. Il n’est, par exemple, pas concevable de publier des critiques à l’encontre d’un client ou d’un manager.
Le journaliste Nikos Aliagas (@nikosaliagas) disait par exemple que sur les réseaux sociaux, il s’exprime à titre personnel et pourtant, il s’impose un devoir de réserve vis-à- vis de ses employeurs. En effet, dans l’esprit du public, l’animateur est associé à une marque  : la chaîne de télévision ou la station radio dans laquelle il travaille. Aussi s’oblige-t-il de fait à ne pas publier telle ou telle information qui pourrait avoir un impact négatif sur ses employeurs. On voit ici qu’il est souvent difficile de définir une frontière nette entre le collaborateur et son entreprise, même si celui-ci s’exprime à titre privé alors qu’il est facile de l’associer à son employeur.
Aujourd’hui, des collaborateurs de l’entreprise sont présents sur les médias sociaux pour faire de la veille, benchmarker leur entreprise par rapport aux concurrents, appartenir à des groupes. Parallèlement, beaucoup de candidats cherchent des informations sur un poste via les personnes qui travaillent dans l’entreprise pour connaître la réalité du poste. Ainsi, lorsque l’on saisit une marque sur le moteur de recherche de LinkedIn, la probabilité de toucher des personnes qui ne travaillent pas dans la sphère des ressources humaines est élevée. Cela soulève des questions :
  • Les ressources humaines ne devraient-elles pas être plus visibles sur les médias sociaux ?
  • Les collaborateurs lambda sont-ils plus/moins légitimes pour identifier des bonnes compétences sur ces réseaux plutôt que les ressources humaines ?
Comment une entreprise comme la Société Générale peut-elle inculquer une culture du numérique à son personnel tout en tenant compte des disparités de compétences en interne, des appétences de certains, de la nécessaire proactivité de son personnel au-delà des accompagnements en formation des ressources humaines et de la direction ?
On ne peut pas inculquer une culture numérique de façon globale  : il est nécessaire de décliner des actions selon les populations. Par exemple, mettre en place des actions ciblées pour les top managers du groupe, d’autres pour des métiers bien spécifiques, d’autres enfin pour l’ensemble des collaborateurs. Il est possible d’opérer une approche à la fois par strates, car le niveau d’information à délivrer selon les strates de l’entreprise varie, et également à l’intérieur de ces strates. Il existe des niveaux hétérogènes à combler, car on ne peut pas considérer que la transition numérique du groupe va être portée par les 10  % les plus geeks d’une catégorie. L’entreprise doit mettre en place une «  voiture-balai  » pour qu’il n’y ait pas de laissés-pour-compte du numérique au sein du groupe. La transition numérique ne peut pas être la future fracture au sein des entreprises. Cela permet aux salariés de mener à bien les missions qui leur sont confiées et également de maintenir leur employabilité face aux changements induits par le numérique.
Il est également possible d’instaurer du « reverse mentoring » avec des «  petits jeunes  » qui vont expliquer le numérique aux seniors de l’entreprise. Cela ne peut s’opérer que pour les membres du Comex et non pour l’ensemble de l’entreprise. On va adapter les modalités à la population à laquelle on s’adresse et à son étendue, examiner les compétences qu’il est indispensable qu’elle connaisse.
Un membre du Comex n’a pas besoin de savoir comment fonctionne précisément LinkedIn ou Twitter  ; il doit néanmoins comprendre quels en sont les impacts sur le business ou comment ces outils peuvent aider le business. En revanche, un responsable de service après-vente ou de la relation clientèle, au même titre qu’une personne en charge du recrutement aux ressources humaines, doit connaître les fonctionnalités avancées de LinkedIn pour ses usages au quotidien.
À l’intérieur de ces populations, on peut avoir un recruteur qui a un profil LinkedIn et qui l’utilise régulièrement. Le niveau d’information ne va pas être le même  : la sensibilisation et la montée en compétences pour l’un, et l’utilisation des fonctions avancées et l’expertise pour l’autre.
La culture du numérique doit être comprise dans ses deux dimensions  : collective, pour servir les enjeux de l’entreprise, et notamment de transformation des métiers, mais aussi individuelle  : celle d’une condition indispensable à l’employabilité du collaborateur. L’entreprise doit aider le collaborateur à prendre conscience que, quels que soient l’entreprise, le métier et les missions, il est indispensable de se former, de réfléchir à l’impact du digital sur la manière de faire son métier.
La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) en matière de numérique pour une grande organisation est-elle à reconsidérer face au risque de disruption accélérée  ? Comment anticiper la transformation digitale des compétences du personnel compte tenu des choix stratégiques de l’entreprise (diversification, rachats, etc.) ?
Oui, il est indispensable de le faire – ou du moins d’intégrer les impacts du numérique dans les métiers. Cela peut signifier bâtir une GPEC dédiée aux métiers du numérique de son entreprise. Cela peut également consister à intégrer dans sa GPEC les impacts qu’aura le numérique sur les métiers. Ensuite, il est nécessaire de se pencher sur les compétences manquantes soit pour les développer en interne, soit pour aller les chercher ailleurs.
Une GPEC en matière de numérique a un sens malgré l’évolution rapide des technologies. Toutefois, cet exercice de projection est de fait plus délicat. Aussi, il conviendrait de définir une GPEC à géométrie variable avec en outre une échelle de temps plus courte pour diminuer l’incertitude.
Ensuite, il faut avoir la capacité de remettre en cause et de faire évoluer cette GPEC en se focalisant sur certains métiers : par exemple, les fiscalistes seront-ils autant impactés par le numérique que les marketeurs ? Sûrement pas !
Concrètement, il s’agit de développer un état d’esprit chez les collaborateurs plutôt qu’une connaissance des technologies qui sont par ailleurs rapidement évolutives. Cela revient à développer chez les équipes techniques une culture de veille, d’autoformation permanente, d’ouverture intellectuelle et de curiosité. Le digital, et les transformations profondes et rapides qu’il entraîne dans l’entreprise, semblent avoir réhabilité les soft skills, ces capacités à prendre en compte l’environnement et la situation pour y adopter le comportement adéquat. Quand les connaissances techniques changent vite, l’adaptabilité et la capacité à acquérir rapidement ces nouveaux savoirs deviennent centrales.
* * *
Héloïse Lemeillet (@heloiselem), systems HR, digital & data director, LVMH
«  La direction des ressources humaines doit s’organiser en mode agile pour être réactive dans la mise à disposition des services ressources humaines et pouvoir éventuellement les faire pivoter en fonction du contexte et de la demande. »
Vous avez accompagné de nombreuses entreprises dans la transformation digitale des ressources humaines de leur organisation. Quels en sont les facteurs clés  ? Percevez-vous des différences selon le secteur d’activité et/ou la culture d’entreprise ?
Quel que soit le secteur d’activité (banque/assurance, énergie, agro-alimentaire, transport, médias …) ou la culture des entreprises que j’ai accompagnées, la transformation digitale génère de nouveaux défis pour elles. Tout d’abord un marché concurrentiel et une transformation des emplois – selon le rapport 2016 The Future of
Jobs du World Economic Forum, 65  % des enfants entrés en primaire en 2016 exerceront un métier qui n’existe pas encore. D’autre part, des habitudes de consommation qui sont reprogrammées  : les besoins et/ou envies – dont le consommateur n’a parfois même pas conscience – lui sont proposés sur son smartphone et sont disponibles en un clic en moins de quarante-huit heures. Finalement, comme le dit le Bouddha, «  il n’existe rien de constant, si ce n’est le changement  ». La commercialisation du premier smartphone date seulement de juin 2007. En dix ans, de nouveaux usages sont apparus. Chaque organisation appréhende cette transformation digitale de manière propre et doit s’adapter à son environnement  : l’industrie ou le retail, où les salariés n’ont pas tous un poste de travail ou une adresse mail en propre, déploieront leur transformation de manière bien différente d’une entreprise de services du numérique (ESN*) ou d’une banque. Chaque approche doit être ajustée au secteur et à la culture de l’entreprise. La direction des ressources humaines doit donc faciliter ce changement permanent – par nature peu prédictible et éphémère. Le facteur clé de la transformation, c’est avant tout l’état d’esprit que l’entreprise insuffle. Les différentes générations qui composent l’entreprise (75  % de millénials estimés en 2025) se retrouvent dans le besoin de sens et de responsabilisation de leurs activités.
Devant ces défis de changement et d’immédiateté, la direction des ressources humaines doit réinventer son offre de services et ses canaux de distribution pour attirer et retenir les collaborateurs. Car, comme le dit Simon Sinek, «  si vous ne comprenez pas les gens [les salariés], vous ne comprenez pas le business ».
Richard Branson affirme qu’il suffit d’apprendre à s’occuper de ses employés et que le reste suivra («  Learn to look after your staff first and the rest will follow ») . Comment les directions des ressources humaines peuvent-elles garantir la symétrie des attentions entre les clients internes et les clients externes ?
L’explosion de la notion d’expérience client, pour mieux positionner et vendre les produits et services dans un contexte d’organisation Vuca (Volatil, Incertain, Complexe et Ambigu), s’est naturellement propagée sur les clients internes. C’est la symétrie des attentions  : mieux on s’occupe de nos clients internes (les salariés), mieux ceux-ci s’occupent de nos clients finaux. Comme le scande Richard Branson, l’objectif est de connaître ses collaborateurs (par exemple, qui ils sont, comment ils fonctionnent …) de façon à produire des services de ressources humaines adaptés (par exemple, des parcours de formation présentielle, distancielle et/ou expériencielle, une offre de mobilité dans l’entreprise …) qui génèrent une expérience unique pour chaque collaborateur  ! L’exemplarité doit venir du haut de la pyramide managériale. À l’instar d’Amazon ou de Netflix dans leur capacité à nous fournir une offre de services personnalisée, la connaissance des collaborateurs et de leurs modes de fonctionnement permet d’offrir des produits et services de ressources humaines segmentés et diversifiés. Les besoins en ressources humaines d’un millénial, d’un quarantenaire avec enfants ou d’un senior sont très différents. Pour assurer l’engagement de chacune de ces typologies de population, il faudra adapter les services de ressources humaines. Sans tomber dans la caricature, et pour clarifier mon exemple, le millénial sera sensible à une offre de formation diversifiée lui permettant de se développer rapidement  ; de son côté, le quarantenaire avec enfants sera sensible aux services de conciergerie lui permettant de gagner en productivité pour un meilleur équilibre vie professionnelle/vie privé  ; et enfin, le senior quant à lui sera sensible à la mobilisation de son expertise qui transmette des savoir-faire et les ancre dans le temps  !
Cette connaissance passe par l’utilisation de nouvelles approches managériales basées sur le peer to peer valorisant la proximité et les « best practices  », mais aussi par des approches permettant de connaître les salariés et d’anticiper au mieux leurs attentes et besoins – la maîtrise des données et leur utilisation devenant un différenciateur fort dans la performance des organisations.
Les directions des ressources humaines, historiquement focalisées sur la paie, les contrats de travail, la gestion administrative, doivent maintenant intégrer le développement de carrière et rechercher l’engagement des collaborateurs. Comment arrivent-elles à concilier ces activités régaliennes et ces activités de développement des collaborateurs ?
Cela demande une certaine dextérité  ! En effet, le rôle de la direction des ressources humaines a beaucoup évolué en vingt ans, et cette évolution s’est même accélérée cette dernière décennie. La direction des ressources humaines fait sa révolution et a parfaitement intuité que tout en conservant un rôle de gardien des processus administratifs, elle doit tendre vers un rôle business. Au-delà des activités régaliennes, elle s’occupe du développement des collaborateurs et doit intégrer le pilotage de la transformation digitale des organisations. La pluralité de ces activités doit l’inciter à adopter les codes de n’importe quelle entreprise  : structurer ses produits et services, définir une stratégie de développement, gérer son positionnement et vendre ses activités tout en maîtrisant ses coûts pour en assurer la rentabilité.
Les clients internes – c’est-à-dire les employés – sont exigeants. Ils attendent que leurs besoins primaires (les besoins physiologiques et sécuritaires de la pyramide de Maslow) soient satisfaits. Les services régaliens – notamment la paie et les organisations – doivent être stables et acceptables pour que l’on puisse s’intéresser aux besoins supérieurs de la pyramide (comme les besoins d’estime et d’accomplissement). En effet, les focus groups que j’ai réalisés auprès de collaborateurs montrent qu’ils ne valorisent pas les efforts tels que la mise à disposition d’équipements/services sportifs ou de conciergerie si les couches primaires ne sont pas satisfaites.
Un autre facteur clé de succès sera l’évolution et la cohérence des actions menées dans le contexte de l’entreprise. La digitalisation de la fonction ressources humaines progresse, mais les outillages restent souvent en décalage par rapport aux usages et modes de communication privés. Pour être connectée à la réalité opérationnelle des managers ou des employés, la direction des ressources humaines doit accélérer sa transformation et synchroniser les comportements sur les intentions incarnées par les valeurs de l’entreprise.
Avec l’évolution des outillages permettant d’automatiser les activités de ressources humaines, quels compromis trouver entre l’humain et la donnée ?
La capacité à «  mastériser  » la donnée (récolte et exploitation) est devenue un vrai facteur de différenciation dans la génération de business. Mais les entreprises ont l’obligation de prendre en compte l’impact de leurs activités avec la législation. Le règlement général sur la protection des données (RGPD) imposé en mai 2018 a permis de réveiller les consciences de tout un chacun sur l’utilisation de ses données personnelles, même si nous restons nombreux à fournir – dans notre vie privée – nos données aux entreprises de type Gafa sous peine de renoncer à l’utilisation de leurs services  ! Dans la vie professionnelle aussi, nous n’hésitons pas parfois à utiliser des solutions grand public échappant aux principes fondamentaux de sécurité imposés par les directions des systèmes d’information.
Dans ce contexte, la direction des ressources humaines doit trouver un juste équilibre entre l’exploitation des données personnelles pour offrir des services personnalisés, et sa raison d’être autour de l’humain pour favoriser la coopération, le co-développement, la créativité … Pour développer le business, les idées restent fondamentales et il y a peu de chances que les données seules génèrent des idées. Pour contribuer au développement du business, la direction des ressources humaines devra donc habilement combiner l’utilisation de la donnée et l’écoute des humains pour accompagner la transformation digitale. À mon sens, les solutions se trouvent à l’intérieur même des entreprises – chez ceux qui la vivent  : les employés – plus que dans les benchmarks et les copier-coller d’autres entreprises.
Le H (pour Humain) est une dimension fondamentale de la direction des ressources humaines. Tous les acronymes de la digitalisation des ressources humaines (par exemple, RPA pour Robotic Process Automation, les chatbots, le machine learning …) doivent être des accélérateurs de la performance administrative et permettre aux directions des ressources humaines de consacrer plus de temps au suivi individuel. e Les collaborateurs du 21 siècle sont des consommateurs habitués aux services digitaux qu’ils utilisent dans leur quotidien. Quels services une direction des ressources humaines peut-elle apporter aux collaborateurs dans un monde d’immédiateté pour accompagner le recrutement, la formation ou la rétention des talents ?
Premièrement, l’ensemble des processus de gestion en ressources humaines connaît une phase de transition avec la prise de pouvoir croissante du candidat/collaborateur :
  • Les candidats attendent que l’entreprise se vende, non plus de se vendre à l’entreprise. Celle-ci doit travailler sa marque employeur et être pro-active pour attirer les talents.
  • Le collaborateur choisit son parcours de formation en activant si besoin ses propres ressources et n’attend plus la mise en place à douze mois du plan de formation de l’entreprise. L’entreprise doit repenser l’univers de l’apprenant en continu dans un contexte de changement perpétuel.
  • Le collaborateur attend des feed-back réguliers de son écosystème (N+1, pairs, équipe …) et non plus un échange annuel normé. L’entreprise doit repenser les relations du collaborateur dans l’entreprise …
Deuxièmement, l’entreprise n’est plus en avance sur son temps sur les outillages qu’elle fournit aux salariés. Les applications de gestion des ressources humaines (et autres) n’ont pas pleinement fait leur mue vers les terminaux mobiles. Les applications SaaS (software as a service) présentes dans les entreprises ont souvent été rapidement transférées de l’ordinateur au mobile, sans repenser la navigation pour une consommation plus fluide. Par ailleurs, de nombreuses start-up en ressources humaines offrant un service spécifique ont boosté le paysage des systèmes d’information des ressources humaines dans les trois dernières années, mais elles ont du mal à dépasser le stade du PoC (proof of concept) et à se déployer dans les grandes entreprises.
Les entreprises doivent savoir mieux écouter leurs collaborateurs qui savent ce qu’ils veulent et construire des services de ressources humaines qui leur seront utiles et respecteront la législation. Pour héberger ces services, il faut penser une architecture ouverte, scalable et évolutive au travers d’une plateforme de ressources humaines. Il est également important de s’organiser en mode agile pour être réactif dans la mise à disposition des services de ressources humaines et pouvoir rapidement les faire pivoter en fonction du contexte et de la demande.
Quels indicateurs de maturité recommanderiez-vous à une direction des ressources humaines de s’appliquer pour accompagner la transformation en profondeur des organisations du fait du digital ?
En synthèse, nous avons cinq facteurs clés de succès pour la transformation digitale :
  • insuffler l’état d’esprit du changement porté par la direction générale ;
  • porter des actions cohérentes avec la culture d’entreprise et l’organisation ;
  • combiner habilement l’utilisation de la donnée et l’écoute des salariés ;
  • construire une digital factory de ressources humaines ;
  • distribuer des services de ressources humaines aux collaborateurs au travers d’un HR store. À l’image d’un compte épargne temps ou d’un compteur CPF (compte personnel de formation), le collaborateur aurait une valeur de points en début d’année avec lequel il pourrait consommer les services en ressources humaines qui lui sont utiles.
Les indicateurs de maturité doivent être adaptés à chaque entreprise et tourner autour de l’adoption des services de ressources humaines par les salariés, et de la performance/efficacité.
* * *
Stéphane Hugon (@eranosconseil), sociologue, co-fondateur de Eranos
« Deux vitesses pour une même transformation, voilà le mal français  ! »
Cinq ans après l’interview que vous nous aviez accordée pour la première édition de Transformation digitale, quelles évolutions structurantes de la société, liées au digital, sont apparues ?
Nous avons probablement en Europe une culture d’urgentistes, nous scrutons les crises et les renversements. En Asie, on donne beaucoup plus d’importance aux silences et aux temps longs. Paradoxalement, les vraies transformations sont beaucoup plus lentes qu’on ne le pense. Il y a eu dans le digital un phénomène de percolation, c’est-à-dire que l’essentiel s’est fait de manière muette, bien en amont de la partie visible. Les transformations relationnelles qui sont à l’origine de l’avènement du digital – entendons ici les mutations des cultures de la confiance, de l’autorité, de la délégation… – ont suivi une dynamique de sédimentation qui a permis in fine une éclosion rapide. Mais là encore, ne nous trompons pas, le digital est une culture, pas un outil. Aujourd’hui, les questions de santé et d’éducation liées au digital vont probablement occulter les sujets de diffusion et de vitesse qui seront des acquis.
La fameuse génération Y accède désormais à des postes à responsabilité, d’encadrement. Son usage intensif des outils collaboratifs préfigurait au début des années 2010 un choc brutal avec ses aînés. Quelles conséquences observez- vous de cette rencontre des générations ? Et quid de la génération Z ?
Effectivement, on note bien dans la période des années 2010 une rupture dans les cultures du travail qui va se déployer grâce au digital. On aurait ainsi le réflexe de penser que cette mutation serait le seul fait de cette génération. Or, l’idée même de génération s’est fragilisée, justement par le biais du digital. Le terme de génération induit que, par les données socio-démographiques d’un public, on puisse anticiper ses comportements. Et on suppose aussi que les générations se caractérisent par une certaine homogénéité de leurs qualités et caractéristiques. Or, ceci est moins vrai aujourd’hui qu’il y a vingt ans, car le digital produit une certaine hétérogénéité dans les cultures et comportements. Si dans l’après-guerre on pouvait comprendre la société par une différence entre mainstream et underground, entre gauche et droite, aujourd’hui, et le digital en est une caisse de résonance, on constate un émiettement des cultures, des styles, des modes de vie … ce qui induit une hypersegmentation au sens marketing. La conséquence est qu’il faut probablement repenser l’idée de génération, et lui préférer des marques de contexte, d’expériences et de situations.
La France se transforme lentement, en adoptant le digital avec retard par rapport à ses partenaires européens, comme l’Estonie qui figure comme un modèle de pays ayant massivement adopté le numérique dans son administration notamment. Comment aider nos compatriotes à adopter des technologies qui ne sont plus si nouvelles ?
C’est l’éternel débat entre les modernes et les anciens. Mais il me semble que la France a une dimension paradoxale, elle accueille à la fois des comportements très traditionnels et d’autres très avantgardistes. Y compris parfois chez les mêmes personnes en fonction des situations de vie. Longtemps, l’innovation technique a été la chasse gardée des territoires professionnels. Mais on a vu un basculement, et une intelligence plus spontanée – proche de la culture populaire – s’est engagée, et a libéré des énergies qui ont donné à la posture de l’amateur une place centrale. Le digital en a été là encore le révélateur, pour le meilleur comme pour le pire. Par son nombre d’utilisateurs et la masse critique d’essais-erreurs, les systèmes largement distribués accélèrent fortement les transformations. Comme dans certains modèles du libre par exemple. Les blocages viennent souvent d’une désynchronisation entre les usages, leur compréhension et les grandes directions, qui sont nécessaires, dans les feuilles de routes des grands équipements collectifs notamment. Deux vitesses pour une même transformation, voilà le mal français !
L’Europe a choisi de protéger les données personnelles en adoptant le RGPD. Quel regard portez-vous sur ce besoin impérieux de protéger la vie privée sur notre continent ? Et quels seraient les critères pertinents à mesurer à cet égard ?
J’ai beaucoup de discussions avec mes clients et collègues à ce propos. J’entends l’idée que le modèle européen est quantitativement dérisoire au regard des influences chinoise ou américaine. Et que dans ce contexte, une contrainte de ce type peut apparaître comme un obstacle à la crédibilité des systèmes européens. En revanche, on peut se dire aussi que c’est une manière de préserver un mode de vie qui fait la qualité et la singularité de l’Europe. Pour détourner la phrase de Churchill, je dirai que cela ne sert à rien de se battre si on n’a pas de modèle culturel à défendre. De ce point de vue, le RGPD est un atout. En revanche, n’oublions pas que les idées de propriété, d’individu et d’identité sont des expressions de la culture occidentale, et que plus de la moitié des cultures et des marchés n’ont aucune considération pour cela, ni aucun intérêt à s’en inspirer.
Comment appréciez-vous chez vos clients l’évolution des comportements des collaborateurs face à l’augmentation croissante des informations à traiter, à la collaboration avec des personnes extérieures à l’entreprise, à l’émergence de nouveaux types de contrats de travail liés à l’ubérisation de la société ?
Sur la question des rythmes et des volumes d’information, j’entends beaucoup d’entreprises qui pensent qu’on arrive à un moment indépassable. Et que le basculement vers l’intelligence artificielle est désormais nécessaire pour évacuer tout un ensemble de décisions qui deviennent secondaires au regard de la qualité attendue auprès des collaborateurs. Mais cet argument existait déjà du temps des premières mécanisations dans le domaine industriel  : l’idée que les robots traiteraient les flux et que l’humain se concentrerait sur la partie relationnelle …
Sur le point de la collaboration avec des intervenants extérieurs à l’entreprise, c’est une certitude. La porosité des acteurs est devenue une règle, mis à part certains secteurs soumis à des réglementations particulières (je pense à l’alimentaire ou au secteur pharmaceutique). Enfin, sur la question des contrats, je pense que nous sommes effectivement proches d’un nécessaire ajustement des cadres au regard des pratiques.
Sur les trois aspects, on voit bien que le digital accélère les transformations, et que l’imaginaire industriel qui a caractérisé nos activités depuis l’après-guerre est désormais caduc. On peut clairement se reposer la question aussi simplement que cela  : dans un contexte où le digital modifie les hiérarchies, les rythmes de travail et leur synchronisation, le temps, personnel et professionnel, l’espace privé et public, alors comment définir ce qu’est une entreprise  ? Et au-delà de l’entreprise, comment une nouvelle forme de revenu universel pourrait-elle émerger  ? Si elle est assez mature dans certains pays, cette question paraît encore assez polémique en France. Notre pays vit une vraie césure entre une culture issue de notre tradition judéo-chrétienne où l’on acquiert son salut individuel par le travail, et une influence qui a produit le welfare state que l’on voit dans certains pays d’Europe du Nord, et dans lesquels l’appartenance sociale est plus forte que l’action individuelle. N’oublions pas que le revenu universel ne peut exister que dans un contexte de cohésion sociale forte et de contributions non monétaires que la France a connu par le passé, mais qui a été largement chahuté par des aspirations paradoxalement individualistes chez les jeunes générations notamment. Ceci fait du revenu universel un sujet qui ne peut exister que dans le cadre d’une redéfinition complète du travail et de la vie sociale.

Indicateurs et mesure de la maturité numérique associée[modifier]

Personnel[modifier]

Formation[modifier]

PF1. Maîtrise du numérique par les opérationnels de l’organisation
Il s’agit d’analyser les fondamentaux du numérique sous forme :
  • de QCM avec dix mots-clés et leur définition (quatre réponses possibles, dont une juste) pour 25 % de l’évaluation (par exemple, bande passante*, chatbot, cloud, cookie, fablab, hashtag, Mooc, omnicanal, RGPD, transformation digitale) ;
  • d’une liste de cinq catégories d’outils numériques à maîtriser au quotidien (avec un niveau d’évaluation de 0 à 4 pour chacun d’eux) pour 75 % de l’évaluation (suite bureautique, smartphone, réseau social d’entreprise et intranet, sites Internet phares pour les opérationnels, outil informatique utilisé dans l’organisation, par exemple pour la gestion).
Pour l’évaluation des outils numériques, un évaluateur observe et questionne un agent sur son utilisation des cinq catégories d’outils pour produire les cinq notes qui sont ensuite moyennées.
50 agents de différents sites et de tous niveaux pourraient être évalués afin que la note obtenue soit représentative.
Une note globale est calculée par agent ainsi qu’une note moyenne de l’ensemble des agents évalués.
Du fait de l’évolution constante du numérique, la grille d’analyse pour le QCM sera mise à jour chaque année.
NB : Il est possible de recourir à des outils d’évaluation en ligne comme https://pix.fr/développé par le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse et celui de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation.
Moyenne globale supérieure à 10. Plus de 50 % des agents obtiennent au moins 10/20.
Moyenne globale supérieure à 12. Plus de 60 % des agents obtiennent au moins 10/20.
Moyenne globale supérieure à 12. Plus de 80 % des agents obtiennent au moins 10/20.
Moyenne globale supérieure à 14. Plus de 90 % des agents obtiennent au moins 10/20. Plus de 70 % des agents obtiennent au moins 12/20.
Moyenne globale supérieure à 15. 100 % des agents obtiennent au moins 10/20. Plus de 80 % des agents obtiennent au moins 12/20.
PF2. Maîtrise du numérique par les principaux cadres dirigeants
Il s’agit d’analyser les fondamentaux du numérique sous forme :
  • de QCM avec dix mots-clés et leur définition (quatre réponses possibles, dont une juste) pour 25 % de l’évaluation (par exemple, bande passante, chatbot, cloud, cookie, fablab, hashtag, Mooc, omnicanal, RGPD, transformation digitale) ;
  • d’une liste de cinq catégories d’outils numériques à maîtriser au quotidien (avec un niveau d’évaluation de 0 à 4 pour chacun d’eux) pour 75 % de l’évaluation (suite bureautique, smartphone, réseau social d’entreprise et intranet, sites Internet incontournables pour les dirigeants, outils corporate de l’organisation).
Cet indicateur est voisin du précédent (PF1) mais concerne une population réduite : les cadres dirigeants de l’organisation (C level).
Pour l’évaluation des outils numériques, un évaluateur observe et questionne un dirigeant sur son utilisation des cinq catégories d’outils pour produire les cinq notes qui sont ensuite moyennées.
10 cadres dirigeants (moins dans le cadre de TPE, PME, petites associations) de différents sites peuvent être évalués afin que la note obtenue soit représentative (pour les TPE, PME, petites organisations, l’évaluation peut porter sur trois catégories d’outils, le réseau social d’entreprise et intranet ainsi que les outils corporate pouvant être non applicables).
Une note globale est calculée par cadre dirigeant ainsi qu’une note moyenne de l’ensemble des cadres dirigeants évalués.
Du fait de l’évolution constante du numérique, la grille d’analyse pour le QCM sera mise à jour chaque année.
Moyenne globale supérieure à 12.
Moyenne globale supérieure à 14. Plus de 60 % de cadres dirigeants obtiennent au moins 12/20.
Moyenne globale supérieure à 15. Plus de 75 % de cadres dirigeants obtiennent au moins 12/20.
Moyenne globale supérieure à 16. Plus de 90 % de cadres dirigeants obtiennent au moins 12/20.
Moyenne globale supérieure à 16. Plus de 100 % des cadres dirigeants obtiennent au moins 12/20.
PF3. Maîtrise du numérique par le reste du personnel
Le personnel concerné est l’ensemble de l’organisation, sauf les cadres dirigeants et les opérationnels. Il s’agit d’analyser les fondamentaux du numérique sous forme :
  • de QCM avec dix mots-clés et leur définition (quatre réponses possibles, dont une juste) pour 25 % de l’évaluation (par exemple, bande passante, chatbot, cloud, cookie, fablab, hashtag, Mooc, omnicanal, RGPD, transformation digitale) ;
  • d’une liste de cinq catégories d’outils numériques à maîtriser au quotidien (avec un niveau d’évaluation de 0 à 4 pour chacun d’eux) pour 75 % de l’évaluation (suite bureautique, smartphone, réseau social d’entreprise et intranet, sites Internet usuels, outils numériques de l’acteur numérique sur les PC).
Cet indicateur est voisin du PF1 mais concerne un échantillon représentatif du personnel qui n’est ni dans la partie opérationnelle ni cadre dirigeant. Pour une grande entreprise, ce peut être les personnes du siège, au sein des fonctions transverses ou travaillant dans des business units et filiales par exemple.
Pour l’évaluation des outils numériques, un évaluateur observe et questionne la personne sur son utilisation des cinq catégories d’outils pour produire les cinq notes qui sont ensuite moyennées.
50 personnes (moins dans le cadre de TPE, PME, petites associations) de différents sites pourraient être évaluées afin que la note obtenue soit représentative (pour les TPE, PME et petites associations, l’évaluation peut porter sur quatre catégories d’outils, le réseau social d’entreprise et intranet étant bien souvent non mis en œuvre).
Une note globale est calculée pour chacune des personnes ainsi qu’une note moyenne de l’ensemble des personnes évaluées.
Du fait de l’évolution constante du numérique, la grille d’analyse pour le QCM sera mise à jour chaque année.
Moyenne globale supérieure à 10. Plus de 50 % des agents obtiennent au moins 10/20.
Moyenne globale supérieure à 12. Plus de 60 % des agents obtiennent au moins 10/20.
Moyenne globale supérieure à 12. Plus de 80 % des agents obtiennent au moins 10/20.
Moyenne globale supérieure à 14. Plus de 90 % des agents obtiennent au moins 10/20. Plus de 70 % des agents obtiennent au moins 12/20.
Moyenne globale supérieure à 15. 100 % des agents obtiennent au moins 10/20. Plus de 80 % des agents obtiennent au moins 12/20.
PF4. Nombre d’heures consacrées par an à la formation numérique par collaborateur
Il s’agit de mesurer l’investissement que consent l’organisation aux formations au numérique de son personnel, qu’elles soient délivrées en présentiel ou en e-learning avec ou non usage des Mooc. Elles couvrent à la fois l’environnement technique et numérique de l’organisation et les spécificités des technologies. Cet indicateur se définit en décomptant le volume de temps moyen de formation consacré chaque année par collaborateur au numérique, combiné à son auto-formation via la veille pour acquérir des compétences numériques et à un taux de collaborateurs ayant suivi au moins une formation numérique.
Au moins dix heures de formation au numérique en moyenne par agent, 20 % au moins des collaborateurs ayant suivi une formation numérique.
Au moins vingt heures de formation au numérique en moyenne par agent, 40 % au moins des collaborateurs ayant suivi une formation numérique. Auto-formation via la veille sur Internet encouragée par le management dans le cadre des missions du personnel à hauteur de x minutes par jour, selon ce qui est précisé dans la charte d’usage (voir OG5, « Charte d’usage du numérique »).
Au moins trente heures de formation au numérique en moyenne par agent, 50 % au moins des collaborateurs ayant suivi une formation numérique. Le top management a établi une stratégie de Mooc pour multiplier les formations à la demande afin de sensibiliser à la stratégie, au numérique et à l’innovation, et permettre d’intégrer les nouvelles connaissances.
Au moins trente heures de formation au numérique en moyenne par agent, 80 % au moins des collaborateurs ayant suivi une formation numérique. L’auto-formation via la veille sur Internet fait l’objet de partage pour les éléments pertinents pour le domaine de l’organisation sur le réseau social d’entreprise, en étant encouragée par le management.
Au moins quarante heures de formation au numérique en moyenne par agent, 100  % des collaborateurs ayant suivi une formation numérique.
PF5. Engagement collectif à la formation au numérique via les plateformes de l’organisation et possibilité d’avoir des formations juste-à-temps (e-learning, Mooc)
Cet indicateur apprécie le fait que l’organisation propose un catalogue (en ligne, hors ligne). Dans celui-ci, chaque collaborateur a les moyens de choisir ses formations en accord avec sa hiérarchie et avec les ressources humaines.
Existence d’un catalogue de formations au numérique.
Benchmark annuel du catalogue de formations au numérique avec l’état de l’art (lutte contre l’obsolescence des programmes).
Possibilité pour les collaborateurs de noter les formations, d’être identifiés comme ayant suivi une formation dans les bases de données ressources humaines et/ou outils collaboratifs et pouvant être sollicités par des apprenants (partage de retour d’expérience, démonstration sur site, etc.). Utilisation des Mooc dans au moins un tiers de la formation en volume horaire (économie de coût, de temps de transport, formation juste-à-temps et rapidement utilisable) avec une visibilité de ce type de formation sur les outils de l’organisation.
Enrichissement du catalogue à l’initiative des collaborateurs, élaboration de parcours de formation jalonnés de prérequis. Pour une même formation, recours systématique au Mooc dès que possible pour les fonctions support, avec un management qui facilite des plages disponibles à cet effet. Pour les fonctions commerciales, traitement au cas par cas du fait du besoin de sortir de l’activité opérationnelle pour prendre du recul : mix entre présentiel et formation à distance à rechercher.
Suivi et évaluation des plans de formation au numérique des collaborateurs. Des cours leur sont proposés et font l’objet d’une évolution et d’une adaptation au gré de l’évolution des technologies, des besoins, de la maturité de l’organisation (ajout, suppression, modification, et ce de façon collaborative). Utilisation de l’e-learning et des Mooc pour au moins la moitié des formations (en volume horaire).
PF6. Formation et évaluation de l’éthique du personnel
La composante éthique devient importante par rapport aux conséquences dramatiques des détournement de fonds, des abus de biens sociaux, etc. Aussi le personnel doit-il être formé et sensibilisé à ces risques pour que son comportement soit exemplaire.
Une charte éthique par rapport aux risques inhérents à l’organisation (par exemple, banque, armée) est mise à disposition du personnel de l’organisation et des clients (s’il n’y a pas de confidentialité) et disponible en ligne.
Le personnel exposé est conformé aux risques inhérents à l’organisation et a un devoir d’explication envers ses clients et prospects quant aux risques possibles.
Idem, mais élargi à l’ensemble du personnel.
Une transparence est faite pour les produits et services de l’organisation qui comporteraient des risques (par exemple, produits financiers avec leur composition, leur origine dans le domaine bancaire ; rupture de la chaîne de froid pour la livraison de denrées périssables pouvant mettre en danger la vie d’autrui).
Des questionnaires d’évaluation en ligne pour l’éthique du personnel sont administrés au moins une fois par an avec des actions de formation en conséquence pour ceux qui auraient un score inférieur à 12/20.
PF7. Transmission de la culture d’entreprise
Le partage de la culture d’entreprise, des codes de l’organisation, de son langage mais aussi des messages de ses dirigeants est intéressant pour véhiculer un esprit, partager le sens et les valeurs de l’organisation dans le but de réaliser plus efficacement les missions.
Les éléments de culture, les codes et le langage sont partagés sur le site de l’organisation ainsi que quelques vidéos des dirigeants.
Idem, mais sur les outils internes à l’organisation de type intranet, réseau social d’entreprise d’une part, et sur le site de l’organisation avec des messages différenciés d’autre part.
Des kits de communication sont disponibles sur les outils numériques (sites, Apps) dans le but de les partager et de les utiliser pour des commerciaux par exemple. Les principes clés des valeurs de l’organisation sont publiés (par exemple, les six principes de BlaBlaCar, les neuf lois du culture code de Netflix, les quatorze principes de leadership d’Amazon).
Des questionnaires de type quiz en ligne permettent au personnel de mesurer sa connaissance de la culture d’entreprise.
Idem + le personnel peut contribuer en enrichissant la culture d’entreprise avec des retours d’expérience terrain, des suggestions qu’il formule sur les outils idoines et qui sont ensuite, pour ce qui est pertinent, intégrés par l’organisation.

Intelligence collective[modifier]

PI1. Degré de veille d’un collaborateur dans l’acquisition de compétences pour l’organisation
Cet indicateur se définit comme le rapport entre le nombre de collaborateurs qui mènent une veille quotidienne tout au long de l’année d’une durée significative et la partagent, et le nombre total de collaborateurs de l’entreprise (par exemple, dans une entreprise de mode pour enfants, assurer une veille quotidienne sur les produits lancés par les concurrents du secteur).
Au moins 5 % des collaborateurs mènent une veille quotidienne de quinze à trente minutes qu’ils partagent au sein de l’entreprise en utilisant des techniques propres et des moteurs de recherche.
Au moins 10 % des collaborateurs mènent une veille quotidienne de quinze à trente minutes en bénéficiant d’outils de veille spécifiques proposés par l’organisation.
Au moins 15 % des collaborateurs mènent une veille quotidienne de quinze à trente minutes avec un partage des résultats synthétisés sur le réseau social de l’entreprise.
Au moins 20 % des collaborateurs mènent une veille quotidienne de quinze à trente minutes avec des commentaires sur les résultats de la veille effectuée, notamment sur la façon dont elle pourrait déboucher sur des projets au sein de l’organisation.
Plus de 25 % des collaborateurs mènent une veille quotidienne de quinze à trente minutes.
PI2. Intelligence collaborative des collaborateurs, partage sur les projets et réseau social d’entreprise
Il s’agit d’évaluer comment les collaborateurs vont partager sur les outils collaboratifs pour assurer une transversalité et faire émerger une intelligence collective utile à la créativité et aux projets.
Une démarche de partage bienveillante invite les collaborateurs à exprimer librement leurs idées pour l’évolution de l’organisation et de son offre. Un outil collaboratif de type réseau social d’entreprise peut être utilisé.
Le top management a un rôle d’exemple pour inciter au partage avec des publications, des commentaires, des partages et des interactions exclusives sur des plages dédiées avec le personnel (par exemple, web conférence) pour échanger par exemple sur un point de stratégie.
Les outils permettent de mettre en relation les experts au sein de l’organisation pour travailler sur des projets, pour des consultations sur des points techniques ou juridiques par exemple, des retours d’expérience sur des projets et des PoC menés.
Chaque collaborateur dispose d’une fiche le décrivant avec ses centres d’intérêt principalement professionnels et la mise en relation est facile.
Les méthodes agiles de type Scrum et des outils de type Kanban sont utilisés dans les équipes projet avec une répartition des rôles et des stand-up meetings le matin sur le réseau social d’entreprise ou en présentiel avec des groupes de travail (que ce soit en présentiel ou à distance). Des indicateurs de participation figurent sur le profil du collaborateur : nombre de publications, de commentaires, de partages.
Des indicateurs de participation quantifiés pour faire émerger l’intelligence collaborative au sein de l’organisation font partie des objectifs annuels de chacun des collaborateurs.
PI3. Partage du savoir pour assurer la continuité de service avec le numérique
Certaines fonctions nécessitent une continuité de service inconditionnelle lors de l’absence de la personne qui assure les tâches (par exemple, community manager, directeur de business unit, etc.). Cet indicateur permet de mesurer le taux de relais pour assurer la continuité en cas d’absence avec l’existence de plusieurs personnes qui détiennent les compétences dans l’organisation pour effectuer les tâches au moment souhaité ou qui peuvent, grâce aux outils en ligne, obtenir les modes opératoires très rapidement pour traiter les demandes sans générer du retard. Il convient d’abord de savoir si les compétences des personnes vacantes existent auprès d’autres collaborateurs dans l’organisation ou peuvent être rapidement trouvées grâce aux outils en ligne. Puis un ratio, baptisé taux d’intérim, est utilisé. C’est le rapport entre le nombre d’équivalents temps plein réalisés par des collaborateurs ayant remplacé des collègues avec l’aide des technologies et le nombre d’équivalents temps plein à remplacer. Celui-ci varie entre 0 et 1. S’il est de 1, l’entreprise a pu se réorganiser temporairement et assurer sa continuité d’activité.
Au moins 90 % des tâches nécessitant une forte réactivité peuvent être assurées par d’autres personnes dans l’organisation dans un délai moyen de la journée. Taux d’intérim pour ce type de tâches > 0,6.
Au moins 95 % des tâches nécessitant une forte réactivité peuvent être assurées par d’autres personnes dans l’organisation dans un délai moyen inférieur à quatre heures. Taux d’intérim pour ce type de tâches > 0,75.
100 % des tâches nécessitant une forte réactivité peuvent être assurées par d’autres personnes dans l’organisation dans un délai moyen inférieur à deux heures pour celles nécessitant une forte réactivité. Taux d’intérim pour ce type de tâches > 0,85.
100 % des tâches nécessitant une forte réactivité peuvent être assurées par d’autres personnes dans l’organisation dans des délais quasiment analogues à ceux des personnes titulaires. Taux d’intérim pour ce type de tâches > 0,95.
Taux d’intérim pour ce type de tâches = 1.
PI4. Capacité d’utiliser les outils et techniques assimilées dans le cadre des missions du collaborateur
Cet indicateur mesure les conséquences de la capacité à utiliser les outils numériques sur l’efficacité opérationnelle de l’organisation. Il prend en compte les outils mis à disposition des collaborateurs comme autant de solutions pour résoudre les problèmes de productivité. Par exemple, si une solution de web conférence est disponible, rien n’empêche a priori la tenue d’une réunion, même si certains participants indispensables ne peuvent pas physiquement se rendre dans la salle de réunion.
Moins de 30 % des problèmes adressables par les outils numériques l’ont été dans l’année écoulée.
30 à 60 % des problèmes adressables par les outils numériques l’ont été dans l’année écoulée.
60 à 80 % des problèmes adressables par les outils numériques l’ont été dans l’année écoulée.
80 à 100 % des problèmes adressables par les outils numériques l’ont été dans l’année écoulée.
Aucun frein à l’usage des technologies disponibles n’est à déplorer au cours de l’année écoulée.
PI5. Degré de contribution sur une période donnée par collaborateur en interne
Cet indicateur est la combinaison de deux paramètres : le nombre moyen de contributions par collaborateur dans l’année et le pourcentage de collaborateurs ayant publié. À cela s’ajoute la qualité des publications perçues, laquelle peut être mesurée par l’adjonction d’un score de réputation (0 à 100) du collaborateur de l’organisation sur le réseau social de l’entreprise. Ce score résulte de la valeur ajoutée apportée aux échanges, des relations qu’il a tissées avec d’autres collaborateurs. Ceci peut être vu à l’image du social selling index de LinkedIn (www.linkedin.com/sales/ssi) qui est une notation basée sur la construction de sa marque professionnelle, la recherche de bonnes personnes, l’échange d’information et l’établissement de relations. En fonction des paramétrages utilisés par l’outil employé par l’organisation et pour les niveaux 4 et 5, on peut imaginer l’établissement d’un tel indicateur qui donne la réputation numérique d’un collaborateur en fonction de la valeur ajoutée qu’il apporte sur les outils internes de l’entreprise.
De 5 à 10 contributions (posts, signalement d’un lien pertinent, commentaire d’un post publié) par collaborateur en moyenne.
Plus de 10 contributions par collaborateur en moyenne. Au moins 25 % des collaborateurs publient.
Plus de 50 contributions par collaborateur en moyenne. Au moins 40 % des collaborateurs publient.
Plus de 100 contributions par collaborateur en moyenne. Au moins 60 % des collaborateurs publient, avec une qualité des publications perçues supérieure à 50  %.
Plus de 200 contributions par collaborateur en moyenne. Au moins 80 % des collaborateurs publient, avec une qualité des publications perçues supérieure à 60  %.
PI6. Degré de contribution sur une période donnée par collaborateur en externe
Cet indicateur mesure la quantité et la qualité des contributions des collaborateurs ambassadeurs de l’organisation sur les réseaux sociaux, les sites Internet, les blogs. Plus l’entreprise est mature sur le digital, plus les contributions de ses collaborateurs sont perçues comme utiles par ses parties prenantes (clients, fournisseurs, partenaires, etc.). Son appréciation résulte de la combinaison de deux paramètres, le nombre moyen de contributions par collaborateur dans l’année liées de près ou de loin à l’organisation et le pourcentage de collaborateurs ayant publié d’une part, et d’autre part la qualité des publications perçues. Pour évaluer la qualité des publications perçues où l’on peut avoir la teneur d’une information (jugée positive, négative ou neutre), des outils peuvent être utilisés sur les réseaux sociaux (Hootsuite, Mention).
De 5 à 10 contributions (tweets, posts sur Facebook, billet sur un blog, photo de l’entreprise sur un compte Instagram, etc.) en moyenne par collaborateur.
Plus de 10 contributions en moyenne par collaborateur. Au moins 30 % des collaborateurs publient.
Plus de 50 contributions en moyenne par collaborateur. Au moins 50 % des collaborateurs publient.
Plus de 100 contributions en moyenne par collaborateur. Au moins 70 % des collaborateurs publient, avec une qualité des publications perçues supérieure à 60  %.
Plus de 200 contributions en moyenne par collaborateur. Au moins 80 % des collaborateurs publient, avec une qualité des publications perçues supérieure à 75  %.
PI7. Appréhension des outils groupe et taux d’utilisation
Il s’agit de mesurer comment les nouveaux outils sont appréhendés par le personnel.
Le personnel qui en fait la demande reçoit les outils de collaboration dans un délai inférieur à sept jours.
Le personnel qui en fait la demande reçoit les outils de collaboration dans un délai inférieur à trois jours.
Le personnel découvre au démarrage (PC, smartphone, autres) que les outils sont installés automatiquement (avec éventuellement redémarrage du poste de travail au moment idoine) ou via un lien de téléchargement sûr sur PC, smartphone ou autre. Ces outils sont utilisés par au moins 75 % du personnel dans les trois jours qui suivent, sachant que le personnel a été formé ou autoformé à son utilisation (sauf le personnel absent au moment de la mise à disposition de l’outil).
Idem, mais au moins 90 % du personnel utilise les outils dans les trois jours qui suivent (sauf le personnel absent au moment de la mise à disposition de l’outil).
Idem, mais 100 % du personnel utilise les outils dans les trois jours qui suivent (sauf le personnel absent au moment de la mise à disposition de l’outil).
PI8. Niveau de mixité du personnel de nature à favoriser l’innovation
Il s’agit pour l’organisation d’avoir une diversité dans ses effectifs de nature à encourager l’innovation et au-delà de tout mécanisme de quotas paritaires stricts dans tous les domaines. Du reste, des quotas stricts complexifient la politique des ressources humaines qui répondent dans ce cas davantage à des nominations/affectations de personnes à des fins statistiques que d’efficience. Pour autant, la diversité encourage une multitude d’approches permettant de voir un problème sous différents angles, ce qui est plus propice à la disruption. Aussi la diversité est-elle à considérer au niveau des genres, des âges, des études, des expériences professionnelles et extraprofessionnelles (par exemple, associatives), à l’étranger, de la culture.
Un genre ne doit pas avoir moins de 25 % de l’effectif au sein de l’organisation.
Un genre ne doit pas avoir moins de 35 % de l’effectif au sein de l’organisation. Au moins 10 % d’effectifs pour chaque tranche d’âge (moins de 25 ans, 25-35 ans, 35- 45 ans, 45-55 ans, plus de 55 ans).
Au moins 15 % d’effectifs pour la tranche [moins de 25 ans]. Au moins 20 % du personnel de l’organisation est impliqué dans une association extérieure à l’organisation avec des responsabilités de type président, secrétaire, trésorier. Au moins 25 % du personnel de l’organisation a connu deux métiers différents pour au moins six mois dans sa carrière (par exemple, marketing et ressources humaines).
Idem + un genre ne doit pas avoir moins de 40 % de l’effectif au sein des dirigeants. Au moins 10 % du personnel de l’organisation a un double diplôme dans deux domaines différents de niveau supérieur ou égal à bac + 4.
Idem + au moins 13 % d’effectifs pour chacune des tranches d’âge. Au moins 10  % du personnel de l’organisation a une expérience professionnelle supérieure à un an à l’international.

Expertise[modifier]

PE1. Capacité à attirer des talents et à les fidéliser
Il s’agit pour l’organisation de pouvoir attirer des talents et des potentiels et les fidéliser dans la durée.
Existence d’un parcours d’accueil pour les nouveaux avec un kit de bienvenue. Proactivité de l’organisation sur les réseaux sociaux, salons, forums virtuels pour séduire les candidats. Mise en avant des projets menés, des valeurs et de l’ADN de l’organisation.
Idem + proactivité de l’organisation sur les chatbots, j obboards et chatlives pour séduire les candidats. Turnover annuel inférieur à 20 % pour les moins de 30 ans. Intéressement et participation, comité d’entreprise attractif. Perspectives de carrière, développement d’une culture de confiance et collaborative avec système de reconnaissance pas uniquement financière.
Turnover inférieur à 12 % pour les moins de 30 ans. Évaluation de la performance à 360° pour permettre les promotions les plus objectives possible, écoute du personnel (via des enquêtes) et détection de signaux faibles (ennui, monotonie dans le travail) avec éventuels plans d’actions ou accompagnement individuel par le management et les ressources humaines.
Idem + facteurs d’attractivité différenciés selon les classes d’âge et les projets de vie (par exemple, moins de 30 ans, 30-39 ans, 40-49 ans, 50 ans et plus). Plan de rétention d’actions et de bonus qui s’inscrit dans la durée (cycle de quatre ou cinq ans par exemple, avec des pourcentages débloquables ou investissables sur le PEE et fonction des résultats) avec des stock-options plans étendus aux cadres supérieurs. Coaching individualisé avec des mentors de l’entreprise ou de l’écosystème de l’organisation, ateliers de développement personnel en petits groupes.
Utilisation de modèles pour la fidélisation des talents de type Keep (kudos, empowerment, excitement, promotion) de Robert Half et Office Team, notamment pour les talents et les hauts potentiels. Existence de learning expeditions pour le personnel sélectionné sur des critères objectifs.
PE2. Ressources de haut niveau
On assiste à un niveau de qualification en progression constante dans l’ensemble des secteurs. Ceci semble corroboré par la transformation digitale des grosses organisations en particulier qui nécessite des profils de plus en plus pointus sur des fonctions notamment au siège, ainsi que pour les start-up et TPE/PME et ETI innovantes.
En outre, internaliser certains développements stratégiques notamment dans le numérique permet de ne pas être dépendant de sociétés tierces.
Cet indicateur mesure la capacité de l’organisation à attirer et fidéliser les ressources scientifiques de haut niveau.
Part de bac + 5 dans les effectifs du siège au moins de 2 % et, parmi le personnel de moins de 30 ans embauché au siège dans l’année, d’au moins 10 %.
Part de bac + 5 dans les effectifs du siège au moins de 8 % et, parmi le personnel de moins de 30 ans embauché au siège dans l’année, d’au moins 25 %.
Idem + part de bac + 8 dans le personnel embauché au siège d’au moins 2 %.
Idem + taux de turnover pour les moins de 35 ans inférieur à 10 % + part de bac + 5 dans les effectifs du siège au moins de 15 % et, parmi le personnel de moins de 30 ans embauché au siège dans l’année, d’au moins 40 %.
Idem + taux de turnover pour les moins de 35 ans inférieur à 15 % + part de bac + 5 dans les effectifs du siège au moins de 20 % et, parmi le personnel de moins de 30 ans embauché au siège dans l’année, d’au moins 50 % + part de bac + 8 dans le personnel embauché au siège d’au moins 4 %.
PE3. Capacité à anticiper les nouveaux métiers de l’organisation
Il s’agit pour l’organisation de pouvoir disposer des ressources dont elle aura besoin dans x années (recrutement, formation et gestion des départs) et de préparer la mutation des compétences et des expériences requises pour assurer que les missions demandées à ce moment-là pourront bien être satisfaites. Ceci passe par l’existence d’une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC), notamment pour le numérique en prévision des besoins futurs. Les besoins de ressources digitales étant connus, l’entreprise doit se donner un outil de planification des recrutements et des formations adapté à l’univers du digital.
Les métiers du numérique sont référencés dans la GPEC de l’entreprise sans tenir compte de leur spécificité.
Le management reconnaît l’inadaptation de la GPEC classique à certains profils du numérique et sollicite la direction des ressources humaines pour réfléchir à des anticipations.
Des critères innovants de recrutement sont déployés (par exemple, score de type social selling index de LinkedIn ou équivalent Klout* du candidat, recours à la vidéo et à des serious games). Des outils de planification des besoins sont utilisés par les ressources humaines.
Des méthodes d’identification des talents (internes et externes) telles que hackathons ou projets tutorés avec les écoles ayant des enseignements en lien avec le numérique sont mises en place. En lien avec la veille, les métiers qui vont se développer ou apparaître font l’objet d’une anticipation des ressources humaines et du management dans le catalogue de formations, en fonction également des projets professionnels du personnel et des besoins, avec une liste de métiers et un dimensionnement en termes d’effectifs pour l’organisation. Ce peut être le data scientist, le big data analyst, l’impact des chatbots sur les fonctions de certaines catégories de personnel, par exemple sur les téléconseillers (en termes de dimensionnement mais aussi d’expertise requise technique, réglementaire, juridique, etc.) et les outils numériques que les différentes catégories de personnel auront à maîtriser dans leurs fonctions.
Tous les métiers du numérique sont couverts. Une part d’incertitude est laissée aux métiers qui n’existent pas encore, avec néanmoins une veille permanente en partant par exemple d’outils comme le hype cycle du Gartner Group appliqué au domaine de l’organisation, en définissant également l’impact pour les métiers et l’échelon temporel du besoin associé et quantitativement avec un processus de revue annuel de la planification des besoins en ressources humaines pour les cinq ans à venir. Le sourcing des profils s’appuie sur les outils numériques. Des méthodes de recrutement et de formation innovantes sont testées.
PE4. Motivation et récompense modulée selon l’accompagnement au changement
Ce critère permet d’indiquer comment la conduite du changement est facilitée avec des éléments de motivation pour impliquer le personnel de l’organisation.
La culture de l’organisation est associée à un accompagnement des personnes en leur expliquant en quoi leurs missions et leurs fonctions vont changer et pour quel bénéfice l’entreprise est faite. La question du sens dans le changement est mise en avant.
Lors de la conduite du changement, les personnes en charge de l’accompagnement interagissent avec les personnes concernées par les changements (nouveaux métiers, nouveaux outils et nouvelles technologies, nouveaux business plans, etc.) en lien avec les managers locaux et les ressources humaines. Ils donnent du feed-back positif auprès des managers en soulignant les forces de leurs équipes et les points à améliorer.
Des primes sont versées et modulées selon l’impact de la transformation digitale sur le travail de la personne et son niveau de responsabilité. La récompense versée peut être affectée sur le PEE (s’il s’agit d’une grande entreprise ou si c’est applicable), qui peut par ailleurs bénéficier d’un abondement.
Les récompenses financières sont couplées avec des témoignages de satisfaction pour le personnel le plus enclin à accompagner la transformation numérique. Ce peut aussi être des classements, challenges, prix.
L’analyse de la motivation intrinsèque du personnel dans la diversité de ses profils est faite pour accompagner la transformation digitale de l’organisation. Un équilibre est systématiquement recherché pour assurer une reconnaissance de l’ensemble du personnel (et notamment les nouveaux éléments, plus diplômés que les anciens, par exemple dans les centres de back office plus affectés par les changements) pour associer l’ensemble des parties prenantes au changement. Des ateliers brassant les profils peuvent être conduits pour gérer le changement.
PE5. Qualité de vie au travail avec le numérique
Cet indicateur mesure la qualité de vie au travail permettant à l’ensemble du personnel de s’y sentir bien et d’être efficace dans ses missions, avec notamment l’aide des outils numériques.
Utilisation de services pour faciliter le travail du collaborateur (restaurant d’entreprise, service de conciergerie, place en crèches d’entreprise, possibilité accrue de télétravail) qui sont également gérés par les collaborateurs en ligne avec le paiement associé dématérialisé pour les services concernés.
Choix des localisations des sites par rapport aux infrastructures de transport pour minimiser le temps de trajet et le stress, et mise en place d’outils pour le co-voiturage entre collaborateurs initiée par les ressources humaines.
Existence de recours au télétravail et d’outils de web conférence encouragés par le management pour avoir du travail :
  • occasionnel (par exemple, plans B en cas d’aléas climatiques, de problèmes techniques ou de grèves dans les transports) ;
  • fixe (par exemple, deux jours par semaine) ;
  • variable (selon les besoins et les impératifs de réunions en présentiel par ailleurs).
Usage des outils de réservation des salles disponibles sur PC et smartphone avec système de visualisation (nombre de personnes, matériel, boissons) et alertes envoyées.
Mise en place de « villages » dans l’esprit de Google, par exemple, au siège et dans les business units avec espaces de travail conviviaux, machine à café, salles zen et de sport, cabines de relaxation.
Partenariat avec des entreprises de type Coursera pour proposer de la formation e-learning illimitée au personnel.
PE6. Relations avec les écoles et les universités et taux d’étudiants dans les effectifs
Ce critère permet de mesurer comment l’organisation se tourne vers l’avenir avec le souci de rajeunir l’âge de la population de ses agents et d’interagir avec les structures de formation.
Existence de correspondants relations écoles/universités clairement identifiés dans l’organisation. Typiquement, 1 par business unit.
Participation à des salons étudiants ciblés selon les besoins en recrutement de l’organisation. Politique de recours à des apprentis, alternants, stagiaires (notamment en dernière année de formation) et mise en place d’agréments associés (accords de non-divulgation, NDA) pour préserver la confidentialité des informations.
Idem + orientation conforme aux besoins du moment mais également dans une perspective de GPEC à moyen/long terme. Versement de la taxe d’apprentissage avec des critères de répartition équitable par rapport aux diplômés et aux étudiants dans ses effectifs. Au moins 6 % d’apprentis, d’alternants et de stagiaires dans les effectifs en moyenne dans l’année. Des projets tutorés entre l’entreprise et les écoles/ universités sont menés.
Relations avec les écoles et les universités visant à proposer des formations au personnel pour participer à son employabilité sur les nouvelles missions de l’organisation. Au moins 9 % d’apprentis, d’alternants et de stagiaires dans les effectifs en moyenne dans l’année.
Idem + recours à des Mooc pour certains types de formation. Lancement de compétitions de type Amazon Campus Challenge avec proposition de stages et primes pour les lauréats. Au moins 12 % d’apprentis, d’alternants et de stagiaires dans les effectifs en moyenne dans l’année.
Synthèse des indicateurs selon le type d’organisation
Une croix dans une case du tableau signifie que l’indicateur est applicable pour la catégorie d’organisation considérée.

Points clés[modifier]

  • Réduisez la fracture numérique au sein de votre entreprise en formant en continu vos collaborateurs au digital.
  • Développez une culture collaborative, ouverte, décloisonnée, réactive, engagée, disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, et incitez fortement au partage pour augmenter l’intelligence collective.
  • Aidez vos collaborateurs à investir les médias sociaux en devenant des ambassadeurs de la marque.
  • Attirez des talents et développez-les en tirant profit du numérique.
  • Mesurez vos progrès dans la transformation digitale de vos équipes selon trois aspects  : formation, intelligence collective, expertise.
1World Economic Forum, The Future of Jobs: Emp loy ment, Skills and Workforce Strategy for the Fourth Industrial Revolution, janvier 2016, http://www3.weforum.org.

Chapitre 7[modifier]

Levier  : offre

Positionnement du levier et objectifs[modifier]

Le numérique nécessite d’avoir une offre sur mesure, évolutive et rapidement adaptable pour répondre à des clients mieux informés, moins fidèles aux marques et attentifs à la réputation des marques sur Internet, en particulier sur les médias sociaux.
L’entreprise se doit d’évoluer en décloisonnant ses directions et en co-innovant avec un écosystème d’acteurs qui va l’aider à adapter son offre aux besoins des clients et à les anticiper. La culture du prototypage et des maquettes avec des étapes par essais et erreurs jusqu’au lancement éventuel d’un produit devient la règle et vient bousculer un monde cartésien et déterministe. Cet univers était jusqu’alors rompu à la gestion de projets reposant sur des cahiers des charges précis et laissant peu de place aux schémas disruptifs et à l’innovation.
Dans ce contexte, le fait de mettre en place une stratégie multicanale pour atteindre le client (en face-à-face, sur Internet, par téléphone, etc.) et de bâtir une logistique associée pour mieux le servir en cas de rupture de stock par exemple est crucial. Il convient également de s’attacher à l’exploitation de ses parcours sur les sites de l’entreprise pour constituer une expérience client unique pour ses visites ultérieures. Enfin, la gestion de son image sur Internet, de sa visibilité et de sa cohérence est un aspect important pour exister positivement.

Groupements[modifier]

Nous proposons de caractériser les produits et services d’une entreprise engagée sur
le numérique suivant quatre groupements répondant aux questions structurelles de ce type d’entreprises :
  • Innovation et concep tion  : comment développer l’offre pour qu’elle demeure adaptée à une clientèle moins fidèle aux marques, très utilisatrice du smartphone, nomade et privilégiant l’omnicanalité ? Comment développer de nouveaux services, interopérables et évolutifs avec un écosystème, et les co-construire en respectant la législation notamment par rapport aux données ?
  • Commercial  : comment les ventes et les stocks peuvent-ils être pilotés avec le numérique  ? Comment avoir des données commerciales en temps réel  ? Comment mesurer le taux de transformation en vente ? Comment réduire le time to market  ?
  • Marketing  : comment exploiter les données pour l’évolution de l’offre ou mieux établir les tarifs  ? Comment assurer une cohérence de la marque sur Internet et à l’international ? Quelle est l’audience sur les médias sociaux ?
  • Exp érience client  : la relation avec le client ou le prospect est-elle omnicanale  ? Comment est assurée la relation client avec les outils numériques  ? Comment l’organisation s’inscrit-elle dans un modèle phygital avec une complémentarité en ligne et avec des agences physiques ?
NB  : Les indicateurs proposés ne préjugent pas si les projets sont innovants ou non et ne se prononcent pas sur le choix de canaux de vente plutôt que d’autres. De même, il ne s’agit pas de s’attacher à la qualité intrinsèque de l’offre développée et de ses caractéristiques fonctionnelles et techniques.
Catherine Barba (@cathbarba), présidente du PEPS Lab, fondatrice du WIN Forum NY, auteur de Le magasin n’est pas mort ! et business angel
«  Plus aucune entreprise ne doit croire que son métier est de vendre des produits. »
Vous avez vu décoller Internet en France. Selon vous, qu’est-ce qui a le plus changé dans la façon de vendre ?
Ce qui a le plus changé avec Internet, c’est que nous sommes désormais et résolument dans l’ère de la relation. Plus aucune entreprise ne doit croire que son métier est de vendre des produits  : il y a une tout autre dimension qui relève de la relation, de l’émotion, du lien. Quel que soit son secteur, si on veut se différencier et durer, c’est d’abord une expérience que l’on doit vendre, et proposer des solutions, un partenariat jugé utile par le client. Ce partenariat doit être efficace, personnalisé, avec une forte dimension d’écoute et d’attention, avec de l’empathie. C’est cela que les Américains appellent « value for money »  : c’est la valeur associée à ce que je paye pour un produit ou un service.
Cela a toujours été vrai, et ça l’est de façon autrement plus prégnante avec la concurrence d’Internet. Dans cette logique, que ce soit en B2C ou en B2B, il faut se dire que le client veut garder du lien après l’achat. Il veut aussi pouvoir évaluer l’accueil, l’expertise, l’offre, le prix ou les services, par tous les moyens qui le relient à l’entreprise  : newsletter, mél personnalisé, App, site web, mobile … Si la création de ce lien coûtait cher avant Internet, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Ce qui compte, ce n’est plus la transaction, mais le lien. Ce n’est plus le médium, mais le contenu des messages. Avec les données, le one to one n’est plus un fantasme. Le digital est la promesse d’une extraordinaire proximité, d’une personnalisation plus forte que jamais, à distance.
Compte tenu du changement permanent des outils (version bêta permanente), qu’est-ce qui est pérenne dans la présence d’une organisation sur Internet  ? Qu’avez-vous pu observer depuis quatre ans à New York sur la transformation du commerce ?
Ce qui compte aujourd’hui pour toute entreprise, aux États-Unis comme partout ailleurs, est sa capacité à innover, à faire des choses nouvelles, à regarder le monde et les clients autrement. Pour cela, quand on est une grande organisation monolithique, on doit apprendre à abaisser son centre de gravité pour faire porter par chaque collaborateur la dynamique de transformation. Chaque salarié doit pouvoir devenir un catalyseur de cette transformation, avec une vision limpide de la direction à prendre et la capacité à se projeter dans un avenir commun positif. Quand Isabelle Kocher dit  : «  De baleine, nous devons devenir un banc de poissons  », c’est exactement l’image que je me fais du challenge des grandes entreprises aujourd’hui  : le passage à une organisation matricielle, coopérative, qui reconnecte les gens ensemble, une organisation faite de collaborateurs à qui l’on fait confiance et chez qui on réveille l’amour du client et l’esprit d’entreprendre. La bonne nouvelle est qu’il me semble que les entreprises françaises sont probablement mieux armées que les américaines pour opérer cette transformation. Je regarde avec admiration comment Leroy Merlin, Kiabi ou Tape à l’œil réussissent à diffuser l’agilité et l’esprit d’entreprendre dans leurs organisations, et je me dis que Target, Macy’s et tous les acteurs du retail américain feraient bien de s’en inspirer !
Face aux accès multiples du client (selon les supports de connexion, les navigateurs, les versions, les canaux), que conseillez-vous pour avoir une vision unique du client et faciliter son parcours sur les sites de la marque qu’il visite dans le but d’améliorer les ventes ?
Une chose me marque toujours aux États-Unis  : quand je rencontre un entrepreneur, que ce soit le fondateur de Nike ou le jeune dirigeant d’une start-up, il commence toujours par décrire son entreprise à travers sa visée : pas la description de ses produits ou services, mais son sens, son ambition, le bénéfice ultime et différenciant apporté à ses clients. J’aime cette première approche qui passe par le «  pourquoi  » plus que par le « comment ».
Avoir une vision du client unique, c’est d’abord avoir défini une ambition relationnelle unique pour ses clients – que chaque collaborateur aura la liberté de traduire au quotidien dans ses postures, ses comportements, ses attitudes – mais aussi «  augmenter » sa qualité de service grâce aux outils numériques. La conjonction de cette ambition client forte, d’une culture de la liberté («  empowerment  ») et d’une bonne culture digitale est une formule extrêmement efficace. Aucune entreprise ne peut prétendre accompagner ses clients dans leur transformation digitale sans d’abord se transformer elle-même en une entreprise digitale autour de ses clients.
Il y a là un énorme enjeu de communication et de formation en interne, tant au siège qu’auprès des équipes terrain. Certaines entreprises l’ont bien intégré et investissent largement sur ces postes clés. Comment faire comprendre à chaque personne dans l’entreprise qu’un client n’est plus égal à un canal ? Que l’on doit continuer à servir son client en magasin (ou au téléphone, sur le site, par mél, sur les réseaux sociaux …) le mieux possible, avec le plus d’écoute et d’empathie possible, tout en se sentant responsable de la façon dont il est servi sur les autres canaux, parce que c’est le même client – le mien !
Face à un client plus libre que jamais de passer d’un canal à un autre, chacun doit apprendre à être Shiva, à coopérer plus que jamais, pour vivre d’abord soi-même en interne l’expérience sans couture, fluide et cohérente que l’entreprise prétend vouloir faire vivre à ses clients. Comment faire grandir sa capacité d’écoute et d’empathie – individuelle et collective – pour se tenir au plus près des attentes, du ressenti, des besoins de ses clients et de ses salariés, et peut-être réorienter sa production, ses produits et ses services en conséquence ? L’avenir est à la co-création en interne, et à la coopération accrue entre les grandes et petites entreprises. « Find people who make you better  », me conseillait un grand entrepreneur américain  : une quête passionnante dont chacun dans l’entreprise ne peut ressortir que grandi, et le client … ravi !
Vous êtes administratrice du groupe Renault  : quel est l’impact de l’arrivée de la voiture autonome sur les constructeurs et les clients, et en particulier quels sont les nouveaux usages apportés par la mobilité ?
Avec l’arrivée de la voiture intelligente et autonome, tous les services vont très vite être à la demande. Le client n’aura plus à choisir entre l’achat d’une voiture, le voyage avec un covoitureur ou l’utilisation d’un service d’autopartage  : il se fera conduire où il veut, quand il veut, avec qui il veut, sur de courtes comme de longues distances. Il paiera pour des kilomètres, pour un service de déplacement, pas pour une voiture. Cela a un
impact énorme sur le métier et le modèle économique des constructeurs. Pour eux, le nouvel enjeu sera d’aider à fournir la bonne voiture au bon moment et au bon endroit (dispatching), à optimiser la trajectoire en mutualisant les demandes (data engineering) pour offrir une expérience de voyage sur mesure. Le métier ne consistera plus seulement à vendre des véhicules et gérer un parc automobile, mais à être un partenaire d’expérience de voyage personnalisée qui maîtrise parfaitement les données client. On a une peur terrible de voir son avenir compromis parce que son métier change. Dans cette optique, l’urgence est d’accompagner tous ses collaborateurs vers la conviction que cette révolution est source de création de valeur.
* * *
Isabelle Hervouet (@ZazHervouet), Europe director of digital, acquisition & customer engagement chez Unibail-Rodamco- Westfield
«  La transformation que nous menons n’est pas digitale, mais elle s’appuie à 100  % sur le digital pour passer d’une stratégie de “drive to mall anonyme” à un “drive to store personnalisé”. »
Unibail-Rodamco-Westfield est le premier créateur et opérateur global de centres de shopping de destination. Aujourd’hui, le groupe possède 92 centres de shopping, incluant 55 « flagships » dans les villes les plus dynamiques d’Europe et des États-Unis. Les centres du groupe accueillent chaque année 1,2 milliard de visites. Présent sur 2 continents et dans 12 pays, Unibail-Rodamco-Westfield propose une plateforme unique pour les enseignes et les événements des marques, et offre aux clients une expérience exceptionnelle et sans cesse renouvelée, dans des lieux conformes aux plus hauts standards environnementaux.
Les centres commerciaux continuent d’avoir une forte capacité d’attraction des consommateurs. Certains se transforment en espace de vie, des drives sont proposés, etc. Quelles technologies mettez-vous en œuvre pour attirer le consommateur vers les marques et enseignes des centres Unibail-Rodamco- Westfield ?
De manière classique, nous utilisons les réseaux sociaux (Facebook, Instagram) et Google pour promouvoir nos centres et les marques qui y sont présentes. Nous communiquons également de plus en plus via CRM (mél, push, SMS…) pour informer nos clients de façon ciblée, voire personnalisée, sur les marques et les événements susceptibles de les intéresser (l’ouverture d’une boutique ou des temps forts commerciaux, par exemple).
Afin de personnaliser au maximum l’expérience de nos clients, de mieux répondre à leurs attentes et être plus efficaces, nous concentrons actuellement nos efforts/tests sur la communication dans le centre, lorsque nos visiteurs sont réceptifs et potentiellement intéressés par nos messages. Nous testons dans ce cadre plusieurs solutions en ce moment  : du push geofenced au SMS géolocalisé en passant par le push Wi-Fi ou le push wallet.
Avec le poids grandissant du e-commerce, comment luttez-vous contre l’érosion des visites en centre commercial et contre l’omniprésence en ligne des Gafa  ? Dans quelle mesure êtes-vous clients des Gafa ?
La richesse (en moyenne plus de 200 boutiques par centre) et la qualité de notre offre commerciale (recherche systématique des marques les plus tendance), associées à la qualité de l’expérience que nous offrons, nous permettent d’attirer un nombre élevé de visiteurs – un nombre par ailleurs en croissance régulière. Un centre comme Les Quatre Temps à La Défense, par exemple dépasse les 42 millions de visiteurs annuels  ; combinés, nos deux centres de Londres atteignent 81,8 millions.
Nos clients sont sûrs de trouver ce qu’ils cherchent dans un cadre agréable qui peut aussi leur offrir loisirs, restauration et expériences inattendues (concerts, événements, animations pour enfants …). Nos centres sont de véritables lieux de destination.
Nous considérons le digital comme une double opportunité  : pour nous, celle d’engager un contact direct et personnalisé avec les visiteurs. Pour les enseignes, Internet est une obligation  : nous les encourageons à s’y développer parce que les clients sont et seront de plus en plus « multicanaux ».
Nous observons aujourd’hui une vraie convergence entre magasins physiques et e- commerce. La moitié du commerce en ligne est en fait réalisée par des acteurs historiques de la distribution physique. Par ailleurs, les acteurs nés en ligne ouvrent désormais des magasins, et ils le font au sein de nos centres de shopping, comme Amazon !
Comment la mise en œuvre du RGPD a-t-elle impacté vos programmes de qualification de prospects et vos programmes de fidélisation ?
Nous étions présents à l’époque dans 11 pays européens, avec 11 pratiques différentes. L’arrivée du RGPD nous a permis d’uniformiser globalement notre fonctionnement. Devant la complexité de l’alignement de ces pratiques multiples, nous avions d’ailleurs anticipé l’arrivée de ce texte et étions finalement en conformité dès octobre 2017. Dans la mesure où toute notre collecte de données est basée sur la volonté de nos visiteurs à rejoindre notre programme de fidélité, et à ce titre à bénéficier de communications/offres segmentées voire personnalisées, les choses sont claires et explicites dès le début de notre relation. Cette démarche a même permis de renforcer
leur satisfaction.
Dans un monde devenu digital, comment équipez-vous les centres commerciaux en vue d’accompagner un parcours client de plus en plus omnicanal ?
Le digital est présent tout au long du parcours client :
  • lors de la préparation de sa venue avec le site web pour s’assurer de la présence d’une boutique, réserver sa place de cinéma ou consulter les offres disponibles pour les 7,5 millions de membres du programme de fidélité ;
  • à son arrivée dans le centre grâce à un accès facilité au parking via le service in & out (reconnaissance de plaque) ;
  • à l’intérieur du centre avec l’orientation via la MAP interactive de l’app qui emmène directement le visiteur à la boutique/ restaurant de son choix ;
  • et enfin à la sortie, avec Find my car qui ramène le client directement à sa voiture, sans avoir besoin de la chercher.
Pour offrir ces services géolocalisés, nous nous appuyons sur une infrastructure robuste avec un réseau dense de beacons et un Wi-Fi de grande qualité partout dans nos centres.
Nous avons également mis en place une app qui permet aux enseignes, aux prestataires et à la direction du centre de communiquer en temps réel, de partager offres d’emploi, performances commerciales, messages de sécurité ou encore avantages et réductions réservés aux travailleurs du centre.
Vous menez une transformation en profondeur faisant du digital un atout dans un monde éminemment physique dans lequel le modèle économique s’appuie sur la location de surface commerciale et le drainage de visiteurs. Quels indicateurs de maturité numérique suivezvous dans la contribution au métier traditionnel de loueur d’espace de vente ?
La transformation que nous menons n’est pas digitale, mais elle s’appuie à 100 % sur le digital pour passer d’une stratégie de «  drive to mall anonyme  » à un «  drive to store personnalisé  ». Notre objectif est d’offrir un meilleur service à nos visiteurs ET à nos enseignes via la connaissance individuelle d’un maximum de nos clients. Nous déployons également notre capacité à les engager individuellement vers les boutiques qui seraient susceptibles de les intéresser et qu’ils ne connaissent/fréquentent pas encore.
Nous suivons par exemple à un rythme hebdomadaire le nombre de membres du programme qui nous rejoignent grâce aux canaux digitaux, leur taux d’engagement vis- à-vis du centre (taux d’ouverture des méls, participation à des événements …), la part des visiteurs qui nous ont indiqué leurs marques préférées ou bien encore l’efficacité de nos campagnes de drive to store.
* * *
Yann Gourvennec (@ygourven), président-fondateur de Visionary Marketing
« Le marketeur de demain sera un geek ou ne sera pas. »
Comment les entreprises adaptent-elles leur marketing (vente inversée, contenu stratégique, omnicanalité, logistique et distribution, etc.) ?
Seule une vue statistique permettrait de répondre précisément à cette question afin de se baser sur des faits et non des impressions.
Prenons la distribution et l’omnicanalité en exemple et essayons de répondre sur ce périmètre restreint. Simplifions encore les choses et ne considérons que les États-Unis où la consommation de technologie est une des plus fortes du monde (environ 30 % du total) . On découvre que, sur ce périmètre, 87 % des distributeurs fournissent sur leurs sites web un store locator, mais que seuls 35  % d’entre eux savent le relier à leurs stocks (étude Kibo & Astound Commerce en 2017 ). Toujours selon la même source, seulement un tiers des distributeurs utilisaient les technologies mobiles en magasin. Plus intéressant, malgré le décalage entre ces chiffres et l’état des lieux de ce côté-ci de l’Atlantique, on constatait encore que chez près de 20 % des distributeurs aux États- Unis des différences entre leurs prix en ligne et en magasin perduraient encore.
En conclusion de ce rapide balayage, et sous réserve d’une lecture plus approfondie en phase avec les conclusions de l’étude, l’inclusion de la technologie dans les points de vente est contrastée.
Certes, on a dépassé les balbutiements des années 2000 qui consistaient à mettre de la technologie sur le terrain principalement pour des effets de preuves de concept ou de communication (phases de «  digitisation  » et de «  digitalisation  ») pour aller un cran plus loin. Cette étude monte clairement cependant que si des progrès sont faits, ils demeurent très lents et bien dérisoires face aux nouveaux acteurs ou entrepreneurs innovants des marchés établis. En fin de compte, le résultat global n’est pas satisfaisant.
Même s’il s’agit d’un premier niveau d’analyse, le constat est qu’un acteur majeur (à l’instar de ce qu’avait décrit Seth Godin dans Unleashing The Ideavirus dès 1999 ) est très nettement en train de remporter la mise. Majeur et dominant, Amazon maîtrise parfaitement les codes de l’approvisionnement, de la logistique et du web marketing, et surtout celui de l’expérience client. Ceci est d’autant plus remarquable que l’entreprise n’a pas d’efforts à faire pour intégrer une technologie qui lui est native et préserver un quelconque cœur de métier existant. Le géant de Seattle représente déjà 41  % du e- commerce américain en 2019, mais ce chiffre devrait monter à 50  % en 2021 selon Statista, soit le montant déjà incroyable de près de 5  % du commerce total des États- Unis. Il envisage de multiplier ses bureaux sur son territoire et continue d’embaucher massivement avec le cap de 600 000 collaborateurs franchi en 2018, dont la moitié aux États-Unis. Dans le monde, Amazon était déjà le dixième employeur mondial en 2017.
Quand je parle d’Amazon comme d’un acteur dominant, il conviendrait de nuancer car le e-commerçant n’est ni présent ni dominant dans toutes les spécialités de la distribution .
Cela explique les craintes, justifiées, d’étouffement des marchés sur des domaines qu’on comprend cependant assez mal car ils restent nouveaux. La résistance s’organise comme elle peut .
On assiste en quelque sorte à une troisième révolution industrielle de la distribution, après celle des grands magasins (milieu des années 1800) puis celle de la grande distribution (milieu des années 1900). Un moderne Zola pourrait sans doute écrire de nouveau Au Bonheur des dames d’ici peu, version cyber…
Cette étude devrait être approfondie et menée dans tous les domaines et toutes les zones géographiques, car de fortes disparités existent. En France, Amazon ne représenterait que 20  % environ du e-commerce hexagonal (selon le site www.retaildetail.eu) et cette menace semble donc beaucoup plus lointaine, voire irréaliste (ces chiffres seront à nuancer en 2019 et en 2020 après le désastre de la fin d’année 2018 et les 2 milliards d’euros perdus par les commerçants, qu’on retrouve à un degré moindre toutefois chez les e-commerçants).
Ce que nous réserve l’avenir dépendra surtout de deux choses  : la capacité à réguler (au-delà même de la volonté, on voit aujourd’hui l’incapacité de l’Europe dans son ensemble à faire payer l’impôt aux Gafa au-delà de quelques montants symboliques dans un environnement fiscal non harmonisé) ou l’incapacité de ces sociétés dominantes à pérenniser leur emprise en maintenant leurs niveaux de service.
Cette brève analyse ne répond qu’à une toute petite partie de la question. Tous les secteurs n’en sont pas aux mêmes niveaux de maturité, loin s’en faut. Il faut s’attendre à ce que les choses bougent, dans de nombreux métiers qui avaient pris du retard, dans les prochaines années. N’oublions pas que le web fête ses 30 ans en 2019. C’est plus que l’âge de raison.
Quelles transformations du commerce B2B percevez-vous et quelles sont les perspectives de ce domaine pour les années à venir ?
Le B2B est un domaine qui focalise assez peu l’intérêt des médias et du public, mais qui représenterait environ les deux tiers de l’économie. Ce désintérêt est à mon avis une erreur d’appréciation qui mérite d’être corrigée .
En 2015, Forrester prédisait la « mort du commercial en B2B » dans un rapport dont le titre reprenait celui de la fameuse pièce d’Arthur Miller, Mort d’un commis voyageur. C’était il y a quatre ans. Qu’en est-il aujourd’hui  ? Le constat est que la vente en B2B n’est pas morte.
Certes, la tendance à l’accroissement de la vente en ligne en B2B est indéniable et l’arrivée d’Amazon Business me fait penser que tout va commencer en 2019. Mais le million de commerciaux qui devaient perdre leur emploi aux États-Unis à l’horizon 2020 sera toujours, pour l’essentiel, sur le terrain dans un an. La tendance au dégraissage des forces de vente est nette cependant chez certains fournisseurs comme US Foods – qui les a réduites de 30 % entre 2013 et 2017 –, mais pour ceux qui, comme moi, ont vu les modèles de ventes en circuits longs disparaître dans les années 1990-2000, cette tendance n’est pas nouvelle.
En fait, tout cela n’a rien d’étonnant. Les temps de maturation des technologies sont plus longs que ce que l’on imagine communément. L’illusion de la vitesse de e transformation donnée par l’innovation technologique (sauf peut-être au 19 siècle où tout était à inventer et où la violence de la transformation a été incroyablement brutale, rappelez-vous Les Temps difficiles de Charles Dickens) n’est en fait que le résultat de la faiblesse de nos mémoires ou de nos connaissances.
Une technologie met énormément de temps à s’imposer, et encore, au prix de nombreux pivots et d’évolutions successives. L’e-commerce, dont j’ai été acteur au début des années 1990, commence seulement à peser un poids conséquent, vingt-cinq ans plus tard : globalement, 10 % environ aux États-Unis, mais moins chez nous.
Ceci vient frapper les esprits des professionnels qui s’étaient reposés sur leurs certitudes. Ils vivent aujourd’hui ce que mon vieux professeur d’économie nous répétait sans cesse comme étant une des règles de base de cette discipline  : «  Qui n’avance pas recule ! » Ce qui ne veut pas dire qu’ils n’ont pas eu de temps pour se retourner.
La véritable transformation, en fait, est à venir  : c’est probablement l’essoufflement du e-commerce B2C indépendant, sa concentration à venir (déjà largement entamée) et le développement stratosphérique du e-commerce B2B, comme l’avait prévu Forrester en 2015 mais avec un décalage dans le temps.
Je pourrais résumer les trois tendances fondamentales de l’évolution de la vente en B2B à l’aune de la transformation digitale, au risque de schématiser un peu :
  • Premièrement, la fin de la barrière entre marketing et vente avec la généralisation – en cours de mise en œuvre – de la génération de leads. Pour cela, il existe une myriade de solutions technologiques et c’est justement le point sur lequel de nombreux progrès sont à réaliser10. La formation des marketeurs est également à revoir ainsi que celle des commerciaux. Bref, les ingrédients sont là mais il faudra encore du temps pour que cette barrière – bien artificielle – entre vente et marketing s’estompe en B2B. Quoi qu’il en soit, cette tendance est inéluctable.
  • Deuxièmement, l’automatisation des forces de vente (ce qu’en anglais on nomme sales enablement) est en cours et elle ne fait que commencer. Des solutions d’aide à la vente sur tablette11 existent et se développent. Ce n’est que le premier pas dans une révolution du métier qui recourra de manière systématique à l’informatique pour l’aide à la prise de décision, de commande et le conseil au client. Cela va également demander du temps afin que les commerciaux acquièrent une forte maturité pour être capables d’intégrer ces outils sans qu’ils deviennent une barrière à la négociation.
  • Enfin, et c’est presque une banalité, l’invasion de la donnée vient renforcer les deux tendances décrites ci-dessus. Je me suis livré à un début d’exercice de brainstorming prospectif12 à la Albert Robida sur la potentialité de la donnée dans le domaine de la vente en imaginant ce qu’elle permettrait de faire dans un monde idéal si l’informatique était réellement intelligente (avouons-le, il y a encore du travail, comme nous le confirme le créateur de Siri, Luc Julia, qui écrit que «  l’intelligence artificielle n’existe pas13 »).
La seule variable manquante est le temps. Le temps qu’il faut pour que les choses bougent, car cela n’adviendra pas en 2020. Je pense qu’il faudra donner cinq à dix ans supplémentaires encore pour voir ce paysage-là (sauf coup de foudre réglementaire toujours possible) complètement bouleversé. En fin de compte, tout ce bouleversement aura pris trente à trente-cinq ans pour s’établir, ce qui est déjà radical car cela s’est passé à l’échelle de la planète.
Quelles seront les prochaines étapes pour les entreprises qui ont déj à entamé une transformation digitale pour apporter plus de valeur aj outée avec le marketing ?
Nous entendons répéter depuis tellement longtemps que «  le client doit être mis au centre des préoccupations  » que j’ai cessé personnellement d’attendre ce miracle, qui pourtant n’est que la base implicite du marketing lui-même (on s’en rend compte en relisant le manifeste fondateur « The Marketing Revolution » de 195914).
Joe Pine (co-inventeur du terme customer experience) a parfaitement décrit le mécanisme de ce qui fait qu’une société s’élève au-dessus des autres en créant un lien avec ses clients (un «  lien qui importe plus que le bien  », ajouterait Bernard Cova15).
Les entreprises qui saisissent ce paradigme resteront maîtres de leur business, pas les autres.
L’âge du post-consumérisme sera en effet sans pitié pour les entreprises qui ne comprennent pas cette aspiration profonde à une expérience client. Celles qui ne fondent pas l’usage de la technologie derrière cette expérience client et qui la rendent trop visible et laborieuse devront également le payer cher. La technologie se doit d’être à la pointe, et quand elle est à la pointe, elle se doit d’être transparente.
Par rapport aux observations que vous avez effectuées au sein de Visionary Marketing, quels sont les messages clés d’une transformation digitale réussie pour la partie offre ?
Le message clé, c’est que la transformation digitale, à mon avis, n’existe pas  ! Pour cela, je renvoie à mon livre blanc d’il y a cinq ans, La Face cachée de la transformation digitale16. Je n’ai pas changé d’avis depuis sur ce point, bien au contraire. Seule existe la transformation de l’entreprise, de ses modèles, avec le digital. La nuance est d’importance.
Pour réussir cela, il faut parfaitement maîtriser la technologie. On ne peut prendre du recul par rapport à elle que si on en connaît les possibilités aussi bien que les limites. Cela ne signifie pas que les marketeurs doivent devenir des programmeurs, mais qu’il faut connaître la technologie, son histoire, ses origines, et développer un sens aigu de la conduite du changement. Cette double culture est un préalable à tout travail de transformation du business.
Avec l’impulsion des Gafa, en quoi la part touj ours plus importante du digital dans le mix marketing amène-t-elle une évolution du rôle du directeur marketing et quel impact a-t-elle sur ses relations avec le directeur des systèmes d’information (DSI) ou le chief digital officer (CDO), notamment dans les grands groupes ?
Début 2018, l’entreprise de conseil Gartner a fourni un chiffre intéressant  : 30 à 40  % des dépenses IT des grandes entreprises sont le fait du Shadow IT. Pour les dix ans qui viennent, leurs prédictions sont encore plus radicales  : l’analyste américain envisage en effet que ce chiffre montera à 90  % de cette dépense totale. Cela ne sera pas sans créer des défis pour les systèmes d’information, leur sécurité et leur pérennisation.
Là encore, il s’agit d’un changement intervenu sur une très longue période. J’ai moi- même participé de cette émancipation des directions marketing vis-à-vis des DSI, dès le début de ma carrière.
Le marketeur de demain sera un geek ou ne sera pas. Pas un geek programmeur (d’ailleurs, la plupart des technologies du futur seront faites d’assemblages, comme c’est déjà largement le cas aujourd’hui  ; elles ne nécessiteront plus de développements côté client). Des geeks donc, mais ce que j’entends par là, ce sont des analyseurs de tendances technologiques qui sauront puiser dans les bonnes technologies qui les aideront à faire leur métier. Ou, à tout le moins, qui sauront détecter les bons technologues qui les aideront à mener leurs tâches à bien. Même si eux-mêmes n’y
connaissent rien. La fin de l’ère du marketeur affichant fièrement son ignorance de la high-tech a, à mon avis, sonné. Les fonctions majeures mentionnées dans votre question subiront des transformations fondamentales dans les années qui viennent. Dans la réalité des faits, les DSI n’ont déjà plus grand-chose à voir, sous l’impulsion du cloud, avec ce qu’elles étaient voilà dix ans, et leur évolution future sera encore bien plus radicale. Quant au CDO, je n’ai jamais cru que c’était une fonction indispensable. Je pense qu’elle tendra à disparaître assez rapidement.
* * *
Sandrine Mourao (@SandrineMourao), responsable marketing & communication, GetQuanty
«  Nous avons en France le meilleur dispositif pour faire naître les start-up… mais peut-être le pire pour les faire grandir  ! »
GetQuanty poursuit son développement après une levée de fonds de 2 millions d’euros en 2016. Plus de deux ans après, quelles innovations et quels nouveaux marchés avez-vous pu financer grâce à cette levée ?
La levée de fonds fin 2016 a permis de lancer la solution et de nous imposer comme leader du marché de l’IP tracking et des outils d’aide à la prospection B2B. Nous avons pu incorporer davantage d’intelligence artificielle depuis l’identification des visiteurs B2B (1), stimuler notre scoring prédictif (2) et créer de nouveaux moyens de réengager (3) en temps réel les prospects les plus intéressants :
1.L’identification temps réel des visiteurs B2B
GetQuanty détecte et identifie les visiteurs de votre site web, e-mailings et réseaux sociaux. Grâce à nos algorithmes et à l’infrastructure que nous avons mise en place chez Google, nous sommes aujourd’hui le seul acteur à pouvoir le faire en temps réel tout en incorporant des techniques de machine learning et big data. Nous sommes, d’ailleurs, partenaire officiel de Google Cloud. Cela ouvre de nouvelles possibilités sur le marché  : d’autres solutions que les nôtres peuvent interagir avec les visiteurs pendant leur visite (cf. troisième axe d’innovation).
Nos clients multiplient par dix leur stock de leads qualifiés en capitalisant simplement sur leurs investissements marketing actuels. Pour accompagner cela, il a été nécessaire d’inventer de nouveaux outils de data visualisation pour pouvoir incorporer la dimension B2B jusqu’ici totalement inexistante à travers les outils du marché comme
Google Analytics ou encore bit.ly.
2.Le scoring comportemental et le ciblage prédictif par intelligence artificielle (IA)
En observant plus de 10 millions de visites tous les mois, nous pouvons relier le parcours de visite de chacun des employés à la maturité de décision d’achat de l’entreprise. Cela permet de détecter les prospects qui sont les plus avancés ou au contraire ceux qui n’en sont qu’au début de la découverte de vos offres. C’est essentiel pour orienter ses forces commerciales au bon moment sur les prospects les plus chauds et ne pas laisser l’opportunité filer chez la concurrence  ! Lorsqu’on sait qu’en B2B plus de 50  % des ventes se font avec le premier vendeur qui a pris contact, l’impact sur le business et le cycle de vente est fort.
3.Le réengagement multicanal ultra ciblé (stratégie d’Account Based Marketing* ou «  ABM »)
Cet axe d’innovation change la configuration du marché et illustre la transformation digitale B2B qui doit être intégrée par les directions marketing.
En effet, à partir d’un prospect visiteur détecté comme «  chaud  », il est possible de le réengager automatiquement. Nous avons intégré notre solution avec de nombreux acteurs comme AB tasty, Kameleoon, IgnitionOne, Target First, iAdvize, Mapp, Dataiku, mediarythmics, Sociallymap et bien sûr tout l’univers Google. Nous pouvons donc mettre en place des pop-up, un chatbot intelligent, un retargeting email ou display en fonction de critères firmographiques (suivant le nom de l’entreprise visiteuse, sa taille, son secteur d’activité, sa forme juridique, etc.) ou encore comportementaux (parcours de visite).
Le réengagement par mél se fait sur des personas et non plus sur des listes de méls que vous devez au préalable «  onboarder  » (maîtriser l’opt-in), ce qui est devenu problématique avec le RGPD. En raisonnant au niveau entreprise, puis poste dans la société, GetQuanty permet des actions de reciblage mél en toute conformité et reliées à un contexte de visite (par ex  : abandon de formulaire, visite de tarifs ou d’un produit en particulier) et de recibler simultanément cinq à dix personnes clés dans l’entreprise au lieu d’une seule  ! Et cela change tout sur les taux d’ouverture qui grimpent à 20, voire 40 %, là où ils plafonnent à moins de 10 % (en moyenne) sur du mailing classique.
Cette solution est très appréciée des PME qui ont peu de temps et des budgets limités, mais aussi des grands comptes, qui, avec leur agence, peuvent mettre en œuvre des stratégies complexes en lien avec leurs outils existants.
La solution que vous proposez équipe désormais plus de 450 sites web chez vos clients. Quel regard portez-vous sur leur maturité dans l’usage des leviers en ligne de génération de leads ? Être un éditeur européen peut-il être un atout ?
Le marché est encore en pleine mutation même si on ressent très fortement une accélération, en particulier dans le recours à des solutions à base d’IA.
Lorsque nous avons démarré nous nous heurtions souvent aux freins psychologiques  : « Est-ce que c’est légal ? Cela fonctionne-t-il vraiment ? La donnée est-elle fiable ? Mes clients vont-ils apprécier que je les contacte alors qu’ils n’ont pas laissé leurs coordonnées ? »
L’arrivée du big data puis de l’intelligence artificielle a «  éduqué  » le marché sur le fait qu’un marketeur d’aujourd’hui ne peut plus prétendre définir ses segments de manière statique. Il doit, au contraire, profiter de la puissance du cloud pour démultiplier ses leviers d’action.
Au niveau commercial, il reste du chemin à faire car les équipes ne sont pas habituées à interagir aussi tôt dans le cycle d’achat et nous inventons avec GetQuanty une nouvelle discipline (de plus en plus appelée «  demand generation  » au lieu de lead generation) qui consiste à «  choisir  » ses cibles grâce à l’IA en redonnant la main au commercial. Mais s’il s’attend à ne travailler que sur du lead ultra qualifié et un client qui l’attend, il se trompe  : c’est à lui de devenir chasseur. C’est pour cela que nous accompagnons d’abord les équipes SDR plus matures pour ce type d’exercice et qui adorent chasser sur des leads qualifiés par GetQuanty par rapport à de la prospection à froid. Dans un monde où le consommateur connaît les solutions presque aussi bien que les commerciaux grâce à l’accès facile à l’information, GetQuanty redonne le pouvoir aux sales en détectant les premiers signaux d’intérêt.
Notre positionnement en Europe a été un frein et est désormais un énorme atout car nous avons une manière d’opérer bien plus fine sous réglementations strictes. Aux États-Unis, le marché du marketing digital s’est structuré autour de la publicité, avec de gros volumes et sans forte contrainte légale. Logiquement, les éditeurs de notre domaine se sont engouffrés dans la brèche  : ils proposent essentiellement de la publicité (faiblement) ciblée et ne sont pas capables de descendre au niveau granulaire d’action que nous avons dû développer (persona, mél, etc.). Ils n’ont pas eu besoin de développer d’IA et restent frileux sur le contexte RGPD. Nous avons su développer une panoplie d’armes en tenant compte des variables externes et en faisant de chaque menace potentielle une opportunité. Nous avons maintenant la possibilité de nous étendre en Europe sans forte concurrence et de préparer notre expansion mondiale.
Face aux Gafam, Natu et autres BATX qui semblent omnipotents dans la captation de trafic en ligne, quels atouts mettez-vous en œuvre pour apporter à vos clients les prospects dont ils ont besoin pour leur croissance  ? Comment arrivez-vous à vous différencier pour capter les budgets marketing et commerciaux de vos clients ?
Ce sont en réalité nos alliés car ils ont besoin de nous pour développer les usages en B2B, ce qui explique notamment notre collaboration très étroite avec Google.
En effet, les investissements média en B2B sont aujourd’hui bridés par le manque d’outils de mesure d’impact ciblés. Google, Microsoft mais aussi LinkedIn, Facebook ou les grandes régies de pub ne proposent qu’un ciblage très approximatif des entreprises et ne fournissent, en retour, que très peu d’éléments permettant de vérifier quelles entreprises ont réellement été exposées et amenées sur le site lors d’une campagne.
Ils ont de forts atouts mais fonctionnent encore sur le régime de la publicité traditionnelle – moins massive mais, en réalité, encore peu personnalisée. Le marché s’est structuré autour des cookies anonymes et des mécaniques d’enchères fondées sur le comportement individuel de l’internaute sans que l’on puisse le relier de manière fiable à une entreprise ou un secteur d’activité. Par exemple, lorsque vous ciblez des directeurs informatiques, ces acteurs vous proposent uniquement de cibler la destination (par ex  : DSI magazine) parce qu’il y a une probabilité plus forte que des DSI les visitent, mais aucun moyen de le vérifier.
Or, dans le B2B, où il faut en moyenne cinq à dix personnes pour décider d’un investissement, les choses sont très différentes. Ce n’est qu’en raisonnant sur l’agrégation de visites de personnes différentes qu’on peut déceler les intérêts et toucher les décideurs !
La technologie GetQuanty combinée aux stratégies d’achat est déterminante et permet de :
  • cibler, a priori, des entreprises entières (ABM) non pas sur leur site de destination mais par rapport à l’origine de leur connexion (adresse IP ou cookie entreprise) ;
  • fournir la liste précise, campagne par campagne, voire mot clé par mot clé, des entreprises exposées et/ou visitant le site et suivre tout leur parcours derrière et donc de faire des arbitrages rapides ;
  • s’adapter au contexte en temps réel et donc de personnaliser le message, la bannière, voire le parcours pour chaque visiteur cible et augmenter le taux de conversion ;
  • construire des tableaux de bord analytiques avec une dimension B2B en réutilisant les investissements faits sur Google Analytics.
Nous constatons d’ailleurs que lorsqu’un client est équipé de GetQuanty, ses investissements média et search augmentent car il est en confiance et a les moyens de les piloter. Cerise sur le gâteau, il peut aussi récupérer une partie du bénéfice des investissements faits en B2C, en isolant la part du trafic B2B amenée au travers de ces campagnes !
Parmi vos clients, quels sont ceux qui bénéficient le mieux de la plateforme GetQuanty pour développer leur activité  ? Quels sont selon vous les facteurs clés qu’ils mettent en œuvre, que ce soit dans la conception de leurs produits et services, dans l’organisation et les compétences dont ils disposent pour traiter les leads que vous leur apportez, ou encore dans leur stratégie ?
Nous avons identifié trois contextes ultra favorables à l’utilisation de GetQuanty :
  • sur un marché très concurrentiel (par ex  : le marché de la fontaine à eau, édition de logiciel, SSII, cabinets de recrutement) ou ultra spécialisé comme dans l’industrie (par ex  : microgravure au laser), il est difficile de faire venir les visiteurs entreprise sur son site  ; mais s’ils viennent, c’est qu’ils ont un besoin et vont forcément passer rapidement à l’achat (chez vous ou chez la concurrence). Dans ce cas, c’est le contact avec le commercial qui fera la différence. GetQuanty est essentiel pour gagner un cran d’avance, et en général les commerciaux ont un accès direct à la plateforme pour ce cas de figure. La top réactivité est clé ;
  • sur les plateformes de commerce ou de distribution avec de l’achat en ligne (par ex  : produits industriels, accessoires auto, accessoires informatiques, vêtement de travail, etc.), GetQuanty permet d’augmenter la conversion directe grâce à la reconnaissance temps réel du visiteur. Des pop-up ou des offres ciblées sont proposées aux prospects hésitants et à fort potentiel. Le gain au niveau de la conversion est net et peut atteindre plus de 25  %, et s’ils quittent le site sans acheter, un reciblage par mél permet d’en récupérer encore 5 à 10 % ;
  • chez les grandes marques à la fois B2B et B2C (MMA, PSA, Karcher, Weber, etc.), GetQuanty permet de détecter et adresser spécifiquement l’audience professionnelle et les renvoyer vers les offres dédiées à plus fort panier, et bien souvent on constate qu’il y a plus de pros sur la version B2C que sur les pages dédiées au B2B  ! Ces mêmes grandes marques utilisent également GetQuanty pour lancer, via leurs agences, des campagnes média destinées aux pros (digital, TV, radio), avec de l’achat de trafic ciblé via ABM et mesurer enfin l’impact réel et le RoI. Certains clients utilisent même GetQuanty pour challenger leurs agences et nous demandent de leur recommander des agences certifiées (aujourd’hui Markentive, Aressy et Waisso sont des agences certifiées GetQuanty) !
En tant que responsable marketing et communication d’une start-up, quel regard portez-vous sur le rôle de l’État dans votre développement, par exemple au travers de la French Tech ou du financement via BPI France  ? Que pourrait faire l’État pour vous aider dans votre développement à l’international ?
Dans notre domaine ultra concurrentiel et mondial, on n’attend pas de l’État qu’il nous régule, mais plutôt qu’il nous simplifie l’accès aux marchés et aux financements, et utilise sa puissance pour nous exposer au-delà de nos frontières.
Nous avons en France le meilleur dispositif pour faire naître les start-up… mais peut- être le pire pour les faire grandir !
Nous sommes très aidés pour la Recherche et le Développement via le crédit impôt recherche (CIR), mais ensuite c’est un no man’s land. Il me semble qu’il manque un vrai start-up act pour nous permettre de passer rapidement de 1 à 10 M€ de chiffre d’affaires en France et en Europe, en favorisant, par exemple, la dépense de toutes les entreprises vers les start-up françaises.
À mon niveau, un label French Tech me permettrait de développer notre notoriété, surtout s’il nous accordait la possibilité de participer à des salons ou des tournées à l’international.
* * *
Nathalie Sanguine (Instagram @nath_sng, @nath_sng_tricote, @nath_sng_marche), knit fashion designer
«  Aujourd’hui, pour les meilleures marques dans la mode, si on rate la story Instagram, on rate le produit. »
En tant que consommatrice, quels sont les outils et services numériques que vous utilisez au quotidien  ? Quel est votre rapport aux données personnelles, à la géolocalisation dans l’utilisation de ces outils  ? Et comment arbitrez-vous entre facilité d’usage et protection de la vie privée ?
J’utilise surtout des aiguilles et de la laine  ! Plus sérieusement, l’outil numérique que j’utilise le plus au quotidien, c’est Instagram. J’utilise aussi des applications comme Vinted, les applications bancaires, Decathlon Coach, Zara, WhatsApp, Télé Loisirs, Quoty, PayPal, PagesJaunes, Dropbox, Outlook, Spotify (rarement). Toujours sur mon mobile, quasiment jamais sur mon PC, excepté peut-être pour Outlook car je dois parfois imprimer des éléments depuis ma boîte mél. J’utilise aussi beaucoup l’application mobile Amazon, plusieurs fois par semaine, dès que j’ai besoin d’un produit du quotidien. Amazon est devenu mon hypermarché en ligne.
Concernant mes données personnelles, on sait que sur Internet tout est tracé, enregistré. Soit on fait le choix de faire ses achats en boutique en espèces pour ne pas laisser de trace, soit on accepte de partager ses données pour faciliter le quotidien. L’arbitrage est vite fait  ! Je partage donc mes données avec des sites de confiance, ce qui exclut par exemple les sites chinois ou les sites suspicieux (fautes d’orthographe, pas d’adresse de contact).
J’utilise PayPal pour 95  % de mes transactions sur le web. PayPal me sert de tiers de confiance pour mes commandes en ligne et me permet de ne pas communiquer mes données bancaires aux différents commerçants.
Sur Instagram, mes comptes sont publics. Par mesure de protection, j’ai désactivé la géolocalisation depuis mon domicile. Je contrôle mes publications de sorte à fournir uniquement les données personnelles nécessaires.
Ma priorité reste la facilité d’usage. Je fais la plupart de mes achats sur Internet. Je gagne un temps précieux en évitant le trajet jusqu’à un centre commercial bondé où je dois me garer, multiplier les boutiques et les essayages, porter les paquets, etc. Sur Internet, je visualise la pièce portée, je la fais venir à mon domicile, je l’essaie tranquillement et j’ai le plus souvent trente jours pour la renvoyer si nécessaire.
Zara livre en quarante-huit heures, Spartoo en vingt-quatre heures. Zara offre un retour sous trente jours, Zadig & Voltaire sous quatorze jours. Ces derniers, même s’ils sont un peu plus longs sur les expéditions, livrent en quarante-huit à soixante-douze heures. Le jour même de la réception, je peux faire une demande de retour via le site UPS. Je le remets au livreur UPS le lendemain lors de son passage à mon domicile. Je suis remboursée sous quinze jours à trois semaines. L’opération est donc blanche avec une carte à débit différé.
Chez Zara, je me connecte sur mon compte, je sélectionne les produits qui ne me conviennent pas, je reçois un mél avec le bon de retour que j’imprime, je dépose le colis à La Poste. Quarante-huit heures après, je suis remboursée. Chez Spartoo, le remboursement est même émis dès le dépôt du colis en bureau de poste.
Pour les sites qui facturent des frais de retour, PayPal les prend en charge jusqu’à douze fois par an. Mais sur la plupart des sites sur lesquels je commande, les frais de retour sont offerts.
J’ai des comptes sur de nombreuses marques en ligne. Lors de la mise en application du RGPD, j’ai reçu des dizaines de méls me demandant de me connecter sur mes comptes mais je n’avais pas que ça à faire  ! Ce règlement est clairement une contrainte pour la consommatrice que je suis. Par exemple, sur un site comme www.dks-cuir.com, je ne peux plus me connecter. En rentrant mes coordonnées, le site ne me reconnaît pas  ; en essayant de créer un nouveau compte, c’est un échec. Je suis contrainte de passer mes commandes en mode invité. Du coup, je n’ai plus de suivi de mes commandes. Des données ont dû être effacées, mais pas toutes.
Vous utilisez depuis quelques mois Vinted pour y vendre des vêtements. Quels enseignements tirez-vous de votre usage de l’application sur les relations que vous avez pu nouer avec les acheteuses, sur votre perception des marques dont les produits d’occasion sont mis en vente via cette plateforme ?
C’est en voyant une pub à la télévision que je suis venue à Vinted. Mes placards débordent de vêtements et mon espace de stockage est limité  : il me fallait trouver une solution pour y voir plus clair et pouvoir choisir ma tenue du jour !
On ne peut pas dire qu’on noue des relations avec les Vinties. La plupart des acheteuses sur Vinted aiment négocier, même pour 2 euros. Seulement 10  % de mes ventes se font sans négociation, et ce n’est pas une question de prix. Les Vinties qui achètent sans discuter le prix ne veulent pas manquer la pièce qui leur plaît. Mais pour 90 % des acheteuses, le besoin de faire une affaire est plus important que de remporter l’article.
Certaines Vinties repèrent des pièces que je propose et attendent de vendre leurs propres articles pour acheter. Elles font alors des demandes de réservation, suspendues à leurs ventes. J’ai arrêté cette pratique, car il m’est souvent arrivé de ne plus avoir de nouvelles à l’issue du délai de cinq jours de réservation.
Vinted propose trois possibilités d’expédition  : Mondial Relay, Chrono Shop2Shop et La Poste. J’ai abandonné les deux premiers avec lesquels j’ai rencontré de nombreux problèmes  : relais colis peu aimables, délais d’acheminement trop longs, colis perdus, supports client incompétents, indemnisations trop faibles. J’ai souvenir d’un colis expédié qui m’a valu de nombreuses relances du service client sur plusieurs semaines avant de parvenir à la conclusion que le colis était finalement perdu. La Poste reste, pour ce type de prestation, le seul transporteur fiable selon mon expérience.
Vinted bénéficie d’un traçage automatique des colis expédiés. Une fois le colis déposé à La Poste, je renseigne dans Vinted le numéro de suivi. Le colis est alors automatiquement tracé dans l’application et Vinted déclenche le paiement au plus tard dans les quarante-huit heures qui suivent la réception. Alors qu’avec Mondial Relay, l’acheteuse dispose de quatorze jours pour aller chercher le colis, à quoi s’ajoutent les délais d’acheminement et ceux accordés par Vinted … On peut donc être payé jusqu’à un mois après envoi !
Sur Vinted, les produits Zara se vendent vraiment bien. Fin février 2019, plus de 600 000 abonnés suivaient la marque Zara sur Vinted. Plus de 3 millions d’articles étaient proposés à la vente. Du coup, je suis plus tentée d’acheter des produits Zara, car je sais qu’ils se revendent rapidement sur Vinted. Maintenant, lorsque j’achète un produit sur Internet, si j’hésite entre deux marques, je regarde sur Vinted et je favorise la marque la plus présente. Évidemment, cela est vrai pour les produits dont je sais dès l’achat que je les revendrai un jour.
Vous partagez via Instagram vos passions et loisirs tels que le tricot, les tenues du j our ou encore la randonnée en FiveFingers. Quelles sont les émotions qui vous poussent à publier du contenu  ? Quelles marques vous semblent-elles avoir le mieux compris les usages de ce média social ?
Je suis des influenceuses comme Emmanuelle Cureau (@manuecureau) et Nuria (@kuka_chic) sur Instagram. En voyant ces femmes exposer leur quotidien au travers de stories, ma vision des réseaux sociaux a changé. Je suis moins méfiante aujourd’hui que je l’étais auparavant, et mes propres comptes sur Instagram sont désormais publics.
Pour moi, les FiveFingers sont un produit top pour la santé. C’est ma kiné qui m’a conseillé de reprendre la course à pied avec des minimalistes après plusieurs entorses du genou. Je voulais faire découvrir ces chaussures bonnes pour le corps au plus grand nombre. J’ai même converti mon conjoint marathonien !
De même au travers du tricot. Pour moi, tricoter c’est méditer  : «  Knitting is the new yoga.  » L’idée est de dire à des femmes qui sont toujours en train de courir, de se dépêcher au bureau, de se presser pour récupérer les enfants, etc., de se poser trente minutes par jour pour se connecter à elles-mêmes avec le plaisir de créer quelque chose de leurs propres mains. C’est bon pour le corps. C’est bon pour l’esprit. Au travers de mes publications Instagram, j’ai envie de montrer aux autres qu’il existe des activités faciles et vraiment bénéfiques.
Je n’avais jamais tricoté et je m’y suis mise. Je ne faisais pas de randonnée et je m’y suis mise en minimalistes. Tout le monde peut se lancer dans ces activités et se sentir mieux dans son corps et dans sa tête.
J’ai segmenté mon usage d’Instagram en trois comptes. Sur @nath_ sng, je suis par exemple Zadig & Voltaire, Louboutin et Messika. Dès que je vois passer un modèle qui m’intéresse, je me rends sur le site pour l’acheter ou je procède à l’achat via Instagram. Ça m’évite d’aller sur les sites des marques que j’aime pour surveiller les nouveautés. J’y partage mes tenues du jour avec le hashtag «  Outfit of the day  » (OOTD). Ces publications sont plutôt à destination de mes copines, ce compte aurait pu être un compte privé. Sur @nath_sng_tricote, je suis abonnée sur tous les hashtags des modèles que j’ai achetés sur We Are Knitters, ce qui me permet de voir comment adapter le modèle en fonction de ma physionomie. Je suis aussi les marques les plus connues comme Phildar pour me tenir au courant de ce qui sort ou des techniques de tricot. Sur @nath_sng_marche, je suis abonnée à FiveFingers et aussi à des photographes qui font de belles photos de montagne. C’est un compte que j’utilise uniquement en vacances, lorsque je mets mes FiveFingers pour des randonnées.
Vous commandez en ligne, vous réceptionnez des colis chez vous, parfois vous êtes contrainte d’aller les chercher dans un relais colis. Quelle est votre perception de l’évolution du e-commerce au cours des dix dernières années et plus généralement de votre expérience d’achat en ligne ?
Les e-commerçants se sont nettement améliorés sur les délais et la qualité du service de livraison, sur la gratuité des retours et sur les délais de remboursement. J’utilise Amazon Prime pratiquement au quotidien en tant que service de livraison. En payant la livraison une fois pour toutes, je ne me soucie plus du coût de livraison, quel que soit le montant de la commande. Sur Zara, j’attends d’avoir assez d’articles à commander pour dépasser le seuil de gratuité de la livraison.
En revanche, autant la livraison est payée annuellement avec Amazon Prime, autant la qualité de livraison est toute relative. UPS est clairement au top. DHL est un peu derrière, les livreurs étant un peu moins serviables. La livraison est essentielle. C’est ainsi que j’ai arrêté de commander chez The Kooples, qui passe par DPD avec qui j’ai eu une expérience désastreuse.
Aujourd’hui, aller dans les magasins est une galère. Je m’y rends uniquement avec mon fils pour comparer sur place entre plusieurs tailles, compte tenu de son gabarit. Il y a dix ans, alors que j’habitais dans une petite ville de province, j’achetais très peu sur Internet. Aujourd’hui, en région parisienne, aller dans les centres commerciaux, c’est avoir du mal à se garer, se faufiler dans la foule, se déshabiller et se rhabiller dans les cabines d’essayage, se laisser convaincre par une vendeuse alors que le produit ne convient pas, c’est ramener le produit en magasin pour se faire rembourser voire faire un avoir. Voilà un peu plus de dix ans, je trouvais des boutiques sympas dans de petites rues de la ville où j’habitais. En région parisienne, dénicher les pièces qui sortent de l’ordinaire et qui me correspondent prend un temps considérable. C’est beaucoup plus rapide sur Internet, surtout grâce à Instagram où les marques montrent leurs produits en situation.
Amazon est devenu mon hypermarché. J’y trouve tout et n’importe quoi. Si je n’avais pas Amazon, il faudrait que je me rende chez Carrefour près de chez moi, par exemple pour des cartouches d’encre, une coque de téléphone, un roman, etc.
Pour l’alimentaire, j’ai testé quelques services qui se sont avérés inadaptés à notre consommation. Rien ne vaut la relation de confiance avec nos petits commerçants de Grand Frais que nous retrouvons chaque semaine !
Quelle que soit la nature des services en ligne que vous utilisez (e-commerce, achat-vente d’occasion, banque, impôts, école, voyages, etc.), quels sont pour vous les critères indispensables à un service de qualité et à une expérience utilisatrice qui vous satisfasse ?
Pour moi, il est indispensable que le site soit clair avec une navigation fluide et que le client soit reconnu  : si je pose une question, je veux une réponse rapide et précise. Par exemple, il m’est arrivé de poser une question sur le réassort d’un produit via le chat de Zara, j’ai eu la réponse en deux minutes. Sur le site des impôts, lorsque je pose une question, je reçois la réponse précise en quarante-huit heures …
La qualité de l’expérience utilisateur est indispensable. Un site truffé de fautes d’orthographe, ça sent l’arnaque, je n’achète pas. Et il suffit d’une mauvaise expérience  ! Par exemple, sur le site mobile Rivage By Laura, une boutique à La Rochelle, le contenu était un coup en français, un coup en italien, les dénominations de produits ne correspondaient pas à celles du site web, c’était incompréhensible. Une seule visite a suffi pour me dissuader d’y retourner.
Il faut aussi que le service soit rapide et ergonomique. Par exemple, sur le site mobile de Zadig & Voltaire, lorsque je clique sur un produit du catalogue pour en voir le détail, en revenant sur le catalogue je suis renvoyée sur le début au lieu d’être ramenée là où j’en étais ! Heureusement que j’adore les produits de la marque !
Vu mon usage de PayPal, il faut bien sûr que le site propose ce moyen de paiement.
J’attends aussi d’un e-commerçant une livraison rapide. Chez Shein, il faut trois semaines pour être livré, c’est trop long  ! Une commande en septembre, alors qu’il fait encore beau, signifie une livraison si tardive qu’il faudra attendre la saison suivante pour porter le vêtement ! Les meilleurs de tous sur ce point, ce sont Spartoo et Zara.
Celle qui a tout compris, c’est Kuka & Chic. Cette Espagnole qui tient une boutique à Alicante fait une story sur Instagram en montrant chaque nouveau modèle. Ça permet de voir comment le modèle tombe. Elle en fait des tonnes sur le confort, le look, la qualité. Elle met le lien directement sur la story pour acheter. Si on rate la story , on rate le produit. Il faut même mettre des alertes sur ses stories pour être sûr de ne pas les rater  ! Elle passe du temps pour détecter des articles originaux et de qualité, et elle sait les mettre en avant pour susciter l’achat d’impulsion. Si on a des questions à lui poser, elle répond en direct via Instagram ou WhatsApp. C’est donc la personne qui porte et présente le produit qui répond instantanément aux questions. Elle partage aussi sur ses stories les posts des clientes satisfaites, ce qui renforce la confiance des autres clientes. C’est ça, le secret du e-commerce en 2019 !
Indicateurs et mesure de la maturité numérique associée

Offre[modifier]

Innovation et conception[modifier]

OFI1. Ratio de produits/services réalisés en open innovation et apport du crowdsourcing
Il s’agit de calculer le ratio de produits/services réalisés dans une démarche d’open innovation après recensement et le nombre de produits/services totaux réalisés dans l’année et de l’apport du crowdsourcing. Ces produits/services peuvent être réalisés
conjointement avec des grandes écoles, des universités, des internautes, des partenariats en réponse à des appels à projet. Ils peuvent impliquer également des mises en relation entre start-up et des personnes de l’organisation.
0 à 10 % des projets sont réalisés selon une démarche d’open innovation. L’organisation fait appel ponctuellement au crowdsourcing (par exemple, sondage pour le nom d’un produit, d’un service ou pour le changement d’un logo).
10 à 20 % des projets sont réalisés selon une démarche d’open innovation. L’organisation fait appel aux internautes pour recueillir des idées d’amélioration des produits/services existants et remonter des dysfonctionnements.
20 à 30 % des projets sont réalisés selon une démarche d’open innovation. L’organisation demande aux internautes d’apporter des idées pour de nouveaux produits/services.
30 à 50 % des projets sont réalisés selon une démarche d’open innovation. Les cahiers des charges de quelques nouveaux produits/services sont réalisés conjointement avec les internautes, et un système de récompense des internautes est instauré après appel à contribution.
Plus de 50 % des projets sont réalisés selon une démarche d’open innovation. Les cahiers des charges de projets majeurs sont réalisés conjointement avec les internautes et un système de rétribution des internautes pour le travail outsourcé est instauré en transparence avec les partenaires sociaux.
OFI2. Capacité à tester des services expérimentaux ou en bêta avec l’écosystème
Cet indicateur combine le degré de projets conduits en mode PoC ou MVP (minimum viable product) avant généralisation éventuelle (dans une logique de Go/No Go si l’intérêt est avéré et validé en matière économique, d’usage ou d’amélioration de l’existant) et la capacité de l’organisation à attirer autour d’elle un écosystème dans le but de mener des campagnes de tests de ses produits/services à grande échelle.
Pour le degré de projets conduits en mode PoC, le ratio r désigne le nombre de projets en mode PoC divisé par le nombre de projets menés par l’organisation hors PoC ou MVP.
Concrètement :
  • au numérateur : les PoC, MVP et toutes les expérimentations qui peuvent être nombreuses. Tous n’aboutissent pas à des projets industrialisés ;
  • au dénominateur : les projets qui sont lancés et industrialisés.
Le ratio r peut être supérieur à 1 si l’organisation est dans une logique d’expérimentation massive et de lancement de moins de projets dans une logique d’essais et d’erreurs (test and learn). r est compris entre 0,05 et 0,3. Implication de plusieurs entités de l’organisation dans les tests (logiciels, données de test, prototype ou maquette en production). r varie entre 0,3 et 0,7. Traçabilité des tests et capitalisation par rapport aux autres versions et produits/services analogues. r varie entre 0,7 et 1 et une méthode de prototypage. Les tests de PoC ou de prélancement impliquent l’extérieur (internautes, partenaires, clients, fournisseurs). r varie entre 1 et 3 et une méthode de prototypage transverse dans l’organisation et partagée. Des corrections sont apportées par l’extérieur via du crowdsourcing et un réseau de bêta-testeurs. r est supérieur à 3 avec action pour le choix et le criblage des projets à lancer. Des corrections sont directement faites sur le produit/service par l’extérieur et remontées aux équipes de développement pour la traçabilité.
OFI3. Interopérabilité des services développés et évolutivité
Il s’agit de la capacité d’un produit/service numérique développé à interopérer avec d’autres produits/services de l’organisation ou d’autres organisations. Cet indicateur détermine la propension de l’organisation à bâtir des services compatibles avec d’autres.
Les produits/services développés par l’organisation sont bien décrits et commentés.
Les produits/services sont globalement génériques et peuvent être facilement réutilisés au sein de l’organisation.
Les produits/services sont évolutifs sans avoir à changer la structure et l’interfaçage avec l’extérieur. Les produits/services développés sont simples d’utilisation et intuitifs pour les clients.
Les produits/services développés sont facilement réutilisables pour d’autres organisations avec développement d’APIs spécifiques pour favoriser l’interfaçage.
Les produits/services développés permettent le lien entre les mondes physique et numérique (par exemple, QR code) et entre les biens numériques et le reste du monde numérique.
OFI4. Services autour des données des moyens de paiement (carte bancaire, smartphone)
Cet indicateur mesure la capacité de l’organisation à proposer des services autour des données qui sont produites par les moyens physiques de paiement. Les deux premiers niveaux s’attachent à la sécurité qui est une exigence forte observée chez les clients, les deux suivants à des utilisations des données avec le contrôle du client selon le principe de l’opt-in et dans le respect du RGPD.
Les données générées par les moyens de paiement (carte bancaire, smartphone) sont exploitées dans un but de sécurisation du client et de prévention d’éventuelles transactions frauduleuses (par exemple, géolocalisation des transactions avec horodatage pour détecter des incohérences). Les paiements sont effectués de façon simple pour le client avec des processus de sécurité peu contraignants.
Les processus de sécurité peuvent être paramétrés selon le client (autorisation de découvert, recours au 3D Secure et montant associé).
Des offres personnalisées non intrusives peuvent être proposées par l’organisation en fonction des préférences du client et selon les événements de vie, le calendrier et l’analyse du big data des transactions passées. Des statistiques sur les paiements sont proposées via un outil idoine sur le site et l’App du client avec des possibilités d’export pour traitement et analyse (par exemple, fichier Excel).
Des transactions bancaires (au choix du client par nature de dépense) peuvent être vendues à des tiers en échange de monnaie virtuelle, monnaie, points de fidélité (au choix). Des utilisations de codes à barre sur smartphone permettent d’interagir avec un écosystème partenaire pour des programmes de fidélité pour des achats dans des enseignes.
Des systèmes de sécurisation avec la blockchain sont greffés en complément pour assurer une sécurité de deuxième niveau des transactions et transparente pour l’utilisateur.
OFI5. Documentation des services proposés
Il s’agit de mesurer le degré de maturité dans la documentation des produits et services pour le bien des utilisateurs, tant clients que personnel de l’organisation.

La documentation existe et est claire.[modifier]

La documentation peut être obtenue (en ligne sur les sites de l’organisation via des liens et sur les App, ainsi que sur les intranets).
La documentation est accessible sur les outils de l’organisation, elle peut être partagée et commentée dans un but d’enrichissement ou de correction des anomalies ou défauts d’explication. La documentation – notamment les contrats, les conditions générales d’utilisation (CGU), etc. – peut être téléchargée au format PDF ou équivalent.
Le cas échéant, la documentation existe dans d’autres langues correspondant aux pays où le produit/service est disponible. La mise à jour de la documentation bénéficie d’une correction automatique des anomalies avec une remontée d’information vers les personnes en charge de la documentation et un signalement des utilisateurs (mél, SMS) en cas de modifications importantes impactant l’utilisation du produit/service, et notamment les CGU.
Le produit/service comprend en lui-même la documentation (par exemple, si le produit est pris en photo ou si le code du service de type QR code permet d’avoir une vidéo ou une information augmentée le présentant et permettant facilement de naviguer vers la question posée).

Commercial[modifier]

OFC1. Disponibilité des services sur les canaux numériques et omnicanalité
Il s’agit de pouvoir proposer les services de l’organisation sur un plus large ensemble de canaux afin de faciliter le choix et in fine influer sur le taux de souscription de produits, notamment à distance (smartphone, Internet, SMS).
Chacun des canaux de vente principaux (site Internet, agence, téléphone) permet de proposer la vente d’au moins 90 % des services du catalogue de l’organisation.
Chacun des canaux (hors SMS) permet de proposer l’ensemble des services. En particulier, toute offre ou souscription de service commandée sur Internet peut être confirmée quelques secondes plus tard. La souscription à un service donne lieu à des éléments de preuve (automatiquement envoyés par mél, SMS). Les délais de rétractation prévus par la loi sont rendus possibles par les systèmes d’information. La télévente permet de proposer tous les services (avec cependant des confirmations pour les contrats dans le cadre des dispositions de la loi). Le paiement se fait par https ou de façon sécurisée via le smartphone.
L’ensemble des offres et des services est consultable à la demande, en tout temps, en tout lieu (Internet, agence, téléphone), avec pour les contrats des fichiers de type PDF fournis.
Un référencement est fait sur Internet (combinaison de référencement naturel et payant sur les moteurs de recherche) et les App des services afin d’améliorer leur visibilité par rapport aux concurrents. Une base de données unique fait état des produits physiques commercialisés par l’organisation (carte de crédit dédiée à l’organisation, divers produits participant aux relais de croissance) dans le cadre d’une gestion de stock avec proposition d’option de livraison à domicile, dans un point relais ou tout autre lieu prévu le cas échéant, avec délai de livraison estimé.
Le bien fait partie d’un écosystème de services développé. Il bénéficie d’une traçabilité, d’un support et de services autour (par exemple, produit augmenté via réalité augmentée, etc.).
OFC2. Capacité à piloter ses stocks et à initier des réassorts automatiques grâce au numérique tout en étant en flux tendu
Il s’agit de mesurer la capacité e-logistique de l’organisation dans la gestion de ses stocks pour une meilleure optimisation et satisfaction du client.
Connaissance de l’état des stocks par magasin en fin de journée.
Connaissance de l’état des stocks par magasin en temps réel.
Génération de réassorts automatiques en cas de faible niveau de stock d’un article par rapport à l’historique des commandes passées, des pics éventuels et d’autres paramètres liés à des phénomènes de mode, d’actions commerciales ou de retombées médiatiques.
Possibilité en cas de produits/services non disponibles en stock, de se faire livrer via un autre magasin pour que le client ait le produit dans le magasin de son choix, ou de se faire livrer à domicile ou dans un lieu convenu au créneau horaire de son choix.
Idem + prise en compte des délais et des coûts dans l’optique d’une satisfaction du client. Possibilité pour certains objets et pièces de les imprimer à proximité du client en impression 3D et de les lui livrer dans la journée.
OFC3. Reporting des ventes en temps réel et analyse de marge
Il s’agit de disposer d’un reporting des ventes des produits/services en temps réel et de pouvoir effectuer des analyses de marges, de calculer l’impact sur le chiffre d’affaires. L’objectif est de pouvoir aider à la prise de décision rapide (par exemple, devis, tarification sur mesure compte tenu des spécificités du client, du territoire, de la concurrence et dans le respect de la loi) tant au niveau global qu’au niveau local.
Connaissance des ventes de produits/services d’un point de vue temporel (jour, mois, même période précédente) et selon les pays, sites, agences dans la journée et selon les droits associés pour les personnes manipulant les outils de reporting idoines.
Idem, mais en quasi-temps réel. Les calculs d’impact sur les marges sont effectués par le personnel du siège habilité en raisonnant sur l’année en cours où il existe des marges de manœuvre. La connaissance de chaque client est possible via les outils proposés, notamment le chiffre d’affaires généré par client (par exemple Arpu – average revenue per user – dans le monde des télécommunications).
Connaissance fine des marges via un outil utilisé ou développé par l’organisation permettant les analyses. Les ventes via les apporteurs d’affaires ou les affiliations sont intégrées à l’outil de pilotage. Des reportings sous forme de tableau de bord sont générés pour les directeurs qui le souhaitent.
Les ventes via le canal qui les a amenées, voire un code de réduction ou une promotion, peuvent être tracées. Toute vente est tracée et l’événement déclencheur peut être remonté et analysé précisément. Le pilotage du nombre de rendez-vous client par commercial est remplacé par le pilotage des ventes tous canaux avec la possibilité d’effectuer des focus sur chacun des canaux (par exemple, la vente à distance, en face-à-face, etc.).
Les prix des concurrents et en fonction du niveau de service sont intégrés dans l’outil de pilotage, de nature à pouvoir réaligner rapidement les prix. Les modifications des prix sont effectuées simultanément sur l’ensemble des canaux de vente.
OFC4. Pilotage des ratios commerciaux des canaux de vente grâce au numérique
Cet indicateur mesure la possibilité de disposer de ratios automatisés grâce au numérique pour les différents canaux de vente où les services sont proposés par l’organisation.
Des remontées sont faites automatiquement par période pour les nombres et les taux de souscription à des offres et selon les canaux à distance (par téléphone, via un site web, etc.) et selon les types de produits avec utilisation d’outils idoines.
Des remontées sont faites automatiquement par périodes avec un pourcentage de souscription sur chacun des canaux, avec également le pourcentage de souscription utilisant au moins deux canaux, le nombre de contacts client sur chaque canal à distance. Des extractions automatiques sont faites pour les agences physiques et ensuite agrégées.
Des remontées concernent aussi des agrégations pour calculer le chiffre d’affaires, les marges, l’évolution du nombre de clients par canal, le nombre de services vendus par rapport aux consultations des différents sites, au temps moyen passé, etc.
Des remontées plus poussées avec des ventes croisées, des niveaux de marges sur les offres et le RoI des nouveaux produits sont réalisées.
Les remontées sont exploitées avec des outils de big data pour donner des tendances globales, locales, par canal, par type de clientèle, etc. pour le service de la direction commerciale et de la direction financière. Les données sont délivrées à la fois brutes et agrégées sous forme de tableau selon le formalisme requis.
OFC5. Taux de transformation d’actions commerciales en vente
Cet indicateur mesure le taux de transformation d’une action commerciale en vente (souscription d’un nouveau service ou ajout d’une option à un service existant, par exemple). Il comprend à la fois les actions réalisées sur le web (via un lien produit qui peut être issu d’un partenaire), mais aussi celles qui le sont en face-à-face et via d’autres canaux dans un objectif de multicanalité de la vente. Pour le web, il s’agit de la capacité à transformer une visite en vente (CPA* – coût par action).
Pour le web, plus de 1 % de CPA.
Pour le web et les canaux numériques, CPA compris entre 2 et 3 %.
Pour le web et les canaux numériques, CPA compris entre 3 et 5 %. Capacité à générer des ventes additionnelles ou des options pour une offre dans plus de 10 % des cas pour une commande passée.
Pour le web et les canaux numériques, CPA compris entre 5 et 7 %. Capacité à générer des ventes additionnelles ou des options pour une offre dans plus de 20 % des cas pour une commande passée. Pour la télévente, plus de 7 %. Pour la vente en face-à-face lors d’un rendez-vous avec un conseiller financier ou un chargé de clientèle, plus de 10 %.
Pour le web et les canaux numériques, plus de 7 % de CPA. Pour la télévente, plus de 9 %. Pour la vente en face-à-face lors d’un rendez-vous avec un conseiller financier ou un chargé de clientèle, plus de 12 %.
OFC6. Temps de décision de commercialisation d’un nouveau service depuis l’idéation
Cet indicateur permet de mesurer la rapidité de conception d’un nouveau service pour réduire le time to market (temps entre la création d’un nouvel usage et sa commercialisation). Lancer un service en étant pionnier pourrait constituer un avantage compétitif et la réduction des temps de développement peut être corrélée avec les coûts.
Existence d’ateliers de créativité ou d’idéation dans l’organisation et analyse des besoins du marché et des avantages compétitifs possibles par rapport à des concurrents.
Maîtrise d’une chaîne de valeur de création de service depuis la compréhension des besoins des clients par catégorie, la capacité à générer des PoC, la validation des usages et des maquettes, le temps de réactivité du management (direction du marketing ou de la stratégie) afin de se prononcer sur un Go/No Go pour le lancement d’un nouveau service.
Accessibilité des résultats dans le cloud et via le réseau social d’entreprise auprès des acteurs projets de façon à pouvoir recueillir les remarques en temps réel. Capacité à apporter rapidement des améliorations incrémentales. Cycle depuis l’idéation jusqu’au PoC et à la décision de commercialisation inférieur à neuf mois.
NB : Il s’agit de la décision de commercialisation et non du temps entre le cahier des charges et la production qui, dans l’automobile, est d’environ quatre ans et beaucoup plus dans l’aviation ou pour de gros équipements de défense.
Cycle depuis l’idéation jusqu’au PoC et à la décision de commercialisation inférieur à six mois.
Cycle depuis l’idéation jusqu’au PoC et à la décision de commercialisation inférieur à quatre mois.

Marketing[modifier]

OFM1. Exploitation des données pour faire évoluer l’offre en temps réel
Cet indicateur mesure la capacité à exploiter les données de façon à permettre de proposer des offres adaptées et faire évoluer l’offre en temps réel.
Les données du client sont exploitées (informations personnelles, e-CRM, bases de données, historique des transactions, nombre et nature des comptes) pour offrir une personnalisation de l’interface du site web et de l’App, des suggestions de services ou conseils dans l’utilisation des offres et de façon non intrusive (par exemple, dans un bandeau du site). Des messages peuvent être envoyés à l’occasion d’événements de type anniversaire.
Des outils exploitent le big data et analysent les paramètres pour proposer des conseils pour la gestion des comptes, la souscription à des services dans le respect du RGPD. Des offres sur mesure tenant compte des spécificités du client peuvent être proposées.
Idem + des offres sur mesure tenant compte des transactions du client (par carte bancaire, via smartphone) et des parcours du client sur les sites de l’organisation peuvent être proposées en interne ou avec un écosystème de partenaires en établissant un score de crédit, etc.
Le big data, collecté et analysé, est enrichi avec des données extérieures (sectorielles, concurrents) pour permettre des calculs et, par exemple, proposer des modifications des contrats à la direction de l’organisation dans la journée pour ensuite pouvoir, après validation humaine, être ventilé sur le terrain. Le recours à la gamification peut être utilisé pour cibler une clientèle plus jeune.
Idem, mais décliné client par client avec des suggestions non intrusives ou conformes à ses souhaits avec un mix de l’exploitation du big data des données globales et des données du client. Les propositions d’offres ou de modification d’offres existantes peuvent être faites automatiquement ou transmises par l’intermédiaire d’un commercial ou conseiller à distance.
OFM2. Capacité à proposer une tarification juste d’un produit en temps réel compte tenu des paramètres fournis
Cet indicateur mesure la capacité de l’entreprise à établir un prix sur mesure selon des cibles très différentes tout en tenant compte des inducteurs de coût et des caractéristiques du produit/service. Les spécificités du numérique et des marchés liés au numérique (C2C, places de marché) ou les pratiques facilitées par Internet (achat groupé, intermédiation) sont prises en compte.
L’entreprise dispose de marges de manœuvre pour facturer les services en fonction du profil du client, du nombre de produits qu’il a souscrits, de sa solvabilité et d’autres critères comme l’ancienneté en tant que client.
L’établissement de contrats ou de produits complexes fait l’objet de simulation avec des outils idoines. Les éléments fournis par le client ou le prospect permettent de réaliser une simulation tarifaire dans un délai inférieur à sept jours.
Idem, mais tout peut être fourni par le prospect et le client en ligne avec un délai de réponse inférieur à trois jours.
L’entreprise peut faire appel à des partenaires de son écosystème pour bénéficier de tarifs plus avantageux. Tous les échanges sont automatisés pour gagner du temps.
Idem, avec un délai de réponse inférieur à vingt-quatre heures.
OFM3. Cohérence de la présence de l’organisation et de ses produits/services sur le web
Cet indicateur a pour but de vérifier la cohérence de la présence du nom de la marque et de ses produits/services sur le web. Il reflète aussi la capacité à réserver un nom le premier et à lutter efficacement contre les homonymes tout en choisissant des noms différenciants. Il s’agit aussi d’avoir une lisibilité simple pour les clients, les partenaires, les fournisseurs et les prospects de nature à faciliter la communication.
L’organisation a son nom de marque sur ses sites Internet dans l’ensemble des pays où elle est présente de façon uniforme (par exemple www.organisationlambda.com, www.thelambdaorganization.fr, etc. pour un acteur qui s’appellerait Lambda).
Un service surveille les noms de marques, produits et services, effectue les recherches d’antériorité et dépose les noms en conséquence sur le web.
Le nom de la marque est unique sur les médias sociaux. À titre proactif, le nom est réservé sur les médias sociaux sur lesquels l’organisation n’est pas présente (par exemple, Snapchat). La politique de réservation des noms de produits et de marques sur les différents médias sociaux et ceux qui se créent se fait par anticipation.
Idem + les noms des offres de l’entreprise sont les mêmes pour chaque type d’offre sur les médias sociaux. Des comptes dérivés sur les médias sociaux existent à l’international pour les produits où l’organisation est présente, par exemple @lambda @lambda_uk @lambda_es sur Twitter.
Des outils générateurs de noms de produits et services sont utilisés dans l’optique de disposer de noms pour les prochains lancements en cohérence avec ce qui est disponible.
OFM4. Adéquation des noms de domaines et de la stratégie de marque à l’international
Il s’agit de mesurer la cohérence de l’organisation sur Internet à l’international, en particulier l’adéquation entre les noms de domaines détenus et la stratégie de la marque à l’international. Les noms de domaine doivent refléter la stratégie de la marque.
Un seul nom de domaine (par exemple, .fr ou .com).
Des noms de domaines pour des pays où l’organisation est implantée (par exemple .de, .uk, .es) sont parfois créés. Chaque site est soit dans la langue du pays, soit en anglais avec une redirection vers le site .com, par exemple en langue anglaise.
À chaque pays où l’organisation est implantée, un « .pays » existe. Les mises à jour sont effectuées régulièrement pour l’ensemble des sites à l’international et de façon synchrone. Des redirections depuis un site vers un autre site dans une même langue peuvent être proposées (par exemple, les pays de langues espagnoles verses). Les CGU sont pensées pour les spécificités juridiques des pays.
Les spécificités des pays sont prises en compte et le contenu même du site (texte, audio, vidéo) est adapté selon les offres proposées à chacun des pays et à sa culture.
Autant de noms de domaines que de marques et de pays où l’organisation est présente + un .com et éventuellement un « .type_de_l’organisation » selon les noms de domaine libéralisés proposés par l’Icann (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) et ses revendeurs, par exemple .wine pour un acteur du vin ou .immo pour l’immobilier.
OFM5. Taux de couverture des langues ciblées
Cet indicateur mesure l’effort de l’entreprise pour localiser les contenus qu’elle produit aux marchés qu’elle veut adresser.
0 à 20 % des contenus produits par l’entreprise sont disponibles dans toutes les langues ciblées.
20 à 50 % des contenus produits par l’entreprise sont disponibles dans toutes les langues ciblées.
50 à 70 % des contenus produits par l’entreprise sont disponibles dans toutes les langues ciblées.
70 à 100 % des contenus produits par l’entreprise sont disponibles dans toutes les langues ciblées.
100 % des contenus sont disponibles dans toutes les langues ciblées.
OFM6. Notoriété numérique de l’organisation auprès du client
Cet indicateur permet de mesurer la notoriété de l’organisation sur Internet et les réseaux sociaux avec une analyse du buzz généré et la tonalité des messages (positifs, négatifs, neutres), avec également un NPS (Net promoter score) instauré pour suivre un panel de clients et contrôler l’évolution de son image avec des actions de communication ou des actions correctives associées.
Un suivi des messages associés à l’organisation sur les réseaux sociaux, notamment Twitter et sur les blogs, est mis en place pour évaluer la tonalité. Celle-ci doit être a minima neutre. Des actions de type réponses personnalisées aux internautes mécontents sont faites.
L’organisation met en place un calcul de son NPS auprès d’un panel représentatif d’au moins 100 clients pour un suivi mensuel ou trimestriel. Son NPS est au moins de 0. Les mécontentements clients rencontrés sont remontés aux équipes opérationnelles concernées.
Le NPS est au moins de 20. Tout mécontentement exprimé sur Internet et les réseaux sociaux est traité en moins de trois heures après l’alerte. Un suivi du mécontentement remonté aux équipes opérationnelles est fait de bout en bout jusqu’à la clôture de l’incident.
Le NPS est au moins de 50. Des personnes sont en alerte avec un community management idoine dans une optique d’anticipation de tout bad buzz impactant l’image et la notoriété numérique de l’organisation. En cas de client mécontent sur Internet ou les réseaux sociaux, un geste commercial est proposé.
Le NPS est au moins de 65.
OFM7. Audience de l’organisation sur les médias sociaux
Il s’agit d’évaluer le niveau d’audience de l’organisation en considérant le nombre d’interactions sociales sur les médias sociaux liées à l’offre ou la marque dans une semaine (commentaires, partages, « J’aime » ou émojis sur Facebook ; mentions, retweets, « J’aime », listes sur Twitter, interactions sur d’autres médias sociaux comme LinkedIn, Instagram ou YouTube). Cela reflète tant ce qui est posté via son community management que les réactions qui sont suscitées. Le nombre d’interactions est ramené à la taille de l’organisation. Étant donné la disparition de l’indicateur Klout pour la mesure de l’influence sur les réseaux sociaux qui faisait référence, un mécanisme de calcul est proposé pour la détermination du niveau atteint.
Au moins 10 + (effectif/10 000) échanges sociaux par semaine publiés par l’organisation (tweets, posts, commentaires).
Au moins 50 + (effectif/7 000) échanges sociaux par semaine publiés par l’organisation (tweets, posts, commentaires).
Idem + au moins 80 + (effectif/5 000) reprises sur les médias sociaux (partages, retweets, mentions) par semaine en moyenne.
Idem + au moins 150 + (effectif/500) reprises sur les médias sociaux (partages, retweets, mentions) par semaine en moyenne.
Idem + la capacité à interagir avec un client mécontent dans un délai inférieur à une heure lorsque la marque est mentionnée négativement sur les médias sociaux afin de prévenir tout bad buzz .

Expérience client[modifier]

OFE1. Omnicanalité dans la relation client/prospect et l’expérience utilisateur
Il s’agit pour l’organisation de pouvoir offrir à tout client ou prospect un moyen de contact et d’interaction sur des canaux nombreux et complémentaires afin de toucher les cibles les plus larges possible tout en offrant une cohérence en matière d’expérience utilisateur, en particulier lorsque le client ou prospect alterne dans sa relation avec l’organisation d’un canal à un autre.
L’organisation est présente sur Internet et des interactions sont possibles par téléphone, SMS, chat et sur les réseaux sociaux.
Les informations sur les différents canaux sont cohérentes et mises à jour simultanément (prix, services) tout en offrant une logique de personnalisation propre au canal (par exemple, interface différenciée selon les terminaux – PC, tablettes, smartphones, objets connectés).
Toute indisponibilité d’un canal délivre un message pour que le client ou prospect puisse contacter l’organisation via d’autres canaux de son choix avec l’heure escomptée de retour du service indisponible.
Une exploitation des commentaires sur les réseaux sociaux avec des outils d’analyse textuelle est faite pour améliorer les services (cela peut passer par des partenariats avec des start-up idoines ou des compétences en interne). Des chatbots permettent un traitement intelligent et efficace de premier niveau pour tout contact du client/prospect avant de basculer vers un agent humain davantage expert.
Les canaux permettent la remontée des informations sur le client dans une base de données unique pour disposer d’un historique et lui offrir davantage de sur- mesure (par exemple, une visite en agence avec un intérêt prononcé pour un service sera connue du centre d’appels, un SMS envoyé à un agent commercial sera également tracé dans l’historique de la base de données).
OFE2. Gestion de la relation client de l’avant-vente à l’après-vente
Cet indicateur évalue la qualité de la relation client sur l’ensemble de la chaîne commerciale. On peut supposer que la fréquence de connexion de son compte en ligne est corrélée à l’importance de la relation entre le client et l’organisation (sauf pour certains secteurs comme l’assurance où l’interaction intervient davantage en cas de sinistre ou besoin de justificatif d’assurance, par exemple). En outre, il convient d’évaluer le temps de réponse de l’organisation dans sa stratégie multicanale à des sollicitations de clients ou de prospects.
Le nombre moyen de connexions par client et par jour à l’organisation (via ses portails web et ses App) est au moins de 0,5. Pour l’entrée en relation, le prospect a le choix par téléphone, mél ou chat via le site. Idem pour le client.
Sur les réseaux sociaux, en particulier Twitter et Facebook, toute mention à l’acteur via un de ses comptes (par exemple, « @lambda » sous Twitter) fait l’objet d’une réponse dans les trois heures. Le changement d’interlocuteur commercial est adressé au client par plusieurs canaux (site web, mél, etc.) de façon non intrusive avec ses coordonnées multiples pour le contacter. Pour l’entrée en relation, le prospect peut passer par les réseaux sociaux (Facebook et Twitter notamment).
Le nombre moyen de connexions par client et par jour à l’organisation (via ses portails web et ses App) est au moins de 1. Pour certaines opérations et afin d’évaluer la qualité de service dans la souscription ou la mise à jour de certaines offres, un SMS est adressé au client pour connaître son niveau de satisfaction (par exemple, sur une échelle de 1 à 5) dans une optique d’amélioration permanente. Les échanges pour la relation client sont enregistrés et consolidés (à la fois pour les clients et pour les prospects).
Sur les réseaux sociaux, en particulier Twitter et Facebook, toute mention à l’acteur via un de ses comptes (par exemple, « @lambda » sous Twitter) fait l’objet d’une réponse dans l’heure qui suit. L’interlocuteur commercial peut être contacté par plusieurs canaux (y compris SMS, web conférence) avec une réponse de sa part dans la journée ou par quelqu’un d’autre en cas d’absence pour assurer un intérim. Les échanges client sont historisés dans un outil unique avec, pour chaque contact, la date, l’heure, l’indication de l’objet et du canal utilisé par le client.
Des outils de big data analysent les échanges client et prospect tant au niveau individuel que collectif, et des actions globales et ciblées en découlent.
OFE3. Délai pour l’ouverture d’un compte ou la (re)négociation d’un contrat, facilité et sécurité
Cet indicateur permet de mesurer la réactivité de l’organisation et la facilité de l’opération d’ouverture de compte pour un nouveau client ou pour un client souhaitant souscrire un nouveau contrat ou renégocier un contrat existant. Internet est de nature à permettre une plus grande réactivité et une dématérialisation des procédures qui ont un impact sur le délai total de l’opération. Les acceptations des contrats par les clients restent soumises aux délais de rétractation prévus par la loi.
L’ouverture d’un compte s’effectue en moins de trois jours pour le B2C et en moins de quinze jours pour le B2B où la vente est plus complexe.
L’ouverture d’un compte peut s’effectuer entièrement en ligne et dans un délai inférieur à deux jours pour le B2C et à sept jours pour le B2B. Des contrats peuvent être instruits en ligne en moins d’une semaine avec fourniture des éléments en ligne (par exemple, et selon le type d’organisation, fiches de paie, avis d’imposition, questionnaire de santé, Kbis, numéro de Siret, etc.) pour l’établissement d’une proposition si les conditions d’éligibilité sont réunies. Les demandes en ligne font l’objet de dispositifs de vérification de l’authentification de la personne (morale ou physique).
L’ouverture d’un compte peut s’effectuer entièrement en ligne et dans un délai inférieur à deux heures pour le B2C et à quatre jours pour le B2B. Une renégociation de contrat peut être demandée en ligne avec fourniture des éléments et une réponse quant à la possibilité dans un délai inférieur à deux jours pour le B2C et à quatre jours pour le B2B, et dans l’affirmative, un délai total d’instruction du dossier inférieur à sept jours. Les demandes en ligne font l’objet de dispositifs de vérification de l’authentification de la personne qui sont ergonomiques et prennent moins de trois minutes.
L’organisation utilise des solutions basées sur la blockchain et des tiers pour vérifier les éléments de dossier apportés par les clients et prospects.
Tous les contrats, renégociations et avenants peuvent être faits en ligne dans un délai inférieur à deux jours. En cas de clause évolutive dans le contrat ou d’événement imprévu, le client est automatiquement informé par 2 canaux complémentaires.
OFE4. Degré de maturité des agences physiques (ouverture, développements de nouveaux services et partenariats)
Cet indicateur se propose de mesurer la tendance souhaitée par les clients : une ouverture vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour permettre l’accès aux automates (par exemple, dans le domaine bancaire ou les stations-service), des plages d’ouverture élargies pour rencontrer les agents, un lieu de vie avec un développement de services additionnels qui n’étaient jusqu’alors pas proposés par l’organisation, la génération d’un écosystème de services avec des partenaires.
Ouverture de l’agence vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour les parties où se trouvent les automates.
Wi-Fi disponible en agence. Ouverture au moins une heure avant 9 heures ou après 19 heures.
Écrans interactifs dans l’agence pour interagir avec chatbot ou conseiller virtuel avec hologramme.
Des partenariats sont noués entre l’organisation et d’autres enseignes en accord avec la stratégie pour en faire un lieu de vie et une market place physique. Des locaux peuvent être mis à disposition de clients à tarif préférentiel.
Des espaces de co-working sont proposés à des entreprises innovantes et des start-up avec des possibilités de collaboration avec les acteurs de l'organisation pour, par ailleurs, faire émerger des idées nouvelles et des projets.
Synthèse des indicateurs selon le type d’organisation
Une croix dans une case du tableau signifie que l’indicateur est applicable pour la catégorie d’organisation considérée.

Points clés[modifier]

  • Développez des prototypes sous forme de PoC dans une logique de Go/No Go et ayez une culture du test au-delà de l’organisation.
  • Pensez à la cohérence entre vos canaux de vente/distribution et les informations recueillies en étant dans une logique omnicanale.
  • Tirez parti du numérique pour adapter votre offre et son positionnement tarifaire.
  • Surveillez l’audience de vos offres sur les médias sociaux et mesurez votre réputation auprès de vos clients.
  • Mesurez vos progrès dans la transformation digitale de vos offres selon quatre aspects  : innovation et conception, commercial, marketing et expérience client.
1Voir «  À la rencontre des entrepreneurs  », le carnet de voyage quotidien de Catherine Barba chez les chefs d’entreprise américains, sur le site du Figaro, http://plus.lefigaro.fr/tag/good- morning-entrepreneurs.
2The Business Research Company, Information Technology Global Market Rep ort, 2019, https://www.reportlinker.com.
3The State of Omnichannel Commerce: A My stery Shopp ing Study , 2017, https://kibocommerce.com.
4Seth Godin, Les Secrets du marketing viral  : le p ouvoir du bouche à oreille p uissance 10  !, traduit de l’américain par Larry Cohen, Maxima-Laurent du Mesnil Éditeur, 2001.
5Pour une analyse plus approfondie et nuancée, notamment avec le poids de l’Asie, voir «  E- commerce  : 50  % des ventes de 2017 effectuées sur des marketplaces  », LSA , 10 janvier 2018, http://www.lsa-conso.fr.
6Russell Brandon, «  The Monopoly-Busting Case Against Google, Amazon, Uber, and Facebook: What Tech Companies Have to Fear from Antitrust Law  », The Verge, 5 septembre 2018, http://www.theverge.com.
7Yann Gourvennec, «  Marketing B2B et B2C, même combat  ?  », Journal of Marketing Revolution, no 6, hiver 2017, p. 4-9, https://visionarymarketing.com.
8Andy Hoar, «  Death of a (B2B) Salesman: One Million US B2B Salespeople Will Lose Their Jobs to Self-Service eCommerce By 2020 », Forrester, 13 avril 2015, http://www.forrester.com.
9Dans Le Digital exp liqué à mon boss : p ar ceux qui en font et p our ceux qui aimeraient (mieux) en faire (Kawa, 2017), Hervé Kabla et moi-même avons décrit ce phénomène sous le nom de «  courbe de digestion des technologies ».
10Yann Gourvennec, « De l’Homo economicus à l’Homo technologicus  : conseils de survie dans la jungle technologique du marketing  », Survey magazine, octobre 2018, p. 57-61, https://visionarymarketing.info.
11Par transparence, il faut dire que Visionary Marketing a pour client Touch & Sell, leader français du domaine.
12Yann Gourvennec, « Quand la donnée fait vendre  : exercice de prospective », Touch & Sell, 3 décembre 2018, https://www.touch-sell.com/blog.
13Luc Julia, L ’intelligence artificielle n ’existe p as, First éditions, 2019.
14Robert J. Keith, «  The Marketing Revolution  », Journal of Marketing, vol. 24, n° 3, janvier 1960, p. 35-38.
15Bernard Cova, A u-delà du marché  : quand le lien imp orte p lus que le bien, L’Harmattan, 1995.
16Yann Gourvennec et Philippe Colin, La Face cachée de la transformation digitale, Visionary Marketing, 2014, https://visionarymarketing.info.

Chapitre 8[modifier]

Levier  : technologie et innovation

Positionnement du levier et objectifs[modifier]

L’entreprise numérique doit faire des choix en matière de solutions techniques (logiciels, matériels, applications pouvant reposer sur l’intelligence artificielle, la blockchain, le traitement du big data, etc.) mais aussi de rapport aux outils (BYOD) ou au stockage des données (cloud ou non). Ces choix doivent lui permettre d’évoluer sans être contrainte par des solutions techniques susceptibles de fragiliser son organisation. Cela peut amener soit à développer les propres APIs de son système d’information, cœur de métier, soit à acquérir des briques sur le marché qui soient interchangeables, l’organisation pouvant alors se focaliser sur le développement d’une surcouche fonctionnelle et technique de produits et services technologiques sur étagères qu’elle va utiliser. Il est important de mesurer son niveau d’appétence pour la technique au service de ses domaines d’activité stratégiques. Ainsi, savoir si elle maîtrise les techniques d’Internet pour être visible de ses cibles est important, notamment pour son référencement et son occupation de l’espace sur le web, en prévenant les éventuelles situations de crise et d’atteinte à l’intégrité de ses sites.
Même si l’architecture technique est complexe, l’utilisation doit être simple pour les utilisateurs (simplexité*) avec un accès facile et ergonomique, indépendamment du degré de sécurité voulu par l’organisation.
Outre les APIs mises à disposition par l’organisation pour les tiers, l’ouverture des données auprès d’une communauté extérieure est de nature à développer un écosystème de services bénéfique à l’organisation.
L’entreprise doit également assurer la sécurité de ses données en s’inscrivant dans une dynamique par rapport aux solutions qu’elle a préconisées.
Enfin, le niveau d’équipement de ses collaborateurs (PC, smartp hone, tablette) et d’accès à Internet et la qualité de celui-ci lui offrent un avantage déterminant en matière de démultiplication des usages.

Groupements[modifier]

Nous proposons de caractériser la technologie et l’innovation d’une organisation engagée sur le numérique suivant quatre groupements répondant aux questions structurelles de ce type d’entreprise :
  • A rchitecture  : comment sont effectués les choix de solutions techniques de l’entreprise (architecture, matériels, logiciels et applications, stockage des données)  ? Sont-ils faits de façon à rendre l’entreprise réactive et évolutive par rapport à ses propres produits et services sans qu’elle soit prisonnière d’une solution technique la rendant vulnérable ?
  • Orientation client  : comment l’organisation choisit-elle des solutions qui lui permettent d’adresser l’ensemble de ses cibles sur Internet et via les App  ? Comment se positionne-t-elle sur les médias sociaux pour être visible  ? Quelles technologies va-t-elle utiliser pour être au service de ses clients, etc. ?
  • Standards  : l’organisation respecte-t-elle les standards du web ? Son parc applicatif est-il cohérent ?
  • Productivité  : quel est le degré d’équipement des collaborateurs d’un point de vue matériel et logiciel  ? Quelle est la qualité d’accès à Internet dans l’entreprise et en dehors ?
NB  : Les indicateurs proposés ne s’attachent pas à l’infrastructure réseau (routeurs, serveurs), au choix de faire du on demand ou on p remise, au choix de technologies (par exemple PHP ou Java) ou d’outils de productivité mis en place par l’organisation, sauf rares exceptions. On ne s’intéresse pas ici aux processus mis en place par l’organisation, mais on s’attache à ce qui est réellement fait pour que l’accès aux données et aux applications soit tracé en maximisant le niveau de sécurité requis.
Damien Douani (@damiendouani), explorateur digital
«  La principale question des nouveaux usages est la marge de liberté que les managers vont laisser aux générations Y ou Z pour pouvoir faire “autrement”. »
Vous observez l’émergence des technologies et des usages digitaux dans les entreprises depuis de nombreuses années. Quels sont les tops et les flops que vous avez en tête ?
Je note que de nombreux usages se sont installés sans la bénédiction première des entreprises. Et que d’autres usages, comme la sacrosainte «  collaboration  », sont toujours aussi difficiles à installer. Preuve que les changements sont avant tout culturels, méthodiques, et doivent être partagés par tous. Il faut du bon sens et du pragmatisme avant tout, pour que cela serve les usages réels et non fantasmés.
En ce sens, les réseaux sociaux d’entreprise attendent toujours leur grand soir… L’utilisation de la plateforme collaborative Slack dans des équipes agiles pousse à repenser les modes de communication sans créer une nouvelle boîte mél  ; le cloud devient un standard alors que de nombreuses entreprises ne voulaient pas en entendre parler  ; le BYOD, même s’il donne du fil à retordre aux directions des systèmes d’information, s’impose et floute les lignes entre personnel et professionnel, interne et externe. Sans compter la digitalisation de certains processus (comme le dépôt de congés) en mode « self care mobile ».
Quant à la boîte mél, personne n’a vraiment réussi à la réinventer, et c’est toujours un boulet et un goulet de productivité.
Les réseaux sociaux font désormais partie du quotidien des consommateurs, mais également des collaborateurs en entreprise. Vous semblent-ils arrivés à leur pleine puissance  ? Existe-t-il des freins générationnels dans l’entreprise par rapport au collaboratif et à l’émergence d’une intelligence collective ?
Le problème de l’intelligence collective est sa mémoire et son agrégation. Collaborer sur le moment de manière plus fluide  ? Parfait. Mais retrouver une information pertinente sur un projet passé est une autre histoire. Car cela demande une rigueur de mise en forme, de référencement. De fait, cela est vécu comme une contrainte par certains «  parce qu’on n’a pas que ça à faire, on a du travail  ». Les réseaux sociaux ne sont pas pris au sérieux en interne, en général, ou sont cantonnés à des usages spécifiques. Donc oui, il reste des creusets de croissance autour de ces nouvelles méthodes sociales.
En revanche, la messagerie instantanée ou les outils collaboratifs autour des documents fonctionnent bien. Il est évident que certains freins sont liés à des questions d’âge, mais c’est loin d’être une vérité absolue  ! J’ai formé des « quinquas » très agiles en digital, et parallèlement, d’après ce que j’ai pu constater, il y a beaucoup de fantasmes autour des «  jeunes  » qui seraient de supers utilisateurs de ces outils. En réalité, ils n’ont pas les appréhensions de ceux qui doivent apprendre quelque chose de nouveau et à qui il faut prouver que ça va être mieux. On préfère souvent faire comme d’habitude, même si ce n’est pas le plus efficace, car le coût pour sortir de sa zone de confort est moindre. En fait, le principal concurrent à tous ces outils et usages, ce sont les habitudes des utilisateurs.
La génération hyperconnectée, Y voire Z, arrive en entreprise. Quels nouveaux usages apporte-t-elle, qui seront demain intégrés au quotidien au-delà du BYOD ?
Outre le fait que je déteste ces classifications qui ne visent qu’à donner un pseudo- vernis sociologique à du bullshit marketing, il y a une réalité plus générale  : des générations arrivent dans le monde professionnel avec de nouvelles habitudes de communication héritées de leurs usages personnels avec – notamment et surtout – leur mobile. Leurs nouveaux usages, c’est qu’ils ont peu de réticences, peu de peurs. Leur pratique habituelle, ce sont des usages efficaces, courts et ciblés, qui utilisent le bon médium au bon moment (et pas le mél comme solution unique et magique). À partir de là, la principale question des nouveaux usages est la marge de liberté que les managers vont leur laisser pour pouvoir faire «  autrement  ». Inutile de constituer ces stupides «  shadow comex  », ces comités exécutifs constitués uniquement de jeunes, pour en apprendre d’eux : laissons-les faire !
En se proj etant à cinq ou dix ans, quelles évolutions des technologies et des comportements nous attendent, que ce soit en tant que consommateurs ou collaborateurs, et plus largement pour tout l’écosystème d’une organisation  ? Allons-nous voir émerger des entreprises plateformes ?
Difficile de répondre sans boule de cristal  ! Nous sommes en fait à un tournant  : les entreprises ont – pour la plupart – enfin pris au sérieux le digital, et arrêtent d’en avoir peur pour en saisir les opportunités. Il aura fallu du temps pour cela, et c’est tout à fait normal. Les PME vont s’y mettre, et c’est nécessaire. Les consommateurs, malgré une possible défiance envers les réseaux sociaux, vont continuer à vouloir davantage de proximité, de rapidité et d’individualité dans leur relation aux marques et entreprises. Les collaborateurs vont vouloir retrouver en interne la facilité d’usage qu’ils connaissent en externe dans des applications grand public. Les entreprises vont devoir travailler l’expérience utilisateur de leurs solutions internes, les connecter au monde extérieur via des APIs, apporter de la souplesse via des solutions SaaS (software as a service – soit logiciel à la demande) et cloud, réellement travailler sur l’exploitation des données (avec certainement de l’intelligence artificielle), permettre une continuité de travail quel que soit le lieu… En un mot : nous allons vers une ère de la fluidité.
L’entreprise plateforme – comme Amazon – est un modèle qui ne sera pas reproductible par toutes. Il faut que cela ait du sens au regard de l’ADN de celles-ci, et se méfier des modes. À une époque on parlait de l’entreprise sans usine, on a vu ce qu’il est advenu d’Alcatel… Mais il est clair que cela pose de vraies questions à un Accor face à un Airbnb par exemple. Comment muter sans se dévoyer  ? Entreprise plateforme ou entreprise malléable ? Il est évident que les lignes entre les «  territoires de business  » de chacune vont se flouter – on peut désormais être un opérateur de télécoms et une banque – et que, de fait, l’on peut voir apparaître de vrais scénarios de coopétition, à l’image d’un Monoprix qui utilise les services d’Amazon Prime Now. J’imagine bien demain un Ikea vendre des meubles d’autres marques …
Vous rencontrez de nombreux dirigeants d’entreprises de toutes tailles. Quels sont les signes distinctifs qui vous donnent confiance dans leur capacité à emmener la transformation digitale de l’organisation qu’ils dirigent ?
Ils n’ont plus le choix  ! La peur n’a jamais fait avancer dans le bon sens, et je note qu’ils ont intégré la variable digitale comme un moyen de se développer. Mais il y a encore trop de cloisons, liées à la culture, la structure, l’ego de certains … Désormais, les dirigeants sont de plus en plus nombreux à communiquer publiquement sur leurs convictions autour du chemin à suivre, et ces prises de parole sont un moyen d’entraîner les salariés avec eux, tout en faisant en interne la preuve de ces changements. J’ai en tête Pascal Demurger, directeur général de la Maif, avec qui j’ai plusieurs fois échangé, qui a su apprendre et comprendre le digital pour faire bouger cette entreprise très institutionnelle, en partageant son enthousiasme publiquement en complément d’actions concrètes. Et ça marche !
* * *
François Stephan (@FrancoisStephan), vice-président Sales & Innovation de Be-Bound
«  Le secret d’une transformation digitale réussie réside dans l’intégration à bon escient des deep tech pertinentes pour sa stratégie, son marché, ou pour ses missions d’intérêt général, au bon niveau de maturité technologique. »
Quelles sont les possibilités de disruption induites par la blockchain dans l’ensemble des secteurs d’activité de l’économie au-delà du seul domaine bancaire et des crypto-monnaies ?
La blockchain se présente comme un protocole distribué, transparent et consensuel, permettant à des parties d’échanger de l’information, sans intermédiaire ni autorité centrale (banque, entreprise, avocat, notaire ou gouvernement) pour le contrôler ou le réguler. Au-delà du domaine financier, avec la promesse des crypto-monnaies de remplacer les monnaies fiduciaires par des monnaies virtuelles, potentiellement tous les secteurs d’activité peuvent être la cible des disruptions induites par la blockchain.
On lui prête par exemple la capacité à «  ubériser  » Uber, tiers de confiance par excellence. On peut raisonnablement anticiper de telles disruptions à l’horizon de quelques années dans les domaines de la mobilité comme Arcade City , réseau de chauffeurs décentralisés avec un traitement plus humain du personnel venant en concurrence d’Uber, Lyft et autres acteurs. Plus généralement, les technologies des véhicules autonomes, connectés et électriques, combinées à la blockchain, engendreront une profonde transformation des usages et des modèles économiques de la mobilité.
Nous avons aussi le secteur de l’énergie – lui-même à l’aube d’un changement de paradigme majeur. Historiquement, il reposait sur une architecture centralisée des producteurs vers les consommateurs en passant par les distributeurs. Il va évoluer vers une architecture décentralisée entre acteurs qui seront en même temps producteurs et consommateurs. Ce changement de paradigme est favorisé par l’émergence de la production compétitive d’énergies renouvelables comme le solaire. Sunchain, filiale de Tecsol, a mis en place en France une expérimentation à l’échelle locale d’un quartier. Il s’agit d’une solution de réseaux virtuels entre producteurs et consommateurs, dont les données sont enregistrées dans une blockchain qui automatise et sécurise la répartition de l’électricité entre les participants du réseau.
Le département recherche et développement d’EDF étudie par exemple depuis quelques années des solutions s’appuyant sur la blockchain pour des échanges d’énergie de pair à pair au sein d’une communauté urbaine. La blockchain peut y apporter des réponses intéressantes pour le comptage à faible coût de l’énergie photovoltaïque, la traçabilité des transactions, la sécurisation des contrats, etc.
Depuis le début de l’année 2019, BTU Hotel est en train de proposer des réservations d’hôtels reposant sur la technologie blockchain avec un système de récompense des utilisateurs avec des tokens BTU après chaque réservation. Ceci risque d’ubériser des acteurs comme Booking qui prennent d’importantes commissions pour chaque réservation.
Pourriez-vous expliquer les facteurs clés de succès de la transformation digitale d’un point de vue technique, outre la blockchain (plateforme avec APIs ouvertes, cloud, évolutivité des systèmes, intelligence artificielle, big data )  ? Quels exemples pourriez-vous mettre en exergue ?
Depuis un demi-siècle déjà, la loi de Moore gouverne le rythme du développement des technologies numériques et ne semble pas avoir encore atteint sa limite, sans cesse repoussée, même si l’informatique quantique se profile sur le long terme. Plusieurs décennies après l’invention du transistor et son intégration dans les microprocesseurs, l’éventail des technologies de l’information est très large, dont celles qu’on a parfois tendance à appeler les deep tech, c’est-à-dire des technologies de rupture, issues d’activités poussées en recherche et développement menées dans des laboratoires publics et privés tels que ceux d’Inria en France par exemple. On y trouve l’intelligence artificielle, qui regroupe notamment les techniques du machine learning, du deep learning en tant qu’évolution de celui-ci (reconnaissance de la voix, des images, des formes, traitement du langage, traduction automatique, et qui peuvent se retrouver au sein de chatbots ou de produits comme les smartphones), avec par exemple les classements thématiques de ses photos ou de ses méls et la traduction automatique avec très peu d’erreurs par Google Translate ou bien de solutions comme Systran (http://www.systran.fr). Notons que Gmail livre parfois des suggestions de réponses courtes et pré-formatées du genre «  Entendu », «  Pour info », « C’est noté » ou encore «  Avec plaisir  », «  Ça marche  », «  Je suis en vacances  », avec des choix souvent satisfaisants qui permettent de faire gagner du temps, même si l’on peut perdre légèrement en chaleur humaine. Nous avons aussi le big data, les nanotechnologies, l’Internet des objets (IoT), la réalité virtuelle et augmentée. S’agissant des télécoms, l’arrivée de la 5G offrira de très hauts débits en mobilité, ce qui permettra des ruptures dans les usages qu’il convient d’anticiper, notamment chez les grands groupes et l’IoT industriel. Ce sont les ingrédients technologiques et de méthode à intégrer telles des pièces de Lego pour un projet de transformation digitale.
D’un point de vue technique, le secret d’une transformation digitale réussie pour une organisation, entreprise ou administration, réside, d’une part, dans l’intégration à bon escient des deep tech pertinentes pour sa stratégie, son marché ou pour ses missions d’intérêt général, au bon niveau de maturité technologique. Ces technologies sont à prendre sur étagère à un instant donné, du fait de leur évolution rapide et de leur obsolescence. La difficulté réside dans l’intégration de ces technologies dans un contexte métier, un existant du côté des systèmes d’information et des habitudes des utilisateurs et de l’écosystème. Cela peut amener à revoir les processus et le business model de l’organisation. Cet investissement technologique dépendra du secteur d’activité de l’organisation (grande distribution vs télécommunications ou BTP par exemple, où un même pourcentage d’investissement en technologie n’aura pas la même signification en matière de maturité numérique), de sa préparation à y investir, de la vision et de l’impulsion du top management.
D’autre part, une transformation digitale réussie est celle qui sait s’appuyer sur l’état de l’art des technologies générales en informatique et télécommunications, et sur les bonnes pratiques associées, en particulier le cloud computing, les réseaux sociaux et messageries instantanées, l’open source, les APIs ouvertes (interfaces de programmation), les langages de programmation orientés objet, les réseaux de télécommunications mobiles, l’ingénierie des systèmes complexes et la cybersécurité.
Par exemple, Carrefour a rejoint le consortium IBM Food Trust pour rendre la chaîne d’approvisionnement plus sûre afin de prévenir et anticiper tout problème sur la chaîne alimentaire grâce à la blockchain. Grâce à la réalité augmentée et en collaboration avec
Air Liquide, Bouygues Construction a développé un prototype de manchon connecté pour les opérateurs afin que ceux-ci puissent intervenir sur les chantiers.
Comment les nouvelles technologies peuvent-elles amener de nouveaux usages et comment s’articule le levier technologie et innovation au sein de la transformation digitale globale d’une organisation ?
Les technologies dites de rupture le sont par leur capacité à rendre possibles de nouveaux usages et ainsi créer de la valeur. À titre d’exemple, citons deux technologies sous-jacentes au développement du véhicule autonome  : les lidars (radars par laser qui permettent de cartographier une scène en trois dimensions) et l’intelligence artificielle. Plus qu’un nouveau produit, la voiture du futur préfigure en fait de nouveaux usages permis par la capacité donnée à un véhicule de se mouvoir en totale autonomie et en toute sécurité, dans certaines conditions d’usage avec toutefois des considérations algorithmiques. La sécurité de ces véhicules sera démontrée par une conjugaison de simulations numériques et de tests en grandeur nature, à l’image des crashtests aujourd’hui dont la majorité le sont en numérique  : mobilité et logistique à la demande, nouvelles activités menées pendant les trajets par les passagers, etc. Au même titre que la transformation majeure vécue par le secteur automobile depuis quelques années, la transformation digitale d’une organisation doit tirer profit de l’induction de nouveaux usages par les technologies, tout comme elle doit mobiliser les technologies nécessaires aux changements de processus et d’usage pensés a priori. «  Technopush  » et conception de nouveaux usages qui se basent sur des technologies sont deux approches complémentaires. C’est-à-dire que la transformation digitale doit s’articuler sur une double dynamique  : celle animée par les technologies de rupture qui inventent de nouveaux usages – l’innovation technologique – et celle animée par les changements de processus et de pratiques voulus par l’organisation et nécessitant l’intégration de certaines technologies – l’innovation organisationnelle. Il s’agit par exemple de l’optimisation du back office ou de ses processus cœurs de métier. Cette double dynamique doit être alimentée de manière continue tout au long de la transformation digitale de l’organisation, ces deux volets étant chacun porteurs de valeur et complémentaires.
Quels indicateurs de maturité surveiller pour mesurer la maîtrise de la blockchain  ?
KPMG a développé un blockchain maturity model et plusieurs autres cabinets s’intéressent à la question. Si certains de ces indicateurs reprennent une typologie déjà utilisée pour d’autres technologies, en ce qui concerne la blockchain on peut retenir plus particulièrement les indicateurs de l’expérience utilisateur, de la capacité à monter à l’échelle et les performances, et enfin la gestion des données. Au-delà de ces modèles de maturité, et pas seulement pour la blockchain, il paraît nécessaire d’avoir de plus en plus de compétences technologiques en interne même si on s’appuie sur des partenaires externes. En faisant des expérimentations (preuve de concept, PoC) avec des start-up ou des partenaires technologiques, en acquérant progressivement des compétences en interne, l’entreprise gagne en maturité technologique. Cela passe par des formations du personnel, des recrutements sur ces compétences et un appui sur des prestataires de conseil et de service.
* * *
Laurent Deleville (@deleville59), directeur Open innovation de Safran
« Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. »
Vous avez mis en place la direction de l’ open innovation au sein de Safran. Quels sont les enj eux de l’open innovation chez Safran et quels sont les piliers de la direction que vous avez créée  ? Êtes-vous dans une démarche d’innovation frugale, de budgets dédiés, dans une logique de retour sur investissement et à quelle échéance ?
La direction Safran Innovation Collaborative que j’ai créée en 2013 a pour objectif initial de promouvoir les idées de nos fournisseurs dans nos programmes de recherche et innovation. Nous avons même trouvé un acronyme qui est resté  : MaGIC, pour Management et Gestion de l’Innovation Collaborative. Très vite, nous avons compris que d’autres dimensions étaient à appréhender  : la notion de panel ne pouvant s’appliquer à l’innovation ouverte, nous préférons parler d’écosystème car il est divers et en constante expansion. À côté de nos fournisseurs connus se présentait un monde inconnu alors  : celui des start-up et des sociétés ne travaillant pas dans nos domaines industriels historiques. L’enjeu était alors clair  : comprendre, appréhender et détecter les idées pouvant conduire à une innovation produit. Enfin, cette direction doublement rattachée à l’innovation et aux achats a pour mission de préparer ses partenaires à devenir de futurs fournisseurs.
Trois piliers soutiennent cette démarche. Des outils digitaux, bien entendu, pour nous permettre de chercher efficacement les bonnes technologies et produits, mais aussi les partager au sein du groupe. Un processus jalonné pour impliquer les prescripteurs internes au plus tôt dans la démarche open innovation et ainsi prévenir tout risque, en particulier sur la propriété intellectuelle. Enfin, le plus important, un réseau d’acteurs open innovation ou MaGICiens, senior achats ou recherche et technologie, travaillent de façon transverse et échangent les informations de façon proactive. Ce sont eux le véritable cœur de la démarche. Nous avons des budgets dédiés pour la mise en œuvre de démonstrateurs impliquant plusieurs sociétés du groupe. Au-delà de cette démarche groupe, chaque société pilote indépendamment ses propres budgets dédiés à l’innovation.
Les acheteurs des sociétés du groupe Safran sont rompus à la relation avec un nombre important de fournisseurs. Comment avez-vous réussi à déployer une innovation plus collaborative, plus ouverte sur l’extérieur, dans une entreprise où règne en maître le not invented here (NIH) ?
Je n’irai pas jusqu’à dire que le NIH règne en maître chez Safran. Bien au contraire. Les chercheurs et ingénieurs de Safran sont curieux et déjà très connectés. Toutefois, les programmes commerciaux qui sont les nôtres nous focalisent sur le court-moyen terme. Ils manquent de temps pour une ouverture plus grande. Nous avons alors changé de terminologie et n’utilisons plus le terme NIH, mais PFE, pour proudly found elsewhere. À nous, les acteurs de l’open innovation, de transformer l’idée ou l’innovation détectée à l’extérieur par quiconque en un démonstrateur, voire plus tard en un produit.
Nous faisons ainsi appel à l’intelligence collective en mettant à disposition du plus grand nombre notre portefeuille de co-innovateurs en contact ou identifiés par Safran. Nous ne sommes pas partis de zéro non plus. Mais pour réussir cela, il a fallu effectuer une démarche de conduite du changement ou d’acculturation. Nous avons multiplié les occasions de rencontres entre le management de Safran et notre écosystème pour que chacun apprenne de l’autre et prenne conscience des risques et opportunités de ces relations. Mais dorénavant, les idées et les relations foisonnent et nous ne pouvons plus en rester là, il nous fallait trouver une méthode robuste pour piloter cette démarche.
En faisant des MaGICiens de véritables dénicheurs d’idées venant des fournisseurs et partenaires de Safran, vous les mettez au cœur d’une relation foisonnante avec l’environnement du groupe, qui pourrait les mettre en difficulté face à la variété des interlocuteurs. Quelle solution avez-vous mise en œuvre pour créer un véritable hub collaboratif ?
D’abord l’intelligence collective. «  Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin.  » Ensuite, un processus le plus partagé possible entre chacun des MaGICiens. Enfin, des outils de pilotage cohérents et complémentaires. Nous intégrons avec l’aide de la société Ecosys les outils historiques à notre disposition, Yoomap pour le catalogage des co-innovateurs et des démonstrateurs, ideXlab pour les recherches ciblées de partenariats et de nouveaux outils, Linkurious pour la visualisation des interactions entre Safran et son écosystème, et ROK pour le pilotage de l’ensemble de la démarche, que ce soient l’avancement des projets, des jalons de sélection ou la communication. Ce hub collaboratif basé sur des hommes, des outils et un processus doit fonctionner de façon transverse, agile et rapide. Il s’appuie également sur le service achats pour permettre d’accélérer les démarches commerciales qui prennent parfois du temps …
Quels freins rencontrez-vous dans le déploiement de l’open innovation  ? Comment les solutions digitales vous aident-elles à les dépasser ?
Le temps est un frein à l’open innovation. J’entends le temps de cycle de nos produits. Développer un moteur ou un train d’atterrissage demande plusieurs dizaines d’années. Ce temps long est incompatible avec les horizons de temps de start-up ou de PME cherchant à percer le marché aéronautique. J’entends également le temps de nos ingénieurs dédiés aux programmes actuels et à leur industrialisation. D’où la notion de PFE pour qu’ils acceptent de partager leurs contacts pour que nous puissions les transformer. Les solutions digitales permettent de capitaliser les informations, mais surtout de les partager en temps réel. Nous pouvons visualiser notre écosystème, le classifier et le piloter. Il nous est possible de transformer la motte de paille qu’il représente en une fractale de technologie qui nous permet d’y retrouver l’aiguille que nous cherchons …
Quels indicateurs sont suivis par le Comex de Safran pour mesurer la maturité du groupe en matière d’open innovation  ? La fusion avec Zodiac apporte-t-elle un autre regard sur cette démarche et donc sur les indicateurs à suivre au plus haut niveau ?
Nous n’avons pas encore défini d’indicateurs au niveau Comex. Bien évidemment, le budget recherche et technologie est suivi par notre gouvernance. Pour l’open innovation, nous avons fait une première proposition que nous allons tester en 2019  : le nombre de comptes actifs (plus de 5 connexions) dans notre catalogue de co- innovateurs en pourcentage du nombre total de comptes, le pourcentage de notre programme recherche et technologie soutenu par l’open innovation, et enfin le nombre de démonstrateurs. L’arrivée de Zodiac apporte clairement un nouveau regard, le rapport au temps devrait être modifié car les temps de cycle sont plus courts. Enfin, le client final, le passager, peut directement avoir accès à nos innovations. Nous parlons aujourd’hui davantage d’expérience utilisateur. Mais il est trop tôt pour dire si cela impactera nos indicateurs à haut niveau.
* * *
Nicolas Babel (@nicbaboul), co-fondateur et directeur des opérations de l’agence D-Rating
«  Le leader digital est celui qui marque le plus de points sur un maximum d’indicateurs. Il existe donc plusieurs façons d’être un leader digital. »
Quelle est votre vision de la transformation digitale du secteur bancaire grand public  ? Quels sont les difficultés et les freins rencontrés par les acteurs traditionnels par rapport aux nouveaux entrants (fintech, néobanques, Gafa) ?
Le secteur bancaire a vécu une première transformation numérique avec la création des banques en ligne dans les années 2000, mais il a été finalement peu impacté car ces banques n’ont pas réussi à prendre beaucoup de parts de marché. On a simplement remplacé une relation physique par une relation au téléphone ou sur Internet … Les clients et les technologies n’étaient sans doute pas encore très matures.
Aujourd’hui, la transformation numérique est importante. Elle se caractérise selon plusieurs axes :
  • La majorité des interactions des banques avec leurs clients sont digitales , même pour les banques traditionnelles ;
  • De nouveaux acteurs sont arrivés sur le marché avec des moyens importants – soit via 7 8 des levées de fonds (par exemple, N26 ou Revolut , soit via leur appartenance à des groupes importants et non bancaires comme Orange – et de nouvelles approches avec des banques 100  % mobiles (Revolut n’a par exemple pas de portail Internet pour l’accès aux comptes, seulement des applications mobiles).
  • Le digital a permis une véritable innovation produit (modes de paiement, ouverture de compte en dix minutes, accord crédit à la consommation immédiat, gestion de budget, allocation automatique des dépenses par type, placements participatifs …).
De plus, l’érosion des marges liée à la baisse des taux d’intérêt pousse les banques à chercher des économies que le digital peut leur offrir. Le digital s’invite donc aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur des banques.
Les acteurs traditionnels investissent donc très fortement dans la transformation digitale, mais du point de vue de l’expérience client. Il y a très peu, voire pas du tout, d’innovations à l’initiative des banques traditionnelles elles-mêmes. Elles copient beaucoup. C’est là sans doute le premier frein à la transformation digitale des banques traditionnelles  : leur peur du risque condamne l’innovation. C’est par ailleurs un frein très fréquent au sein des grands groupes qui, par nature, ne récompensent pas les plus aventuriers de leurs employés.
Deuxième frein important, un système d’information vieillissant. L’activité des banques est depuis longtemps très fortement informatisée et encore plus fortement réglementée. Cela a abouti à la construction depuis vingt à quarante ans, de systèmes d’information dits «  spaghetti  », c’est-à-dire avec des couches fonctionnelles et techniques qui s’entrelacent et qui rendent très compliquée la refonte de ceux-ci. À tel point que de nombreuses banques n’ont pas encore prévu de date de remplacement de ces vieux systèmes, préférant faire des corrections petit à petit, quitte à rajouter quelques spaghettis de plus dans une assiette qu’il faudra tout de même digérer un jour ou l’autre.
Troisième frein, les banques de détail sont toujours très profitables … Bien que les conditions exogènes fassent baisser les marges (de 4 à 6 % en moyenne entre 2016 et 2017), les banques de détail dégagent un résultat net moyen de 15  % du produit net bancaire en 201710. De plus, le secteur est très peu concentré au niveau européen, ce qui laisse présager des économies potentielles, mais sans impliquer le risque de se transformer fortement.
Malgré ces freins très importants, la majorité des banques françaises ont trouvé le courage d’engager leur transformation numérique. Seul l’avenir permettra de dire si ces transformations ont réellement lieu en profondeur (au niveau IT comme au niveau culturel).
Quels seraient les critères importants de mesure de la maturité numérique d’une banque, qu’il s’agisse de ceux qui peuvent être déterminés par un regard extérieur – ce que vous faites au sein de D-Rating – ou de ceux qu’un auditeur interne à la banque pourrait évaluer ?
La difficulté avec la notion même de performance «  digitale  » est qu’elle intègre de nombreux éléments très différents. On doit inclure, par exemple, une appréciation quantifiable d’un parcours client précis (preuve ou non que l’organisation est centrée sur le client) mais aussi le degré d’usage des réseaux sociaux par la direction (preuve ou non du management par l’exemple dans les usages digitaux). Nous incluons la mise en avant ou non des outils digitaux dans les lieux physiques de vente (important pour digitaliser la relation client sans la forcer), mais aussi le niveau de satisfaction des employés (important pour permettre aux changements organisationnels nécessaires de s’opérer). Notre stratégie de notation a, depuis le début, été de faire la somme de très nombreux indicateurs. Le leader digital, pour nous, est ainsi celui qui marque le plus de points sur un maximum d’indicateurs. Il existe donc plusieurs façons d’être un leader digital. Il m’est par conséquent difficile de choisir les critères les plus importants.
D’un point de vue externe (c’est-à-dire des éléments captables sans l’aide de l’entreprise notée), si je devais en choisir deux, ils seraient ceux-ci :
  • le nombre de visiteurs uniques mensuels sur les points de présence digitaux (sites web, applications mobiles et comptes de réseaux sociaux) pondéré par le nombre de clients de la banque. Il est révélateur de la richesse digitale des interactions avec les clients et les prospects – une richesse qui est le résultat de très nombreuses initiatives (expérience client, outil de résolution autonome de problèmes, questions, mise en œuvre d’une politique omnicanale efficace …) ;
  • le degré d’ancienneté des technologies de développement de l’information employées. Il est possible depuis l’extérieur de comprendre le type de technologies employées par une entreprise (par exemple, en examinant les offres d’emploi). Sans faire de «  jeunisme  » technologique, il me semble important de comprendre que les dernières technologies de développement/ déploiement informatiques permettent de gagner énormément en productivité et en souplesse. Une entreprise qui aurait encore fortement besoin de développeurs de vieux langages ou de mise en production archaïque a pour moi un problème très important à résoudre pour réussir à suivre la vitesse de transformation qu’exige le monde d’aujourd’hui.
Sur la base de données disponibles dans l’entreprise, je mettrais en avant :
  • le nombre de ventes intégrant au moins une étape digitale identifiée. Cet indicateur est intéressant car d’une part, pour être calculé, il nécessite une traçabilité des relations prospect/ client, et d’autre part il ne met pas en avant un canal (le digital) au détriment un autre (le physique) mais pousse à une bonne intégration des deux ;
  • le nombre moyen de personnes en destinataire ou en copie des méls internes. Acquérir une vitesse de transformation suffisante nécessite une organisation et des individus compétents, responsables et partageant les mêmes objectifs. Si les collaborateurs estiment nécessaire et utile de mettre toujours un grand nombre de personnes en copie (pour informer, faire des réunions, décider…), c’est qu’il y a encore des problèmes de culture importants et potentiellement bloquants. Mais ne nous y trompons pas, un indicateur comme celui-ci doit être considéré comme un symptôme, non comme une maladie. Il ne faut donc pas lutter contre lui directement, mais plutôt chercher à corriger les attitudes, souvent managériales, qui poussent les gens à mettre toujours autant de monde en copie de leurs méls.
Comment voyez-vous évoluer les banques vers des plateformes et APIs ouvertes pour fédérer un écosystème et proposer de nouveaux produits/services  ? Cette approche de développement d’une application qui devient plateforme, à la façon des Gafa, est-elle transposable dans d’autres secteurs d’activité  ? Si oui, lesquels et pourquoi ?
Les discussions au tour de la DSP2 (directive sur les services de paiement 2) montrent que les banques traditionnelles cherchent plutôt à ralentir l’ouverture plutôt qu’à l’accélérer. Elles veulent garder le monopole sur les données de leurs clients, car elles ont bien compris qu’elles sont une richesse.
Il y a tout de même des exemples de banques qui cherchent à créer cette dynamique de plateforme. Plusieurs approches sont possibles :
  • l’accès au client comme plateforme. Ainsi la banque met à son catalogue les produits financiers d’autres organisations. C’est par exemple le cas de N26 qui a intégré à son offre en France le crédit à la consommation de Younited Credit. La souscription et l’interface client restent à la charge de N26. Younited Credit se charge du back office ;
  • l’accès aux données du client comme plateforme. Le Crédit agricole a de ce point de vue pris les devants depuis longtemps avec le CA store (http://www.creditagricolestore.fr) où des sociétés tierces peuvent proposer aux clients de la banque des applications intégrant des informations sur leurs comptes bancaires (par exemple, les dépenses) ;
  • Le système Core (compensation retail) comme plateforme («  Bank-as-a-Service  »). Des entreprises louent leurs systèmes d’information bancaires (fortement réglementés) à d’autres banques. On peut citer comme exemples le pionnier dans ce domaine en France, Arkéa Banking Services, et la start-up Treezor, rachetée en septembre 2018 par la Société Générale.
Face à la nouvelle facilité d’interconnecter et de modulariser les systèmes d’information, les économies de plateformes ont beaucoup de sens quelle que soit l’industrie. Dans la banque, je pense que nous verrons de plus en plus d’ultra-spécialisations et d’économies de plateformes pour venir concurrencer les monolithes traditionnels. Mais Apple, malgré ses derniers déboires début 2018, a toujours été l’exemple de l’incroyable efficacité que peut avoir une approche fermée et monolithique. Il y aura de la place pour ces différentes approches, mais il serait très surprenant que cela ne se fasse pas sans une concentration forte du secteur, a minima en Europe.
* * *
Rémy Gaudic (@RemyGaudic), directeur des systèmes d’information télécoms, expert Microsoft et digital (actuellement DSI de transition pour une filiale du groupe Altice)
«  La direction générale est fortement intéressée par la transformation digitale sous l’angle de la réduction des coûts et du développement du canal de vente par Internet. »
L’agilité des systèmes d’information, plus qu’un vœu pieux, est une obligation dans une industrie dynamique soumise à une concurrence intense. En tant que directeur des systèmes d’information (DSI) d’un opérateur de télécommunications, comment avez-vous adapté vos méthodologies de travail pour accompagner les métiers dans le lancement de nouvelles offres ?
Dans le secteur très concurrentiel des télécommunications en France, il est important d’être rapide et compétitif lors des lancements d’offres. Donc l’agilité, la rapidité d’exécution et la structure de coûts sont importantes. En effet, avec plus de 30  % de baisse de l’Arpu (chiffre d’affaires par utilisateur) depuis 2012, les marges sur les nouvelles offres et la capacité à prendre rapidement des parts de marché sont différenciantes.
Chaque fois que possible, il faut chercher à accompagner au plus tôt les métiers sur les lancements d’offres et faire appel à des partenaires télécoms et systèmes d’information (SI) pour construire les offres, et pour mettre en place des solutions permettant de les commercialiser ou de les déployer auprès des clients. Par exemple, sur le lancement d’une offre fibre grand public, les métiers vont choisir le partenaire de la fibre, la solution de téléphonie sur Internet et le partenaire de contenu TV.
Enfin, la DSI doit intervenir dans la validation du partenaire fibre en apportant son analyse technique sur les web services mis à disposition et en confirmant un délai prévisionnel de mise en place.
L’accompagnement des métiers doit être fait par la DSI avec des chefs de projets, par exemple avec une approche de prototypage des solutions des partenaires SI vis-à-vis des besoins métiers.
Quelles solutions technologiques privilégiez-vous pour répondre aux besoins changeants de vos interlocuteurs métiers, aux aléas imprévisibles liés à une évolution de l’environnement ou encore aux restrictions budgétaires ?
Les solutions de type SaaS ou de type web services, donc simples à intégrer au SI, ont clairement ma préférence. Des solutions de workflow pour paramétrer les processus métiers et d’EAI (intégration d’applications entreprise) pour s’interfacer avec les partenaires sont aussi à prendre en considération. Ces choix technologiques et de solutions SI sont clairement structurants et différenciants vis-à-vis des concurrents.
Comment arrivez-vous à concilier l’adaptabilité aux métiers avec les ressources dont vous disposez, qu’elles soient technologiques ou humaines ?
L’exercice de conciliation des ressources avec les besoins métiers tout en garantissant une adaptabilité du système d’information au contexte concurrentiel est une équation à trois inconnues :
  • La première inconnue est que les besoins métiers évoluent avec de nouvelles offres nécessitant des services SI différents avec de nouveaux partenaires ou avec les partenaires existants.
  • La deuxième inconnue est que les ressources (technologiques, humaines et financières) ne sont pas infinies et doivent être redéployées (nouvelles compétences, etc.) et évolutives, avec la question d’internaliser ou de sous-traiter.
  • La troisième inconnue est que le contexte concurrentiel oblige ou incite à une adaptabilité et une transformation digitale du système d’information pour rester agile à moindre coût, donc pour rester compétitif vis-à-vis des concurrents.
Une réflexion de fond sur le renouvellement des applications, sur l’ouverture du système d’information historique aux applications web est à inscrire dans le schéma directeur informatique.
Quelles expériences de solutions avez-vous qui s’appuient sur des systèmes d’information internes comme externes ?
Selon mon expérience, une solution en mode SaaS telle que ROK peut permettre d’intégrer en deux mois des applications du système d’information avec celles des partenaires.
Les atouts de cette solution sont la simplicité et la rapidité de mise en place (configuration du workflow dans ROK avec peu de développements) et un passage quasi immédiat du prototype à la solution en production.
À vos yeux, quels indicateurs de maturité vous permettent d’apprécier l’agilité du système d’information ?
Les indicateurs de maturité de l’adaptabilité du système d’information reposent à la fois sur la réutilisation des briques SI existantes (web services internes), sur la configuration des offres et services (bases de données internes), et sur la capacité d’intégration SI avec des partenaires télécoms et SI.
Les indicateurs nous permettant d’apprécier la maturité de l’adaptabilité de notre système d’information vont être les suivants :
  • les développements sur nos projets (en charge ou en pourcentage) avec la répartition entre les nouvelles fonctionnalités, l’adaptation de l’existant et l’intégration ;
  • la part de configuration dans nos développements ;
  • la maintenance applicative et technique (en charge ou en pourcentage) vis-à-vis de la maturité des socles et des applications.
Quelle(s) direction(s) aux côtés de la DSI est (sont) -elle(s) selon vous légitime(s) pour conduire la transformation digitale de l’entreprise ?
La direction légitime est avant tout la direction générale, qui doit jouer le rôle de sponsor de cette transformation digitale. Ensuite, les directions marketing et développement, ressources humaines, services client, et technique doivent être actrices de la transformation digitale aux côtés de la DSI.
De mon expérience, la direction générale est fortement intéressée par la transformation digitale sous l’angle de la réduction des coûts et du développement du canal de vente par Internet. Cela explique aussi pourquoi une direction du réseau qui construit techniquement les offres et les services (développement), le marketing et le services client sont les trois principales directions impliquées et actives dans la transformation digitale d’un opérateur télécoms.
Les autres directions comme les ressources humaines, le juridique et la direction financière le sont moins, mais devraient l’être davantage.
La transformation digitale avec ROK Solution
ROK Solution11 est une nouvelle classe de services logiciels (SaaS) qui répond à la problématique posée par la transformation digitale. Son approche originale est la seule capable de remettre le collaborateur au cœur du système, tout en donnant à l’entreprise l’agilité dont elle a besoin pour adapter son activité. Distribuée dans le cloud, mettant en œuvre les meilleures pratiques en termes de sécurité des systèmes d’information, la plateforme est accessible via une connexion internet et disponible sur tout type de poste de travail, fixe comme mobile.
La convivialité de la solution la rend accessible par les métiers qui s’exonèrent ainsi des contraintes informatiques et deviennent les véritables architectes de leur environnement digital. De mise en œuvre simple et rapide la solution facilite la collecte des retours utilisateurs et l’adaptation en continu des applications, selon une démarche lean
intégrée. Tout repose sur l’approche organique et systémique originale brevetée ROK , qui permet un hub collaboratif unique.
Dans un monde où tout est devenu digital, comment remettre le collaborateur au cœur du système  ? Tout d’abord en ayant une vision pertinente, claire et partagée de l’organisation de l’entreprise. ROK propose ainsi toutes les fonctionnalités nécessaires à la modélisation de l’organisation, à son mapping sur la structure financière et plus généralement à tous les attributs structurants du modèle d’entreprise (operating model). Les représentations graphiques de l’organisation, sous forme de listes, d’organigrammes montrant automatiquement les relations hiérarchiques et fonctionnelles, ou encore de cartographies géolocalisées des activités, toutes navigables et filtrables, sont de puissants outils de visualisation et d’analyse de l’organisation au service du management.
La structure de données organisationnelles est un socle permettant d’avoir une appréhension claire du «  Qui  »  : quels sont les postes structurants de l’organisation  ? Qui les occupe  ? De qui dépen-dent-ils  ? Qui est rattaché à tel ou tel département, centre de coûts, code de consolidation financière ?
La plateforme offre également la possibilité de collecter et d’organiser la description fonctionnelle des tâches confiées aux collaborateurs et des tâches automatiques, à savoir le «  Fait Quoi  ». La distribution des tâches aux postes de l’organisation donne à voir en un clin d’œil «  Comment  » les tâches sont réparties. Les tâches sont enrichies de liens vers les outils et documents nécessaires à leur exécution, décrivant ainsi le «  Avec Quoi  ». Les tâches de contrôle sont également reliées à la cartographie des risques de sorte à ce que le contrôle interne dispose de manière instantanée des informations concernant qui contrôle quoi et comment. Ainsi la plateforme peut automatiquement distribuer les tâches aux collaborateurs qui en ont la charge.
L’ensemble des éléments modélisés, mais aussi des documents stockés ou encore des données de workflow, sont facilement restituables au travers de bureaux digitaux personnalisés. Ainsi le collaborateur se connectant à ROK dispose d’un cockpit construit à la volée pour lui, et dont ROK garantit les droits d’accès aux contenus et services en fonction de ce que le collaborateur a à en connaître.
Les applications ainsi modélisées dans la plateforme s’adaptent automatiquement aux mouvements de l’organisation, se connectent facilement aux systèmes tiers au travers d’APIs ou encore via des robots automatisant les tâches des collaborateurs (RPA/IPA), pour une meilleure productivité.
La conduite du changement est aussi facilitée par l’intégration au sein même des écrans poussés aux collaborateurs, de contenus pédagogiques (vidéos en streaming, documents) permettant une formation continue et dynamique.
Enfin, à tout moment, l’ensemble des éléments structurants modélisés est auditable, lisible et autodocumenté. Une approche qui révolutionne la conduite des programmes de transformation, accessible avec un simple abonnement SaaS.

Indicateurs et mesure de la maturité numérique associée[modifier]

Technologie et innovation[modifier]

Architecture[modifier]

TIA1. Existence d’un plan de transformation de l’infrastructure numérique
Un plan de transformation de l’infrastructure numérique de l’organisation est essentiel, notamment pour les systèmes d’information anciens. Il facilite leur évolution pour les rendre plus agiles, comme les start-up ou les nouveaux entrants qui ne disposent pas d’un lourd historique à gérer. Celui-ci doit par ailleurs être aligné avec la stratégie.
Cet indicateur mesure le niveau du schéma directeur numérique de l’organisation.
Existence d’un schéma directeur numérique de l’organisation à n années (n ≤ 312) aligné aux objectifs de l’entreprise.
Idem + schéma réalisé conjointement avec les directions métiers pour la déclinaison de leur activité en ligne.
Idem + communication du schéma faite à l’ensemble des collaborateurs (courrier, mél, réunion, etc.).
Idem + schéma partagé sur les outils de l’entreprise pour être accessible à tous les collaborateurs à tout moment, avec un processus de réactualisation de celui-ci.
Idem + réalisation et réactualisation collaborative du schéma, avec recours à des personnes extérieures à l’organisation (conseil ou crowdsourcing) pour des points spécifiques demandant une connaissance et un regard critique externe.
TIA2. Niveau d’évolutivité et de migration des systèmes d’information
L’évolutivité des systèmes d’information de l’organisation est essentielle sans subir de contraintes temporelles fortes (trains de maintenance contraignant la moindre évolution à être embarquée pour une nouvelle version planifiée à n mois, etc.). La migration des gros systèmes en Cobol ou Fortran (dette technique) vers des solutions web, par exemple pour instaurer, à la place des traitements par lot la nuit, des intégrations de mises à jour des données en temps réel qui permettent aux clients un suivi en temps réel de leurs opérations et de leurs comptes, constitue un exemple.
Un calcul peut être réalisé en évaluant le nombre des principales solutions techniques de l’organisation et en examinant celles qui répondent aux différents niveaux, de façon à mesurer le niveau de maturité globale sur cet indicateur.
Développement des solutions applicatives avec une surcouche technique et fonctionnelle reposant sur des outils du marché (système d’information, web).
Idem + utilisation de standards et des APIs permettant d’analyser et de tracer son audience (cookies, traçage des adresses IP, profilings).
Idem + couplage entre les bases de données de l’organisation et les données des sites de l’organisation afin de garantir l’interopérabilité entre les outils. Savoir-faire pour effectuer les évolutions fonctionnelles et techniques disponible en interne ou en moins d’un mois en cas de sous-traitance.
Idem + indépendance de l’entreprise vis-à-vis des technologies et services sur le marché (briques de base vues comme des boîtes noires sur lesquelles les solutions bâties sont interchangeables, par exemple remplacer Google Maps par une solution équivalente tout en assurant la continuité du service proposé qui reposait initialement sur Google Maps). Internalisation des développements stratégiques sans recourir à de la sous-traitance.
Idem + embarquement d’une évolution fonctionnelle ou technique au fil de l’eau sans délai et attente d’un train de maintenance futur.
TIA3. Niveau de robustesse et de sécurité des solutions
Il convient de préserver l’organisation de toutes les attaques liées au numérique (détournement des bases de données, des transactions de paiement, attaques par déni de service, défacement* de ses sites, phishing*, malwares, cybersquatting, etc.). Les aspects de cybersécurité et de conformité nécessitent aussi un très haut niveau de sécurité du fait des enjeux financiers ou d’image en cas d’attaque ou de non-respect de la législation.
Cet indicateur combine le niveau de maturité de la politique de sécurité de l’organisation et la traduction de son niveau de sécurité numérique globale à travers les dimensions disponibilité/intégrité/confidentialité/imputabilité (DICI) : le vecteur DICI global est calculé selon les recommandations du référentiel de sécurité ISO 27001/27002*. Les ressources critiques de l’organisation sont définies, puis des matrices de risque sont établies après estimation des menaces et des vulnérabilités . Ensuite, une analyse de risque est effectuée pour établir comment les menaces identifiées sont contrées en tenant compte des vulnérabilités. Le classement du niveau global de sécurité numérique de l’organisation s’opère selon quatre niveaux, de 0 à 3 (insuffisant, faible, moyen, fort) pour chacune de ses composantes (disponibilité, intégrité, confidentialité, imputabilité). Un vecteur DICI global est déterminé, par exemple 2, 1, 3, 3 si le niveau de disponibilité est moyen, celui de l’intégrité est faible et ceux de la confidentialité et de l’imputabilité sont forts. Le vecteur DICI global est enfin calculé en faisant la somme de ces quatre notes.
Existence d’une politique de sécurité informatique (PSI) + somme du vecteur DICI comprise entre 3 et 5.
Existence d’une politique de sécurité propre au digital qui peut être un document à part ou intégré à la PSI + somme du vecteur DICI comprise entre 6 et 10.
Idem + suivi de cette politique d’un point de vue opérationnel (mise à jour des logiciels anti-malwares, sauvegarde automatique des données sensibles chaque jour, reprise en cas d’incident dans l’heure avec au plus une perte de quatre heures des données, hors transactions sensibles – par exemple, procédés de fabrication dans le cadre d’une industrie pharmaceutique, données financières dans le cas d’une banque). Existence d’audits planifiés au moins une fois par an + somme du vecteur DICI comprise entre 8 et 10 avec aucune note inférieure à 2.
Idem, mais avec une perte de données de moins de vingt minutes. Existence d’audits inopinés qui font l’objet de corrections systématiques des dysfonctionnements face aux risques observés. Somme du vecteur DICI = 11.
Idem, mais avec des pertes de données de moins de cinq minutes. Somme du vecteur DICI = 12.
TIA4. Capacité à ouvrir ses données (open data) et APIs pour être une plateforme
La propension à ouvrir ses données est intéressante de façon à ce qu’un écosystème extérieur se crée autour de l’acteur, de nature à favoriser de nouveaux usages et de services.
Très peu de données sont disponibles en open data.
Un catalogue de données en open data est disponible et consultable en ligne (site dédié).
Le catalogue de données en open data couvre toutes les données de l’entreprise (hors données stratégiques).
Les données disponibles en open data sont à jour.
Plusieurs services tiers utilisent les données open data.
TIA5. Données dans le cloud
Cet indicateur vise à estimer la maturité de l’organisation dans l’utilisation du cloud pour la gestion de ses données, en partant du postulat que la maîtrise du système d’information et de sa sécurité constitue un avantage concurrentiel ainsi que la suppression des silos.
L’organisation utilise des offres basées sur le cloud pour gérer une partie de ses données et permettre un décloisonnement en interne et davantage d’agilité vis-à-vis des clients, avec une vision de bout en bout des transactions métiers en quasi-temps réel. Le besoin d’en connaître est respecté en matière d’habilitation des accès aux données. Un contrat est souscrit avec des dispositifs de sécurité prévus quel que soit le type de cloud choisi (public, privé, hybride). Les obligations juridiques (par exemple liées à la localisation des serveurs) sont respectées. Au niveau de la direction du système d’information (ou informatique), au moins 20 % des environnements de production sont dans le cloud.
Pour l’utilisation du cloud, l’ensemble des questions d’ordre juridique et de conformité sont adressées. Les menaces inhérentes au cloud sont analysées avec des contre-mesures – notamment juridiques – mises en place.
Les données hébergées dans le cloud se trouvent sur des serveurs basés sur le sol communautaire (ce qui permet de mieux les maîtriser par rapport à des questions de souveraineté vis-à-vis des États-Unis et de l’Asie notamment). Les contrats sont clairement établis avec les tiers et les prestataires ainsi que les clauses en cas d’attaques ou d’actes malveillants affectant l’intégrité, la disponibilité, la confidentialité et l’imputabilité des données. Les prestataires proposant des offres cloud répondent aux normes de sécurité de type ISO (27001, 27017 et 27018). Au niveau de la direction du système d’information (ou informatique), au moins 50 % des environnements de production sont dans le cloud.
Les actions en back office sont automatisées grâce au cloud (par exemple, gestion des contrats). Au niveau de la direction du système d’information (ou informatique), au moins 75 % des environnements de production sont dans le cloud.
Des prestations stratégiques en matière de cloud sont internalisées pour en conserver la maîtrise. L’organisation recourt également à des clouds publics afin de disposer de puissance de calcul, d’interagir avec un écosystème et d’absorber les pics de charge.
TIA6. Niveau de sécurité de l’identification
Cet indicateur mesure le niveau de sécurité des solutions d’authentification de l’utilisateur.
Authentification par ce que sait l’internaute (mot de passe simple).
Authentification par mot de passe alphanumérique de plus de 8 caractères + changement du mot de passe prévu à des périodes données.
Authentification avec ce que possède l’internaute (carte, carte bancaire, smartphone) + PIN, ou équivalent associé, ou système d’authentification à deux facteurs pour l’accès au compte du client (PC et smartphone).
Idem, avec pour le mot de passe alphanumérique au moins 1 caractère minuscule, 1 caractère majuscule, 1 chiffre et 1 caractère spécial.
Idem 4 + authentification couplée avec ce qu’est l’internaute (moyen biométrique).
TIA7. Simplicité d’utilisation de la solution d’identification
L’enjeu est de concilier sécurité et facilité d’utilisation. Cet indicateur mesure la simplicité selon laquelle l’utilisateur s’authentifie.
Nécessité de s’identifier/authentifier pour chacun des services de l’entreprise, parfois avec des modalités d’identification/authentification différentes.
Nécessité de s’identifier/authentifier pour accéder aux services de l’entreprise avec un seul mode d’identification/authentification valable pour l’ensemble des services.
Nécessité de s’identifier/authentifier pour accéder aux services de l’entreprise avec un seul mode d’identification/authentification valable pour l’ensemble des services sans avoir à ressaisir son identité ensuite. Synchronisation entre les supports de connexion du client (PC, tablette, smartphone, Internet des objets) à l’entreprise.
Idem, mais avec un enabler pour le dialogue avec le client et une technologie associée de type sans contact (RFID, biométrie sans contrainte pour le client), par exemple Facebook Connect.
Idem, mais avec la création rapide d’une identification unique pour n’importe quel prospect qui pourra ainsi se trouver dans la base de l’entreprise pour des connexions ultérieures facilitées.
TIA8. Mise en place de robotic process automation (RPA) dans l’organisation
Les applications de l’entreprise sont difficiles à faire évoluer et le patrimoine applicatif est complexe pour les grosses organisations avec de plus en plus de silos, alors que la plupart des fonctions métiers dans les entreprises ont besoin de se transformer rapidement. Le taux d’automatisation des processus observé est de 20 % en moyenne dans les entreprises, le reste reposant sur des actes humains.
En outre, 20 % des données sont structurées, le reste ne l’étant pas (factures, contrats, méls, conversations des centres d’appels ou sur des chats). L’objectif est d’automatiser les processus pour aller plus vite, créer de la valeur, etc.
Au moins 20 % des processus de l’entreprise sont automatisés.
Des processus sont mis en place dans l’organisation pour le RPA :
  • configurer selon des règles avec peu d’exceptions pour l’exécution ;
  • développer le cognitif (pour actionner les données, développer des processus comme la visualisation de documents, le traitement du langage et l’automatisation de bout en bout) ;
  • exploiter les données avec des outils d’analyse intelligents.
Idem + au moins 35 % des processus de l’entreprise sont automatisés.
Utilisation de bots et de RPA basés sur l’intelligence artificielle pour les activités de production et les activités commerciales.
Idem + au moins 50 % des processus de l’entreprise sont automatisés.

Orientation client[modifier]

TIO1. Universalité des solutions techniques pour l’internaute
Cet indicateur mesure la capacité mise en place par l’organisation pour capter l’internaute quels que soient ses usages, son matériel et sa configuration logicielle.

Entreprise présente via son (ses) site(s).[modifier]

Entreprise présente via son (ses) site(s) qui est (sont) responsive design* pour l’ensemble des terminaux de connexion (PC, smartphone, tablette) et l’ensemble des navigateurs (Chrome, Explorer, Firefox, Safari, Opera).
Idem + pour n’importe quel système d’exploitation, aussi bien pour les smartphones/tablettes (Android, iOS, etc.) en proposant des applications téléchargeables mieux pensées pour ces terminaux spécifiques que pour l’ensemble des PC (deux dernières versions de Windows, MacOS, Linux, Ubuntu, etc.).
Idem + compatibilité ascendante vérifiée avec les solutions encapsulées vues comme des boîtes noires avec des opérations de maintenance, des mises à jour sans effets de bord et des migrations sans gêne pour les utilisateurs ni perte de données.
Idem + développement de services autour de l’Internet des objets.
TIO2. Accessibilité des sites et des App de l’organisation
Il s’agit de mesurer le niveau moyen d’accessibilité des sites de l’organisation tant en interne (Intranet si existant) qu’en externe ainsi que les App.
NB : On se focalise sur les sites qui représentent les plus fortes audiences de l’organisation. Pour l’accessibilité, une référence au site accessiweb.org est faite.
Les principaux sites répondent au responsive design. Les App de l’organisation sont disponibles sur les deux principaux systèmes (Android, iOS).
Idem + le niveau AccessiWeb des principaux sites Internet est « bronze ».
Idem + le niveau AccessiWeb des principaux sites Internet + intranet est « bronze  ». Les App de l’organisation sont disponibles sur un troisième système.
Idem + le niveau AccessiWeb des principaux sites Internet + intranet est « argent
». Les App de l’organisation sont disponibles sur l’ensemble des systèmes proposés dans les pays où elle est implantée.
Idem + le niveau AccessiWeb des principaux sites Internet + intranet est « or ».
TIO3. Visibilité de l’organisation sur Internet et disponibilité sur les App
Cet indicateur mesure la visibilité des sites de l’organisation tant sur Internet, en matière de positionnement et de qualité du référencement en se basant sur l’autorité de domaine (outil Moz13), que sur la visibilité de ses App dans les stores (Google Play et App Store).
Note Moz au moins égale à 35 pour le site principal + App de l’organisation disponible sur Google Play (Android) et l’App Store (iOS).
Note Moz au moins égale à 45 pour le site principal + note de l’App supérieure à 3,8 étoiles + au moins 2 000 téléchargements sur chaque store en B2C (20 en B2B).
Note Moz au moins égale à 55 pour le site principal + note de l’App supérieure à 4 étoiles + au moins 10 000 téléchargements sur chaque store en B2C (60 en B2B).
Note Moz au moins égale à 65 pour les deux principaux sites + note de l’App supérieure à 4,1 étoiles + au moins 50 000 téléchargements sur chaque store en B2C (120 en B2B) + sur les critères de recherche avec les deux mots-clés le plus en rapport avec le secteur d’activité de l’organisation, par exemple « automobile » ou «  voiture » dans le secteur automobile, l’App figure dans les quinze premières positions.
Note Moz au moins égale à 75 pour les deux principaux sites + note de l’App supérieure à 4,2 étoiles + au moins 100 000 téléchargements sur chaque store en
B2C (300 en B2B) + sur les critères de recherche avec les deux mots-clés le plus en rapport avec le secteur d’activité de l’organisation, l’App figure dans les dix premières positions.
TIO4. Positionnement de l’organisation sur les médias sociaux
Il s’agit de déterminer le niveau de visibilité de l’organisation sur les médias sociaux.
Existence d’au moins trois comptes sur les médias sociaux (Facebook, Twitter, YouTube, Instagram, Snapchat, etc.). Au moins (500 + effectif / 3) abonnés sur deux médias sociaux.
Au moins quatre comptes sur les médias sociaux + au moins deux comptes Twitter différents. Au moins (1 000 + effectif / 3) abonnés sur deux médias sociaux.
Au moins deux comptes certifiés sur les médias sociaux.
En B2C, au moins (10 000 + effectif) abonnés sur Twitter, (30 000 + effectif × 2) sur Facebook. En B2B, au moins (1 000 + effectif) abonnés sur Twitter, (1 000 + effectif × 2) sur Facebook + au moins trois comptes certifiés sur les médias sociaux.
En B2C, au moins (20 000 + effectif × 2) abonnés sur Twitter, (60 000 + effectif × 4) sur Facebook. En B2B, au moins (2 500 + effectif × 2) abonnés sur Twitter, (4 000 + effectif × 4) sur Facebook.
TIO5. Niveau des noms de domaine
Il s’agit de mesurer le niveau de maturité de l’organisation dans le choix de ses noms de domaine sur Internet.
La vérification de la disponibilité d’un nom de domaine sur Internet et d’un nom sur les médias sociaux peut être effectuée avec des outils du type http://namechk.com.
Hébergement du site chez un tiers avec une adresse de site du type «  www.lambda.com ».
Le ou les noms de domaine du type « www.lambda.com » sont en https.
Idem + cohérence de la présence de l’organisation sur les médias sociaux (même nom de type « facebook.com/lambda », « @lambda », etc.) pour faciliter la communication.
Idem + déclinaison du nom du principal site selon les pays où l’organisation est présente (cas de présence à l’international, par exemple .uk, .us, .de) et/ou utilisation d’un nom de domaine libéralisé spécifique réservé à l’organisation.
Idem + propriétaire du nom de domaine libéralisé spécifique à l’activité de l’organisation (par exemple .immo, .bank, .car) avec une sous-location de ce nom de domaine à d’autres entreprises du secteur et des partenaires.
TIO6. Pertes de données et mode dégradé
Il s’agit du nombre d’heures de non-enregistrement de données dans les bases se traduisant par une quantité d’informations des systèmes d’information (et sites, applications web) potentiellement perdues. Cet indicateur s’attache aux pertes de données (hors transactions qui sont vitales pour l’entreprise) liées à une panne de courant, une absence de sauvegarde, une défaillance matérielle (PC, serveurs) ou une attaque.
Pertes de données comprises entre vingt-quatre et quarante-huit heures (données saisies, mises à jour des sites par rapport à des effacements accidentels, des malwares ou encore des attaques). Existence de données de sauvegarde pour rétablir les données dans un état au moins équivalent à h – 48 h.
Pertes de données comprises entre douze et vingt-quatre heures.
Pertes comprises entre quatre et douze heures + temps de restauration (via archives, données compressées, réinstallation de sites, etc.) inférieur à quatre heures.
Pertes comprises entre une et quatre heures + temps de restauration (via archives, données compressées, etc.) inférieur à deux heures.
Pertes estimées en dessous de dix minutes + temps de restauration inférieur à dix minutes.
TIO7. Utilisation de l’intelligence artificielle et de la blockchain pour le bénéfice du client
Cet indicateur mesure l’apport des technologies basées sur l’intelligence artificielle et la blockchain pour le bénéfice du client, ou de l’organisation et indirectement du client.
L’organisation a développé des services basés sur des chatbots vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept, pour assurer un service après-vente de premier niveau et répondre aux demandes des clients et des prospects avant de basculer éventuellement vers un conseiller expert (via son site web et son centre d’appels).
Idem + relais humain de deuxième niveau au moins seize heures sur vingt-quatre, six jours sur sept.
Idem + relais humain de deuxième niveau vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sept jours sur sept. Des outils d’optimisation des offres apportant une valeur ajoutée en fonction des habitudes, de la situation et des projets des clients sont proposés pour accroître leur satisfaction.
Utilisation de solutions en intelligence artificielle pour optimiser le temps passé par le personnel à des tâches à faible valeur ajoutée. L’intelligence artificielle ou la blockchain sont utilisées pour améliorer l’expérience client ; en particulier, des outils d’analyse comportementale permettent de détecter des souhaits sans être intrusif. L’intelligence artificielle ou la blockchain peuvent être également utilisées en tant que reconnaissance des signaux faibles des cyberattaques impactant l’organisation et/ou le client.
Plusieurs outils d’intelligence artificielle sont utilisés pour optimiser les tâches des téléconseillers et du personnel de l’organisation au quotidien, y compris pour des tâches plus complexes et souvent répétitives (relecture de contrats commerciaux, algorithme marketing pour des propositions tarifaires aux clients, aide à la gestion des méls du personnel). L’intelligence artificielle et la blockchain sont systématiquement utilisées en tant que reconnaissance des signaux faibles des cyberattaques impactant l’organisation et/ou le client.
TIO8. Exploitation du big data pour délivrer un service souhaité et non intrusif
Cet indicateur mesure comment l’organisation utilise le big data pour améliorer le service offert ou suggéré au client et de façon non intrusive, conformément à ses souhaits.
Une plateforme permet d’analyser les données personnelles collectées au travers des applications en lien avec le client pour les données structurées (customer relation management – CRM, enterprise resource planing – ERP). Des tendances globales sont générées, lesquelles permettent d’améliorer les services proposés aux clients de façon générale.
Une plateforme permet d’analyser les données personnelles collectées au travers des applications en lien avec le client à la fois pour les données structurées (CRM, ERP) et non structurées collectées (fichiers Excel, CSV, etc.). Des tendances globales sont générées, lesquelles visent à améliorer les services proposés aux clients de façon générale avec des outils permettant d’exploiter les corrélations pour l’intérêt supposé envers certains types de service en élaborant des profils de clients (âge, CSP, revenu, composition du foyer, projets de vie).
Les données personnelles du client sont analysées individuellement et permettent d’établir des scores pour le client, de détecter des fraudes, le marketing prédictif envoyant des alertes indiquant que le client va résilier une offre ou risque de passer à la concurrence, d’améliorer les scénarios des centres d’appels et la connaissance du client lors de rendez-vous avec un conseiller. L’architecture du système d’information comprend un data lake interne pour mieux exploiter les données.
Proposer aux clients de type petits commerçants, par exemple, l’achat de données relatives à la connaissance des habitudes de consommation de leur zone de chalandise (selon les âges, revenus, sexe, dépenses par nature, etc.) de façon à les aider à cibler les actions commerciales. Selon l’accord du client, proposer des offres de partenaires ciblées et susceptibles de l’intéresser (« à la Google ») mais non intrusives et sur les canaux souhaités, dans le respect du RGPD et de la réglementation.
Utilisation d’APIs avec le consentement du client pour obtention par l’organisation d’informations sur les offres souscrites chez des concurrents (avec les outils d’interopérabilité entre acteurs) afin de mieux le conseiller sur les produits et services qui l’intéresseraient à des moments précis, et également avec des partenaires de l’écosystème.
Standards
TIS1. Conformité des sites et des applications
Il s’agit de mesurer le degré de conformité des sites et des applications qui sont critiques pour le business ou la vie de l’organisation.
Cet indicateur mesure la capacité de l’organisation à progresser dans le degré de conformité de ses sites et de ses applications aux standards du web.
Utilisation des feuilles de style CSS pour la conception des sites afin de séparer contenu et contenant, commentaire du code des applications produites. Existence d’un fichier de suivi des versions des standards (par exemple HTML 5, XHTML 1.1) avec lesquelles les sites et les applications ont été développés.
Idem + respect des normes édictées par le World Wide Web Consortium (W3C) (pages validées XHTML) et utilisation de standards pour le développement des applications. Existence d’un fichier de suivi des versions également pour l’ensemble des produits sur étagères et APIs utilisées avec la documentation associée.
Idem + utilisation de briques sur étagères certifiées (par exemple, feuilles de styles CSS ou bibliothèques logicielles faisant l’objet de certifications informatiques en matière de sécurité) et fourniture d’APIs commentées. Mise à jour des versions des logiciels dans les quinze jours qui suivent leur disponibilité, et des correctifs dans les sept jours.
Idem + développement des sites pensé par rapport à l’indexation (référencement) avec ajout d’attributs sémantiques (balises alt, rel, tag, etc.) pour optimiser le référencement. Les briques sur étagères utilisées font l’objet d’une investigation par rapport aux possibles failles de sécurité en complément des certifications. Mise à jour des versions des logiciels et des correctifs dans les quarante-huit heures qui suivent.
Idem + les sites sont pensés pour le référencement par rapport à la recherche vocale et le lien avec les assistants personnels. Veille proactive qui permet d’anticiper les standards à venir pour les sites et les applications pour permettre des choix d’outils éclairés.
TIS2. Taux de disponibilité des sites
Le taux de disponibilité des principaux sites de l’organisation est essentiel (site web + App), toute impossibilité de connexion étant un générateur de mécontentement surtout lorsque des opérations urgentes sont à effectuer par le client.
De 97 à 99 %.
De 99 à 99,9 % + message d’indisponibilité affiché en précisant, s’ils sont connus, les raisons de l’interruption de service (maintenance, etc.) et le moment de retour à la normale, avec des excuses pour la gêne occasionnée.
De 99,9 à 99,95 % + existence de contrats de service SLA/SLR avec alerte automatique en cas d’indisponibilité (via des remontées par des sondes) pour un retour à la normale plus rapide.
De 99,95 à 99,99 % + existence de contrats de service SLA/SLR avec alerte automatique en cas d’indisponibilité (via des remontées par des sondes) pour un retour à la normale plus rapide.
Plus de 99,99 % + existence de contrats de service SLA/SLR avec alerte automatique en cas d’indisponibilité (via des remontées par des sondes) pour un retour à la normale plus rapide + dispositif de pré-alerte en cas de surcharge des serveurs de nature à déclencher des solutions de continuité de service automatisée.
TIS3. Cohérence du parc logiciel
Il s’agit de mesurer le décalage potentiel qui existe entre les dernières versions de logiciels ou de systèmes d’exploitation disponibles et le parc existant au sein de l’organisation.
Versions installées sur les PC des applications et des systèmes d’exploitation ayant deux versions d’écart au plus (par exemple, Windows 7 vs Windows 10).
Idem, mais une version d’écart au plus.
Mise à jour automatique des logiciels, des applications et des systèmes d’exploitation sauf règles de gestion particulière (par exemple, politique des achats ne donnant pas le feu vert pour une mise à jour coûteuse d’une application). Homogénéité du parc applicatif de l’entreprise pour a minima chaque business unit.
Idem, avec politique de gestion des versions et des mises à jour clairement documentée et sauvegarde des dernières versions installées. Homogénéité du parc applicatif de l’entreprise pour l’ensemble de ses sites. L’utilisation de BYOD, s’il est mis en œuvre, présente une homogénéité avec une compatibilité avec le parc matériel et logiciel ainsi que des dispositifs de sécurité pour les appareils en usage nomade.
Idem + possibilité de retour arrière rapide et sans perte de données en cas de dysfonctionnement, d’effet de bord, de non-compatibilité du système avec les applications développées par l’organisation. L’utilisation de BYOD, s’il est mis en œuvre, présente une homogénéité totale avec le parc matériel et logiciel de l’organisation et une qualification des appareils BYOD avant achat.
Productivité
TIP1. Niveau d’équipement numérique du personnel
Il s’agit d’évaluer la nature, l’âge et le niveau d’équipement mis à disposition du collaborateur (PC, smartphone, tablette, infrastructure télécoms) ainsi que la mise à jour du matériel et des logiciels pour que l’équipement conserve toute sa pertinence dans les missions qu’exerce le personnel au quotidien. Cet indicateur mesure le taux d’équipement en matériel du personnel de l’organisation.
Au moins 95 % des collaborateurs (hors ouvriers et agents d’exécution qui ne sont pas en bureau) disposent d’un équipement (PC, smartphone, tablette) pour leur usage professionnel.
Au moins 97 % des collaborateurs (hors ouvriers et agents d’exécution qui ne sont pas en bureau) disposent d’un équipement. Des mises à jour système et des antimalwares sont faites régulièrement, automatiquement et sans perturbation du travail du collaborateur. L’âge moyen du parc de l’équipement (PC, smartphone, tablette) est inférieur à deux ans.
100 % des collaborateurs (hors ouvriers et agents d’exécution qui ne sont pas en bureau) disposent d’un équipement et 50 % disposent d’au moins deux équipements (dont l’ensemble des commerciaux et les cadres, typiquement smartphone + PC, ou tablette pour les commerciaux et PC + smartphone pour les cadres). L’âge moyen de la flotte (PC, smartphone, tablette) est inférieur à deux ans. Des mises à jour système sont faites automatiquement et, dans ce cas, le travail du collaborateur prime pour ne pas perturber ses actions, quitte à reprogrammer la mise à jour dans les vingt-quatre heures. Une politique de traçabilité du matériel en cas de casse, de vol ou de perte existe.
Idem, avec une politique de renouvellement du matériel instaurée avec contrats de maintenance, gestion de la flotte mobile à distance, désactivation du matériel en cas de perte ou de vol et procédé de chiffrement de type BitLocker pour Windows. Le BYOD est proposé avec les paramétrages requis pour assurer la confidentialité et la protection des informations.
Idem + l’équipement informatique prévoit toute forme de mobilité et de connexion avec l’entreprise (intranets, wikis, réservation de salle à distance, web conférence, Internet des objets, par exemple pour pouvoir télétravailler ou travailler depuis sa voiture lors d’un déplacement). Le BYOD est entièrement intégré par les équipes de l’organisation (traçabilité et impacts en matière de système d’information).
TIP2. Connexion et débit Internet en agence
Il s’agit de mesurer le pourcentage de personnel d’une organisation ayant accès à Internet dans le cadre de son travail en agence et la qualité du débit associé, mais également de proposer l’accès Internet aux clients de l’organisation dans ses agences (par exemple administration, hypermarché) pour en faire un lieu de vie. Cet indicateur n’est pas intégré dans le calcul du niveau de maturité numérique du levier technologie et innovation pour les acteurs et start-up dépourvus d’agences.
Pour apprécier la qualité du débit, le débit Internet fixe au pic de connexion est intéressant pour savoir dans quelle mesure la capacité du réseau télécoms peut absorber les besoins en bande passante des collaborateurs au plus fort de l’activité de l’agence. Il révèle l’importance des moyens que l’organisation accorde à la qualité de service pour ses collaborateurs en agence, les offres télécoms qu’elle souscrit devant être adaptées aux moyens requis par les collaborateurs.
Plus de 90 % du personnel dispose d’un accès à Internet dans l’agence (PC ou smartphone). Plus de 40 % des besoins en bande passante au pic de connexion sont satisfaits dans l’agence.
Plus de 95 % du personnel dispose d’un accès à Internet dans l’agence (PC ou smartphone). Un accès Wi-Fi est proposé pour tous à un niveau basique (par exemple dix minutes de connexion offerte).
100 % du personnel dispose d’un accès Internet dans l’agence (PC ou smartphone). Plus de 50 % du personnel de l’agence dispose d’un accès Internet en cas de mobilité (smartphone ou tablette principalement). L’accès au Wi-Fi est proposé pour tous avec mot de passe communiqué sur demande. Plus de 70 % des besoins en bande passante au pic de connexion sont satisfaits dans l’agence.
Idem 3 + alerte remontée sur smartphone en cas de message reçu sur PC avec une synchronisation des messageries entre les outils utilisés par le collaborateur.
Idem 4 + accès en mobilité de type 4G proposé et l’ensemble des services auxquels chaque type de collaborateur a le droit d’accéder. Plus de 95 % des besoins en bande passante au pic de connexion sont satisfaits dans l’agence.
TIP3. Connexion et débit Internet pour les autres personnels en bureau
Il s’agit de mesurer le pourcentage de personnel d’une organisation ayant accès à Internet dans le cadre de son travail en bureau (siège, diverses antennes, etc.) et la qualité du débit associé.
Pour apprécier la qualité du débit, le débit Internet fixe en moyenne est intéressant pour savoir dans quelle mesure la capacité du réseau télécoms peut absorber les besoins en bande passante des collaborateurs en moyenne pour supporter l’activité. Il révèle l’importance des moyens que l’organisation accorde à la qualité de service pour ses collaborateurs dans les bureaux, les offres télécoms qu’elle souscrit devant être adaptées aux moyens requis par les collaborateurs.
Plus de 90 % du personnel dispose d’un accès à Internet en bureau (PC ou smartphone). Plus de 50 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux.
Plus de 95 % du personnel dispose d’un accès à Internet en bureau (PC ou smartphone). Plus de 60 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux.
100 % du personnel dispose d’un accès Internet en bureau (PC ou smartphone). Plus de 50 % du personnel de l’agence dispose d’un accès Internet en cas de mobilité (smartphone ou tablette principalement) et la messagerie de l’organisation peut être consultée en mobilité dès lors qu’un accès Internet est disponible. Plus de 80 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux.
Idem + alerte remontée sur smartphone en cas de message reçu sur PC avec une synchronisation des messageries entre les outils utilisés par le collaborateur. Plus de 90 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux.
Idem + accès en mobilité de type 4G proposé et l’ensemble des services auxquels chaque type de collaborateur a le droit d’accéder. Plus de 95 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux.
TIP4. Connexion et débit Internet pour les autres agents en mobilité
Il s’agit de mesurer le pourcentage de personnel d’une organisation ayant accès à Internet dans le cadre de son travail qui peut être en bureau mais qui est souvent nomade (par exemple, commerciaux, personnel télétravaillant fréquemment, etc.) et la qualité du débit associé.
Pour apprécier la qualité du débit, le débit Internet fixe en moyenne est intéressant pour savoir dans quelle mesure la capacité du réseau télécoms peut absorber les besoins en bande passante des collaborateurs en moyenne pour supporter l’activité.
Il révèle l’importance des moyens que l’organisation accorde à la qualité de service pour ses collaborateurs, les offres télécoms qu’elle souscrit devant être adaptées aux moyens requis par les collaborateurs.
Plus de 80 % du personnel dispose d’un accès à Internet en bureau (PC ou smartphone). Plus de 50 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux. 100 % du personnel en mobilité dispose d’un accès à Internet (via smartphone ou PC portable).
Plus de 90 % du personnel dispose d’un accès à Internet en bureau (PC ou smartphone). Plus de 60 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux. La messagerie du personnel peut être consultée en mobilité dès lors qu’un accès Internet est disponible.
100 % du personnel dispose d’un accès Internet en bureau (PC ou smartphone). Plus de 80 % des besoins en bande passante en moyenne sont satisfaits dans les bureaux. Alerte remontée sur smartphone en cas de message reçu sur PC avec une synchronisation des messageries entre les outils utilisés par le collaborateur
Idem + accès en mobilité de type 4G proposé et l’ensemble des services auxquels chaque type de collaborateur a le droit d’accéder.
Idem + accès en mobilité de type 5G proposé et l’ensemble des services auxquels chaque type de collaborateur a le droit d’accéder.
TIP5. Outils collaboratifs basés sur le cloud
Cet indicateur mesure le niveau de maturité des outils mis à disposition du personnel de l’organisation dans un but de partage et de performance collective.
Existence d’outils collaboratifs et/ou de réseau social d’entreprise.
Les outils sont dans le cloud. La mise à jour des versions est faite régulièrement. Une notification est adressée à chaque utilisateur sur son poste de travail.
La mise à jour des versions est faite automatiquement, transparente pour les utilisateurs qui disposent tous en même temps de la même version (pour une utilisation avec PC ou smartphone).
La mise à jour des versions est faite automatiquement, transparente pour les utilisateurs qui disposent tous en même temps de la même version (pour une utilisation à la fois sur PC, smartphone et éventuellement autre support de type tablette ou Internet des objets).
Tous les outils du personnel sont dans le cloud (avec un choix d’architecture entre cloud hybride et privé) et des processus de sécurité associés. Les partenaires de l’organisation peuvent accéder à des outils du cloud pour des projets communs avec des droits associés basés sur le principe du besoin d’en connaître.
TIP6. Niveau de vigilance par rapport à une crise numérique
Cet indicateur mesure le degré de vigilance de l’organisation en préparation d’un éventuel buzz négatif sur Internet.
Surveillance manuelle de l’image de l’organisation sur les principaux réseaux sociaux face à des éventuels bad buzz + surveillance du bon fonctionnement des sites (en ligne, cohérence des informations, temps de réponse) avec alertes remontées au management.
Surveillance automatique de l’image de l’organisation sur les principaux réseaux sociaux face à des éventuels bad buzz (avec des outils de type Google Alerts, Mention, Radian6) + surveillance du bon fonctionnement des sites (en ligne, cohérence des informations, temps de réponse) avec alertes remontées au management.
Idem 2, mais surveillance automatique et apprenante avec un historique des dysfonctionnements passés et un plan de gestion de crise.
Idem 3, avec activation d’une cellule de crise et réponse aux principaux problèmes potentiels identifiés dans les vingt-quatre heures.
Idem 4, avec activation d’une cellule de crise et réponse aux principaux problèmes potentiels identifiés dans l’heure.
Synthèse des indicateurs selon le type d’organisation
Une croix dans une case du tableau signifie que l’indicateur est applicable pour la catégorie d’organisation considérée.
Points clés
  • Bâtissez votre présence pour être visible de vos cibles sur Internet, sur les App et selon les supports de connexion ; cultivez-la en permanence.
  • Choisissez des outils qui vous rendent indépendant de la technique.
  • Pensez APIs, réutilisabilité et simplicité d’utilisation.
  • Ayez des sites disponibles à tout moment et des données sauvegardées.
  • Mesurez vos progrès dans la transformation digitale de vos technologies selon quatre aspects : architecture, orientation client, standards, productivité.
1Côme Bastin, «  Uber, t’es foutu, la blockchain est dans la rue  », OuiShare, 24 mai 2016, www.ouishare.net.
2Laurent Lequien, «  CES 2019  : BTU Hotel, un service de réservation avec zéro commission », La Tribune, 8 janvier 2019, http://www.latribune.fr.
3Clotilde Chenevoix, «  Traçabilité alimentaire: Carrefour rejoint IBM Food Trust  », LSA , 8 octobre 2018, https://www.lsa-conso.fr.
4«  Un manchon connecté pour opérateurs de chantier  », Minatec, 4 décembre 2017, https://www.minatec.org/fr.
5Klara Paardenhooper, «  Blockchain Maturity Model  », KennisDC Logistiek, 31 mai 2018, https://assets.kpmg/content/dam/kpmg/nl/pdf/2017/advisory/blockchain-maturity-model.pdf.
6Fabienne Simon, «  Les banques et leurs clients… à l’heure du “tout digital”?  », Ipsos, 15 février 2018, http://www.ipsos.com.
7Juliette Raynal, « La néobanque N26 lève 160 millions de dollars pour s’attaquer aux marchés britannique et américain », L’Usine digitale, 20 mars 2018, http://www.usine-digitale.fr.
8Juliette Raynal, «  Dopée par une levée de fonds XXL, la néobanque Revolut vise les 100 millions d’utilisateurs d’ici cinq ans  », L’Usine digitale, 26 avril 2018, http://www.usine- digitale.fr.
9Pour ne citer qu’un exemple  : Luciana Uchôa-Lefebre, «  BNP Paribas accélère sa transformation digitale », Le Journal du Net, 26 février 2018, http://www.journaldunet.com.
10Étude réalisé par D-Rating sur la base des rapports annuels de 14 banques de détail françaises : Crédit agricole, LCL, BNP Paribas, Société Générale, Crédit du Nord, Boursorama Banque, Caisse d’épargne, Banque populaire, Crédit mutuel, CIC, CM Arkéa, La Banque postale, ING Direct, HSBC France.
11www.rok-solution.fr
12Soit l’équivalent de deux lois de Moore.
13Le PageRank* (échelle de 0 à 10) créé par Google a été supprimé. L’outil Moz (https://moz . com) est proposé et se base sur les backlinks avec une échelle également logarithmique de 0 à 100. Il est possible, pour affiner, de regarder le classement délivré par Alexa pour le site principal de l’organisation et de le comparer en ayant également des statistiques comme le temps moyen passé par client/prospect sur le site par jour (voir www.alexa.com/topsites).

Chapitre 9[modifier]

Levier  : environnement
Positionnement du levier et objectifs
L’entreprise digitale évolue dans un environnement extrêmement changeant. Les relations avec les partenaires se font et se défont en s’appuyant pour certaines sur des APIs. Des innovations technologiques et de services utiles pour l’entreprise naissent et meurent chaque jour. La réputation en ligne de l’organisation se propage instantanément au travers des médias sociaux. Les partenariats industriels s’appuient sur une ingénierie contractuelle tirant profit de solutions évolutives donnant une grande souplesse à la relation. Le cadre juridique et fiscal évolue au rythme du développement à grande vitesse de services plébiscités par les consommateurs ou d’évolutions législatives, et même de lobbies. De nouvelles normes de fait ou émanant d’organismes s’imposent aussi rapidement que sont adoptés les technologies et usages par les consommateurs et les clients de l’entreprise.
Ces changements permanents supposent une attitude d’ouverture, de veille, d’appréhension des nouveautés, qu’elles soient liées au cœur du métier de l’entreprise ou à sa périphérie  : technologies et services supports, écosystème économique, comportements des consommateurs (pour les entreprises B2C) et des clients (pour les entreprises B2B), réglementation juridique et fiscale. Cette appréhension des changements se révèle au travers d’activités menées par l’entreprise. Pour autant, le juridique, le lobbying et l’environnement économique peuvent également constituer un levier d’optimisation dans le respect de la loi (par exemple, choix de l’implantation des sites par rapport à l’attractivité fiscale ou sur le territoire d’un pays selon le coût du mètre carré et les taxes).
Groupements
Nous proposons de caractériser la maîtrise de son environnement par l’entreprise digitale selon trois groupements répondant aux questionnements de l’organisation :
  • Économique  : comment l’entreprise tire-t-elle profit du digital pour développer autour d’elle un écosystème d’acteurs  ? Quelle est sa stratégie d’implantation physique de ses sites afin de bénéficier des pôles d’emplois technologiques ou d’optimiser fiscalement son résultat  ? Comment exploite-t-elle les résultats économiques pour gérer son implantation physique  ? Quelle est sa capacité à générer un écosystème avec des APIs autour d’elle ?
  • Réglementaire  : quel est son niveau de maturité en matière de droit numérique  ? et de sa relation contractuelle  ? Comment fait-elle évoluer ses conditions générales d’utilisation (CGU) ?
  • Lobby ing  : comment contribue-t-elle aux organismes en charge de l’élaboration des normes qui régissent le digital  ? Quels moyens humains y consacre-t-elle et quels sont les impacts en matière de normes et de règlements qui lui sont utiles par la suite  ?
Yoann Denée (@YoannDenee), chief data officer, data protection officer, digital expertise director chez Prisma Media
« Depuis le règlement général sur la protection des données (RGPD), des lecteurs nous envoient des articles de loi. »
Chez Prisma Media, en tant que data protection officer, vous avez mis en place le règlement général sur la protection des données (RGPD) . Quelles difficultés avez- vous rencontrées ?
La principale difficulté est liée à la nouveauté apportée par ce règlement, qui globalement renverse la notion de charge de la preuve et qui par conséquent a nécessité le lancement d’un projet d’envergure pour l’ensemble du groupe Prisma Media. Une dizaine d’entités, tous les métiers et toutes les composantes se sont en effet avérés concernés par le RGPD. Il a d’abord fallu faire preuve de pédagogie et expliquer à un large public pourquoi se mettre en conformité. Et pour cela rencontrer les ressources humaines, les services généraux, les commerciaux, le marketing, les développeurs, l’infrastructure et la direction générale du groupe.
Ensuite, il a fallu mobiliser l’ensemble des collaborateurs en vue de l’élaboration d’un registre global des traitements de la donnée personnelle qui couvre l’ensemble des procédures et processus anciens ou nouveaux, chacun devant être documenté pour satisfaire l’exigence d’imputabilité du RGPD.
Un véritable travail de bénédictin s’est alors engagé dans toute l’entreprise pour rassembler la documentation, les propriétaires de processus, combler les incomplétudes de documentation du traitement des données personnelles. Certains processus historiques n’avaient pas été mis à jour depuis longtemps, d’autres étaient insuffisamment documentés, certains manquants.
En conséquence, d’autres difficultés sont apparues telle que la modification de bases de données qui contenaient des données non nécessaires au traitement selon le principe de minimisation de la donnée mise en œuvre. Des explications juridiques vulgarisées aux métiers ont été nécessaires pour que chacun comprenne pourquoi il était désormais impossible de conserver la donnée inutilement.
Avant même l’entrée en vigueur du RGPD, nous avons ainsi arrêté certaines activités par anticipation dès 2017, activités dont nous avions identifié qu’elles seraient non conformes à la réglementation.
Aujourd’hui, nous cadrons la prise en compte de la réglementation dès la conception. C’est ce que l’on appelle la privacy by design. Pour mener à bien l’ensemble des missions induites par le RGPD, nous avons aussi mis en place une équipe de 6 personnes en temps partagé (soit environ 3 équivalents temps plein), chacune spécialisée dans un rôle pour couvrir l’ensemble des problématiques posées par la mise en œuvre du RGPD :
  • data protection officer (management) ;
  • documentation des processus (imputabilité) ;
  • sécurité des données (security by default) ;
  • gestion de projets transverses ;
  • juridique (privacy by design) ;
  • exercice des droits des personnes (information, opposition, plaintes).
Le RGPD est entré en vigueur le 25 mai 2018. Quel bilan tirez-vous environ un an après sa mise en application  ? En tant que data protection officer, recevez-vous de nombreuses sollicitations de la part des lecteurs des sites édités par Prisma Media  ? Avez-vous pu transformer la contrainte du règlement en une opportunité dont vous récoltez déj à les fruits ?
J’observe sur le marché un nombre important d’acteurs en retard sur la mise en place du RGPD. Soit parce qu’ils n’en ont pas compris l’intérêt, soit parce que les structures sont de taille tellement importante que la mise en œuvre sera très longue (ce qui semble être le cas pour le retail), soit majoritairement parce qu’ils sont non-Européens et voient ce règlement de très loin.
Il y a eu beaucoup de bruit à partir du 25 mai 2018 avec des passages télé, des articles de presse, des campagnes de réactualisation des bases. RGPD/GPDR est même devenu un spam word. Des confirmations d’opt-in étaient demandées, parfois même en dépit du bon sens. On a ainsi vu certains acteurs, qui détenaient des bases de prospects et clients, détruire leurs actifs par une lecture inappropriée du règlement, en demandant par exemple un double consentement.
J’ai aussi fait l’observation que la plupart des outils existants pour gérer le RGPD étaient soient inexistants, soit insuffisamment prêts donc immatures. La plupart des CMP (consent management platform) servant à récupérer le consentement des internautes n’étaient pas suffisamment rodées et avaient interprété le RGPD à leur façon en l’absence de guidelines opérationnelles fournies par les autorités locales. Le 26 mai 2018, certains Gafa ont par exemple orienté leurs budgets auprès de sociétés considérées comme conformes au RGPD, selon leur propre interprétation. Résultat  : des acteurs médias ont ainsi perdu plus de 75 % de leur chiffre d’affaires sur une courte période  ! Plus généralement, on a pu déplorer l’impréparation de l’écosystème publicitaire.
Par ailleurs, il est à noter que les acteurs américains ont eu l’avantage dans un premier temps – d’autant plus qu’il faut plusieurs mois pour bien déployer le RGPD. Ainsi, par exemple, Google ne s’est engagé que très récemment (décembre 2018) à rejoindre le Transparency and Consent Framework de l’IAB (Internet Architecture Board).
Pour ce qui est des sollicitations de nos lecteurs, nous en recevons toujours beaucoup chez Prisma Media du fait que nous parlons à tous les Français à travers nos 22 marques du groupe. L’anticipation du RGPD deux ans avant sa mise en place nous a permis de constater peu d’impact sur le volume des sollicitations. En revanche, leur nature a changé. Auparavant, nos lecteurs pouvaient poser les questions de manière naïve. Depuis le RGPD, les gens envoient des articles de loi. Cela nous oblige à apporter des réponses plus détaillées à leurs demandes tout en conservant une volonté d’industrialisation du traitement des réclamations.
Pour donner un ordre de grandeur, sur l’activité CRM data (customer relationship management), plusieurs milliards de méls sont envoyés chaque année, suscitant quelques milliers d’échanges (demandes d’information, réclamations, dont RGPD). La nouveauté, par exemple, c’est que les gens demandent à ne pas apparaître sur un site parce qu’ils ont pris conscience que l’image est une donnée personnelle.
Prisma Media ayant largement anticipé le RGPD, une communication a pu être faite. Nous avons créé «  Prisma Connect  », un compte unique proposant un accès direct à toutes les données personnelles pour les 22 marques du groupe (Gala, Télé Loisirs, etc.). Une consent management platform (CMP) a été mise en place sur tous les sites web et applications mobiles de nos marques, permettant de récupérer les consentements sur les finalités de traitement des cookies et autres traceurs, et d’administrer le consentement par finalité. Prisma Media a été précurseur sur ce point, générant ainsi un véritable vecteur de confiance avec nos lecteurs.
Comment anticipez-vous l’évolution de la réglementation  ? Avec vos collègues, comment appréhendez-vous le lobbying dans la transformation digitale de Prisma Media ?
La mise en application du RGPD nécessite des clarifications au niveau de sa lecture avant même d’anticiper ePrivacy, qui arrivera dans plusieurs années.
Par exemple, le texte n’explicitait pas clairement ce qui devait être mis en place en termes d’expérience utilisateur pour récolter le consentement, notamment au sujet de la géolocalisation. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) est tombée en désaccord avec des start-up qui ont été mises en demeure de respecter la réglementation qui avait été mal comprise et/ou mal interprétée. Il a donc fallu instaurer un parcours client spécifique au mobile pour permettre la récolte appropriée (libre et spécifique) du consentement élaboré sur la base des éléments fournis par la Cnil.
Autre exemple  : la portabilité des données. Simple et même inscrite dans les habitudes pour les télécoms, la banque et d’autres industries, elle s’avère plus complexe dans d’autres secteurs moins enclins à l’exercice. En effet, personne ne sait quoi porter, comment le porter, selon quel format … Il manque une approche industrielle à structurer pour transporter un compte d’un média à un autre par exemple. Cependant, en un an, aucun lecteur n’en a fait la demande. Il semblerait qu’il n’y ait pas de marché sur ce point dans le secteur des médias. Les évolutions sont ainsi discutées avec la Federation of European Direct and Interactive Marketing (Fedma), organisme de lobbying qui retranscrit notre réalité marché de façon opérationnelle et tangible aux politiciens de la Commission européenne. Par exemple, s’il est demandé d’obtenir un consentement par cookie, les lecteurs devront cliquer à chaque page, ce qui serait invivable et irait à l’encontre de l’esprit du RGPD. La Fedma nous aide à porter nos intérêts et notre réalité opérationnelle d’une voix structurée et lisible face au législateur européen.
Au-delà de l’Europe, quel regard vous semblent porter les autres pays sur ce règlement et les évolutions j uridiques à venir, comme le futur règlement ePrivacy  ? Celui-ci est-il vu comme une opportunité de prendre des parts de marché à des sociétés européennes plus contraintes  ? ou au contraire comme un bon exemple à suivre pour assainir le traitement des données personnelles  ? Comment anticipez-vous les évolutions d’ordre fiscal et comment optimisez-vous ce point pour le groupe ?
En prenant un peu de recul sur le marché depuis l’entrée en vigueur du RGPD, on peut s’étonner de constater qu’on entend peu parler d’Amazon, alors que Google et
Facebook ont été sous les projecteurs. On peut aussi remarquer que les États-Unis sont intéressés par l’approche RGPD de défense du droit des personnes au niveau des données personnelles. Avec notamment le Cloud Act, les Américains veulent arriver à quelque chose de similaire au RGPD, mais sans perte de souveraineté de la donnée. Ainsi, toute donnée passant par les États-Unis relève du droit américain, ce qui est léonin. C’est donc encore une autre lecture de la protection des données personnelles, soucieuse de maintenir les intérêts business, qui prévaut aux États-Unis.
Sur un plan financier, il est encore un peu tôt pour évaluer les impacts financiers du sujet, et sur les business models qui dépendent eux-mêmes des partenaires de Prisma Media – des partenaires qui peuvent être des plateformes européennes comme américaines, ce qui complexifie l’analyse !
L’anticipation du risque fiscal est à l’étude, et nous le surveillons attentivement. Au niveau des médias, les business plans des médias ne sont pas aussi confortables que ceux des Gafa. Une taxe supplémentaire sur le chiffre d’affaires aurait un impact beaucoup plus important dans notre industrie. Par ailleurs, en cas de sanction, les acteurs français sont contraints de payer sur la totalité des revenus du groupe (amende maximum de 4  % du revenu global) alors que les acteurs étrangers pourraient tenter d’indexer l’amende sur une partie seulement de leurs revenus.
Quels indicateurs avez-vous mis en place au sein du groupe Prisma Media pour mesurer la maturité des filiales dans leur appropriation en profondeur du RGPD et plus globalement des données ?
Nous avons mis en place quatre indicateurs principaux.
Le premier est le pourcentage de formation des personnes concernées par les données personnelles. Une douzaine de formations ont lieu tout au long de l’année, sur des équipes thématiques (e-commerce, régie pub, IT, ressources humaines). Ces sessions sont complétées d’une solution de e-learning présentant les vidéos des formations. Au travers de cet indicateur, nous visons en permanence d’être le plus proche possible des 100 % de personnes concernées formées.
Le deuxième indicateur est le pourcentage d’assimilation. Nous l’évaluons au travers d’une forme de contrôle continu. Il nous permet de tester la résilience de la formation. La première évaluation a eu lieu début 2019.
Le troisième indicateur est le degré de sollicitations sur l’équipe RGPD/ePrivacy. Il mesure le nombre de fois où l’équipe est sollicitée pour des conseils, ou modifier un projet. Début 2019, cet indicateur révèle que l’équipe est ainsi sollicitée plus de deux fois par jour en moyenne – la bonne nouvelle étant qu’aujourd’hui, un commercial ou un chef de projet appelle l’équipe avant de vendre ou de réaliser un projet pour confirmer que celui-ci est bien compliant !
Enfin, le quatrième indicateur est le nombre de personnes qui suivent la communauté
interne sur les évolutions de la réglementation. Du fait de l’anticipation de la mise en place du règlement, cette communauté a déjà plus d’un an d’existence. Elle réunit 75 % des 150 personnes ayant accès à la donnée personnelle. Et elle reçoit en moyenne un article par semaine.
* * *
Alain Bensoussan (@A_ Bensoussan), fondateur du cabinet Alain Bensoussan et du réseau Lexing, réseau international d’avocats spécialisés en droit des technologies numériques
«  D’autres évolutions juridiques sont prévisibles à cinq ans, pour prendre en compte par exemple l’Internet des objets, le développement de la robotique, de l’intelligence comportementale et du cerveau artificiel. »
Avez-vous établi une check-list des obligations j uridiques qu’une organisation doit observer pour être performante sur le web (règlement général sur la protection des données, loi pour une République numérique, loi pour la confiance dans l’économie numérique, etc.) en France et dans le monde ?
Plus qu’une check-list des obligations juridiques, la performance d’une entreprise se pose en termes de conformité à un référentiel légal. Par exemple, le développement de la conformité «  Informatique et libertés  », et plus généralement dans le domaine du numérique, suppose de développer des logiciels d’audit juridiques et des outils de conformité. C’est pourquoi nous avons développé notre propre plateforme d’outils en mode SaaS (logiciel à la demande), Lexing SaaS RGPD , dédiée à la conformité informatique et libertés (registres, site d’accountability , chatbot sur le règlement général sur la protection des données, cartographie, diagnostic, etc.).
Un référentiel juridique est par nature évolutif, et la performance juridique se mesure également en termes de capacité à suivre au plus près, voire à anticiper, les évolutions réglementaires. C’est l’objet de la veille juridique que nous pratiquons au quotidien.
Quelles seront les évolutions j uridiques prévisibles dans les cinq prochaines années auxquelles les organisations vont devoir se préparer  ? On peut songer aux impacts du cloud, du big data, de l’Internet des obj ets, de la blockchain, de l’intelligence artificielle et des systèmes autonomes …
Parmi les grands enjeux juridiques des nouvelles technologies du futur, on trouve toutes celles qui alimentent l’intelligence artificielle  : le cloud computing avec sa puissance de calcul, le big data avec l’explosion du volume de données en ligne et l’Internet des objets avec la multiplication des objets connectés. Le premier est susceptible de concerner tous les acteurs et secteurs économiques, et il induit la convergence de nombreuses thématiques telles que les relations contractuelles, la sécurité, les données à caractère personnel, la confidentialité. Autant d’aspects qu’il est indispensable de gérer en amont de l’implémentation du cloud.
Quant au deuxième, le big data, il soulève un nouveau paradigme du droit à travers l’application de la nouvelle loi informatique et libertés (LCEN) et de la loi pour une République numérique (LRN). L’une comme l’autre exigent plus de loyauté et de transparence dans le traitement des données personnelles et leur utilisation par les plateformes d’intelligence artificielle. À terme pour les entreprises, cela va induire de communiquer sur le fonctionnement des algorithmes visibles pour l’utilisateur et d’identifier l’équipe ou la personne responsable (le chief algorithm officer).
Mais d’autres évolutions juridiques sont prévisibles à cinq ans, pour prendre en compte par exemple l’Internet des objets, le développement de la robotique, de l’intelligence comportementale et du cerveau artificiel. L’essor des projets, notamment dans la robotique de services, rend incontournables les questions d’ordre juridique soulevées par la régulation de l’intelligence artificielle et des systèmes autonomes. En janvier 2017, le Parlement européen a adopté une résolution invitant la Commission européenne à créer au plus vite un cadre juridique européen pour les robots dont la première étape a été l’élaboration d’une charte établissant un code de conduite pour les ingénieurs en robotique et un code de déontologie pour les comités d’éthique de la recherche lorsqu’ils examinent les protocoles de robotique.
À terme, il en découlera la nécessité d’instaurer un droit des robots, dotant ceux-ci d’une personnalité et d’une identité juridique pour permettre le développement de l’activité robotique .
Observez-vous chez vos clients et vos partenaires une capacité à appréhender les évolutions du droit numérique  ? Quels dispositifs de veille mettent-ils en œuvre ? Quelles formations en matière de droit numérique suivent-ils ?
Nous avons observé chez nos clients un besoin croissant de formations pour les accompagner dans leur transition numérique.
Celle-ci pose un problème de mutation des produits, des services, des processus et des individus. Ces nouvelles technologies se mettent en place (réseaux, processeurs, logiciels, services à valeur ajoutée) autour des géants comme Google, Intel, IBM ou Apple.
Être en veille ne suffit plus, il faut initialiser sans attendre des projets tenant compte de ces mutations. C’est le cas du big data qui impose d’anticiper de nouveaux concepts «  potentiels  » autour de la protection des données personnelles, l’open data, la propriété intellectuelle ou encore la (cyber)sécurité.
C’est pourquoi bon nombre de formations tournent autour de la maîtrise du cadre juridique du numérique pour sécuriser des projets souvent innovants, encadrer des pratiques numériques (dématérialisation, digitalisation, cloud, big data, etc.), ou faire face à la complexification des contrats (instauration du contract management et de la compliance). Il existe également de nombreux besoins de formation autour de l’exploitation des données numériques de l’entreprise, depuis l’entrée en application du règlement général sur la protection des données (RGPD).
Enfin, il faut également favoriser l’appropriation des technologies d’intelligence artificielle au sein même de l’entreprise. Cela passe par la maîtrise technique et cognitive de l’objet technique et son intégration significative dans ses pratiques et usages. Cette étape passe également par une politique de formation s’appuyant sur des outils numériques (e-learning, chabots). Ainsi, nous avons lancé Eva, le premier chatbot entièrement dédié au RGPD en dialogue vocal.
Comment les relations contractuelles qui existent entre une organisation et ses partenaires (conventions de service avec des infogérants, contrats de services de type service level agreement – SLA/ service level requirement – SLR, etc.) peuvent-elles avoir des degrés d’exigence croissants pour le bien réciproque des parties ?
Les relations contractuelles doivent être fondées sur des schémas juridiques articulés autour de diverses matrices telles que :
  • la matrice d’analyse qui consiste à croiser différentes approches afin de tenter de cerner une « vérité ». Il en est ainsi, par exemple, de la matrice d’analyse des preuves ;
  • la matrice des actions et des responsabilités à toutes les phases d’un projet informatique (conception, réalisation, conformité, exploitation, garantie, maintenance, etc.) ;
  • la matrice de performance, qui permet notamment de recenser et de croiser les différents niveaux de performance observés (temps de réponse, temps de traitement, durée maximale de rétablissement, etc.).
Il est pertinent d’avoir recours à de telles matrices se présentant souvent sous la forme de tableaux qui peuvent être intégrés dans le plan qualité projet annexé au contrat et auxquelles pourront renvoyer certaines clauses.
Ces matrices permettent en effet de dresser la liste des obligations contractuelles essentielles, le titulaire de l’obligation ainsi qu’une cotation du poids de l’obligation en fonction du risque que les parties associent à l’inexécution ou la mauvaise exécution des obligations.
Ce sont là des outils de gouvernance indispensables, car ils permettent de renforcer la confiance des parties.
Enfin, vous militez pour un droit des robots avec différentes considérations quant aux algorithmes. Quels en seraient les conséquences pour les entreprises ?
Le développement du big data conduit à recourir aux algorithmes dans de très nombreux domaines pour optimiser le fonctionnement d’un certain nombre de services. Cela suscite de nombreuses questions en termes de protection des données mais également de transparence des algorithmes («  boîte noire  »)  : qui sont leurs concepteurs, comment sont-ils conçus, quel est leur statut juridique en cas d’erreur, qui en endosse la responsabilité ?
Il conviendra de renforcer la fonction éthique au sein des entreprises  : par exemple, en instaurant des comités d’éthique ou en intégrant, dans les chartes de déontologie, un chapitre dédié à la conception des algorithmes (« Ethic by design ») ou en désignant un chief algorithm officer. Autant d’actions qui permettent d’ancrer la responsabilité sociétale de l’intelligence artificielle au sein des entreprises et de renforcer la confiance des utilisateurs dans ces nouvelles technologies.
Indicateurs et mesure de la maturité numérique associée
Environnement
Économique
EE1. Niveau de reporting, de consolidation et d’optimisation grâce aux outils numériques et dans le respect de la loi
Ce critère vise à mesurer la propension de l’organisation à effectuer des optimisations notamment fiscales grâce au numérique, tout en respectant la loi.
Une veille permet d’établir les zones les moins coûteuses pour l’installation des sites (fiscalité locale, coût du mètre carré et taux d’imposition, en France comme à l’étranger), tant pour l’achat que la location ou le partage de locaux (cas de start-up, par exemple), en corrélation avec l’intérêt économique de la zone. Les résultats sont générés pour le management afin de l’aider à la prise de décision.
Des outils de veille sont utilisés pour connaître les pratiques des concurrents pour leur optimisation fiscale et s’inspirer des bonnes pratiques légales.
Reportings effectués au moins tous les mois sur les résultats générés par zone, l’évolution des coûts et de la fiscalité, le calcul de ratios comme le chiffre d’affaires généré par salarié et par site, etc.
L’utilisation du big data permet la délivrance de conseils d’aide à la décision avec l’analyse des autres acteurs du secteur : partenariats ou rachats de start-up ou de PME apportant une technologie complémentaire de nature à influer sur les résultats économiques et la performance globale de l’organisation, etc.
Une hypervision des résultats permet de connaître en temps réel les résultats des différents sites et de dégager des tendances sur ceux des concurrents.
EE2. Géomarketing des sites
Cet indicateur mesure la dynamique d’implantation des sites pour être proche des clients/prospects/administrés tout en tenant compte des phénomènes de mobilité de la population. Pour autant, pour des raisons politiques, certaines organisations dotées de sites physiques et n’opérant pas uniquement virtuellement peuvent être implantées sur des sites avec des contreparties (aides économiques, fiscalité attractive). Cet indicateur n’est pas applicable aux start-up ou organisations dépourvues de sites pour les activités commerciales.
Les sites sont implantés selon une logique de bassins d’emploi pour le personnel, de desserte par les transports. Une analyse des résultats commerciaux est réalisée avec des ratios au global et par client.
L’évolution de la fréquentation de chaque site est prise en compte dans la politique de fermeture de sites, de déménagement vers un autre site, de même que la fiscalité et le coût complet de chaque site avec une analyse des inducteurs de coût. Des études d’implantation de sites sont également menées.
Des ouvertures de sites peuvent être décidées après étude approfondie de la zone et de son évolution prévue à moyen/long terme, des opportunités de clientèle, de la concurrence.
Un outil pilote dynamiquement les résultats délivrés par les sites et intègre également les paramètres locaux (population, estimation des revenus et du patrimoine grâce à des sources d’informations collectées) pour aider dans la décision d’évolution du réseau de sites.
Idem + l’outil intègre un module qui analyse l’implantation physique des sites des concurrents sur l’ensemble du territoire et leur dynamisme associé.
EE3. Capacité à optimiser les règles prudentielles avec le numérique (intelligence artificielle, big data)
L’organisation peut disposer de titres et de valeurs sur les marchés financiers. Aussi l’optimisation des fonds devient-il clé. Dans ce cadre, l’intelligence artificielle et le big data peuvent permettre d’optimiser les profits avec une recherche de baisse des coûts et de majoration des profits.
Des algorithmes de trading automatique sont utilisés pour les changes entre devises ou sur les marchés boursiers en appui à des opérations manuelles.
Des algorithmes de trading automatique sont systématiquement utilisés pour les changes entre devises et sur les marchés boursiers.
Idem, également avec les crypto-monnaies, les produits dérivés et l’ensemble de la gamme des produits financiers.
Des données alimentent des systèmes d’information (par exemple, les contenus diffusés sur Internet et Twitter relativement aux marchés, secteurs économiques, valeurs et titres, sont analysés et quantifiés) afin de prédire une orientation prévisible des marchés de façon et aider les opérateurs de marché dans l’optimisation des transactions.
Idem, mais automatiquement et avec des processus de sécurité de très haut niveau pour se prémunir des réactions en chaîne et identifier des scénarios potentiels de rupture.
EE4. Ratio nombre de sociétés utilisatrices des APIs développées par l’organisation par rapport au nombre d’employés
Cet indicateur se définit comme le nombre de sociétés utilisatrices des APIs exposées par l’organisation, lorsqu’il en a développé à travers une application ou suivant des standards. Par exemple, dans le domaine bancaire, la directive e européenne sur les services de paiement 2 version (DSP2) facilite l’émergence d’APIs dans le cadre de la recherche d’une interopérabilité entre acteurs. Le recensement est effectué lors du mois précédent la mesure. Il s’agit de l’ensemble des organisations clientes, fournisseurs, partenaires ainsi que les acteurs utilisateurs des données accessibles au travers des APIs développées.
Au moins 10 entreprises utilisatrices des APIs.
Au moins 20 entreprises + (effectif/1 000) utilisatrices des APIs.
Au moins 100 entreprises + (effectif/1 000) utilisatrices des APIs.
Au moins 500 entreprises + (effectif/1 000) utilisatrices des APIs. Au moins 1 000 + (effectif × 2) connexions par jour en moyenne à l’ensemble des APIs proposées par l’entreprise ou l’organisation.
Au moins 5 000 + (effectif × 3) connexions par jour en moyenne à l’ensemble des APIs proposées par l’entreprise ou l’organisation.
EE5. Brevets déposés, redevances perçues et actifs numériques à protéger
Les marques (déclinées en noms de domaines), les contenus, les applications (et le code informatique) sont à protéger au même titre que les brevets qui assurent par ailleurs des redevances. La protection juridique de ces actifs immatériels est clé, dans la mesure où la transformation digitale s’accompagne d’une plus grande expertise technique et qu’il peut être stratégique d’internaliser ces compétences pour ne pas être dépendant d’un fournisseur, au risque de fragiliser ainsi l’organisation. Simultanément, l’ouverture et l’interopérabilité sont à rechercher, ce qui conduit à trouver un juste équilibre entre brevetabilité et transparence pour fédérer un écosystème. [À titre de comparaison, les deux premières sociétés en matière de brevets déposés sont IBM (9 000 brevets déposés en 2017) et Samsung (5 800) .]
Existence d’une entité dédiée pour les dépôts de brevets. Une entité est en charge de la protection de l’entreprise et de la veille contre les contrefaçons et les copies éventuelles de produits ou logos, et s’attache aux recherches d’antériorité. Les nouveaux embauchés signent une charte de non-divulgation d’informations sensibles. Une classification des informations manipulées par le collaborateur est réalisée par l’entreprise (par exemple, non classifié, diffusion restreinte, confidentiel, secret).
Au moins 1 brevet déposé par an. Des actions en justice peuvent être engagées par l’entreprise en cas de litige avec un concurrent, avec dans un premier temps une recherche d’accord à l’amiable. Des budgets peuvent être débloqués ou provisionnés en conséquence.
Au moins 2 brevets déposés par an. Les applications développées par les concurrents sont analysées.
Au moins 4 brevets déposés par an. Des redevances sont perçues pour le patrimoine brevet de l’entreprise.
Plus de 5 brevets déposés par an, dont au moins 2 liés à une technologie de pointe (blockchain, big data, impression 3D par exemple).
EE6. Proximité des principaux sites avec les écosystèmes innovants
Cet indicateur mesure l’effort que fait l’entreprise pour être physiquement présente sur les sites où se réunissent les innovateurs.
Identification des sites réunissant les innovateurs dans les bassins d’emploi où l’entreprise est implantée.
Participation de quelques collaborateurs à des projets réalisés dans des sites réunissant des incubateurs.
Mise en place de passerelles (projets, emplois, ressources temporaires) entre les sites attirant les innovateurs et l’entreprise. Sélection des sites selon les logiques de partage entre organisations de nature à mutualiser les coûts.
Participation active de l’entreprise à l’animation et au financement de sites réunissant des innovateurs autour de l’entreprise, faisant de l’entreprise un mécène de l’innovation locale.
Création de sites propriétés de l’entreprise, attirant des sociétés innovantes, faisant de l’entreprise un incubateur.
Réglementaire
ER1. Niveau de maturité du droit du numérique
Cet indicateur se base sur une liste d’obligations juridiques telles que celles imposées par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) (traitement automatisé d’informations nominatives, durée de conservation des logs, droit à l’oubli, principe de l’opt-in), la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) (hébergement des données et responsabilité associée, par exemple détection de contenus pédophiles publiés sur les plateformes ouvertes), la lutte contre la fraude informatique ou encore les obligations pour répondre à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) (par exemple, protection de l’internaute consommateur en cas d’achat frauduleux via son compte bancaire, délai de rétractation), le RGPD, la loi pour une République numérique. Cette liste sera mise à jour chaque année. Cet indicateur se définit comme le ratio d’obligations respectées par les actifs numériques de l’entreprise
5 à 30 %.
30 à 50 %.
50 à 70 %.
70 à 90 %.
Plus de 90 % et respect des processus opérationnels (par exemple, destruction des données personnelles collectées depuis plus de trois ans).
ER2. Degré de maturité de la relation contractuelle et évolution des CGU
Cet indicateur apprécie, côté B2B, la capacité de l’organisation à gérer les contrats, licences, SLA (service level agreement)/SLR (service level requirement) avec les sociétés tierces, la dépendance économique, la renégociation périodique des contrats, en particulier sur les applications stratégiques pour l’activité de l’entreprise. Il apprécie aussi, côté B2C, la dynamique d’évolution des CGU et la communication qui est faite auprès des clients dans le respect de la loi et des obligations imposées par le RGPD.
Contrats de services hétérogènes, mais clairement référencés au sein de l’entreprise, référentiel à jour permettant d’entrer rapidement en relation avec un fournisseur si nécessaire. Les CGU sont disponibles sur les sites et les App.
Niveaux de SLA/SLR, de dépendance économique, de pénalités, négociés systématiquement et connus par les responsables opérationnels en charge des contrats sur les applications critiques pour l’entreprise. Les CGU évoluent de façon cohérente sur l’ensemble des sites et des App. Elles sont adaptées dans les différentes langues.
Contrats avec les prestataires des applications critiques, centralisés sur un espace collaboratif, quel que soit le département de l’entreprise à l’origine du contrat. Toute évolution des CGU fait état d’une notification par mél, par exemple, aux clients et d’une mention de version et de la date associée.
Campagne d’audits ponctuels de contrôle du respect des contrats des applications critiques, renégociation des contrats chaque année. Lors d’un envoi par mél aux clients des évolutions des CGU, en cas d’erreur retournée (de type boîte mél inexistante ou saturée), le client est contacté par un autre canal pour l’informer et lui suggérer d’effectuer une mise à jour de son mél et de ses canaux de contact.
Solutions de contournement des applications critiques activables dans l’heure qui suit la détection d’une panne, collecte automatisée permanente des informations support au calcul d’indemnités.
Lobbying
EL1. Investissement consacré au rayonnement dans les instances de normalisation en rapport avec les activités de l’organisation
Le nombre de collaborateurs impliqués dans les instances de normalisation et de gouvernance du domaine de l’organisation permet d’influer dans un sens souhaité et favorable à l’organisation en étant acteur des normes.
Des collaborateurs suivent les publications des organismes de normalisation, des différents standards, etc. Certains experts ont commenté à titre personnel des publications d’organismes de normalisation, au nom de l’entreprise.
La veille sur les publications des organismes de publication est industrialisée (systématique et partagée au sein de l’entreprise). Certains experts ont contribué à des normes à titre personnel, mais pas au nom de l’entreprise.
Des collaborateurs contribuent sur leur temps libre aux travaux d’organismes de normalisation. L’entreprise est reconnue par au moins un organisme de normalisation comme contributeur d’une norme majeure en rapport avec le domaine de l’organisation ou le numérique.
Des collaborateurs sont missionnés pour contribuer aux normes les plus critiques pour le développement des activités digitales de l’organisation. Ils participent à des groupes de travail d’organismes de normalisation.
La contribution de l’entreprise aux normes est affichée dans les documents produits par les organismes de normalisation. L’organisation est reconnue par le marché comme contributeur important d’une ou plusieurs normes majeures en rapport avec le domaine de l’organisation.
EL2. Pourcentage de collaborateurs impliqués dans les instances et vis-à-vis du politique
Cet indicateur se définit comme le rapport entre le nombre d’équivalents temps plein de collaborateurs travaillant dans des instances de normalisation ou pour des missions de lobbying vis-à-vis du politique, et le nombre d’équivalents temps plein de l’entreprise.
On peut penser qu’il y aurait un seuil optimal qui maximise le retour sur investissement au-delà duquel celui-ci décroîtrait. Le calcul part des dépenses constatées par les acteurs américains (catégories sectorielles recensées, analyse des Gafa) sur www.opensecrets.org et en ramenant les dépenses sur le chiffre d’affaires (année 2018), puis à des équivalents temps plein.
À partir de 200 personnes, 0,5 personne est affectée à ces fonctions. Pour les entreprises de moins de 200 personnes mais ayant une technologie, des brevets ou un savoir-faire spécifique à protéger, il convient d’avoir 0,5 personne affectée à ces fonctions également.
Pour les organisations de plus de 200 personnes, rajouter 0,02 % de l’effectif en équivalent temps plein.
Idem + pour les organisations de 200 personnes, rajouter 0,04 % de l’effectif en équivalent temps plein.
Idem + pour les organisations de 200 personnes, rajouter 0,07 % de l’effectif en équivalent temps plein.
Idem + pour les organisations de 200 personnes, rajouter 0,1 % de l’effectif en équivalent temps plein.
Idem + pour les organisations de 200 personnes, rajouter 0,15 % de l’effectif en équivalent temps plein.
EL3. Capacité à coopérer avec d’autres acteurs afin d’imposer des standards communs pour mutualiser
Cet indicateur vise à mesurer la capacité qu’a l’entreprise de coopérer avec d’autres acteurs et son influence en vue d’imposer les solutions techniques sur lesquelles elle travaille de façon à mutualiser leur utilisation et les imposer comme standards, notamment sur les nouvelles technologies qui impactent l’organisation.
L’organisation fait partie d’au moins deux consortiums en matière d’agréments, d’évolutions réglementaires et de lobbying pour mettre en avant ses solutions en vue d’une standardisation ou d’une utilisation mutualisée par d’autres acteurs. Une entité suit les évolutions réglementaires et les besoins des clients pour lesquels des solutions communes sont à rechercher (APIs ouvertes, traçabilité des opérations de bout en bout, coopération entre acteurs, géolocalisation, éthique et responsabilité environnementale et sociétale pour les recherches de labels).
L’organisation participe au moins à un projet ayant débouché sur un produit commun (par exemple, projet Paylib dans le domaine bancaire). Elle est membre d’un organisme de normalisation.
L’organisation participe au moins à un projet ayant débouché sur deux produits communs.
L’organisation a mis en place des groupes de travail sur la réglementation et participe à des projets communs autour de technologies de pointe pouvant permettre des relais de croissance.
Idem + l’organisation participe au moins à un projet ayant débouché sur trois produits communs les trois dernières années.
Synthèse des indicateurs selon le type d’organisation
Une croix dans une case du tableau signifie que l’indicateur est applicable pour la catégorie d’organisation considérée.
Points clés
  • Construisez un écosystème autour de votre entreprise et de certaines de vos données en vous appuyant sur une infrastructure digitale ouverte (APIs).
  • Impliquez certains collaborateurs experts dans l’élaboration des normes du digital utiles à votre entreprise.
  • Optimisez l’implantation de vos sites tant d’un point de vue économique que du point de vue du tissu propice à l’innovation.
  • Mesurez vos progrès dans la transformation digitale de votre appréhension de l’environnement à partir de trois aspects : économique, réglementaire, lobbying.
1https://www.alain-bensoussan.com.
2Voir la chronique juridique d’Alain Bensoussan dans le magazine Planète Robots, et Alain et Jérémy Bensoussan, IA , robots et droit, Larcier, 2019.

Chapitre 10[modifier]

Au-delà du modèle de maturité digitale… Un modèle à vivre  !
Vous venez de découvrir le modèle de maturité digitale que nous vous proposons. Six leviers, décomposés en 19 groupements, mesurés avec 113 indicateurs dont nous avons décrit chacun des cinq niveaux de maturité. C’est beaucoup, et pourtant ce n’est pas suffisant.
En structurant et organisant le modèle de cette manière, nous avons voulu couvrir l’ensemble de la problématique posée par l’adoption du digital par tout type d’organisation. Certains indicateurs sont issus de modèles existants, d’études traitant d’une partie de cette problématique, ou encore de nos expériences dans la transformation digitale des organisations. Il s’agit de la grande majorité des indicateurs, que nous avons pu définir finement en proposant des définitions précises de chacun des cinq niveaux croissants de maturité qui les caractérisent.
Cependant, d’autres indicateurs sont plus délicats à définir. Ainsi, certains indicateurs sont fortement dépendants du secteur d’activité de l’entreprise. La définition de chaque niveau de maturité de ces indicateurs ne peut donc se faire que par des experts de ces différents secteurs d’activité. Avec les retours d’expérience, les indicateurs pourront voir leurs coefficients évoluer, permettant de déterminer plus finement le niveau de maturité atteint par une entreprise sur chacun des six leviers. Par ailleurs, certains indicateurs plus innovants relèvent à la fois de notre intuition confortée par plus de vingt-cinq ans d’expérience dans la conception et la gestion opérationnelle de dispositifs digitaux dans diverses organisations privées comme publiques, mais aussi de considérations prospectivistes (avènement du web 3.0, de la robotique, impression 3D, etc.). L’expérience nous a appris que dans ce cas, la confrontation de points de vue différents garantit l’obtention d’un excellent résultat. Enfin, certains indicateurs relèvent de domaines d’expertise que nous maîtrisons moins, tels que le juridique ou la fiscalité. La sollicitation des experts relève dans ce cas du bon sens.
Nous avons eu beau imaginer de nombreux cas, y compris dans des domaines encore embryonnaires, peu répandus, innovants, nous avons pleinement conscience que la rapidité d’évolution du digital peut conduire à l’obsolescence rapide d’un modèle de maturité digitale. Construit voici dix ans, un tel modèle aurait probablement ignoré l’impact des communautés qui s’expriment au travers des médias sociaux et les conséquences que cette expression a eues sur l’obligation de transparence de l’entreprise vis-à-vis de ses clients et des internautes, ou encore sur l’implication des collaborateurs dans l’innovation. De la même manière aujourd’hui, l’Internet des objets, la blockchain ou encore l’impression 3D sont encore trop récents pour que nous puissions proposer des indicateurs qui leur soient liés, même si notre modèle prévoit cette évolution. Nous y faisons déjà référence, considérant qu’il s’agit des évolutions majeures du web à venir. Si l’usage de ces technologies devient courant dans les prochaines années, il pourra être utile d’enrichir le modèle avec des indicateurs spécifiques permettant de mesurer leur adoption par l’entreprise.
Le modèle se veut ainsi une structure d’accueil embrassant toutes les dimensions de la problématique posée par l’adoption du digital par une organisation. Il a vocation à être enrichi des expériences menées sur le terrain. Il se veut un organisme vivant, s’adaptant au fur et à mesure de l’adoption du digital. Les praticiens qui l’utiliseront seront autant de sources de son enrichissement au service de tous, à l’image des produits op en source qui abondent sur le web.
Une collaboration dans l’intérêt de tous
Nous nous étions lancés dans la construction de ce modèle de maturité digitale en partant du constat qu’aucun modèle existant ne permet d’embrasser l’ensemble de la problématique. En l’utilisant sur le terrain, les praticiens de la transformation digitale disposent d’un outil permettant de savoir où se situe l’organisation dans sa digitalisation. En utilisant l’outil à plusieurs intervalles de temps, ils disposent d’un moyen de mesurer les progrès accomplis. Cependant, en partageant les résultats sur www.digitalimpacts.fr qu’ils auront pu mesurer ou les lacunes du modèle qu’ils auront identifiées, ils seront à leur tour des acteurs d’une meilleure compréhension de la maturité digitale d’une organisation. L’expérience permettra d’enrichir la base d’expériences avec d’autres entreprises, des concurrents, des partenaires, des fournisseurs, ce qui rejaillira sur l’ensemble des organisations pour affiner le modèle.
Un site pour réunir les contributions
Le site lié au livre est aussi un réceptacle vivant des expériences de la grande communauté des praticiens du digital, qu’il s’agisse d’experts dont c’est le métier, comme de professionnels dont le métier évolue sous l’impulsion du digital.
Vous y trouverez les podcasts de certaines interviews retranscrites dans l’ouvrage. Écoutez les témoignages que nous avons collectés, vous verrez l’importance de la voix dans la transmission des connaissances et le partage d’expérience.
Enfin, un livre étant par définition figé lorsqu’il sort de presse, vous trouverez sur le site des compléments intervenus entre sa rédaction et sa publication, et bien sûr au-delà. Il peut s’agir de présentations de nouveaux modèles de maturité traitant d’un aspect du digital, de nouvelles éditions des études et publications sur lesquelles nous nous sommes appuyés, de réflexions que nous aurons pu avoir en échangeant avec nos premiers lecteurs, ou encore d’informations d’actualité sur la maturité digitale des organisations (par exemple, classements, études, produits).
Une communauté dédiée à la transformation digitale
À terme, vous l’aurez compris, le site digitalimpacts.fr a vocation à fédérer la communauté de ceux qui changent leurs entreprises en tirant partie du digital. Il est épaulé par un compte Twitter (@digitalimpacts), une page Facebook (facebook.com/digitalimpacts) et le groupe Digital Impacts sur LinkedIn.
Notre modèle est ouvert et public pour tirer parti de l’intelligence de la multitude. Il ne tient qu’à vous, cher lecteur, d’être acteur de cette communauté. Chaque contribution, même modeste, compte pour faire du digital un atout au service du business et améliorer notre maîtrise collective des innovations.
Glossaire
ABC (activity based costing)/ABM (activity based management)  : méthode d’analyse des coûts qui permet d’analyser finement les inducteurs de coût d’un produit et d’un service/méthode dérivée d’ABC et centrée sur les activités et les processus.
APIs (app lication p rogramming interface)  : interface de code source fournie par une application ou une plateforme pour intégrer son contenu à d’autres composants logiciels développés autour. Elle assure l’interopérabilité d’applications.
Bad buzz  : écho ou bouche à oreille négatif, massif et rapide fait sur Internet pour un produit, un service ou une information.
Bande passante (bandwidth)  : quantité maximale d’information (en bit/s) que peut véhiculer un canal de communication. Peut être vue comme la largeur des tuyaux de communication mis à disposition pour le transfert de données.
Big data  : traitement de quantités massives de données, en batch ou en temps réel, du fait de la profusion d’informations produites (capteurs, puces RFID, échanges sur le web, etc.) nécessitant de nouveaux outils (par exemple, MapReduce, Hadoop), différents des classiques outils de gestion de bases de données et faisant appel à des algorithmes complexes.
BIMM (Bank Internet Maturity Model)  : modèle de maturité numérique pour tout acteur du secteur bancaire, issu d’une thèse de doctorat qui a permis de faire évoluer le présent modèle DIMM.
Blockchain  : technologie de stockage et de transmission d’informations, transparente, sécurisée, et fonctionnant de façon distribuée sans organe central de contrôle. La blockchain forme une base de données avec l’historique des échanges effectués et chaque utilisateur peut vérifier la validité de la chaîne.
BYOD (bring y our own device)  : pratique consistant à utiliser ses équipements personnels (smartphone, tablette, PC) dans un contexte professionnel ou à choisir des équipements ayant des usages à la fois professionnels et personnels.
CDO (chief digital officer)  : directeur en charge de la transformation digitale rattaché à la direction générale. Dans la plupart des organisations, la transformation digitale émane de la direction du système d’information et/ou de la direction marketing.
Chatbot (agent conversationnel)  : agent virtuel qui dialogue avec un utilisateur en donnant l’impression d’être une personnelle réelle. Souvent utilisé pour un service client de premier niveau avant qu’une personne prenne le relais.
Cloud comp uting (informatique dans les nuages ou infonuagique)  : concept qui consiste, entre autres usages, à stocker sur des serveurs distants des données ou des applications, et à y accéder.
CMMI (capability maturity model integration)  : ensemble structuré de bonnes pratiques utilisé par les entreprises de services du numérique (ESN), les directions des systèmes informatiques pour évaluer et améliorer leurs développements de produits/services.
CobiT (control obj ectives for information and related technology )  : outil fédérateur qui permet d’établir un langage commun pour traiter de la gouvernance des systèmes d’information.
Community manager : personne qui met en œuvre la stratégie et les méthodes pour gérer, modérer et animer une communauté d’internautes sur le web (dans les forums, pages de réseaux sociaux, etc.).
Coopétition : collaboration et compétition simultanée que se livrent les entreprises. Deux entreprises peuvent en effet être en concurrence sur des produits et services tout en étant en situation de coopérer sur d’autres projets.
CPA (coût par action)  : unité de mesure du coût d’achat d’un espace publicitaire sur un site Internet.
Crowdfunding  : outils et méthodes de financement d’un projet grâce à Internet et aux réseaux sociaux.
Crowdsourcing  : utilisation de l’intelligence, des idées et du savoir-faire des internautes par l’entreprise qui sous-traite certaines tâches effectuées en interne ou par un prestataire.
Défacement  : modification non sollicitée d’un site web consécutif au piratage de celui-ci.
DIMM (Digital Internet Maturity Model)  : modèle de maturité numérique générique décrit dans ce livre.
Disruption  : méthode dynamique tournée vers la création. Elle permet de remettre en question les conventions, typiquement les modèles existant sur un marché et parfois le marché lui-même, pour définir une vision créatrice de produits et de services profondément innovants. Ainsi l’innovation de rupture est-elle disruptive alors que l’innovation incrémentale n’est qu’une optimisation de l’existant.
Domotique  : ensemble des techniques de l’informatique, de l’électronique et des télécoms pour rendre l’habitat intelligent.
Drive  : nouvelle forme de vente au client où le client se déplace en voiture pour récupérer une commande qui peut être faite en ligne. eSCM (e-sourcing capability model)  : référentiel qui permet de mesurer et d’améliorer la relation entre clients et fournisseurs dans le cadre de la fourniture de services utilisant les technologies de l’information et de la communication.
ESN : entreprise de services du numérique, anciennement SSII.
Fablab (fabrication laboratory )  : lieu ouvert au public, et en particulier un écosystème d’étudiants, de start-up, d’entreprises où des outils mis à disposition (par exemple, imprimante 3D) permettent d’innover et de concevoir de nouveaux objets.
Fintech : start-up dans le domaine de la finance ou des technologies financières.
Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft)  : désigne les géants d’Internet. On considère tantôt les Gafa tantôt les Gafam en incluant Microsoft.
GPEC (gestion prévisionnelle des emplois et des compétences)  : gestion par anticipation des ressources humaines d’une organisation se plaçant à un horizon futur afin de déterminer les personnels cibles et les compétences requises pour satisfaire l’évolution de l’organisation.
Hackathon : événement qui réunit des développeurs, généralement des étudiants ou des jeunes ayant un challenge informatique et collaboratif à réaliser sur plusieurs jours (par exemple, développement d’une application sur smartphone).
Holacratie  : système de management de la gouvernance basé sur une intelligence collective formalisée avec des équipes autonomes à tous les niveaux.
Holonumérisme  : société entièrement numérique vers laquelle on tend et où les citoyens, les machines, les équipements sont connectés y compris entre eux. Le défi dans cette société réside dans la place laissée à l’humain et au droit aux déconnexions pour prendre du recul sur le mouvement numérique perpétuel afin de bénéficier de moments régénérateurs.
Illectronisme  : concept d’illettrisme ou d’analphabétisme transposé au domaine du numérique. Il traduit un manque de connaissance pour utiliser les nouveaux outils et services du numérique mais peut être aussi une réticence/défiance à cet égard.
Infobésité  : désigne l’explosion des données produites sur Internet. Cela nécessite d’effectuer une veille efficace pour dénicher les informations pertinentes noyées dans la masse et les signaux faibles.
Intelligence artificielle (IA)  : ensemble de techniques et d’algorithmes développés pour permettre à des machines de simuler l’intelligence. Elle regroupe plusieurs disciplines comme les systèmes experts, le machine learning, le deep learning.
Internet des objets (IoT)  : objets reliés à Internet via des étiquettes dotées de codes (par exemple, puces RFID), des adresses IPv6 uniques et des URL/URI propres permettant de les identifier et de les tracer avec la géolocalisation notamment. Certains objets, plus évolués, sont dotés d’une intelligence propre qui leur permet de s’auto-organiser selon les événements et les environnements. L’Internet des objets permet l’apparition d’une multitude d’applications.
Interopérabilité  : aptitude d’un produit, d’un système ou d’un logiciel, dont les interfaces sont intégralement connues, à fonctionner avec d’autres produits, systèmes ou logiciels présents ou futurs.
IRL (in real life) : indique la vie physique par opposition à la vie sur Internet.
ISO 27001/27002  : norme internationale de système de gestion de la sécurité de l’information.
Itil (information technology infrastructure library )  : ensemble d’ouvrages recensant les bonnes pratiques du management du système d’information.
Klout : Outil d’influence (abandonné) sur les réseaux sociaux qui délivrait une note de 0 à 100. Pour des fonctions de community manager, un Klout minimum de 35 ou de 40 était requis par certaines marques.
Kodakisation  : fait d’avoir peur d’opérer sa transformation numérique (changer de business model, de circuit de distribution, de marché et de produits) en restant en l’état ou dans une logique d’évolution incrémentale alors même que des compétences notamment technologiques existent en interne.
Licorne : start-up dont la valorisation atteint au moins 1 milliard de dollars.
Migration digitale  : rattrapage historique des systèmes d’information, typiquement dans le domaine bancaire, qui est nécessaire pour pouvoir évoluer vers des solutions plus agiles. Il s’agit souvent d’un préalable à une transformation digitale du point de vue technologie et innovation.
Mooc (massive op en online course)  : formation en ligne ouverte à tous avec des aspects collaboratifs et augmentés.
Omnicanal  : parcours client intégrant un passage d’un canal à un autre en temps réel en préservant l’expérience client.
Op en data  : données ouvertes d’organisations publiées sur le web et réutilisables par des tiers qui peuvent ainsi développer de nouvelles applications.
PageRank  : algorithme utilisé par le moteur de recherche de Google pour mesurer la popularité d’une page web et qui repose notamment sur le nombre de liens qui pointent vers elle et sur leur importance respective. Un score de 0 à 10 est délivré.
Phishing  : fraude aux coordonnées bancaires (p hreaking + fishing) qui consiste à récupérer souvent via des spams des informations bancaires personnelles.
Phygital  : combinaison du numérique et du physique pour assurer un continuum entre les deux univers complémentaires.
PoC (p roof of concep t)  : réalisation d’une maquette pour démontrer la faisabilité d’un nouveau produit ou service.
Quantified self  : outils et techniques permettant à chacun de mesurer ses données personnelles, de les analyser et de les partager (par exemple, fréquence cardiaque, nombre de pas dans une journée, tracé et statistiques d’un jogging effectué).
RACI (Réalisateur, Autorité, Consulté, Informé) : matrice qui indique les rôles et responsabilités des acteurs impliqués dans un processus.
Resp onsive design  : site adaptatif, permettant d’avoir un affichage différencié et adapté au support de connexion à Internet : PC, tablette, smartp hone, etc.
SaaS (software as a service) : modèle où les logiciels sont installés sur des serveurs distants plutôt que sur la machine de l’utilisateur.
Simplexité  : contraction de «  simplicité  » et «  complexité  ». Désigne le fait de concevoir des applications simples pour l’utilisateur, même si elles génèrent une complexité notable au sein de l’entreprise qui la conçoit.
Sublimation numérique  : transition directe à une étape numérique avancée en faisant l’impasse sur une étape de développement intermédiaire (par exemple, passer de rien au téléphone portable connecté à Internet).
Transformation digitale : transformation d’une organisation grâce au numérique et selon six composantes (stratégie, organisation, personnel, offre, technologie et innovation, environnement) visant à augmenter la valeur de l’information de son offre. La transformation digitale d’une entreprise peut amener à revoir son business model, ses domaines d’activité stratégique, ses APIs cœurs de métier, à adopter une démarche omnicanale au service de ses clients/utilisateurs/ salariés/administrés, etc. Le but de la transformation digitale est d’assurer la pérennité de l’organisation et de ne pas se faire ubériser par des concurrents plus agiles.
Ubériser  : faire disparaître ou faire décliner un concurrent d’une entreprise du fait de l’emploi d’une nouvelle technologie, de nouvelles méthodes ou d’un business plan disruptif pouvant être opéré grâce à une transformation digitale réussie.
Web 2.0  : deuxième génération du web qui recouvre trois composantes  : technique (utilisation de technologies combinées  : feuilles de style, Ajax, syndication de contenu), sociale (interactions entre les utilisateurs et partage/collaboration avec les blogs et les wikis) et relative aux données collectées qui sont dépendantes de l’application web 2.0 considérée et qui sont accessibles quel que soit le lieu de connexion au site 2.0.
Bibliographie
Livres
AAKER Jennifer, SMITH Andy, The Dragonfly Effect: Quick, Effective, and Powerful Way s To Use Social Media To Drive Social Change, Jossey-Bass, 2010
BEFFA Jean-Louis, La Révolution numérique et les entrep rises  : se transformer ou mourir, Points, 2018
BERNOFF Josh, SCHADLER Ted, Emp owered: Unleash Your Emp loy ees, Energize Your Customers, Transform Your Business, Harvard Business Review Press, 2010
BLANCHARD Olivier, Social Media ROI: Managing and Mesuring Social Media Efforts In Your Organization, QUE Publishing, 2011
BOLMAN Lee, DEAL Terrence, Reframing Organizations: A rtistry , Choice and e Leadership , Jossey-Bass, 2017 (6 éd.)
CAMPANINI Erik, HUTCHINS Kyle, Darwinism in a Consumer-Driven World, Pearson, 2014
CASILLI Antonio, En attendant les robots  : enquête sur le travail du clic, Éditions du Seuil, 2019
COLIN Philippe, WARGNIER Xavier, La Transformation numérique  : les 7 clés p our changer votre entrep rise, Éditions Kawa, 2012
CURLEY Martin, SALMELIN Bror, Op en Innovation 2.0: The New Mode of Digital Innovation for Prosp erity and Sustainability , Springer, 2018
DELORME, Pascal, DJELLALIL Julani, La Transformation digitale  : saisir les opp ortunités du numérique p our l ’entrep rise, Dunod, 2015
DIAL Minter, Heartificial Emp athy : Putting Heart into Business and A rtificial Intelligence, DigitalProof Press, 2018
DUCREY Vincent, VIVIER Emmanuel, Le Guide de la transformation digitale, e Eyrolles, 2019 (2 éd.)
GENTINA Élodie, Marketing et Génération Z  : nouveaux modes de consommation et stratégies de marque, Dunod, 2016
HUNT Tara, L ’Effet whuffie  : tirer p arti de la p uissance des réseaux sociaux p our développ er son business, traduit de l’américain par Habib Benhassine, Morgane Falzerana-Thebault, Rodolphe Falzerana et al., Les éditions Diateino, 2010
ISMAIL Salim, MALONE Michael, VAN GEEST Yuri, Exp onential Organizations: Why New Organizations A re Ten Times Better, Faster, and Cheap er Than Yours (A nd What To Do A bout It) , Diversion Books, 2014
JARVIS Jeff, La Méthode Google  : que ferait Google à votre p lace  ?, traduit de l’américain par François Druel, Éditions SW Télémaque, 2009
KABLA Hervé, LAURENT François, Médias sociaux et B2B : un mariage d ’amour  ?, Éditions Kawa, 2013
KABLA Hervé, GOURVENNEC Yann, Le Digital exp liqué à mon boss  : p ar ceux qui en font et p our ceux qui aimeraient (mieux) en faire, Éditions Kawa, 2017
KAUFMAN Henri, FAGUER Laurence, Internet a tout changé  : rien ne sera p lus e comme avant : marketing, sty les de vie, e-commerce..., Éditions Kawa, 2010 (3 éd.)
LALOUX Frédéric, Reinventing organizations  : vers des communautés de travail insp irées, traduit de l’américain par Philippe Blanchard, Diateno, 2015
NAUGES Louis, MOCKLY Dominique, Dirigeants, A cteurs de la transformation numérique, édition indépendante, 2018
QUALMAN Erik, Socialnomics: How Social Media Transform the Way We Live e and Do Business, Wiley, 2013 (2 éd.)
ROBERTSON Brian J., La Révolution Holacracy  : le sy stème de management des entrep rises p erformantes, traduit de l’américain par Christophe Billon, Alisio, 2016
SCHATT Dan, Virtual banking: A guide to Innovation and Partnering, Wiley, 2014
SOLIS Brian, What ’s the Future of Business ?: Changing the Way Business Create Exp erience, Wiley, 2013
WU Michael, The Science of Social: Bey ond Hyp e, Likes& Followers, 2 vol., Lithium Technologies, 2012-2013
Études et rapports
BALLER Silja, DUTTA Soumitra, LANVIN Bruno, The Global Information Technology Rep ort 2016: Innovating in the Digital Economy , Insead, Johnson Cornell University, World Economic Forum, 2016, https://www3.weforum.org
COLIN Nicolas, La richesse des nations ap rès la révolution numérique, Terra Nova, octobre 2015, http://tnova.fr
Digital Economy , A nalog Boards: The 2013 Study of Digital Directors, Russel Reynolds Associates, 31 janvier 2014, https://www.russellreynolds.com
Digital Disrup tion: Short Fuse, Big Bang ?, Deloitte Australie, https://www2.deloitte.com
Digital Disrup tion: How Fintech is Forcing Banking to a Tipp ing Point, Citi, 31 mars 2016, https://www.privatebank.citibank.com
Digital Transformation in 10 Building Blocks To Boost Customer Exp erience A nd ROE, EFMA, McKinsey&Company, octobre 2012, http://ma.mckinsey.com
Étude IT Focus  : enj eux et p ersp ectives 2016 p our la DSI, Le Monde informatique, février 2016, https://www.lemondeinformatique.fr
Imp act d ’Internet sur l ’économie française  : comment Internet transforme notre p ay s, Rapport McKinsey, mars 2011, https://www.ladocumentationfrancaise.fr
La Maturité numérique des dirigeants français, baromètre Syntec numérique, IDC France, avril 2012, http://frenchweb.fr
Le conseil d ’administration et la transition numérique de l ’entrep rise, IFA-Cigref, septembre 2013, http://images.cigref.fr
NOTAT Nicole, SENARD Jean-Dominique, BARFETY Jean-Baptiste, L ’Entrep rise, obj et d ’intérêt collectif, mars 2018, https://www.ladocumentationfrancaise.fr
Performance digitale des entrep rises françaises  : encore p arcellaire, la transformation digitale p eine à créer de la valeur, Accenture Digital, 2016, https://www.accenture.com
SCOAZEC Marie, SCHNEIDER Emmanuel, Transformation numérique  : les grands group es sont-ils p rêts p our la p rochaine étap e  ?, mémoire de fin de formation des ingénieurs du Corps des mines, 2018
SOLIS Brian, The Six Stages of Digital Transformation Maturity , Altimeter & Cognizant, 2015, https://www.cognizant.com
The 2015 BCG e-Intensity Index, BCG, 18 novembre 2015, https://www.bcg.com
The Digital A dvantage: How Digital Leaders Outp erform their Peers in Every Industry , Cap Gemini consulting, 2012, https://www.capgemini.com
Valeur économique des p roj ets de transformation numérique p our l ’entrep rise  : ap rroche méthodologique, Cigref, mars 2018, https://www.cigref.fr
Articles
A lim ’agri, La révolution numérique, n° 1565, octobre-décembre 2016, https://agriculture.gouv.fr/alimagri-la-revolution-numerique
Born To Be Digital: How Leading CIOs A re Prep aring For A Digital Transformation, EY, 2014, https://www.ey.com
Cadre de référence de la culture numérique, Cigref, entreprises-et-cultures- numeriques.org
DUPUIS-HEPNER Nathalie, VILLEMIN Éric, Les 4 p iliers de la révolution numérique des entrep rises, Les Échos, 12 août 2015, http://business.lesechos.fr
FAYON David, QUINIO Bernard, Stratégie d ’entrep rise 2.0  : vers un Porter 2.0 avec les outils du web 2.0, Télécom, 2012, p. 56-61
La blockchain arrive dans l ’humanitaire, L ’Agefi, n° 90, 14 mai 2018, p. 6, http://www.agefi.fr
LI Charlene, SOLIS Brian, The Evolution of Social Business: Six Stages of Social Business Transformation, Altimeter, 6 mars 2013, https://www.prophet.com
MOORE Geoffrey, Zone to Win: Organizing to Comp ete in an Age of Disrup tion, Diversion Books, 2015
The Digital Transformation: Changing the Game in Financial Services, Fiserv, 2010, https://www.etransformation.fr
ZYSMAN John, FELDMAN Stuart, MURRAY Jonathan et al., The Digital Transformation of Services: From Economic Sinkhole to Productivity Driver, BRIE Working Paper 187, University of California, 2010
ZWILLENBERG Paul, FIELD Dominic, DEAN David, Greasing the Wheels of the Internet Economy : The Connected World, BCG, 20 janvier 2014, https://www.bcgperspectives.com
Outils et méthodes
CMMI (cap ability maturity model integration), Software Engineering Institute, Université de Carnegie-Mellon
Cobit (control obj ectives for information and related technology )
EFQM (Europ ean Foundation for Quality Management)
Itil (information technology infrastructure library ) version 3
Togaf (the op en group architecture framework)
Web
Global Webindex report 2018, https://www.globalwebindex.com/reports/trends-18,
Blog de Bertrand Duperrin https://www.duperrin.com («  Par où commencer votre transformation digitale et sociale », 20 août 2013)
Association française de l’audit et du conseil informatique, http://www.isaca.org
CLAISSE Mélanie, CAMIADE Jean-Marie, Modèle de maturité social media marketing, At Internet, 2011, https://www.atinternet.com
« WoHit 2014  : HIMSS Europe dévoilera son modèle de Maturité numérique pour la continuité des soins », Hosp italia, 6 mars 2014, https://www.hospitalia.fr
Présentation des auteurs
David FAYON (@fayon, @davidfayon), PhD, expert technologies numériques, administrateur des postes et télécommunications, a été successivement directeur marketing de ColiPoste, responsable de l’outil des contrôleurs de gestion de La Poste puis directeur de projets et responsable prospective et veille SI à La Poste Courrier. Il est actuellement responsable du programme d’innovation ouverte Time To Test. Par ailleurs diplômé de Télécom ParisTech, de l’université Paris-VI et de l’Institut d’administration des entreprises de Paris, il assure ponctuellement des cours dans des grandes écoles et universités, et intervient pour des conférences et des missions de conseil en numérique (chambres de commerce et d’industrie, Association pour le progrès du management), notamment autour du web 2.0, des réseaux sociaux, de la stratégie à déployer pour la transformation numérique. David Fayon est membre de plusieurs associations œuvrant pour le développement du numérique en France. Il a publié plusieurs ouvrages dont Géop olitique d ’Internet chez Economica, Facebook, Twitter et les autres… avec Christine Balagué, ou encore Made in Silicon Valley chez Pearson et anime le site L’actualité du web et du numérique (davidfayon.fr).
Michaël TARTAR (@michaeltartar), executive vice-p resident digital de ROK Solution, ancien senior manager responsable de l’offre de conseil digital de BearingPoint en France, a bâti sa carrière sur les nouvelles technologies. Il a ainsi développé le système de distribution des ouvrages de la Bibliothèque nationale de France sur les technologies objets naissantes, puis a rejoint le pôle nouvelles technologies d’Euriware pour lancer les premiers sites web transactionnels en environnement B2B. En rejoignant Andersen, il a d’abord développé l’offre d’intégration d’applications d’entreprises (EAI) pour de grandes marques soucieuses de moderniser leur système d’information. Il a ensuite mis ses connaissances techniques au service des directions marketing et commerciales B2C, pour développer les ventes, la relation client en ligne et conduire des programmes de transformation digitale. Par ailleurs diplômé de l’Epita en génie logiciel et titulaire d’un MBA de l’Institut d’administration des entreprises de Paris, il a contribué à de nombreux ouvrages et livres blancs sur le digital, intervient en tant que conférencier et anime le blog michaeltartar.com.
Index
3 Suisses 10
A
Accenture 21, 47 agences digitales et gouvernance 43
Airbnb 22, 113, 122
Airbus 59
Alibaba 93, 118
Amazon 9, 12, 32, 56, 58, 118
Ami Software 104
Android 32, 256
API 14, 55, 79
Apple 9, 37, 123, 246, 279 applications sur smartphone 9, 16, 32, 61, 204, 206
AppStore 37 archéologie, changements liés au numérique 64
Autolib ’ 38 automatisation 14
Axa 33
B
B2B distribution de produits 115 identification des visiteurs 197
investissements média 201 lien après l’achat 183 ouverture d’un compte 222
transformations actuelles 192, 198
B2C essoufflement du e-commerce 193 grandes marques 203 lien après l’achat 183 ouverture d’un compte 222
Babinet, Gilles 2
baisse des coûts 15, 23, 61, 125, 246, 281, 282 banques
clients 61 en ligne 16, 77, 241 spécificité dans la transformation digitale 77
Barba, Catherine 45
BATX 10, 56, 97, 200 big data 2, 24, 198, 279 analyse des données 62 dans le domaine industriel 76 et législation 278 outil prédictif 104 principes 98
Billaut, Jean-Michel 62
BIMM 70, 71 biscuiterie Poult 67
Bitcoin 107
BlackBerry 32
Blair, Tony XIII blockchain 21, 107, 227, 232 degré de maîtrise 237 et législation 124 possibilités de disruption 233
BNP Paribas 54
Bpifrance 86
BTU Hotel 234
BYOD 32, 42, 227, 262
C cabinet d’analyse McKinsey XIV, 3, 95
Casanove, Alice de 59
Casilli, Antonio 12
Casino, groupe 35
Catherineau, Serge 58
Cdiscount 35
CDO 41 changements liés au numérique en archéologie 64 structurels, se préparer aux 21
Cigref 20
Citi 27
C-K, théorie 28
clients 269 attentes 34, 184 au cœur des attentions 58 autonomie 77 comportement d’achat 16 culture orientée 36 des banques 61 et service 206, 249
interactions 10 maturité 241 mieux satisfaire 24 parcours 188, 243, 274 relation 15, 182
transformation 25, 76, 184, 278
CMMI 5, 48, 69
Cnil 130, 274, 284
CobiT 5, 48
Colin, Nicolas 9 collecte de données continuer en cas de problème technique 45 et programmes de fidélité 188 contexte industriel 27 coûts, baisse 15, 23, 61, 125, 246, 281, 282
Creative Commons XVIII crowdfunding 14 crowdsourcing 14, 211
Crozier, Michel 67 crypto-monnaie 16, 232 culture orientée clients 36
D dématérialisation 15
Demurger, Pascal 232
Derumier, Jean-Pascal 57 design thinking 27, 126 désintermédiation 15
Digimind 104 digital factory 135
DIMM XIV, 49, 71 disruption 115 blockchain 232 depuis l’apparition d’Amazon 124 et innovation 5 facteurs 22
imposée par les nouveaux entrants 18 opportunités 45 outils 86 risques 26
E eBay 9, 118 eCAC40 49
EDF 56 empilements d’outils 18 épitweet XIX
Ernst & Young 43
F fablab 135
Facebook 9, 36, 220, 294
Facebook Connect 255 fintech 16
Framatome 55
French-Road 63
French Tech 86
G
Gafam 2, 10, 35, 200
General Electric 121 génération Y , 13, 76 go/no go, logique 54
Google 9, 36, 40
Google Alerts 104, 265
Google Maps 10, 253 googlisme 36
GPEC 13, 173
H hackathons 54, 174
I
IBM 2
IDC 69
IDC France 45
impression 3D 291
industrie
4.0 28, 58 de la santé 38 du disque 37 du livre 125 et big data 76 et capacité d’innovation 28 et concurrence 246 et leviers de la compétitivité 59 leaders européens 99 partenaires 269
innovation 45, 48, 53 dans l’industrie, capacité 28 disruptive 22
Instagram 35, 207
intelligence artificielle XV, 15, 21, 62, 78, 93, 96, 194, 227, 234, 277, 279, 287
Internet des objets 3, 22, 62, 235 dans le domaine industriel 76 et législation 276
iPhone 32
Issy-les-Moulineaux, attractive pour les entreprises 57
Itil 5, 48
K
Kaporal 115, 117
KissKissBankBank 35
Klout 174
Kodak 24
L
La Poste 10, 53
La Redoute 10, 32
LCEN 284
Lemoine, Philippe 9 leviers fondamentaux de la transformation digitale 49, 65 licorne XIV, 91
LinkedIn 294 livre numérique 125
M
machine learning 60, 198, 234
McKinsey, cabinet d’analyse XIV, 3, 95 méthodes agiles 27 migration digitale 17
N
Natu 10, 97, 200
Netflix 113
Niel, Xavier XIII niveaux hiérarchiques, baisse du nombre 67
O op en data 3, 80, 254, 279 op en innovation 55, 211, 237, 240
Orange Bank 61 outils collaboratifs 37, 84, 122, 230 d’aide à la prospection 197 de gestion RGPD 272 de gouvernance 5 de la disruption 86 de partage 67 de pilotage 239 de production industrielle 76 de réalité virtuelle 60 d’information et de communication 102 empilements 18 évolutifs 48 méthodes agiles 27 numériques 10, 42, 65, 114, 131, 204, 279
P parcours client 188, 243, 274
PayPal 204 phygital 11, 61, 182
Pillaud, Hervé 62
PoC 54, 137
Poult, biscuiterie 67 problème technique, continuer la collecte de données 45 programme de fidélité et collecte de données 188
PWC 121
Q
Quantified Self 2
Quinio, Bernard 63
R réalité virtuelle, outil de 60 relation client 15, 182
Renault 45, 58 révolution industrielle 23, 101, 191
RFID 255
RGPD 156, 161, 188, 205, 270, 272 roue de Deming 5
RPA 157
Russell Reynolds Associates 44
S
SaaS, solutions 231, 247, 277
SAFe 27 Saint-Etienne, Christian 4 santé, apports du digital 38
Scrum 27 service client 206, 249
Silicon Valley 40 simplexité 227
Sindup 104
Singularity University 91 smart city 28, 57, 136 soft skills 147 start-up
clés du succès 53 en France 87, 197 et agriculture 62 et structures organisationnelles spécifiques 113 financement 86
innovantes, rachat 36 stratégie de développement 49, 73 multicanale 10, 181, 221 sublimation numérique 23 système d’information 69, 71, 77, 227, 242 agilité dans les industries 246 des banques 16 faire évoluer 11, 248 outils de gouvernance 5
T
Tesla 113 test and learn 120, 212 théorie C-K 28
transformation digitale 18, 24 enseigner le code aux filles 85 leviers fondamentaux 49, 65
Twitter 9, 220, 293
U
Uber 3, 12, 22, 122
Uber Eats 113
V
Vinted 206
Voyages-sncf 33, 75
W
Walmart 12
Waze 35
Web 3.0 291
WhatsApp 35
Whole Foods 12
Wi-Fi 76, 189
Wikipédia XVIII, 2
Windows 9
Wired, magazine 83
Y
Yahoo! 9
YouTube 35
Z
Zappos 40
Zysman, John 19